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29/12/2023 | FRANCE | N°22TL21583

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 29 décembre 2023, 22TL21583


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2020 par lequel la préfète du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2101867 du 26 janvier 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :
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Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2022, M. A..., représenté par Me Ducos-Mortreuil, demande à la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2020 par lequel la préfète du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2101867 du 26 janvier 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2022, M. A..., représenté par Me Ducos-Mortreuil, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 26 janvier 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 16 novembre 2020 ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Tarn de lui délivrer le titre de séjour sollicité, ou à tout le moins de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et sous astreinte de cent euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ; ce défaut de motivation révèle l'absence d'examen réel et sérieux de sa situation ;

- s'agissant de la décision portant refus de séjour, elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur de droit au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que sa situation au titre du travail a été examinée sur la base des critères fixés par l'article L. 313-10 de ce code ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences qu'elle emporte sur sa situation ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français, elle est dépourvue de base légale ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences qu'elle emporte sur sa situation ;

- en ce qui concerne la décision fixant le pays de destination, elle est dépourvue de base légale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2022, le préfet du Tarn conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du 13 juin 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 13 juillet 2023 à 12 h 00.

Par une décision du 22 juin 2022, le bureau d'aide juridictionnelle auprès du tribunal judiciaire de Toulouse a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. A....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Beltrami.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité ivoirienne, né le 11 août 1987, est entré en France le 5 juillet 2016 sous couvert de son passeport ivoirien en cours de validité, muni d'un visa d'une durée de validité de trente jours. Le 9 juillet 2020, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 16 novembre 2020, la préfète du Tarn a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 26 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 16 novembre 2020.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance du titre de séjour :

2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen réel et sérieux par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal aux points 3 à 5 de son jugement.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ".

4. En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger, ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément relatif à sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

5. La préfète du Tarn, qui était saisie d'une demande de régularisation de M. A... présentée en qualité de salarié, s'est également estimée saisie au titre de sa vie privée et familiale. D'une part, si l'appelant se prévaut de sa présence en France depuis quatre ans à la date de la décision attaquée, il ne justifie toutefois pas de sa présence effective et ininterrompue sur le territoire français depuis 2016 par la seule production d'attestations émanant des associations pour lesquelles il a accompli des actions de bénévolat. De plus, il est constant qu'il est célibataire et sans enfants et qu'il n'est pas dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où sa mère réside. S'il fait état de sa relation avec une ressortissante française et avec les membres de la famille qui est devenue sa famille d'accueil, il ne justifie cependant pas de la réalité et de l'intensité de cette relation. Il en résulte que la préfète du Tarn n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en considérant, pour refuser à M. A... l'admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale, qu'il ne présentait aucune considération humanitaire ou motif exceptionnel.

6. D'autre part, M. A... se prévaut de son intégration professionnelle particulière en France en faisant état de la proposition d'emploi de la société Cryptéo pour le poste de technicien câbleur et de sa qualification de danseur, interprète, percussionniste, chorégraphe et professeur de danse et de percussions. Si, dans le cadre de l'instruction d'une demande de régularisation au titre de sa situation professionnelle, l'administration ne pouvait lui opposer l'avis défavorable émis le 16 octobre 2020 par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, elle s'est également fondée sur la circonstance que l'intéressé n'était pas en mesure de justifier d'une expérience professionnelle en tant que technicien câbleur. À cet égard, il ne ressort d'aucune pièce versée au dossier que M. A... disposerait d'une qualification ou d'une expérience professionnelle de technicien câbleur ou en lien avec ces fonctions. De plus, s'il a participé, de 2016 à 2019, à des manifestations et des spectacles de danses africaines ou de percussions et a animé des stages ou des cours de danse traditionnelle africaine, il est intervenu dans un cadre strictement bénévole. Dès lors, en considérant que M. A... ne justifiait pas, au soutien de sa demande de régularisation, de motifs exceptionnels ou de circonstances humanitaires au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la préfète n'a entaché sa décision ni d'une erreur de droit ni d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de cet article.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Pour les motifs exposés au point 5, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne peut qu'être écarté.

9. En dernier lieu, pour les motifs exposés aux points 4 et 5, la décision attaquée n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur la situation de M. A....

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. En premier lieu, la décision portant refus d'admission au séjour n'étant pas illégale, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas dépourvue de base légale.

11. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne peut qu'être écarté.

12. En dernier lieu, pour les motifs exposés au point 9, la décision attaquée n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur la situation de M. A....

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

13. Il résulte de ce qui précède que ni la décision refusant un titre de séjour, ni celle portant obligation de quitter le territoire, ne sont entachées d'illégalité. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de cette dernière décision, doit être écarté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 16 novembre 2020.

Sur les conclusions accessoires :

15. M. A... n'étant pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 16 novembre 2020, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE:

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet du Tarn.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme Beltrami, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2023.

La rapporteure,

K. Beltrami

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22TL21583


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21583
Date de la décision : 29/12/2023

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur ?: Mme Karine BELTRAMI
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : DIALEKTIK AVOCATS AARPI

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-29;22tl21583 ?
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