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15/02/2024 | FRANCE | N°21NC02536

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 15 février 2024, 21NC02536


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société à responsabilité limitée (SARL) BC Groupe a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 30 novembre 2014 et des suppléments d'impôt sur les sociétés et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises établis au titre de l'année 2013.



Par un jugement

n° 1805498 du 13 juillet 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.



Pr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) BC Groupe a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 30 novembre 2014 et des suppléments d'impôt sur les sociétés et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises établis au titre de l'année 2013.

Par un jugement n° 1805498 du 13 juillet 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 septembre 2021 et des mémoires enregistrés les 4 décembre 2023 et le 10 janvier 2024, la SARL BC Group, représentée par Me Loga, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions contestées ainsi que de l'amende de l'article 1759 A du code général des impôts.

Elle soutient que :

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée en violation de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- la reconstitution du chiffre d'affaires taxable à la taxe sur la valeur ajoutée est viciée en ce qu'elle part du principe que chaque facturation rendait exigible la taxe, sans tenir compte de la clause de réserve de propriété, alors que le service aurait dû ne retenir que les ventes ayant donné lieu à une remise matérielle effective du bien à l'acquéreur ;

- ayant fait l'acquisition de trois portes blindées lesquelles ont été régulièrement facturées par son fournisseur, elle était en droit de déduire la taxe les ayant grevées ; la circonstance que son fournisseur aurait mal ou pas comptabilisé ces factures et qu'il n'a pas matériellement remis ces portes postérieurement à l'année 2013 étant sans incidence sur leur livraison au sens de l'article 269 du code général des impôts et par suite sur son droit à déduction au sens de l'article 271 du même code ;

- le rappel en matière de taxe sur la valeur ajoutée collectée étant infondé, le redressement en matière de profit sur le trésor est lui-même dépourvu de base légale ;

- la dette correspondant à l'acquisition des trois portes blindées était certaine à la clôture de l'exercice 2013 de sorte que la charge correspondante est déductible ;

- les avances que lui ont consenties M. A... et Mme B... sont justifiées par les contrats de prêt et par les relevés de comptes bancaires ;

- les réintégrations en matière d'impôt sur les sociétés étant infondées, le rappel de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises est lui-même dépourvu de base légale ;

- en l'absence de désinvestissement, les redressements en matière de charges non déductibles et de passif injustifié n'ont entraîné aucune distribution de bénéfice de sorte qu'il ne pouvait y avoir matière à la mise en œuvre de l'article 117 du code général des impôts et par suite à l'amende de l'article 1759 du même code ; en tout état de cause, cette amende doit être déchargée en application de l'article 1756 du code général des impôts du fait de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ;

- l'administration n'a pas rapporté la preuve d'un manquement délibéré s'agissant du rappel de taxe sur la valeur ajoutée collectée et d'impôt sur les sociétés afin de justifier des pénalités appliquées.

Par des mémoires enregistrés le 10 février 2022 et le 18 décembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions tendant à la décharge de l'amende sont sans objet, celle-ci ayant été dégrevée ;

- aucun des moyens invoqués par la SARL BC Group n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Agnel ;

- et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL BC Group, qui exerce une activité de commerce de gros de bois et de matériel de construction, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2013 au 30 novembre 2014. Par une proposition de rectification du 23 mai 2016, l'administration fiscale a porté à la connaissance de la société qu'elle envisageait, selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, des rehaussements de son bénéfice imposable, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Les observations de la société ont été partiellement admises par le service le 4 octobre 2016. La commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre a émis un avis favorable aux rectifications par un avis du 26 juin 2017. Les impositions supplémentaires ont été mises en recouvrement au cours de l'année 2017 et la réclamation préalable de la société BC Group a été rejetée le 5 juillet 2018. La SARL BC Group relève appel du jugement du 13 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires.

Sur les conclusions relatives à l'amende de l'article 1759 du code général des impôts :

2. Il résulte de l'instruction que l'amende de l'article 1759 du code général des impôts, ainsi que les autres majorations ayant assorti les impositions litigieuses, ont fait l'objet, le 7 décembre 2018, d'une remise en application de l'article 1756 du code général des impôts, consécutivement au jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société BC Groupe du 7 novembre 2018. Par suite, le ministre chargé des comptes publics est fondé à soutenir que les conclusions de la requête de la SARL BC Groupe tendant à la décharge de l'amende de l'article 1759 du code général des impôts sont irrecevables comme étant dépourvues d'objet.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". L'article R. 57-1 du même livre dispose que : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.

4. Il ressort de la proposition de rectification du 23 mai 2016 que le vérificateur a indiqué avoir constaté une insuffisance de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée collectée après avoir comparé les montants des livraisons enregistrés en comptabilité au titre de chacun des exercices vérifiés avec les chiffres d'affaires portés sur les déclarations mensuelles de taxe sur la valeur ajoutée déposées par la société. Le vérificateur a corroboré les résultats de cette méthode avec le montant de la dette de taxe sur la valeur ajoutée figurant au passif des bilans. Ayant ainsi indiqué les motifs de l'insuffisance de chiffre d'affaires déclaré, la base des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les périodes d'imposition, le service a suffisamment motivé cette proposition de rectification. La comparaison des chiffres d'affaires mensuels déclarés s'étant faite avec les produits comptabilisés au cours des exercices annuels vérifiés, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le service aurait dû indiquer quelle déclaration mensuelle était précisément entachée d'une insuffisance. Par suite, le moyen tiré de la violation de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée :

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée collectée :

5. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. -Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens (...) effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. / II. - 1° Est considéré comme livraison d'un bien, le transfert du pouvoir de disposer d'un bien corporel comme un propriétaire. / (...) 3° Sont également considérés comme livraisons de biens :/ (...) d) La remise matérielle d'un bien meuble corporel en vertu d'un contrat de vente qui comporte une clause de réserve de propriété ". Aux termes de l'article 269 du même code : " 1 Le fait générateur de la taxe se produit :/ a) Au moment où la livraison, l'acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué (...)/ 2. La taxe est exigible :/ a) Pour les livraisons et les achats visés au a du 1 (...) lors de la réalisation du fait générateur ".

6. Il résulte de l'instruction que la SARL BC Groupe a pour activité la vente en gros de bois de construction, opérations pour lesquelles le fait générateur et l'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée interviennent au moment de la livraison des matériaux et marchandises. Le service a rapproché le montant du chiffre d'affaires soumis à la taxe, déclaré par la société requérante sur ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée, et le montant des ventes de marchandises, corrigé des escomptes accordés, enregistrées dans sa comptabilité. La vérificatrice a ainsi constaté une insuffisance de chiffre d'affaires déclaré en matière de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période vérifiée.

7. La société BC Groupe n'a pas présenté de contestation concernant le rappel de taxe sur la valeur ajoutée proposé par le service à la suite de ce rapprochement des chiffres d'affaires déclarés dans ses observations du 25 juillet 2016 et a reconnu au contraire l'existence d'une insuffisance de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée collectée. Par suite, la charge de la preuve du mal-fondé de ce rappel lui incombe en vertu de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales.

8. Afin de contester l'existence d'une insuffisance de taxe sur la valeur ajoutée collectée, la société requérante se borne à soutenir que la vérificatrice n'a pas tenu compte de l'incidence de la clause de réserve de propriété, qui figure de manière systématique dans ses conditions générales de vente, et qui aurait, selon elle, pour effet de différer le fait générateur et l'exigibilité de la taxe à la remise matérielle aux clients des matériaux vendus par elle. Toutefois, la charge de la preuve du mal-fondé de l'imposition lui incombant sur ce point, la société requérante ne précise pas quelle serait l'incidence de cette clause de réserve de propriété au cours des périodes litigieuses sur l'exigibilité de la taxe alors que sa comptabilité faisait ressortir, aux 31 décembre 2013 et 30 novembre 2014, une dette de taxe sur la valeur ajoutée collectée égale au montant des rappels de taxe mis à sa charge à la suite de la vérification de comptabilité. C'est dès lors à juste titre que le service a considéré que la facturation des ventes de la société avait coïncidé avec la remise matérielle des marchandises. Par suite, la SARL BC Groupe ne rapporte pas la preuve du caractère infondé du rappel litigieux.

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée déduite :

9. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. / (...) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas :/ a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures (...) 3. Lorsque ces factures ou ces documents font l'objet d'une rectification, les redevables doivent apporter les rectifications correspondantes dans leurs déductions et les mentionner sur la déclaration qu'ils souscrivent au titre du mois au cours duquel ils ont eu connaissance de cette rectification./ III. A cet effet, les assujettis, qui sont autorisés à opérer globalement l'imputation de la taxe sur la valeur ajoutée, sont tenus de procéder à une régularisation :/ a) Si les marchandises ont disparu ;/ b) Lorsque l'opération n'est pas effectivement soumise à l'impôt ". Aux termes de l'article 272 du même code : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a été perçue à l'occasion de ventes ou de services est imputée ou remboursée dans les conditions prévues à l'article 271 lorsque ces ventes ou services sont par la suite résiliés ou annulés ou lorsque les créances correspondantes sont devenues définitivement irrecouvrables. (...) L'imputation ou la restitution est subordonnée à la justification, auprès de l'administration, de la rectification préalable de la facture initiale. / 2. La taxe sur la valeur ajoutée facturée dans les conditions définies au 4 de l'article 283 ne peut faire l'objet d'aucune déduction par celui qui a reçu la facture ". Aux termes de l'article 283 du même code : " 4. Lorsque la facture ou le document ne correspond pas à la livraison d'une marchandise ou à l'exécution d'une prestation de services, ou fait état d'un prix qui ne doit pas être acquitté effectivement par l'acheteur, la taxe est due par la personne qui l'a facturée ".

10. Il résulte de l'instruction que la société requérante a déduit la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur les factures numérotées 01112013, 02112013 et 01122013, datées respectivement des 8 novembre, 22 novembre et 13 décembre 2013, présentées comme émanant d'une société " CER Réalisation " et se rapportant chacune à l'acquisition de 27 unités de marchandises, sans autre précision quant à leur nature, pour un prix toutes taxes comprises (TTC) de 36 177,08 euros. Ces factures étaient accompagnées de bons de livraison comportant les mêmes mentions. La SARL BC Groupe soutient ainsi avoir fait l'acquisition de portes blindées que son fournisseur ne lui a finalement pas livrées, le litige aboutissant à une résolution des ventes au cours de l'année 2014, une telle circonstance devant demeurer sans incidence sur l'exercice de son droit à déduction dès lors que la livraison est intervenue dès l'échange des consentements conformément au 1° du II de l'article 256 du code général des impôts. Il n'est toutefois pas contesté que l'administration a constaté à la suite de l'exercice de son droit de communication que la comptabilité de la société " CER Réalisation " ne comportait aucune trace de ces ventes et qu'aucune facture correspondant à ces opérations n'avait été émise par elle. Il ressort des documents produits que la numérotation qu'ils comportent n'est pas continue tandis que l'existence de " bons de livraison " est incompatible avec l'absence de remise matérielle des marchandises alléguée par la SARL BC Groupe. Cette dernière ne produit au demeurant aucune pièce de nature à établir l'existence d'un litige avec son fournisseur concernant ces opérations, le courriel du 9 avril 2014 adressé à un destinataire inconnu n'étant pas de nature à établir l'existence d'un tel différend. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que c'est à juste titre que l'administration s'est fondée sur le 4 de l'article 283 du code général des impôts afin de rappeler la taxe sur la valeur ajoutée déduite au cours de l'année 2013 en ce qui concerne ces opérations. La circonstance que la SARL BC Groupe aurait procédé à une régularisation de la déduction de cette taxe postérieurement à la période vérifiée, à la suite de l'établissement d'un avoir par son fournisseur, constituant la pièce 23.5 devant le tribunal administratif, présentée comme émanant de CER Réalisation mais intitulée " facture n° 011122013 " concernant 81 unités de portes blindées pour un total correspondant aux trois factures litigieuses, demeure, dans ces conditions, sans incidence sur le bien-fondé du rappel litigieux en l'absence de taxe déductible dès l'origine.

Sur le bien-fondé des suppléments d'impôt sur les sociétés et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises :

11. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ". Aux termes de l'article 39 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'œuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire ". Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive. Il appartient en outre au contribuable, pour l'application de ces dispositions, de justifier l'inscription d'une dette au passif de son bilan.

12. L'article 1586 sexies du code général des impôts dispose que la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises est égale à la différence entre le chiffre d'affaires défini au 1 et a) du 4 de cet article et les charges définies au b) du 4 du même article parmi lesquelles figurent les achats d'études et de prestations de services. Si la valeur ajoutée imposable est ainsi déterminée à partir des éléments figurant dans la comptabilité de l'entreprise, l'administration peut toutefois contrôler l'exactitude des montants déclarés et tirer les conséquences au regard de cette imposition soit des imputations comptables irrégulières, soit des sous-évaluations ou surévaluations de charges ou produits enregistrés en comptabilité afin de rectifier la valeur ajoutée déclarée.

En ce qui concerne la rectification correspondant au profit sur le trésor :

13. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus au point 6 ci-dessus que la SARL BC Groupe n'est pas fondée à soutenir que le rehaussement de son bénéfice imposable à raison du profit sur le Trésor découlant de l'absence de déclaration d'une partie de la taxe sur la valeur ajoutée collectée ne serait pas fondé à raison du caractère infondé de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée.

En ce qui concerne les charges déductibles :

14. Il résulte de ce qui a été dit au point 10 que les charges déduites par la société requérante correspondant aux documents présentés comme émanant de la société CER Réalisation étaient dépourvues de toute contrepartie. Par suite, c'est à juste titre que le service les a réintégrées dans le bénéfice et la valeur ajoutée imposables sans qu'y fasse obstacle la circonstance que la société aurait régularisé ces sommes postérieurement à la période vérifiée.

En ce qui concerne l'existence d'un passif injustifié :

15. La SARL BC Groupe a comptabilisé le 4 septembre 2013 une somme de 70 000 euros au crédit du compte " 4671 - S. A. " et le 17 décembre 2013 une somme de 15 000 euros au crédit du compte " 4673 - T. F. ". La société requérante n'ayant pas été en mesure d'établir au cours des opérations de contrôle que ces sommes correspondaient effectivement à des dettes, l'administration les a réintégrées au 31 décembre 2013 dans le bénéfice imposable. Afin de justifier de ces écritures la société requérante soutient que deux personnes physiques, dépourvues de tout lien avec elle, lui ont avancé ces sommes afin de lui venir en aide compte tenu de ses difficultés financières. Si la société requérante produit deux contrats de prêts par lesquels elle s'engage à rembourser les sommes au plus tard le 31 décembre 2016, ces documents sont dépourvus de date certaine et, dès lors, de toute valeur probante. Dans ces conditions, si la société justifie avoir encaissé les sommes litigieuses par virements émanant de ces personnes, elle ne rapporte pas la preuve que ces opérations trouveraient leur cause dans des contrats de prêt. Par suite, c'est à juste titre que l'administration a procédé au rehaussement litigieux.

Sur les pénalités :

16. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...), la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ". La majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue au a de l'article 1729 du code général des impôts sanctionne la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir le manquement délibéré, l'administration fiscale doit apporter la preuve de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations du contribuable, et de son intention délibérée d'éluder l'impôt.

17. Afin de justifier de la pénalité pour manquement délibéré prévue par l'article 1729 du code général des impôts aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée, l'administration s'est fondée sur le fait que la société requérante avait procédé, pour des montants particulièrement élevés, à une minoration de la taxe sur la valeur ajoutée collectée, correspondant à la somme totale de 281 624 euros sur les périodes du 1er janvier 2013 au 30 novembre 2014, alors qu'il ressort notamment de sa comptabilité que sa gérante était parfaitement informée de l'étendue de ses obligations et qu'elle ne les a délibérément pas respectées. Par ces éléments l'administration rapporte la preuve de l'intention délibérée de la société requérante d'éluder le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée collectée sur ses opérations.

18. Le service n'a pas appliqué la pénalité prévue par le a. de l'article 1729 du code général des impôts aux suppléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignés. Par suite, le moyen invoqué, tiré de ce que l'administration n'a pas rapporté la preuve d'un tel manquement délibéré, est inopérant.

19. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL BC Groupe n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL BC Groupe est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL BC Groupe et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Bourguet-Chassagnon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2024.

Le rapporteur,

Signé : M. AgnelLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

N° 21NC02536

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC02536
Date de la décision : 15/02/2024
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : LOGA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-15;21nc02536 ?
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