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27/02/2024 | FRANCE | N°22TL21084

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 27 février 2024, 22TL21084


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, sous le n° 2104761, d'annuler l'arrêté du 15 juin 2021 par lequel le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a rejeté la demande de reconnaissance d'imputabilité au service de l'accident survenu le 22 janvier 2019, à titre principal, d'ordonner au préfet de la zone de défense et de sécurité Sud de reconnaître l'imputabilité au service de ses pathologies ayant fait l'objet de sa demande de reconna

issance du 23 janvier 2019 et de prendre en charge à ce titre les soins et arrêts de travai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, sous le n° 2104761, d'annuler l'arrêté du 15 juin 2021 par lequel le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a rejeté la demande de reconnaissance d'imputabilité au service de l'accident survenu le 22 janvier 2019, à titre principal, d'ordonner au préfet de la zone de défense et de sécurité Sud de reconnaître l'imputabilité au service de ses pathologies ayant fait l'objet de sa demande de reconnaissance du 23 janvier 2019 et de prendre en charge à ce titre les soins et arrêts de travail en découlant, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, d'ordonner au préfet de la zone de défense et de sécurité Sud de réexaminer sa demande, sous la même astreinte, de mettre à la charge de l'Etat les dépens et une somme de 3 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°2001298-2104761 du 8 avril 2022, le tribunal administratif de Montpellier a notamment rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 juin 2021.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 mai 2022 et 26 juin 2023, M. B..., représenté par la SELAFA Cabinet Cassel, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°2104761 du 8 avril 2022 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 juin 2021 par lequel le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 22 janvier 2019 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de reconnaître l'imputabilité au service de ses pathologies ayant fait l'objet de sa demande de reconnaissance du 23 janvier 2019 et de prendre en charge à ce titre les soins et arrêts de travail en découlant, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens et une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de refus de reconnaissance de l'imputabilité au service de ses pathologies est entachée d'erreur de qualification juridique des faits et d'erreur manifeste d'appréciation ; son état de santé a été fragilisé par ses conditions de travail, suscitant plusieurs pathologies liées à un syndrome dépressif dont le caractère imputable au service est établi par les éléments produits ;

- le tribunal a lui-même admis un lien entre la pathologie et ses conditions de travail ; un lien direct est établi par les pièces médicales produites entre ses conditions de travail et son syndrome anxiodépressif ;

- il est inexact et inopérant de soutenir qu'il n'a pas sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service d'un trouble anxio-dépressif alors qu'il n'a fait qu'utiliser le formulaire mis à disposition par l'administration et que la commission de réforme a statué sur son dossier et sur le motif d'une décompensation anxio-thymique, stress professionnel intense.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 avril 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud n'a pas commis d'erreur d'appréciation en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident déclaré, l'existence d'un fait accidentel n'étant pas établie ; le requérant n'a jamais expressément sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service d'un trouble anxiodépressif mais d'un accident ; ni la commission de réforme, ni le préfet n'ont été mis à même de se prononcer sur l'imputabilité de cette maladie ;

- il oppose la prescription quadriennale aux éventuels préjudices antérieurs à l'année 2015 ;

- M. B... ne saurait se prévaloir de l'existence d'un harcèlement moral ou de fautes dans la gestion de sa carrière et ne justifie de la réalité d'aucun préjudice ;

- le requérant ne peut se prévaloir de la qualité de fonctionnaire, victime d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle.

Par une ordonnance du 26 juin 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 19 juillet 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., brigadier-chef de la police nationale, affecté au sein de la circonscription de sécurité publique de Narbonne, a présenté, le 24 janvier 2019, une demande de reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident décrit par l'agent comme un malaise survenu le 22 janvier 2019, alors qu'il s'apprêtait à prendre son service. Par un jugement n° 1906578 du 30 juin 2021, le tribunal administratif de Montpellier a annulé pour un vice de procédure la décision du préfet de la zone de défense et de sécurité Sud rejetant implicitement cette demande ainsi que la décision de rejet implicite du recours gracieux de M. B... en date du 9 août 2019. Le préfet a, en exécution de ce jugement, réexaminé la demande de M. B..., après avoir saisi la commission de réforme, et a, par un arrêté du 15 juin 2021, refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident du 22 janvier 2019. Par un jugement du 8 avril 2022, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Montpellier a notamment rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 juin 2021.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 35. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; (...) ".

3. Constitue un accident de service, pour l'application des dispositions précitées, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci.

4. Il ressort des pièces du dossier, notamment du formulaire de sa déclaration d'accident de travail daté et signé le 23 janvier 2019, que M. B... a indiqué comme date et heure de l'accident " 22/01/2019 à 11 H 50 ", avec comme circonstances détaillées, une " accumulation de stress professionnel du fait d'actes managéri[aux] aux conséquences morales violentes, portant atteinte psychologiquement : surcharge de travail, déconsidération au vu du grade, de la fonction et des requêtes exercées, ignorance, mépris, réflexions verbales infondées sur la façon de travailler, atteinte, obstruction au droit de recours administratif, suppression non conforme d'un quota d'heures de repos, le 22 janvier 19 angoisse au moment de prendre son service, pose un titre de congé et se rend chez son médecin ", la nature décrite de l'accident étant une " altération des conditions de travail " et l'élément matériel associé des " violences managériales professionnelles ". Le rapport, daté du 28 mars 2019, du docteur C..., psychiatre qui assure le suivi de M. B... depuis l'année 2015 et signataire du certificat médical du 22 janvier 2019 mentionnant, au titre des constatations effectuées, une décompensation anxio-thymique et un stress professionnel intense, indique que son patient souffre depuis de nombreux mois d'un syndrome anxiodépressif sévère en lien avec une situation de travail complexe et que cet effondrement est " actuellement exacerbé par de nouveaux évènements professionnels stressants, récemment évoqués par le patient et vécus comme particulièrement injustes, excessifs et destructeurs ". Par ailleurs, M. B... indique lui-même dans ses écritures avoir fait l'objet d'un arrêt de travail pour asthénie physique et morale du 8 au 20 novembre 2018 en lien avec le désaveu ressenti après la dénonciation à sa hiérarchie directe de faits de harcèlement sexuel ainsi que d'un traitement antidépresseur à compter du 15 janvier 2019 à la suite du rejet de sa candidature au poste de chef de bureau d'ordre et d'emploi. Dès lors et ainsi que le relève la commission de réforme, dans son avis du 15 avril 2021, eu égard à cet état antérieur et en l'absence d'un fait soudain survenu le 22 janvier 2019 susceptible d'être qualifié d'accident, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation ou d'erreur de qualification juridique des faits que le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident du 22 janvier 2019 déclaré par l'intéressé.

5. Eu égard à l'objet de cet arrêté, qui ne se prononce que sur l'imputabilité de l'accident déclaré du 22 janvier 2019, le requérant ne peut utilement invoquer le caractère imputable au service de son syndrome anxiodépressif.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en litige du 15 juin 2021. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ne peuvent également qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

7. En l'absence de dépens, les conclusions présentées par M. B... sur le fondement de l'article R. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Par ailleurs, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que demande M. B... sur ce fondement.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 6 février 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

M. Teulière, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 février 2024.

Le rapporteur,

T. Teulière

La présidente,

A. Geslan-Demaret

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°22TL21084


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21084
Date de la décision : 27/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-05-04-01 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés. - Congés de maladie.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: M. Thierry TEULIÈRE
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : SELAFA CABINET CASSEL

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-27;22tl21084 ?
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