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09/01/2024 | FRANCE | N°23MA00170

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 09 janvier 2024, 23MA00170


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a implicitement rejeté sa demande d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er janvier 2016.



Par un jugement n° 1903129 du 21 novembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de Mme B....



Procédure devant la Cour :



Par une r

equête et un mémoire, enregistrés les 20 janvier et 23 octobre 2023, Mme B..., représentée par Me Garnier, demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a implicitement rejeté sa demande d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er janvier 2016.

Par un jugement n° 1903129 du 21 novembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de Mme B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 janvier et 23 octobre 2023, Mme B..., représentée par Me Garnier, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1903129 du 21 novembre 2022 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler la décision du garde des sceaux, ministre de la justice, portant rejet de sa demande d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er janvier 2016 ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de lui attribuer le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire et de lui verser les sommes correspondantes à compter du 1er janvier 2016, assorties des intérêts avec capitalisation à chaque échéance annuelle ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle exerce son activité de psychologue au sein de l'unité éducative d'hébergement collectif de Martigues, laquelle correspond aux anciennes dénominations des foyers d'action éducative et non aux centres éducatifs renforcés, contrairement à ce qu'a considéré le jugement attaqué ;

- au surplus, le public reçu relève principalement des quartiers prioritaires de la politique de la ville ;

- à la date de sa demande, elle exerçait bien dans le ressort territorial d'un contrat local de sécurité, la communauté d'agglomération de Martigues ayant signé une stratégie de prévention de la délinquance pour les années 2015-2017, prolongée jusqu'en 2022, date de renouvellement de la convention pour la période 2022-2025 ;

- il n'est pas contesté que des agents de catégories A, B, C exerçant au sein de l'unité éducative d'hébergement collectif de Martigues bénéficient de la nouvelle bonification indiciaire, les fonctions de psychologues apparaissant tout aussi techniques que les fonctions d'éducateur, de sorte que la décision attaquée méconnaît le principe d'égalité de traitement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 15 novembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 novembre 2023.

Par une lettre du 12 décembre 2023, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de relever d'office le moyen tiré de ce que le garde des sceaux, ministre de la justice, se trouvait en situation de compétence liée pour rejeter la demande d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire de Mme B... à compter du 1er janvier 2016, et ce, en application de l'arrêté du 4 décembre 2001 fixant par département les emplois éligibles à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice, qui ne prévoit pas que l'emploi de psychologue exercé dans le département des Bouches-du-Rhône ouvre droit au bénéfice de cet avantage.

Par un courrier enregistré le 18 décembre 2023, Mme B... a fait connaître ses observations en réponse au moyen relevé d'office.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 ;

- le décret n° 2001-1061 du 14 novembre 2001 ;

- l'arrêté NOR : JUSG0160076A du 4 décembre 2001 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Revert, président assesseur, pour présider la formation de jugement de la 4ème chambre, en application des dispositions de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Martin,

- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,

- et les observations de Me Garnier, représentant Mme B....

Une note en délibéré présentée par Mme B... a été enregistrée le 3 janvier 2024.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... est affectée depuis le 1er janvier 2016 au sein de l'unité éducative d'hébergement collectif (UEHC) de Martigues, où elle exerce les fonctions de psychologue.

Par un jugement du 21 novembre 2022, dont Mme B... relève appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle l'administration a rejeté sa demande d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er janvier 2016.

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. Les indemnités peuvent tenir compte des fonctions et des résultats professionnels des agents ainsi que des résultats collectifs des services (...) ". Aux termes de l'article 27 de la loi du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales : " La nouvelle bonification indiciaire des fonctionnaires et des militaires instituée à compter du 1er août 1990 est attribuée pour certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulières dans des conditions fixées par décret. ". Aux termes de l'article 1er du décret du 14 novembre 2001 relatif à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice : " Une nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville (...) peut être versée mensuellement (...) aux fonctionnaires titulaires du ministère de la justice exerçant, dans le cadre de la politique de la ville, une des fonctions figurant en annexe au présent décret. ". Lesdites fonctions comprennent, selon l'annexe à ce décret en vigueur à compter du 1er janvier 2015 : " (...) Fonctions de catégories A, B, C de la protection judiciaire de la jeunesse : / 1. En centre de placement immédiat, en centre éducatif renforcé ou en foyer accueillant principalement des jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville ; / 2. En centre d'action éducative situé dans un quartier prioritaire de la politique de la ville ; / 3. Intervenant dans le ressort territorial d'un contrat local de sécurité ".

3. Il résulte des dispositions précitées de la loi du 18 janvier 1991 et du décret du 14 novembre 2001 que le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire n'est pas lié au corps d'appartenance ou au grade des fonctionnaires, mais aux emplois qu'ils occupent, compte tenu de la nature des fonctions attachées à ces emplois.

4. En premier lieu, si Mme B..., qui se prévaut du bénéfice des dispositions

du 1 de l'annexe au décret du 14 novembre 2001 relatif à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice, soutient, à ce titre, que l'UEHC de Martigues accueille un public issu principalement de quartiers de Marseille constitutifs de quartiers prioritaires de la politique de la ville, elle n'établit pas plus en appel qu'en première instance le bien-fondé d'une telle affirmation. Il ressort en effet de l'analyse combinée de l'ordonnance de placement provisoire, des fiches de situation individuelle établies par l'unité, anonymisées et non datées, ainsi que des données de l'observatoire de l'habitat énumérant et délimitant les quartiers identifiés comme étant prioritaires au titre de la politique de la ville, versées au dossier par l'appelante, qu'à supposer même que les placements recensés par ces documents concernent la période au titre de laquelle l'intéressée sollicite le versement de la nouvelle bonification indiciaire, seuls trois des bénéficiaires d'un placement sont issus d'un tel quartier, alors que l'UEHC de Martigues dispose de onze chambres selon le projet d'établissement de 2016 également produit au dossier d'instance. Dans ces conditions, et alors même que l'UEHC de Martigues ne constituerait pas un centre éducatif renforcé, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que l'UEHC de Martigues accueille principalement des jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville ni, par conséquent, que la décision litigieuse a été prise en méconnaissance des dispositions du 1 de l'annexe au décret du 14 novembre 2001 relatif à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice.

5. En deuxième lieu et d'une part, les contrats locaux de sécurité, définis par la circulaire du 28 octobre 1997 NOR : INTK9700174, sont des outils d'une politique de sécurité s'appliquant en priorité aux quartiers sensibles, conclus sous l'impulsion du maire d'une ou plusieurs communes et du représentant de l'Etat dans le département, lorsque la délinquance est particulièrement sensible sur un territoire donné. D'autre part, en application des dispositions de l'article L. 132-4 du code de sécurité intérieure, dans leur version alors applicable, le maire ou son représentant préside un conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) dans les communes de plus de 10 000 habitants et dans les communes comprenant un quartier prioritaire de la politique de la ville. Enfin, aux termes de l'article D. 132-7 de ce même code : " Le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance constitue le cadre de concertation sur les priorités de la lutte contre l'insécurité et de la prévention de la délinquance dans la commune. / (...) / Il assure l'animation et le suivi du contrat local de sécurité lorsque le maire et le préfet de département, après consultation du procureur de la République et avis du conseil, ont estimé que l'intensité des problèmes de délinquance sur le territoire de la commune justifiait sa conclusion. ".

6. Pour bénéficier de la nouvelle bonification indiciaire prévue par l'article 1er du décret du 14 novembre 2001 précité, les fonctionnaires titulaires du ministère de la justice figurant en annexe à ce décret entendant se prévaloir de la condition prévue au point 3 de cette annexe doivent apporter la preuve, par tout moyen, qu'ils accomplissent la majeure partie de leur activité dans le ressort territorial d'un ou plusieurs contrats locaux de sécurité, quel que soit par ailleurs leur lieu d'affectation.

7. Si Mme B... persiste à soutenir, en cause d'appel, qu'elle exerce les fonctions de psychologue dans une UEHC située dans le ressort d'un contrat local de sécurité, elle n'en justifie pas en se bornant à relever que la communauté d'agglomération de Martigues a signé une stratégie de prévention de la délinquance pour les années 2015-2017, prolongée jusqu'en 2022, date de renouvellement de la convention pour la période 2022-2025, de tels documents n'établissant pas qu'elle a accompli, au titre de la période concernée, la majeure partie de son activité dans le ressort territorial d'un ou plusieurs contrats locaux de sécurité. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir qu'elle remplit la condition prévue au point 3 de l'annexe du décret du 14 novembre 2001.

8. En troisième et dernier lieu, si Mme B... soutient que certains agents de l'UEHC bénéficient d'une nouvelle bonification indiciaire, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité ne peut être utilement invoqué pour obtenir le bénéfice d'un avantage dont elle ne remplit pas les conditions d'attribution. Par ailleurs et en tout état de cause, le moyen, à le supposer soulevé, tiré de l'exception d'illégalité de l'arrêté du 4 décembre 2001 fixant par département les emplois éligibles à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice, motif pris de ce que cet arrêté ne peut, sans méconnaître le principe d'égalité, exclure du bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire les psychologues exerçant leurs fonctions dans le département des Bouches-du-Rhône, alors même que de telles fonctions sont tout aussi techniques que celles d'éducateurs, est inopérant et doit être écarté comme tel, dès lors qu'il résulte de ce qui a été précédemment exposé que Mme B... n'exerce pas ses fonctions dans les conditions définies aux 1 et 3 de l'annexe au décret du 14 novembre 2001 relatif à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite portant rejet de sa demande tendant au bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire. Par suite, sa requête d'appel doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais d'instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2023, où siégeaient :

- M. Revert, président,

- M. Martin, premier conseiller ;

- M. Lombart, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe, le 9 janvier 2024.

N° 23MA00170 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA00170
Date de la décision : 09/01/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. REVERT
Rapporteur ?: M. Stéphen MARTIN
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : GARNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-09;23ma00170 ?
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