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29/04/2024 | FRANCE | N°24NC00354

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 29 avril 2024, 24NC00354


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Le 16 juin 2023, M. B... A... a saisi le juge des référés d'une demande tendant au versement d'une provision de 50 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis à l'occasion de son extraction médicale du 13 décembre 2022.



Par une ordonnance n° 2301814 du 2 novembre 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour :



Par une

requête enregistrée le 18 février 2024, M. A..., représenté par Me David, demande à la cour :



1°) d'annuler l'ordonnanc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le 16 juin 2023, M. B... A... a saisi le juge des référés d'une demande tendant au versement d'une provision de 50 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis à l'occasion de son extraction médicale du 13 décembre 2022.

Par une ordonnance n° 2301814 du 2 novembre 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 février 2024, M. A..., représenté par Me David, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 9 janvier du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser, à titre de provision, la somme de 50 000 euros assortie des intérêts au taux légal ainsi que la somme correspondant à la capitalisation de ces intérêts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 600 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a commis une erreur d'appréciation en considérant que sa créance présentait un caractère sérieusement contestable au sens des dispositions de l'article R 541-1 du code de justice administrative.

La requête a été transmise au ministre de la justice qui n'a pas produit d'observations.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er février 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

-le code pénitentiaire ;

-le code de procédure pénale ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction que M. B... A... est incarcéré depuis le 6 décembre 2013. Il prétend avoir subi, le 13 décembre 2022, une fouille intégrale non justifiée à la maison d'arrêt de Nancy-Maxéville avant son extraction médicale. Il met également en cause les moyens de contrainte utilisés lors de cette extraction médicale. Par courrier du 11 janvier 2023 reçu le 6 février 2023, il a formulé une demande d'indemnisation préalable pour un montant de 50 000 euros auprès du ministre de la justice. Par décision du 18 avril 2023, le ministre a expressément rejeté cette demande d'indemnisation préalable. M. A... a alors sollicité le versement d'une provision auprès du tribunal administratif de Nancy sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative. Il forme appel de l'ordonnance par laquelle le juge des référés du Tribunal Administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Sur la demande de provision :

2. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative :

" Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. " Il appartient au juge des référés, pour statuer sur le caractère non sérieusement contestable d'une obligation, de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude.

3. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

4. Aux termes de l'article L. 225-1 du code pénitentiaire : " Hors les cas où les personnes détenues accèdent à l'établissement sans être restées sous la surveillance constante de l'administration pénitentiaire ou des forces de police ou de gendarmerie, les fouilles intégrales des personnes détenues doivent être justifiées par la présomption d'une infraction ou par les risques que leur comportement fait courir à la sécurité des personnes et au maintien du bon ordre dans l'établissement. Leur nature et leur fréquence sont strictement adaptées à ces nécessités et à la personnalité des personnes détenues. Elles peuvent être réalisées de façon systématique lorsque les nécessités de l'ordre public et les contraintes du service public pénitentiaire l'imposent. Dans ce cas, le chef d'établissement doit prendre une décision pour une durée maximale de trois mois renouvelable après un nouvel examen de la situation de la personne détenue. ". Aux termes de l'article L. 225-2 du même code : " Lorsqu'il existe des raisons sérieuses de soupçonner l'introduction au sein de l'établissement pénitentiaire d'objets ou de substances interdits ou constituant une menace pour la sécurité des personnes ou des biens, le chef le chef de l'établissement pénitentiaire peut également ordonner des fouilles de personnes détenues dans des lieux et pour une période de temps déterminés, indépendamment de leur personnalité. Ces fouilles doivent être strictement nécessaires et proportionnées. Elles sont spécialement motivées et font l'objet d'un rapport circonstancié transmis au procureur de la République territorialement compétent et à la direction de l'administration pénitentiaire ". Aux termes de l'article L. 226-1 du code pénitentiaire : " Les conditions dans lesquelles l'administration peut faire usage de menottes ou entraves sont fixées par les dispositions de l'article 803 du code de procédure pénale ". Aux termes de l'article D. 215-5 du même code : " Des précautions doivent être prises en vue d'éviter les évasions et tous autres incidents lors des transfèrements et extractions de personnes détenues. Ces personnes détenues peuvent être soumises, sous la responsabilité du chef d'escorte, au port des menottes ou, s'il y a lieu, des entraves, dans les conditions définies par les dispositions de l'article 803 du code de procédure pénale. Si une personne détenue est considérée comme dangereuse ou doit être surveillée particulièrement, le chef de l'établissement pénitentiaire donne tous les renseignements et avis nécessaires au chef de l'escorte ". L'article 803 du code de procédure pénale précise : " Nul ne peut être soumis au port des menottes ou des entraves que s'il est considéré soit comme dangereux pour autrui ou pour lui-même, soit comme susceptible de tenter de prendre la fuite (...) ".

5. La circulaire ministérielle AP 2004-07 du 18 novembre 2004, publiée sous la référence NOR JUSK0440155C dans le bulletin n° 96 du ministère de la justice d'octobre-décembre 2004 et accessible sur le site Légifrance, est venue préciser les modalités d'organisation des escortes pénitentiaires des détenus faisant l'objet d'une consultation médicale. Outre les moyens de contrainte qui peuvent être envisagés durant les trajets, la composition de l'escorte et son armement, ainsi que les moyens de liaison dont cette dernière doit disposer, cette circulaire définit trois niveaux de surveillance susceptibles d'être envisagés pendant la consultation médicale proprement dite : pour le niveau n° 1, la consultation peut s'effectuer hors la présence du personnel pénitentiaire avec ou sans moyen de contrainte ; pour le niveau n° 2, la consultation se déroule sous la surveillance constante du personnel pénitentiaire mais sans moyen de contrainte ; pour le niveau n° 3, la consultation se déroule sous la surveillance constante du personnel pénitentiaire avec moyen de contrainte. Il résulte également des orientations de cette circulaire que le régime d'escorte en cas d'extraction médicale et en particulier le niveau de surveillance devant être mis en place au cours des consultations, est défini, pour chaque détenu, en prenant en compte notamment les risques d'évasion, l'état de dangerosité de l'intéressé pour lui-même ou pour autrui, et son état de santé.

6. M. A... prétend avoir subi une fouille intégrale avant son extraction médicale le 13 décembre 2022. Toutefois, le ministre de la justice a contesté ce point en première instance et a produit le tableau des fouilles individuelles et non individualisées qui ne mentionne pas que M. A... aurait fait l'objet d'une fouille ce jour-là. Le seul élément produit par M. A... est une attestation du 23 décembre 2022 qu'il a lui-même rédigée et qui n'est corroborée par aucun autre élément. En conséquence, M. A... ne peut être regardé comme établissant avoir subi une fouille intégrale avant son extraction.

7. M. A... fait également valoir qu'il ne présentait pas de signe de dangerosité particulière, et que le régime d'escorte classé niveau 3 qui a été utilisé n'était pas adapté, ce qui constituerait une faute de l'administration de nature à engager sa responsabilité. C'est par une décision du 5 janvier 2022 que le régime d'escorte de M. A... a été classé au niveau 3 compte tenu des risques d'évasion et de l'état de dangerosité de l'intéressé pour lui-même ou pour autrui. En premier lieu, M. A... ne justifie pas avoir contesté cette décision. En second lieu, ce classement est justifié compte tenu notamment de la gravité des faits ayant abouti à l'incarcération de l'intéressé, dont le comportement a, en outre, été sanctionné à de nombreuses reprises depuis sa détention.

8. Il résulte de tout ce qui précède que l'existence de la créance dont se prévaut M. A... ne présente pas le caractère non sérieusement contestable mentionné à l'article R. 541-1 du code de justice administrative. Il suit de là qu'il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande de provision.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes sollicitées par M. A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions formulées en ce sens doivent, en conséquence, être rejetées.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A... et au ministre de la justice.

La présidente,

Signé : P. Rousselle

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme,

La greffière,

Aline Siffert

2

N° 24NC00354


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Numéro d'arrêt : 24NC00354
Date de la décision : 29/04/2024
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Avocat(s) : DAVID

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-29;24nc00354 ?
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