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13/03/2024 | FRANCE | N°24NC00205

France | France, Cour administrative d'appel, 13 mars 2024, 24NC00205


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Par une requête, enregistrée le 12 juillet 2022, M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg de constater la nullité de l'arrêté du 27 août 2015 en ce qu'il ne prévoit pas que la prime de pupitreur soit exclue du RIFSEEP et celle de l'arrêté du 9 avril 1986 en ce qu'il ne prévoit que trois bénéficiaires de la prime de pupitreur et de condamner l'Etat à lui verser une provision correspondant à la somme de 78 325,22 euros au titre

d'impayé sur son traitement pour la période de janvier 2006 à avril 2022, à la somme de 8 8...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête, enregistrée le 12 juillet 2022, M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg de constater la nullité de l'arrêté du 27 août 2015 en ce qu'il ne prévoit pas que la prime de pupitreur soit exclue du RIFSEEP et celle de l'arrêté du 9 avril 1986 en ce qu'il ne prévoit que trois bénéficiaires de la prime de pupitreur et de condamner l'Etat à lui verser une provision correspondant à la somme de 78 325,22 euros au titre d'impayé sur son traitement pour la période de janvier 2006 à avril 2022, à la somme de 8 824 euros au titre d'impayé de traitement pour la période de mai 2022 à décembre 2023, et à la somme de 1 000 euros au titre du préjudice moral.

Par une ordonnance n° 2204529 du 9 janvier 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 janvier 2024, M. A..., représenté par Me Boisserie, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 9 janvier 2024 du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser, à titre de provision, la somme de 87 149, 22 euros assortie des intérêts au taux légal ainsi que la somme correspondant à la capitalisation de ces intérêts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a méconnu le principe de l'égalité des armes ;

- il a entaché sa décision d'une incompétence négative en refusant de vérifier la conformité des arrêtés du 27 août 2015 et du 9 avril 1996 avec le décret n°71-342 du 29 avril 1971 ;

- il a omis de statuer sur deux moyens ;

- il a jugé à tort que la prescription quadriennale devait s'appliquer en l'espèce ;

- il a commis une erreur d'appréciation en considérant que sa créance présentait un caractère sérieusement contestable au sens des dispositions de l'article R 541-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 février 2024, le ministre de l'intérieur et des outre-mer, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête d'appel de M. A....

Il soutient que :

- l'ordonnance attaquée est irrégulière en ce qu'elle n'a pas considéré que la demande formulée devant le tribunal administratif était irrecevable car elle tendait non au versement d'une provision mais à la condamnation de l'Etat au versement d'une prime ;

- le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg n'a pas méconnu le principe de l'égalité des armes, n'a pas entaché sa décision d'une incompétence négative et n'a pas omis de statuer sur les moyens présentés par M. A... ;

- M. A... ne peut utilement soulever le moyen tiré de l'erreur commise par le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg dans l'application de la prescription quadriennale car il n'appartient pas au juge d'appel d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'appel ;

- la créance dont se prévaut M. A... est contestable.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n°71-343 du 29 avril 1971 ;

- le décret n°2014-513 du 20 mai 2014 ;

-le code général de la fonction publique ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier que M. B... A..., ingénieur des systèmes d'information et de communication depuis le 1er janvier 2024 a exercé en tant que contrôleur des systèmes d'information entre le 19 décembre 2005 et le 31 décembre 2012 et en tant que technicien de classe exceptionnelle des systèmes d'information et de communication entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2023. Par un courrier du 10 mai 2022, il a demandé au préfet du Haut-Rhin de bénéficier, à compter de son affectation à la préfecture du Haut-Rhin en décembre 2005 de la prime de " pupitreur " prévue à l'article 1er du décret n°71-343 du 29 avril 1971. Le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui accorder le bénéfice de cette prime. M. A... forme appel de l'ordonnance par laquelle le juge des référés du Tribunal Administratif de Strasbourg a rejeté sa demande de provision relative à cette prime.

Sur la régularité de l'ordonnance du juge des référés du tribunal :

2. Il ressort de l'ensemble des écritures déposées en première instance par M. A... qu'il a sollicité l'allocation d'une provision. Il suit de là que, contrairement à ce que soutient le ministre, la demande formulée en première instance n'était pas irrecevable.

3. Il appartient au requérant de prouver que l'existence de l'obligation dont il se prévaut n'est pas sérieusement contestable pour obtenir le versement d'une provision sur le fondement des dispositions de l'article R541-1 du code de justice administrative. Le juge des référés du tribunal administratif n'était pas tenu de d'ordonner une mesure d'instruction pour vérifier les affirmations du préfet alors qu'il a écarté l'absence de caractère non sérieusement contestable de la créance dont se prévaut M. A... du fait de l'application combinée des dispositions du décret n°2014-513 du 20 mai 2014 et de l'article 1er de l'arrêté du 27 août 2015 pris en son application.

4. Il n'appartient pas au juge des référés saisi sur le fondement des dispositions précitées de l'article R. 541-1 du code de justice administrative de prononcer la nullité ou l'annulation d'actes administratifs. Dès lors, le juge des référés du tribunal administratif était tenu de soulever d'office l'irrecevabilité des conclusions de M. A... tendant à " constater la nullité " des arrêtés du 9 avril 1986 et du 27 août 2015 et le moyen tiré de l'incompétence négative ne peut qu'être écarté.

5. Contrairement à ce que soutient le requérant, le juge des référés a bien visé le moyen tiré du fait que le principe d'égalité de traitement des agents publics s'oppose à ce que lui soit refusée la prime accordée à son collègue, de même grade et échelon que lui. De plus, ce moyen étant inopérant, il n'était pas tenu d'y répondre.

6. Le fait que le supérieur hiérarchique direct de M. A... ait donné un avis favorable à l'obtention de la prime ne constitue pas une décision créatrice de droits, contrairement à ce que soutient le requérant. Le moyen tiré du fait qu'il existait une décision créatrice de droits d'accorder la prime revêtant un caractère définitif est donc inopérant et le juge des référés n'était pas tenu d'y répondre.

Sur la demande de provision :

7. Aux termes de l'article R541-1 du code de justice administrative :" Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. ". Il appartient au juge des référés, pour statuer sur le caractère non sérieusement contestable d'une obligation, de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude.

8. Aux termes de l'article 1er du décret n° 71-343 du 29 avril 1971 relatif aux fonctions et au régime indemnitaire des fonctionnaires de l'Etat et des établissements publics affectés au traitement de l'information : " Lorsqu'ils exercent les fonctions définies à l'article 2 et à condition qu'ils appartiennent à des corps ou soient titulaires de grades dont le niveau hiérarchique est précisé à l'article 4, les fonctionnaires de l'Etat qui sont régulièrement affectés au traitement de l'information peuvent percevoir, en sus des primes et indemnités prévues par la réglementation en vigueur pour les grades ou les corps auxquels ils appartiennent, et dans les conditions précisées aux articles ci-après, une prime de fonctions non soumise à retenues pour pension de retraite. ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " La prime prévue à l'article 1er est attribuée aux fonctionnaires qui exercent les fonctions définies ci-après : Dans les centres automatisés de traitement de l'information / (....) Le pupitreur assure la conduite générale d'un ensemble électronique. (....) ". Cependant, aux termes de l'article 1er du décret du 20 mai 2014 : " Les fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 susvisée peuvent bénéficier, d'une part, d'une indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et, d'autre part, d'un complément indemnitaire annuel lié à l'engagement professionnel et à la manière de servir, dans les conditions fixées par le présent décret. ". Aux termes de l'article 5 du même décret : " L'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et le complément indemnitaire annuel sont exclusifs de toutes autres primes et indemnités liées aux fonctions et à la manière de servir, à l'exception de celles énumérées par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget. "

9. L'article 1er de l'arrêté du 27 août 2015 pris en application de l'article 5 du décret du 20 mai 2014 ne prévoit pas la prime prévue par l'article 1er du décret n° 71-343 du 29 avril 1971 au titre de celles pouvant être cumulées avec l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise. En conséquence, l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise ne peut se cumuler avec la prime informatique à laquelle avaient droit, dans certaines conditions, les fonctionnaires d'Etat affectés au traitement de l'information même si le décret du 29 avril 1971 n'a pas été abrogé après la parution du décret du 20 mai 2014. Dans ces conditions, M. A..., qui n'établit pas que les dispositions de l'article 1er de l'arrêté du 27 août 2015 seraient illégales, ne démontre pas qu'il aurait dû avoir droit, après la mise en place du RIFSEEP au mois de janvier 2017, au versement d'une prime additionnelle à l'IFSE, au titre de son activité informatique. Si M. A... fait valoir que le montant de l'IFSE dont il bénéficie depuis le 1er janvier 2017 ne tient pas compte de son droit au versement de la prime régie par le décret n° 71-343, il n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité de ses allégations, ou à démontrer que le montant d'IFSE qu'il perçoit serait inférieur à celui auquel il a droit. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un collègue se trouvant dans la même situation que M. A... percevrait cette prime.

10. Contrairement à ce que soutient le requérant, le fait que l'illégalité fautive d'une décision individuelle définitive puisse être invoquée de manière incidente dans le cadre d'un recours indemnitaire ne fait pas échec à l'application de la règle de la prescription quadriennale. Il n'est pas contesté que la première demande du requérant tendant au paiement de la créance en cause a été adressée à l'administration le 10 mai 2022. Le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg n'a donc pas commis d'erreur en considérant que le préfet du Haut-Rhin était fondé à opposer à M. A... la prescription quadriennale pour les primes couvrant la période s'étendant du mois de janvier 2006 au mois de décembre 2016.

11. Il résulte de tout ce qui précède que l'existence de la créance dont se prévaut M. A... ne présente pas le caractère non sérieusement contestable mentionné à l'article R. 541-1 du code de justice administrative. Il suit de là qu'il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande de provision.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes sollicitées par M. A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions formulées en ce sens doivent, en conséquence, être rejetées.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée pour information au préfet du Haut-Rhin.

La présidente,

Signé : P. Rousselle

La République mande et ordonne au ministre en charge de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 24NC00205


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Numéro d'arrêt : 24NC00205
Date de la décision : 13/03/2024
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Avocat(s) : BOISSERIE NICOLAS

Origine de la décision
Date de l'import : 17/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-13;24nc00205 ?
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