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23/04/2024 | FRANCE | N°23MA01200

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 4ème chambre, 23 avril 2024, 23MA01200


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis consécutivement aux agissements discriminatoires, de harcèlement moral et de mise en danger dont elle prétend avoir été victime, d'enjoindre à l'Etat de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire cesser ces agissements, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat

la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis consécutivement aux agissements discriminatoires, de harcèlement moral et de mise en danger dont elle prétend avoir été victime, d'enjoindre à l'Etat de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire cesser ces agissements, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2003138 du 20 mars 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 mai 2023 et 14 février 2024, Mme A..., représentée par Me Journault, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 20 mars 2023 ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a rejeté sa réclamation indemnitaire préalable ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire cesser les agissements discriminatoires, de harcèlement et de mise en danger dont elle se dit victime, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis consécutivement à ces agissements ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a été victime d'une discrimination en raison de son handicap au sens de l'article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; conformément à l'article 4 de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, elle soumet à la Cour des faits susceptibles de faire présumer une discrimination ; l'Etat ne démontre pas que son exclusion de principe du poste d'enquêtrice est étrangère à toute discrimination ; c'est donc à tort que le tribunal administratif de Marseille a considéré que la discrimination en raison de son handicap serait légitimée par son état de santé ;

- elle a subi des faits de harcèlement et de discrimination au travail depuis le 1er octobre 2018, date de sa prise de fonction à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA), au sens de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 ;

- la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) n'a pas respecté les dispositions des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail qui sont applicables aux faits de l'espèce en application de l'article 3 du décret

n° 82-453 du 28 mai 1982.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 janvier 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que la Cour devra confirmer le jugement rendu en première instance et il l'invite, pour ce faire, à se référer à ses écritures de première instance.

Par une ordonnance du 15 février 2024, la clôture de l'instruction, initialement fixée au 15 février 2024, a été reportée au 7 mars 2024, à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la fonction publique ;

- le code du travail ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 ;

- le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lombart,

- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,

- et les observations de Me Journault, représentant Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Le 25 août 2017, Mme A... a été titularisée dans le corps des inspecteurs de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. A l'issue de son stage, elle a été affectée à la direction départementale de la protection des populations (DDPP) de Seine-et-Marne. Elle a été reconnue comme étant travailleur handicapé à compter du 26 octobre 2017. Le 1er septembre 2018, après un congé maternité pathologique et la naissance prématurée de son enfant, Mme A... a été mutée, à sa demande, à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA), sur un emploi sédentaire au pôle C de la division " Pilotage animation et appui régional ", en charge du suivi du programme régional d'enquête pour les enquêtes de consommation, responsable qualité local et traitement des litiges transfrontaliers. Mme A... relève appel du jugement du 20 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis consécutivement aux agissements de discrimination, de harcèlement moral et de mise en danger dont elle prétend avoir été victime depuis cette mutation et à ce qu'il soit enjoint à l'autorité administrative de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire cesser ces agissements.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation :

2. La décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la réclamation indemnitaire préalable de Mme A... a eu pour seul effet de lier le contentieux et a donné à l'ensemble de sa demande le caractère d'un recours de plein contentieux, ce dont il résulte que l'appelante ne peut utilement demander l'annulation de cette décision et qu'il appartient à la Cour de statuer directement sur son droit à obtenir la réparation qu'elle réclame.

En ce qui concerne les conclusions à fin d'indemnisation :

S'agissant de l'existence d'un harcèlement moral et d'une discrimination :

3. D'une part, aux termes du deuxième alinéa de l'article 6 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, applicable au litige, dont les dispositions sont désormais reprises à l'article L. 131-1 du code général de la fonction publique : " (...) Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison (...) de leur état de santé (...) ". Selon l'article 1er de la loi susvisée du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations : " Constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement (...) de son état de santé (...), de son handicap (...), une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable. / Constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d'entraîner, pour l'un des motifs mentionnés au premier alinéa, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés. (...) ".

Aux termes de l'article 4 de cette même loi : " Toute personne qui s'estime victime d'une discrimination directe ou indirecte présente devant la juridiction compétente les faits qui permettent d'en présumer l'existence. Au vu de ces éléments, il appartient à la partie défenderesse de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination (...) ".

4. Par ailleurs, selon l'article 6 sexies de la loi du 13 juillet 1983, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 131-8 de ce code : " Afin de garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des personnes en situation de handicap, les employeurs publics mentionnés à l'article L. 2 prennent, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux personnes relevant de l'une des catégories mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 5212-13 du code du travail d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de développer un parcours professionnel et d'accéder à des fonctions de niveau supérieur ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée tout au long de leur vie professionnelle. / Ces mesures incluent notamment l'aménagement, l'accès et l'usage de tous les outils numériques concourant à l'accomplissement de la mission des agents, notamment les logiciels métiers et de bureautique ainsi que les appareils mobiles. / Les dispositions du présent article s'appliquent sous réserve que les charges consécutives à la mise en œuvre de ces mesures ne soient pas disproportionnées, compte tenu notamment des aides qui peuvent compenser en tout ou partie les dépenses supportées par les employeurs à ce titre. " Ces dispositions imposent à l'autorité administrative de prendre tant les règlements spécifiques que les mesures appropriées au cas par cas pour permettre l'accès de chaque personne handicapée à l'emploi auquel elle postule sous réserve, d'une part, que ce handicap n'ait pas été déclaré incompatible avec l'emploi en cause et, d'autre part, que lesdites mesures ne constituent pas une charge disproportionnée pour le service.

5. D'autre part, aux termes du premier alinéa de l'article 6 quinquies de la même loi, dont les dispositions sont désormais reprises à l'article L. 133-2 du code général de la fonction publique : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (...) ".

6. Il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime d'une discrimination ou de faits constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à toute discrimination ou tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si la discrimination ou les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'administration auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique.

7. Au cas particulier, il résulte, en premier lieu, de l'instruction que l'autorité administrative a pris en considération les contraintes et les difficultés personnelles rencontrées par Mme A... en faisant droit aux demandes de mutation géographique présentées tant par cette dernière, alors qu'au demeurant, elle n'avait pas encore atteint l'ancienneté d'une année dans son précédent poste, que de son conjoint, également inspecteur de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. L'autorité administrative l'a également fait après la prise de poste de Mme A... au sein des services de la DIRECCTE de PACA, notamment, en l'informant de la possibilité de bénéficier du suivi du médecin de prévention et de l'institut d'accompagnement psychologique et de ressources (IAPR), en lui proposant d'effectuer son service en télétravail, en aménageant ses horaires avec dérogation aux plages fixes ou encore en invitant le service des relations humaines à " faire preuve de bienveillance " dans la gestion de ses absences nécessitées par le suivi médical et la garde de son enfant. Dans ces conditions, la seule circonstance que des justificatifs d'absence lui ont été demandés n'est pas susceptible de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral ou même d'une discrimination à son encontre.

8. En deuxième lieu, l'appelante n'apporte pas davantage devant la Cour que devant le tribunal administratif de Marseille d'éléments de nature à établir que sa charge de travail serait excessive et il ne résulte pas de l'instruction que les missions qui lui ont été confiées ne correspondent pas à son grade d'inspectrice de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

9. En troisième lieu, si Mme A... expose être victime " d'actes d'humiliation " ou de " railleries ", sans que ces allégations soient circonstanciées, ni même étayées, il ne résulte pas de l'instruction que ses supérieurs hiérarchiques ou ses collègues auraient usé de propos désobligeants et incorrects à son encontre, ni même, pour les premiers, qu'ils auraient excédé l'exercice normal de leur pouvoir hiérarchique. A cet égard, n'est pas révélatrice d'une situation de harcèlement moral, la seule circonstance que le supérieur hiérarchique direct de l'appelante lui a adressé deux courriels durant ses congés d'été 2019 pour lui demander d'accomplir des tâches " à son retour ". En outre, il ne ressort pas de la lecture du compte rendu d'entretien professionnel produit au dossier que ce supérieur hiérarchique direct aurait fait preuve à l'encontre de Mme A... d'une animosité particulière ou aurait entaché son appréciation de partialité, ni qu'il aurait utilisé cet entretien professionnel à une autre fin que celle d'apprécier sa valeur professionnelle ou encore qu'il aurait eu l'intention de la sanctionner. Si le compte rendu d'entretien professionnel au titre de l'année 2019 a été annulé par un jugement n° 2007846 du tribunal administratif de Marseille du 20 mars 2023, il l'a été au seul motif tiré de ce que

Mme A... n'avait pas bénéficié d'un entretien préalable avant la notification de celui-ci, ce qui ne traduit pas en tant que tel un harcèlement moral. Il en est de même de la circonstance que l'entretien professionnel réalisé au titre de l'année 2018 l'aurait été alors que Mme A... n'avait été présente que quarante-cinq jours au sein de son service. Par ailleurs, si l'appelante reproche à son administration de ne pas avoir reconnu comme étant imputable au service l'agression verbale dont elle prétend avoir été victime, le 16 juillet 2019, de la part de l'adjointe au chef du service Pilotage et animation, la matérialité de celle-ci n'apparaît pas établie au vu des pièces du dossier et, au demeurant, ce faisant, l'autorité administrative a suivi l'avis défavorable émis par la commission de réforme le 19 novembre 2019 au motif de l'absence de fait accidentel.

10. En quatrième lieu, alors qu'il résulte de l'instruction qu'en l'absence de mission d'animation d'un réseau transfrontalier, la part des fonctions confiées à Mme A... relatives aux litiges transfrontaliers n'ouvre pas droit à la nouvelle bonification indiciaire (NBI), le refus de lui attribuer cette prime n'est pas susceptible en tant que tel de faire présumer l'existence d'un harcèlement à son encontre.

11. En cinquième lieu, pour caractériser tout à la fois un élément constitutif du harcèlement moral dont elle se prétend victime et une discrimination à raison de son handicap, Mme A... reproche à l'autorité administrative d'avoir refusé, à plusieurs reprises, de la nommer sur le poste d'enquêteur alors même qu'elle était apte à ce poste et que les médecins qu'elle avait consultés avaient préconisé un changement de poste. Il résulte toutefois de l'instruction que, quand bien même la seule principale restriction médicale imposée à Mme A... était d'éviter la conduite nocturne d'un véhicule de service et que son état de santé n'apparaît pas en tant que tel incompatible avec des fonctions d'enquêteur, l'autorité administrative s'est fondée, pour ne pas faire droit aux demandes de Mme A..., dans l'intérêt du service et pour les besoins de celui-ci, sur son parcours et son expérience professionnels au vu du profil des autres agents candidats sur ce poste ainsi que des contraintes inhérentes à celui-ci, lequel suppose des déplacements dans toute la région avec une grande amplitude journalière alors que, précisément, l'appelante a des contraintes familiales lourdes. Ces refus de nommer Mme A... sur l'emploi d'enquêteur ne traduisent donc pas une discrimination liée à son état de santé, ni un élément constitutif d'un harcèlement moral.

12. En sixième lieu, si Mme A... critique la longueur du délai d'instruction de son signalement à la cellule Discrimination du ministère chargé des finances, ce délai n'est pas révélateur d'une carence de l'Etat, lequel a confié à l'inspection générale des services à la DIRECCTE de PACA une enquête dont l'appelante s'est vue notifier les conclusions et n'apparait ainsi pas susceptibles de caractériser une situation de harcèlement moral à l'encontre de cette dernière.

13. En septième lieu, le refus de protection fonctionnelle qui a été opposé à la demande présentée le 28 novembre 2019 par Mme A... ne saurait davantage, par elle-même et en l'absence de précisions utiles apportées par l'appelante, faire présumer un harcèlement moral et ce alors même que cette décision a été annulée par un jugement n° 2002733 du 20 mars 2023 du tribunal administratif de Marseille pour le seul motif tenant à ce que l'administration avait commis une erreur de droit en estimant, pour lui refusant le bénéfice de la protection fonctionnelle, que les faits à l'origine de sa demande étaient susceptibles de relever de la compétence du juge administratif, alors que cette circonstance est sans incidence sur le droit au bénéfice de cette protection, prévu par l'article 11 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 portant droits et obligation des fonctionnaires, alors applicable.

14. En huitième et dernier lieu, les constatations opérées par les médecins, dont Mme A... produit les attestations, sur son état de santé, si elles sont de nature à établir une dégradation de cet état de santé font essentiellement état de ses difficultés familiales et ne suffisent pas à établir, à elles seules, la réalité des faits de harcèlement moral et de discrimination dont fait état l'appelante.

15. Il s'ensuit que les éléments invoqués par Mme A..., même pris dans leur ensemble, ne caractérisent pas un harcèlement moral exercé à son encontre, pas davantage qu'un comportement discriminatoire en raison de son état de santé. Par suite, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que la responsabilité de l'Etat doit être engagée pour ces motifs.

S'agissant de l'existence d'un manquement par l'Etat à son obligation de sécurité :

16. L'article 23 de la loi du 13 juillet 1983, dont les dispositions sont désormais reprises à l'article L. 136-1 du code général de la fonction publique, dispose que : " Des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail ". Au surplus, il résulte de l'article L. 811-1 de ce code que, depuis son entrée en vigueur le 1er mars 2022, et sauf dérogation, les règles applicables en matière d'hygiène et de sécurité dans les services de l'Etat sont, en particulier celles définies par les livres Ier à V de la quatrième partie du code du travail, au sein desquels l'article L. 4121-1 prévoit que : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. (...) ". Enfin, L'article 2-1 du décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique précise que : " Les chefs de service sont chargés, dans la limite de leurs attributions et dans le cadre des délégations qui leur sont consenties, de veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité. ".

17. Les autorités administratives ont l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et morale de leurs agents. Il leur appartient à ce titre, sauf à commettre une faute de service, d'assurer la bonne exécution des dispositions législatives et réglementaires qui ont cet objet, ainsi que le précise l'article 3 du décret du 28 mai 1982.

18. Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'autorité administrative aurait commis une faute tirée du manquement à son obligation de préserver sa santé au seul motif qu'elle n'a pas fait droit à ses demandes de changement de poste dès lors qu'au vu des avis médicaux émis, qui, au demeurant, pour ceux produits au dossier sont peu circonstanciés et ne préconisaient qu'un aménagement de poste, ladite autorité, qui n'était tenue, notamment eu égard à ses propres contraintes d'organisation, de faire droit à la demande de Mme A..., a, ainsi qu'il a été dit

ci-dessus, procédé à cet aménagement.

En ce qui concerne les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

19. Le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Il suit de là que les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par Mme A... ne peuvent qu'être rejetées.

20. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme dont Mme A... demande le versement au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Les conclusions afférentes de l'appelante doivent donc être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 9 avril 2024, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Lombart, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 avril 2024.

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No 23MA01200


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA01200
Date de la décision : 23/04/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Cadres et emplois - Egalité de traitement entre agents d'un même corps - Absence de discrimination illégale.

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Garanties et avantages divers.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Laurent LOMBART
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : JOURNAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-23;23ma01200 ?
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