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01/02/2024 | FRANCE | N°23MA00288

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 01 février 2024, 23MA00288


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme E... G... C..., Mme D... C..., Mme B... F... et M. A... C... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la délibération du 8 juillet 2021 par laquelle le conseil municipal de Saint-Tropez a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune en tant qu'elle a classé leurs terrains en zone N8, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.



Par un jugement n° 2103311, 2200009, 2200131 du 29 novembre 2022, le tri

bunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.





Procédure devant la Cour :


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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... G... C..., Mme D... C..., Mme B... F... et M. A... C... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la délibération du 8 juillet 2021 par laquelle le conseil municipal de Saint-Tropez a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune en tant qu'elle a classé leurs terrains en zone N8, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 2103311, 2200009, 2200131 du 29 novembre 2022, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 2 février 2023 et le 10 décembre 2023, Mme D... C..., représentée par Me Vicquenault, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 29 novembre 2022 en tant qu'il a rejeté sa demande ;

2°) d'annuler la délibération du 8 juillet 2021 par laquelle le conseil municipal de Saint-Tropez a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune, à titre principal, en tant qu'elle a classé ses terrains en zone N8, à titre subsidiaire, en tant qu'elle a classé en zone N8 individuellement l'emprise de ses parcelles portant les numéros AO 145, 96-99, 97-100, 101, 25-98, 147 et 148, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au maire de Saint-Tropez de saisir le conseil municipal afin que celui-ci se prononce sur le classement en zone urbaine constructible de ses terrains, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Tropez la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- ses parcelles classées en zone N8 présentent les mêmes caractéristiques que d'autres parcelles classées en zone U ;

- le classement de ses parcelles en zone N8 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard du parti d'urbanisme retenu.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 novembre 2023, la commune de Saint-Tropez, représentée par Me Antoine, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de Mme C... devant le tribunal administratif de Toulon est irrecevable en l'absence d'intérêt lui donnant qualité pour agir ;

- les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Par lettre du 13 septembre 2023, en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les parties ont été informées de la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code.

Par ordonnance du 28 décembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée à cette date en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Un mémoire présenté par la commune de Saint-Tropez a été enregistré le 5 janvier 2024, parvenu à la Cour après la clôture de l'instruction et non communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,

- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public,

- et les observations de Me Vicquenault, représentant Mme C..., et de Me Antoine, représentant la commune de Saint-Tropez.

Une note en délibéré présentée pour Mme C... a été enregistrée le 22 janvier 2024 et n'a pas été communiquée.

Considérant ce qui suit :

1. Par trois jugements rendus le 1er février 2016, le tribunal administratif de Toulon a annulé la délibération du 27 juin 2013 par laquelle le conseil municipal de Saint-Tropez avait approuvé le plan local d'urbanisme de la commune en tant notamment qu'elle porte sur la création de " la vaste zone UE qui s'étend de la périphérie sud-ouest de l'agglomération de Saint-Tropez, à partir des quartiers de Belle-Isnarde et de Belle-Vue et qui remonte ensuite vers les quartiers de Maneby et des Canebiers ". Par une nouvelle délibération du 8 juillet 2021 prise après enquête publique, le conseil municipal a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune. Les consorts C..., propriétaires de parcelles précédemment classées dans la zone UE précitée et classées en zone naturelle N8 par la délibération du 8 juillet 2021, en ont demandé l'annulation au tribunal administratif de Toulon, en tant qu'elle a classé leurs terrains en zone N8. Mme C..., propriétaire des parcelles cadastrées section AO n° 145, 96-99, 97-100, 101, 25-98, 147 et 148, relève appel du jugement du 29 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif a rejeté cette demande. Elle conclut en appel à l'annulation de cette délibération, à titre principal, en tant qu'elle a classé ses terrains en zone N8, à titre subsidiaire, en tant qu'elle a classé en zone N8 individuellement l'emprise de ses parcelles, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux

2. Aux termes de l'article R. 151 24 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / 2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; / 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; / 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues ".

3. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils peuvent être amenés, à cet effet, à classer en zone naturelle, pour les motifs énoncés à l'article R. 123-8, un secteur qu'ils entendent soustraire, pour l'avenir, à l'urbanisation. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

4. Les auteurs du PLU révisé de Saint-Tropez ont délimité une zone naturelle N qui correspond aux secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison soit de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique, soit de l'existence d'une exploitation forestière, soit de leur caractère d'espaces naturels. Sont regroupées sous ce terme 8 zones dont une zone N8 recouvrant les espaces naturels habités, dans laquelle sont autorisés l'extension mesurée des bâtiments à usage d'habitation existants à la date d'approbation du PLU ainsi que certains bâtiments annexes à l'habitation.

5. Par son jugement du 1er février 2016 cité au point 1, le tribunal administratif de Toulon a prononcé l'annulation partielle de la délibération du 27 juin 2013 au motif que la création de la vaste zone UE n'était pas compatible avec les dispositions du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, aujourd'hui codifiées à l'article L. 121-8 du même code, subordonnant l'extension de l'urbanisation à sa réalisation en continuité avec les agglomérations et villages existants, cette zone étant " sans réelle cohérence " et comprenant " une urbanisation diffuse, répartie de manière hétérogène sur l'ensemble de son périmètre en raison de l'interposition de parcelles non construites, de nombreux secteurs protégés au titre du 7° de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme et d'un ensemble d'espaces boisés classés situé à l'est ". Il ressort des mentions du rapport de présentation du PLU révisé approuvé par la délibération du 8 juillet 2021 que les auteurs du PLU ont entendu assurer l'exécution de ce jugement en reclassant les terrains concernés, représentant une surface de 94,5 ha, en zones UD, UE2 ou N8 recouvrant une surface, respectivement, de 1,7 ha, 60,1 ha et 32,7 ha. Ils ont ainsi identifié des secteurs présentant un caractère homogène, soit d'une densité équivalente à celle du reste de l'agglomération et desservis par le réseau viaire, soit d'une faible densité et couverts par une protection ou un EBC. Sans pour autant fixer des critères cumulatifs, ils ont également identifié des secteurs qui, sans être couverts par une protection ou un EBC, peuvent être classés en zone naturelle habitée par " capillarité " du fait de leur proximité avec ces espaces. A ce titre, le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) retient une orientation 1 visant à préserver le cadre environnemental et paysager, impliquant d'assurer le respect des dispositions d'urbanisme spécifiques au littoral dont celles qui limitent l'extension de l'urbanisation, en prenant en considération le jugement précité du 1er février 2016. Cette orientation implique aussi la préservation de l'environnement et des paysages tropéziens, dont la trame verte et bleue (réservoirs de biodiversité, continuités écologiques locales...).

6. Il ressort des pièces du dossier que le règlement graphique du PLU révisé classe en zone N8 un ensemble de terrains couvrant une surface totale de 4,35 ha, situé au sud du quartier des Canebiers et limité, à l'ouest, par des parcelles bâties et la route du Pinet, au sud par la route du Capon et, à l'est, par des parcelles bâties. Ce secteur, qui se plaçait à l'angle nord-ouest de la zone UE prévue par le PLU approuvé le 27 juin 2013 dont le jugement du 1er février 2016 a prononcé l'illégalité, ne comporte que 4 à 5 constructions érigées au sein d'un environnement resté à l'état naturel et en grande partie boisé et n'est desservi que par les routes précitées. Le rapport de présentation le repère sur une carte au nombre des " espaces perméables et agricoles " regardés comme des espaces de respiration entre les zones bâties formant des corridors écologiques, permettant le maintien des échanges biologiques entre les réservoirs de biodiversité existant dans la commune. En l'espèce, si cette zone N8 est enclavée au sein de secteurs urbanisés classés, au nord et à l'ouest, en zone UD1 ou, à l'est et au sud, en zone UE2, un alignement d'arbres classé en EBC la traverse du nord au sud et se poursuit jusqu'à un vaste espace classé en zone N8 situé dans la continuité des autres espaces naturels de la commune qui s'étendent jusqu'à la limite sud de celle-ci, classés en zones N1, N3 ou N4 et également en EBC. En outre, des terrains en nature de vigne jouxtent l'angle sud-est de la zone litigieuse. Quand bien même les terrains litigieux sont desservis par les réseaux, eu égard au parti d'aménagement retenu par la commune, à la faible densité des terrains concernés qui les distingue de celle des espaces voisins, au réseau viaire limité à la route du Pinet à laquelle mène la route du Capon, à leur caractère largement naturel et à leur situation par rapport aux autres zones naturelles, leur classement en zone N8, pris globalement ou individuellement, n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation. En outre, il n'appartient pas au juge administratif de vérifier si un autre classement aurait été possible, mais seulement de s'assurer que le classement retenu n'est pas illégal.

7. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance par la commune de Saint-Tropez, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Tropez, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme C... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... une somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature exposés par la commune de Saint-Tropez.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Mme C... versera à la commune de Saint-Tropez une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et à la commune de Saint-Tropez.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2024, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Angéniol, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er février 2024.

N° 23MA00288 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23MA00288
Date de la décision : 01/02/2024

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Régime d'utilisation du permis - Péremption.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Contrôle des travaux - Interruption des travaux.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. QUENETTE
Avocat(s) : CABINET LEGAL PERFORMANCES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-01;23ma00288 ?
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