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04/04/2024 | FRANCE | N°20VE03244

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 5ème chambre, 04 avril 2024, 20VE03244


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La communauté d'agglomération du Val d'Yerres Val-de-Seine (CAVYVS) a demandé au tribunal administratif de Versailles :



- à titre principal, de condamner, in solidum, les sociétés Apia, Cetradiv, Somma, Eqiom Bétons, TPS, Zanier et Compagnie régionale de chauffage plomberie (RSCP) à lui verser la somme de 124 418,59 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la requête et de la capitalisation des intérêt

s, au titre de la réparation des désordres constatés au sein de l'espace jeunesse intercommunal du qua...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La communauté d'agglomération du Val d'Yerres Val-de-Seine (CAVYVS) a demandé au tribunal administratif de Versailles :

- à titre principal, de condamner, in solidum, les sociétés Apia, Cetradiv, Somma, Eqiom Bétons, TPS, Zanier et Compagnie régionale de chauffage plomberie (RSCP) à lui verser la somme de 124 418,59 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la requête et de la capitalisation des intérêts, au titre de la réparation des désordres constatés au sein de l'espace jeunesse intercommunal du quartier de la prairie de l'Oly à Vigneux-sur-Seine, sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs, et de condamner, in solidum, les sociétés Apia, Cetradiv, Somma, Eqiom Bétons, TPS, Zanier et RSCP à lui verser la somme de 51 557 euros TTC, au titre de la réparation des autres dommages subis ;

- à titre subsidiaire, de condamner, au titre de la réparation des désordres constatés au sein de l'espace jeunesse intercommunal du quartier de la prairie de l'Oly à Vigneux-sur-Seine, la société Apia à lui verser la somme de 21 740,32 euros TTC, la société Cetradiv à lui verser la somme de 6 008,17 euros TTC, la société Somma à lui verser la somme de 70 141,77 euros TTC, la société Eqiom Bétons à lui verser la somme de 13 973,71 euros TTC, la société TPS à lui verser une somme de 7 613,21 euros TTC, et la société Zanier à lui verser la somme de 4 941,41 euros TTC, sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs, sommes assorties des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la requête et de la capitalisation des intérêts, de condamner, au titre de la réparation des autres dommages subis, la société Apia à lui verser la somme de 8 573,93 euros TTC, la société Cetradiv à lui verser la somme de 2 655,18 euros TTC, la société Somma à lui verser la somme de 29 284,39 euros TTC, la société Eqiom Bétons à lui verser une somme de 5 490,82 euros TTC, la société TPS à lui verser la somme de 3 366,67 euros TTC et la société Zanier à lui verser la somme de 2 186,01 euros TTC, sommes assorties des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la requête et de la capitalisation des intérêts ;

- à titre infiniment subsidiaire, de condamner la société Somma à lui rembourser le montant des travaux de réfection des murs de façade en béton à hauteur de 41 899,32 euros HT sur le fondement de sa responsabilité contractuelle, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la requête et de la capitalisation des intérêts, de condamner la société Somma à lui verser les sommes correspondant à la part du préjudice pouvant être imputé à la société Cetradiv, soit 6 008,17 euros TTC au titre des désordres affectant l'espace jeunesse intercommunal et 2 655,18 euros TTC pour les autres préjudices ;

- de mettre à la charge in solidum de toutes ces sociétés une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1803793 du 13 octobre 2020, le tribunal administratif de Versailles a :

- condamné la société Somma à verser à la CAVYVS la somme de 50 279,18 euros TTC en réparation des désordres liés à l'esthétique des façades en béton, cette somme devant porter intérêts au taux légal à compter du 22 mai 2018 et capitalisation des intérêts à compter du 22 mai 2019 ;

- condamné in solidum les sociétés Somma et Zannier à verser à la CAVYVS une somme de 4 462,28 euros TTC en réparation des désordres liés aux infiltrations en toiture, cette somme devant porter intérêts au taux légal à compter du 22 mai 2018 et capitalisation des intérêts à compter du 22 mai 2019 ;

- condamné in solidum les sociétés Somma, Apia, TPS et Zanier à verser à la CAVYVS une somme de 25 006,84 euros TTC en réparation des désordres liés aux réseaux d'évacuation, cette somme devant porter intérêts au taux légal à compter du 22 mai 2018 et capitalisation des intérêts à compter du 22 mai 2019 ;

- mis à la charge de la société Somma 65% des frais d'expertise pour un montant de 26 648,68 euros TTC et le surplus à la charge solidaire des sociétés Somma, Apia, TPS et Zanier ;

- mis à la charge des sociétés Somma, Apia, TPS et Zanier le versement à la CAVYVS d'une somme de 1 500 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et à la charge de la CAVYVS le versement aux sociétés Eqiom Bétons et RSCP d'une somme de 500 euros chacune au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

- et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 décembre 2020, la société Zanier, représentée par Me Roy-Mahieu, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il la condamne à réparer les désordres liés aux infiltrations de toiture et aux réseaux d'évacuation ;

2°) de rejeter les conclusions tendant à sa condamnation ;

3°) à titre subsidiaire, de limiter sa part responsabilité à 4,24% ;

4°) de mettre à la charge de la CAVYVS la somme de 1 500 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle ne peut être condamnée solidairement avec la société Somma à réparer les désordres liés aux infiltrations de toiture dès lors qu'elle n'a pas posé l'intégralité des couvertines mais seulement les couvertines en périphérie et que c'est la société Somma qui a achevé les travaux pour les lots gros œuvre et couverture bardage ;

- elle ne peut être condamnée solidairement avec les sociétés Somma, Apia et TPS au versement de la somme de 25 006,84 euros TTC en réparation des désordres liés aux réseaux d'évacuation ;

- sa responsabilité ne peut être retenue ; le partage de responsabilité doit uniquement se faire entre les participants au marché initial, à savoir la société Somma et son sous-traitant Cetradiv et la société Apia, maître d'œuvre ;

- à titre subsidiaire, sa part de responsabilité devra être limitée à 4,24% conformément aux conclusions de l'expert ;

- les désordres invoqués ne relèvent pas de l'article 1792 du code civil.

Par un mémoire, enregistré le 15 avril 2021, la société Compagnie régionale de chauffage plomberie (RSCP), représentée par Me Vaillant, avocat, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge solidaire des sociétés Somma et Zanier la somme de 4 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa responsabilité ne saurait être engagée dès lors qu'elle n'avait pas à sa charge les prestations à l'origine des désordres constatés ; la pose des regards de pieds de chute et des réseaux enterrés intérieurs incombait à la société Somma ; la fermeture des regards de pied de chute incombait à la société Zanier ; l'installation des réseaux enterrés extérieurs incombait à la société TPS ;

- au moment de son intervention pour le raccordement de l'évier et des chutes d'eaux pluviales, les désordres engendrés par les sociétés Somma et TPS étaient irréversibles ; la société Somma a manqué à ses obligations de contrôle de la vacuité de l'attente " eaux usées " ;

- les chutes d'eaux pluviales posées par elle ne présentent aucun dysfonctionnement ou défaut.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 20 avril 2021, le 7 juin 2021 et le 19 septembre 2022, la communauté d'agglomération Val d'Yerres Val-de-Seine (CAVYVS), représentée par Me Sabattier, avocat, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la réparation du préjudice résultant de la défaillance du raccordement de l'évier ;

3°) de rejeter les conclusions de la société Aviva Assurances présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de la société Zanier la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que la société Zanier n'a pas produit la copie du jugement attaqué, en méconnaissance des dispositions combinées des articles R. 421-1 et R. 811-13 du code de justice administrative ;

- la société Zanier n'a émis aucune réserve sur les réseaux d'évacuation des eaux pluviales réalisés par l'entreprise Somma alors qu'elle intervenait pour achever le lot " gros œuvre et bardage " ;

- elle a posé les couvertines qui ont contribué aux désordres ;

- elle a déposé des tampons non étanches et non visitables qui ont contribué aux désordres ;

- la responsabilité de la société Zanier ne saurait être plafonnée à 4,24% du montant de l'indemnité ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que le défaut de raccordement de l'évier n'entrait pas dans le champ de la garantie décennale ;

- la réponse du tribunal administratif sur ce point est insuffisamment motivée ;

- la société Aviva Assurance ayant été mise hors de cause, elle ne saurait obtenir de la CAVYVS le versement de la somme qu'elle demande sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- aucune autorité de la chose jugée ne lie la cour s'agissant du préjudice esthétique des façades dès lors que l'arrêt n° 19VE01478 du 3 février 2022 portait sur les conclusions tendant à la résiliation du marché conclu avec la société Somma et sur le décompte de résiliation.

Par un mémoire, enregistré le 27 avril 2021, M. C... A..., la société C... A... et les Mutuelles du Mans Assurances, représentés par Me Clavier, avocat, demandent à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de la société Zanier la somme de 3 000 euros à leur verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- aucun des désordres constatés n'est en lien avec les missions d'ordonnancement, pilotage et coordination (OPC) ;

- la responsabilité éventuelle de la société les Mutuelles du Mans Assurance ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative.

Par un mémoire, enregistré le 3 mai 2021, la SA Generali IARD, représentée par Me Allemand, avocat, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que c'est à bon droit que le tribunal l'a mise hors de cause dès lors que la juridiction administrative n'est pas compétente pour connaître des recours engagés à l'encontre d'un assureur sur le fondement d'un contrat de droit privé.

Par un mémoire, enregistré le 20 mai 2021, la société Cetradiv, représentée par Me Drappier-Villard, avocat, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire, de limiter sa part de responsabilité à la somme totale de 6 008,17 euros TTC.

Elle soutient que :

- en qualité de sous-traitant, elle n'est pas soumise à la présomption de responsabilité de l'article 1792 du code civil ;

- aucun désordre ne peut lui être imputé.

Par un mémoire, enregistré le 21 mai 2021, la société Mutuelle d'Assurance du Bâtiment et des Travaux publics (SMABTP), représentée par Me Morin, avocat, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de condamner toute partie perdante à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative n'est pas compétente pour connaître des recours engagés à l'encontre d'un assureur sur le fondement d'un contrat de droit privé ;

- aucune demande n'a été formée à son encontre et elle devra être mise hors de cause.

Par un mémoire, enregistré le 28 mai 2021, la société Aviva Assurances, représentée par Me d'Oria, avocat, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de rejeter toute demande formée à son encontre ;

3°) de mettre à la charge solidaire de la société Zanier et la CAVYVS la somme de 5 000 euros à lui verser au titre des frais exposés dans le cadre de la procédure de référé expertise, de la mesure d'expertise, de la procédure en première instance et des présentes.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative n'est pas compétente pour connaître des recours engagés à l'encontre d'un assureur sur le fondement d'un contrat de droit privé ;

- aucune demande n'a été formée à son encontre et elle devra être mise hors de cause.

Par un mémoire, enregistré le 3 juin 2021, la société Qualiconsult et la société Axa France, représentées par la SCP Raffin et Associés, demandent à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de la société Zanier la somme de 3 000 euros à leur verser à chacune sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que c'est à bon droit que la société Qualiconsult a été mise hors de cause dès lors qu'aucun des désordres constatés n'est susceptible de relever de ses missions.

Par un mémoire, enregistré le 8 juin 2021, la SMACL Assurances, représentée par Me Corneloup, avocat, demande à la cour :

1°) de la mettre hors de cause ;

2°) de réformer le point 8 du jugement attaqué.

Elle soutient qu'elle doit être mise hors de cause dès lors qu'aucune demande n'est formée à son encontre, contrairement à ce qui est jugé au point 8 du jugement attaqué.

Par des mémoires et des pièces, enregistrés le 29 juin 2021, le 21 mai 2022, le 25 mai 2022 et le 19 septembre 2022, la société Somma, représentée par Me Godard, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement attaqué ;

2°) de rejeter les conclusions présentées à son encontre ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner les sociétés Eqiom Bétons, Apia, Zanier, TPS et RSCP à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

4°) de mettre à la charge de toute partie perdante la somme de 1 200 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la cour ayant déjà statué, par l'arrêt n° 19VE01479 du 3 février 2022, sur un litige opposant la CAVYVS et la société exposante au sujet de la réalisation de l'espace jeunesse dans le quartier de la prairie de l'Oly, l'autorité de la chose jugée fait obstacle à ce que la cour puisse de nouveau être saisie de ce litige qui oppose les mêmes parties et porte sur la même cause ;

- la société Eqiom Bétons doit être regardée comme un fabricant et non un fournisseur dès lors qu'elle a eu recours à un type de béton qui relève de sa marque propriétaire dont le CCTP décrivait précisément les caractéristiques techniques sans qu'aucune substitution ne soit ainsi possible ; le jugement attaqué est entaché d'une erreur d'appréciation sur ce point ;

- le béton utilisé par la société Eqiom Bétons ne pouvait être utilisé conformément aux stipulations du CCTP ; par suite, la société exposante, qui a alerté sur ce sujet, ne pouvait voir sa responsabilité engagée à ce titre ;

- sa responsabilité contractuelle ne saurait être engagée au titre du défaut d'homogénéité des façades dès lors que le CCTP ne décrit pas quel devrait être le rendu esthétique de ces façades ; le béton livré n'était pas conforme aux prescriptions du CCTP, ce qui a contribué au rendu hétérogène de la façade ; elle a alerté le maître d'œuvre des difficultés résultant de la fermeture de la centrale à béton et de la poursuite de la production par une autre centrale ; le défaut d'homogénéité des façades est également imputable à une erreur de la maîtrise d'œuvre ;

- elle ne saurait être tenue pour responsable du sous-dimensionnement des réseaux dès lors que le CCTP ne prévoyait aucun diamètre particulier ; la norme DTU a été respectée ;

- la responsabilité de la société RSCP doit être engagée s'agissant du raccordement de l'évier dès lors que le fait de procéder à un raccordement sans réaliser les essais correspondants est une faute de nature à engager sa responsabilité contractuelle ; la société exposante n'est pas intervenue dans la pose de l'évier, ni dans la connexion au réseau extérieur de la ville incombant à la société TPS ; l'entreprise Zanier devait s'assurer de la réalisation de ces connexions au réseau ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a retenu la responsabilité de la société Cetradiv au titre des infiltrations en toiture dès lors que la société Zanier est réintervenue sur la toiture et a ainsi modifié la couverture initialement réalisée par Cetradiv ; seule la pose des couvertines, à la charge de la société Zanier, est à l'origine de ces désordres ;

- les malfaçons esthétiques liées au béton désactivé sont couvertes par l'autorité de la chose jugée ; à titre subsidiaire, elles n'entrent pas dans le champ de la garantie décennale, ni dans le champ de la garantie contractuelle ; à titre subsidiaire, la responsabilité de la société exposante devrait être partagée avec la société Eqiom Bétons et le maître d'œuvre.

Par un mémoire, enregistré le 7 octobre 2021, la société Apia Architecture et la Mutuelle des Architectes français, représentées par Me de Bazelaire de Lesseux, avocat, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a retenu la responsabilité de la société Apia et prononcé une condamnation à son encontre ;

2°) de rejeter toute demande de condamnation formée à son encontre ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la société Somma à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre et de confirmer le jugement attaqué ;

4°) en tout état de cause, de mettre à la charge de toute partie perdante la somme de 5 000 euros à verser à la société Apia sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le tribunal administratif ne justifie pas du principe de responsabilité des intervenants ;

- le maître d'œuvre n'est débiteur que d'une obligation de moyens ; il n'est pas tenu de surveiller le chantier en permanence ;

- la société Somma n'a jamais fait part de difficultés dans la réalisation du voile béton ;

- la cause des désordres procède de défauts d'exécution ponctuels commis par l'entreprise ;

- les débordements de chéneau sont liés à un sous-dimensionnement des réseaux d'évacuation enterrés qui résulte d'un défaut d'exécution de la part de la société Somma.

Par un mémoire, enregistré le 5 mai 2023, la société Eqiom Bétons, représentée par Me Hecquet, avocat, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de la société Zanier la somme de 7 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- la société Zanier ne forme aucune demande de condamnation à son encontre ;

- c'est à bon droit que le tribunal administratif a estimé qu'elle n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité et qu'elle n'a pas la qualité de constructeur au sens de l'article 1792-4 du code civil.

Par un courrier du 7 mars 2024, les parties ont été informées, sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible, de relever d'office le moyen d'ordre public tiré de ce que la SMACL ne justifie pas d'un intérêt à faire appel d'un jugement attaqué en tant qu'il ne l'a pas expressément mise hors de cause dès lors qu'elle n'a fait l'objet d'aucune condamnation en première instance.

Par ordonnance du 10 mai 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 31 mai 2023.

Un mémoire présenté par les sociétés Qualiconsult et Axa France a été enregistré le 19 mars 2024 postérieurement à la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Houllier,

- les conclusions de Mme Janicot, rapporteure publique,

- et les observations de Me Godard, pour la société Somma, de Me Kouakou, substituant Me Vaillant, pour la société RSCP, de Me Tupigny, substituant Me Chanteloup, pour la SMACL et de Me Weickert, substituant Me Hecquet, pour Holcim Béton France.

Considérant ce qui suit :

1. La société Zanier, qui est intervenue dans le cadre de la construction de l'espace jeunesse intercommunal du quartier de la prairie de l'OLY à Vigneux-sur-Seine, fait appel du jugement du 13 octobre 2020 en tant que le tribunal administratif de Versailles l'a condamnée, sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs, à verser à la communauté d'agglomération du Val d'Yerres Val de Seine (CAVYVS), solidairement avec la société Somma, la somme de 4 462,28 euros TTC en réparation des désordres liés aux infiltrations en toiture affectant le bâtiment et, solidairement avec les sociétés Apia, TPS et Somma, la somme de 25 006,84 euros TTC, en réparation des désordres liés aux réseaux d'évacuation.

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par la CAVYVS :

2. Contrairement à ce qui est soutenu par la CAVYVS, la société Zanier a joint à sa requête une copie du jugement attaqué. Par suite, la fin de non-recevoir opposée pour ce motif doit être rejetée.

En ce qui concerne le fond :

3. Il résulte des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans. Le constructeur dont la responsabilité est recherchée sur ce fondement ne peut en être exonéré, outre les cas de force majeure et de faute du maître d'ouvrage, que lorsque, eu égard aux missions qui lui étaient confiées, il n'apparaît pas que les désordres lui soient en quelque manière imputables.

S'agissant du caractère décennal des désordres :

4. Il ressort des points 19 à 20 du jugement attaqué que le tribunal administratif a retenu le caractère décennal des désordres affectant la toiture en raison d'infiltrations et affectant les réseaux d'évacuation des eaux pluviales en raison de leur sous-dimensionnement et de la couverture des regards de visite de ces réseaux.

5. Si la société Zanier soutient que les désordres évoqués ne revêtent pas un caractère décennal, elle n'apporte aucune précision au soutien de ce moyen alors qu'il résulte du rapport d'expertise, d'une part, que le défaut de bande d'égout est de nature à favoriser des remontées par capillarité sous le bas acier de la toiture et, à terme, à compromettre la stabilité du bâtiment et, d'autre part, que les désordres affectant les réseaux d'évacuation sont susceptibles de créer un risque d'écoulement en terre-plein au droit des fondations de nature à porter atteinte à la stabilité de l'ouvrage. Par suite, ce moyen doit être écarté.

S'agissant de l'imputabilité des désordres à la société requérante :

6. En premier lieu, la société Zanier soutient qu'elle ne saurait voir sa responsabilité engagée au titre des travaux réalisés en toiture dès lors qu'elle n'a fait qu'achever le marché initialement conclu avec la société Somma et n'a ainsi procédé qu'à la pose des couvertines. Toutefois, il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport de l'expert que si l'absence de bande d'égout est imputable à la société Cetradiv, sous-traitant de la société Somma, la pose des couvertines a également contribué aux désordres constatés. Par suite, la société Zanier n'est pas fondée à soutenir que les désordres consistant en des infiltrations en toiture ne lui seraient aucunement imputables.

7. En second lieu, la société Zanier soutient qu'elle ne saurait voir sa responsabilité engagée au titre des réseaux d'évacuation dès lors qu'elle n'est pas à l'origine du sous-dimensionnement de ceux-ci. Toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que cette société, alors même qu'elle ne pouvait ignorer la présence des réseaux, a posé des tampons étanches sur les regards intérieurs de visite de ces réseaux, qui sont de ce fait devenus inaccessibles pour leur entretien, ce qui a eu pour effet d'aggraver les désordres résultant du sous-dimensionnement dès lors que, lors d'engorgements, " le refoulement sous-revêtement avec écoulement " se fait au droit des fondations. Dans ces conditions, eu égard à la teneur de l'argumentation de la société Zanier, ce moyen doit être écarté.

S'agissant des appels en garantie formés par la requérante :

8. La société Zanier soutient, à titre subsidiaire, que sa responsabilité " ne saurait excéder 4,24 % telle que retenue par l'expert ". Si elle peut ainsi être regardée comme demandant à être garantie par les autres constructeurs de la condamnation in solidum à hauteur de 95,76%, elle n'apporte aucune précision permettant d'apprécier la part de responsabilité des autres entreprises, qu'elle ne désigne au demeurant pas. Par suite, ces conclusions subsidiaires doivent être rejetées.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Zanier n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Sur l'appel incident de la CAVYVS :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

10. L'article L. 9 du code de justice administrative dispose que : " Les jugements sont motivés ". Le juge doit ainsi se prononcer, par une motivation suffisante au regard de la teneur de l'argumentation qui lui est soumise, sur tous les moyens expressément soulevés par les parties, à l'exception de ceux qui, quel que soit leur bien-fondé, seraient insusceptibles de conduire à l'adoption d'une solution différente de celle qu'il retient.

11. Si la CAVYVS soutient que les juges de première instance ont insuffisamment motivé leur réponse au moyen tiré du caractère décennal des désordres affectant le raccordement de l'évier au réseau, il ressort cependant du point 21 du jugement attaqué que le tribunal administratif, qui pouvait adapter sa réponse à la teneur de l'argumentation qui lui était soumise, a suffisamment répondu à ce moyen. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement de ce chef doit être écarté.

En ce qui concerne le caractère décennal des désordres :

12. La CAVYVS soutient que le défaut de raccordement de l'évier au réseau revêt un caractère décennal. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que ce désordre serait de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ou à en compromettre la solidité. En particulier, la circonstance que l'expert souligne l'importance de prévoir, pour le futur, une ventilation naturelle du réseau pour " éviter le dégazage nauséabond et dangereux d'hydrogène sulfuré dans les locaux intérieurs " ne permet pas de conclure que de telles émanations seraient une hypothèse plausible à court terme, ni qu'elles seraient, le cas échéant, la conséquence du défaut de raccordement de l'évier. Par suite la CAVYVS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a écarté le caractère décennal de ce désordre.

13. Il résulte de ce qui précède que la CAVYVS n'est pas fondée, par la voie de l'appel incident, à demander la réformation du jugement attaqué.

Sur l'appel incident de la société Somma :

14. La société Somma appelle en garantie la société Zanier au titre des condamnations prononcées à son encontre. Toutefois, en se bornant à renvoyer à un tableau proposant une répartition des responsabilités au demeurant distincte de celle de l'expert sans exposer clairement en quoi les autres constructeurs, dont la société Zanier, seraient responsables des désordres litigieux, elle n'apporte pas de précisions suffisantes permettant d'apprécier le bien-fondé de ses conclusions. Par suite, ce moyen doit être écarté.

Sur les appels provoqués :

15. Les conclusions des sociétés Apia et Somma dirigées contre la CAVYVS et les autres constructeurs, qui ont été provoquées par l'appel de la société Zanier et présentées après l'expiration du délai d'appel, en vue d'obtenir la décharge ou la réduction des condamnations prononcées à leur encontre sur le fondement de la garantie décennale ne seraient recevables qu'au cas où la décision prise sur l'appel principal aurait pour effet d'aggraver les obligations mises par le jugement attaqué à la charge de ces deux sociétés. Dès lors, les conclusions présentées par ces deux sociétés tendant à l'annulation du jugement attaqué et à la réduction de leur condamnation ne sont pas recevables et doivent être rejetées.

16. Il en va de même, pour le même motif, des conclusions d'appel provoqué formées par la CAVYVS à l'encontre des intervenants autres que la société Zanier et par la société Apia à l'encontre de la société Somma.

Sur les conclusions de la SMACL :

17. Il ressort de l'examen du jugement attaqué que la SMACL, à l'encontre de laquelle aucune conclusion n'avait été formée, n'a fait l'objet d'aucune condamnation en première instance. Par suite, elle est sans intérêt à faire appel du jugement en tant qu'il ne l'a pas expressément mise hors de cause.

Sur les frais de justice :

18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

19. La présente instance n'ayant donné lieu à aucun dépens, les conclusions présentées sur le fondement de l'article R. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Zanier est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions des autres parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Zanier, à la communauté d'agglomération du Val d'Yerres Val de Seine (CAVYVS), à la société Somma, à la SMACL, à la société Générali IARD, à la société Apia Architecture, à la société MAF, à la société Abeille IARD et Santé anciennement Aviva Assurances, au cabinet Vega, au bureau d'études techniques CPIA, à M. B..., à la societé Mutuelle d'assurances du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), au cabinet Equad Guillermain, à M. A..., à la société MMA, à la société ARTP, à la société Qualiconsult, à la société AXA, à la société SARETEC, au cabinet CET PG Expertise, à la société Cetradiv, au cabinet d'expertise RC, à la société Compagnie régionale de chauffage plomberie (RSCP), à la société HD Experts, au cabinet Eurisk, à la société Phare, à la société TPS, à la société Eqiom Bétons et à la Mutuelle des architectes français.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Signerin-Icre, présidente,

M. Camenen, président-assesseur,

Mme Houllier, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 avril 2024.

La rapporteure,

S. HOULLIERLa présidente,

C. SIGNERIN-ICRE

La greffière,

T. RENÉ-LOUIS-ARTHUR

La République mande et ordonne au préfet de l'Essonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 20VE03244


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE03244
Date de la décision : 04/04/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04 Marchés et contrats administratifs. - Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. - Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. - Responsabilité décennale.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: Mme Sarah HOULLIER
Rapporteur public ?: Mme JANICOT
Avocat(s) : ALLEMAND

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-04;20ve03244 ?
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