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23/07/2021 | LUXEMBOURG | N°46236

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 23 juillet 2021, 46236


Tribunal administratif N° 46236 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 15 juillet 2021 Audience publique du 23 juillet 2021 Requête en institution d’un sursis à exécution introduite par la société à responsabilité limitée …, …, et Monsieur …, …, par rapport à un arrêté du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Economie sociale et solidaire en matière d’établissements classés

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 46236 du rôle et déposÃ

©e le 15 juillet 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Steve Helminger, avocat à la Cour, in...

Tribunal administratif N° 46236 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 15 juillet 2021 Audience publique du 23 juillet 2021 Requête en institution d’un sursis à exécution introduite par la société à responsabilité limitée …, …, et Monsieur …, …, par rapport à un arrêté du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Economie sociale et solidaire en matière d’établissements classés

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 46236 du rôle et déposée le 15 juillet 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Steve Helminger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de :

(1) la société à responsabilité limitée …, établie et ayant son siège social à …, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son ou ses gérants actuellement en fonction, (2) Monsieur …, demeurant à …, tendant à voir ordonner qu’il soit sursis à l’exécution d’un arrêté du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Economie sociale et solidaire du 15 juin 2021 ayant déclaré caduque l’autorisation d’exploitation … du 6 juillet 2017 pour la partie entière du parcours « … » du jardin d’escalade « … » à …, cet acte étant encore attaqué au fond par une requête en réformation, sinon en annulation introduite le 15 juillet 2021, portant le numéro 46235 du rôle ;

Vu les articles 11 et 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;

Maître Adrien Kariger, pour les parties requérantes, ainsi que Madame le délégué du gouvernement Hélène Massard entendus en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 20 juillet 2021.

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En date du 15 juin 2021, le ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Economie sociale et solidaire, ci-après dénommé le « ministre », fit parvenir aux requérants l’arrêté ayant la teneur suivante :

« (…) Vu la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés ;

Vu le règlement grand-ducal modifié du 10 mai 2012 portant nouvelles nomenclature et classification des établissements classés ;

1 Vu l'autorisation d'exploitation ministérielle … du 6 juillet 2017 autorisant Monsieur … à exploiter un jardin d'escalade au « … » à …, numéro cadastral … ;

Vu le contrôle du jardin d'escalade «…» situé à …, effectué en date du 8 juin 2021 par l'inspecteur en chef du travail … et des inspecteurs principaux du travail … et … de l'Inspection du travail et des mines ;

Vu que suite à la rupture et à la chute d'une partie de la couronne de l'arbre nr. 13 en date du 4 juin 2021, une partie du parcours « … » a été partiellement détruit ;

Vu le rapport d'expertise du 8 juillet 2020 qui a été établi par le cabinet d'expertise …, agréé par le conseil national de l'expertise foncière agricole et forestière (France), relatif au suivi des arbres du parcours acrobatique en hauteur du « … » ;

Que selon le rapport d'expertise précité, l'expert forestier … a constaté lors du contrôle du 2 juillet 2020 une évolution négative de l'arbre nr. 13, qu'il a répété lors du suivi de l'année 2020 son constat déjà formulé lors du suivi en 2019, à savoir que l'arbre nr. 13 serait à « alléger en haubanage traditionnel », que depuis 2019 l'arbre nr. 13 présente « une cavité importante à une hauteur de 6 mètres » ainsi qu'un « trou de pic dans charpentière principale », que l'arbre nr. 13 a été classé en catégorie B, ce qui signifie qu'il existe un risque apparaissant existant de 10% à 40% de chute non soumis aux aléas climatiques, que l'arbre nr. 13 nécessite une surveillance régulière, que l'arbre nr. 13 aurait dû être soumis à une haute surveillance depuis l'année 2018, qu'il nécessite un suivi particulier avec si possible deux contrôles par an et qu'il nécessite des travaux (opérations de gestions et de mise en sécurité :

nettoyage, tailles, haubanages) depuis le constat de l'expert en 2019 ;

Considérant qu'en raison des informations reprises dans le rapport d'expertise du 8 juillet 2020 précité et du constat de la rupture et chute de la couronne de l'arbre nr. 13 du parcours « … », il est raisonnable de considérer que l'exploitation du parcours en question représente un danger pour la sécurité du public ainsi que la sécurité et la santé des salariés conformément à l'article 1er de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés;

Vu l'article 20, de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés qui dispose que :

« Art 20 Caducité de l'autorisation Une nouvelle autorisation est nécessaire 1. lorsque l'établissement n'a pas été mis en activité dans le délai fixé par l'arrêté d'autorisation;

2. lorsqu'il a chômé pendant trois années consécutives;

3. lorsqu'il a été détruit ou mis hors d'usage en tout ou en partie par un accident quelconque. Si une partie seulement de l'établissement a été détruite ou mise hors d'usage, la nouvelle demande d'autorisation est limitée à la partie en question. […].

2 Considérant que suite à la rupture et la chute de la couronne de l'arbre nr. 13 le parcours « … » a été partiellement détruit, ce qui implique que le parcours a été mis hors d'usage ;

ARRÊTE:

Article unique : L'autorisation d'exploitation … du 6 juillet 2017 est caduque pour la partie entière du parcours « … » du jardin d'escalade «…» à …, numéro cadastral …, conformément à l'article 20, paragraphe 3, de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés. (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 15 juillet 2021, inscrite sous le numéro 46235 du rôle, la société à responsabilité limitée …, ci-après désignée par « la société … », et Monsieur … ont fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de l’arrêté ministériel précité du 15 juin 2021. Par requête séparée déposée également en date du 15 juillet 2021 au greffe du tribunal administratif, inscrite sous le numéro 46236 du rôle, la société … et Monsieur … ont encore fait introduire une requête tendant à l’institution d’un sursis à exécution de l’arrêté ministériel précité du 15 juin 2021, en attendant la solution du recours au fond.

A l’appui de la requête sous examen, les parties requérantes exposent tout d’abord qu’en date du 4 juin 2021 un épisode orageux marqué par de fortes rafales de vent aurait frappé la commune de … en touchant notamment le … et son jardin d’escalade en y causant la chute de nombreuses branches d’arbres et notamment la chute d'une des charpentières de l'arbre numéro 13 du parcours « … » du jardin d'escalade. Le lendemain, Monsieur … aurait procédé à la découpe et à l'enlèvement de la branche tout en cherchant à joindre l'expert forestier chargé de contrôler épisodiquement la qualité des arbres mais qui n’aurait pu être joint qu’en date du 9 juin 2021.

Le 8 juin 2021, des agents de l'Inspection du Travail et des Mines, ci-après désignée par « ITM », se seraient déplacés sur les lieux afin de constater la situation au …. En dépit de l’information donnée par Monsieur … aux agents de l’ITM selon laquelle le parc serait fermé dans l’attente du feu vert de l'expert forestier et de la société de contrôle des installations du parc (…) pour reprendre l'exploitation du parcours, les agents de l’ITM auraient estimé que l'orage en cause constituerait un accident quelconque ayant mis hors d'usage une partie de l'établissement.

Le même jour, Monsieur … aurait sollicité auprès de l'ITM une permission pour ouvrir au moins les 7 premières plateformes du parcours « … », qui seraient utilisables indépendamment de la plateforme numéro 13, afin de pouvoir honorer les plus de 150 réservations d'écoles prévues pour ce parcours, demande qui n’aurait connu aucune réponse.

Les requérants observent que ce serait à tort que le ministre aurait retenu dans son arrêté qu’il y aurait eu rupture de la couronne de l’arbre numéro 13, alors que l’expert … aurait retenu dans son rapport que, d’un côté, seule l’une des charpentières de l’arbre aurait été détruite et, d’un autre côté, que l’arbre ne représenterait aucun danger et qu’il nécessiterait seulement un élagage afin de le rééquilibrer.

Les parties requérantes font valoir qu'en l'absence d'un sursis à exécution de la décision en cause, celle-ci leur causerait un préjudice grave et définitif.

3 Ainsi, la décision déférée amputerait le jardin d'escalade d'un de ses parcours les plus importants pendant le délai d’instruction de la nouvelle demande qu’ils évaluent à 6 mois, voire à plus d’un an s’ils devraient attendre un jugement au fond.

La décision déférée aurait enlevé une source de revenu importante pour l’exploitation en limitant abusivement l’offre de loisir.

Le préjudice serait accru en raison du contexte sanitaire et économique dans lequel l'arrêté ministériel aurait été adopté et par le fait qu'il serait intervenu juste avant les congés scolaires constituant la période de haute saison pour le jardin d'escalade et ce a fortiori après une période de crise sanitaire particulièrement difficile pour le secteur.

Ainsi, alors que l'été 2021 devait être une période de relance pour le parc en permettant d'exploiter son plein potentiel, cette relance aurait été gâchée par la prise de l'acte administratif que les parties requérantes estiment être disproportionné, alors qu’il mènerait à la fermeture pendant de nombreux mois d'un des parcours les plus importants de l'établissement pour être utilisé par de nombreux écoliers en fin d'année scolaire ou réservé pour des stages pendant les vacances scolaires.

Les parties requérantes font valoir dans ce contexte qu’entre les mois de juillet et août 2019 et juillet et août 2020, le parc aurait connu une augmentation de son affluence respectivement de plus de 70% et de plus de 150%, de sorte qu’elles auraient été en droit d’attendre qu’un tel élan se répéterait cette année en espérant voir une relance à hauteur de 125% pour les mois de juin, juillet et août 2021. La décision déférée aurait étouffé cette relance et la reprise des activités à plein régime ne serait plus possible. Concrètement, les parties requérantes devraient faire face à des diminutions du nombre d'heures initialement réservées du fait de la fermeture du parcours vert, voire à des annulations de réservations.

Les parties requérantes quantifient leur préjudice du fait des réductions et annulations de réservation à …- euros, mais donnent à considérer qu’elles ne sauraient évaluer leur manque à gagner du fait de la non réservation par les clients, la perte de clientèle ainsi que l’atteinte à leur réputation, préjudices qui ne seraient pas quantifiables et dès lors irréparables. Dans ce contexte, elles précisent que les écoles et les stages constitueraient une des principales sources de revenu du parc, que les requérantes évaluent à 30% du chiffre d'affaires. Le fait qu’une partie de la clientèle s’orienterait vers d’autres parcs de la région aurait des conséquences importantes pour la pérennité économique du jardin d'escalade.

Le préjudice pour le parc se verrait encore augmenté par les différentes dépenses auxquelles devraient faire face les parties requérantes afin de rendre leur installation conforme aux différentes obligations de l'ITM et notamment une dépense de près de 11.000.- euros pour la création d'une formation afférente à l'accrobranche, qui n'existerait pas au Luxembourg. A cet égard, les parties requérantes donnent à considérer que si de telles obligations se justifieraient pour assurer la sécurité optimale des visiteurs du parc, il n’en resterait pas moins qu’elles devraient pouvoir rentabiliser leurs investissements pendant les périodes de haute saison en permettant aux visiteurs d'en profiter, ce que la décision déférée empêcherait.

Le préjudice grave et définitif consisterait également dans l’atteinte à leur liberté de commerce et dans l’empêchement de faire prospérer leur exploitation.

4 Quant au caractère sérieux des moyens invoqués, les parties requérantes invoquent à l’appui de leur requête au fond, en substance, (i) l’incompétence du directeur de l’ITM de prendre la décision déférée à défaut de mandat spécial de la part du ministre envers le directeur de l’ITM, (ii) une violation du principe de la liberté de commerce, (iii) l’inapplicabilité de l’article 20 de la loi du 10 juin 1999 relative aux établissements classés, ci-après désignée par « la loi du 10 juin 1999 », (iv) le caractère disproportionné de la mesure prise et finalement (v) une violation de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l'Etat et des communes, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 ». Les parties requérantes précisent plus particulièrement que l’arrêté ministériel du 15 juin 2021 aurait été pris sur base d’une fausse prémisse, alors qu’il n’y aurait pas eu une chute d’une partie de la couronne de l’arbre numéro 13 et que le ministre aurait dû prendre une décision moins attentatoire à la liberté de commerce tout en permettant d’atteindre les mêmes objectifs.

Les parties requérantes concluent dès lors au caractère sérieux de leurs moyens développés au fond.

A titre subsidiaire, les parties requérantes demandent sur base de l'article 12 de la loi de 1999 que soient ordonnées toutes mesures de sauvegarde permettant de préserver leurs intérêts et notamment de suspendre la caducité de l'autorisation d'exploitation, respectivement en les limitant au seul arbre numéro 13 et non à l'intégralité du parcours, dont une certaine partie et notamment les 7 premières plateformes seraient utilisables indépendamment de l’arbre numéro 13.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours au motif qu’aucune des conditions légales ne serait remplie en cause, en contestant tant le sérieux des moyens que l’existence d’un préjudice grave et définitif.

En vertu de l’article 11 (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », un sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux.

En ce qui concerne ensuite la mesure de sauvegarde sollicitée à titre subsidiaire, il échet encore de rappeler qu’en vertu de l’article 12 de la loi du 21 juin 1999, le président du tribunal administratif ou le magistrat le remplaçant peut au provisoire ordonner toutes les mesures nécessaires afin de sauvegarder les intérêts des parties ou des personnes qui ont intérêt à la solution de l’affaire, à l’exclusion des mesures ayant pour objet des droits civils.

Sous peine de vider de sa substance l’article 11 de la même loi, qui prévoit que le sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux, il y a lieu d’admettre que l’institution d’une mesure de sauvegarde est soumise aux mêmes conditions concernant les caractères du préjudice et des moyens invoqués à l’appui du recours. Admettre le contraire reviendrait en effet à autoriser le sursis à exécution d’une décision administrative alors même que les conditions posées par l’article 11 ne seraient pas remplies, le libellé de l’article 12 n’excluant pas, a priori, un tel sursis qui peut à son tour être compris comme mesure de sauvegarde. Or, comme relevé ci-dessus, en vertu de l’article 11, 5 (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux.

En ce qui concerne la condition d’un préjudice grave et définitif, il convient de rappeler qu’un préjudice est grave au sens de l’article 11 de la loi du 21 juin 1999 lorsqu’il dépasse par sa nature ou son importance les gênes et les sacrifices courants qu’impose la vie en société et doit dès lors être considéré comme une violation intolérable de l’égalité des citoyens devant les charges publiques.

Un préjudice de nature essentiellement pécuniaire n'est pas, en soi, grave et difficilement réparable, étant donné qu'il peut être réparé à la suite d'une éventuelle décision judiciaire d'annulation par des dommages et intérêts. Il ne saurait être dérogé à cette règle que si le demandeur peut établir qu'il risque de subir un préjudice matériel irréversible ou difficilement réparable1.

La preuve de la gravité du préjudice implique en principe que le requérant donne concrètement des indications concernant la nature et l’ampleur du préjudice prévu, et qui démontrent le caractère difficilement réparable du préjudice2.

Ainsi, la seule allégation d’un préjudice, non autrement précisé et étayé, est insuffisante, l’exposé du préjudice grave et définitif ne pouvant se limiter à un exposé théorique, se cantonner à la seule évocation de précédents ou encore consister en des considérations générales.

Le préjudice est définitif lorsque le succès de la demande présentée au fond ne permet pas ou ne permet que difficilement un rétablissement de la situation antérieure à la prise de l’acte illégal, la seule réparation par équivalent du dommage qui se manifeste postérieurement à son annulation ou sa réformation ne pouvant être considérée à cet égard comme empêchant la réalisation d’un préjudice définitif. Pour l’appréciation du caractère définitif du dommage, il n’y a pas lieu de prendre en considération le dommage subi pendant l’application de l’acte illégal et avant son annulation ou sa réformation. Admettre le contraire reviendrait à remettre en question le principe du caractère immédiatement exécutoire des actes administratifs, car avant l’intervention du juge administratif, tout acte administratif illégal cause en principe un préjudice qui, en règle générale, peut être réparé ex post par l’allocation de dommages-intérêts.

Ce n’est que si l’illégalité présumée cause un dommage irréversible dans le sens qu’une réparation en nature, pour l’avenir, ne sera pas possible, que le préjudice revêt le caractère définitif tel que prévu par l’article 11 de la loi du 21 juin 1999.

Or, en l’espèce, les parties requérantes affirment que l’exécution de la décision risquerait de leur causer un préjudice grave et définitif, résultant, d’une part, d’une perte financière et, d’autre part, d’un risque réel d'atteinte définitive à leur réputation.

La soussignée constate d’abord que Monsieur … s’est vu accorder une autorisation pour l’exploitation d’un jardin d’escalade au lieu-dit « … » à … en date du 6 juillet 2017, qui fut suspendue en date du 5 novembre 2020, alors que plusieurs conditions d’exploitation n’auraient 1 Trib. adm. prés. 31 juillet 2002, n° 15190 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Procédure contentieuse, n° 634.

2 Trib. adm. prés. 10 juillet 2013, n° 32820, Pas. adm. 2020, V° Procédure contentieuse, n° 626 et les autres références y citées.

6 pas été respectées. Cette suspension a été levée sous plusieurs conditions en date du 20 mai 2021. La soussignée relève encore que la décision de caducité prise en date du 15 juin 2021 ne vise que le parcours « … », de sorte qu’un seul des neuf parcours est actuellement fermé aux utilisateurs du parc d’escalade, qui peut continuer d’accueillir des clients pour les huit autres parcours.

Afin d’établir la réalité de leur préjudice financier, les parties requérantes versent un listing des entrées des années 2019 et 2020 ainsi qu’un tableau relevant, selon les parties requérantes, les diminutions et annulations des réservations causées par la fermeture du parcours « … » depuis juin 2021.

Quant au prétendu manque à gagner invoqué par les parties requérantes, la soussignée constate que s’il est vrai que, selon le listing des entrées, le parc d’escalade semble avoir reçu plus de clients en 2020 qu’en 2019, il n’en reste pas moins, qu’à défaut de chiffres concernant l’année 2021, la soussignée ne saurait en tirer une quelconque conclusion quant à une potentielle évolution du chiffre d’affaires des parties requérantes pour l’année 2021, d’autant plus que l’exploitation d’un parc d’escalade dépend en large partie des conditions météorologiques, qui constituent un facteur non prévisible.

Selon le fichier relevant prétendument les annulations et diminutions d’heures en raison de la fermeture du parcours « … » et pour autant que ledit fichier concerne effectivement l’année 2021 et que l’indication de l’année 2020 sur ledit document relève d’une erreur d’encodage, tel qu’affirmé par le litismandataire des parties requérantes lors de l’audience des plaidoiries, il y a eu depuis le 11 juin 2021 plusieurs annulations de réservations, respectivement de réductions d’heures initialement prévues par les clients. Or, à défaut d’autres éléments, tels que notamment des données de comparaison quant au nombre d’annulation en temps normaux, respectivement d’indications quant aux raisons ayant conduit les clients à annuler leur réservation, ce document ne saurait convaincre la soussignée, dans la mesure où plusieurs autres raisons peuvent amener des clients à ne pas honorer leur réservation, tel que notamment de mauvaises conditions météorologiques, de sorte que les parties requérantes n’établissent pas que le préjudice qu’elles invoquent trouvent sa cause dans l’exécution de la décision déférée, étant encore précisé qu’un préjudice qui ne résulte pas uniquement de l’acte attaqué ne tombe pas sous l’application des articles 11 et 18 de la loi du 21 juin 19993. A cet égard, la soussignée est encore amenée à rappeler que les huit autres parcours continuent à pouvoir être utilisés par les clients du parc, de sorte que, même en admettant que le parcours « … » soit le plus populaire, les parties requérantes ne sauraient sérieusement conclure à une « amputation » d’une source de revenu, respectivement à une atteinte au principe de liberté de commerce, alors qu’elles conservent près de 90%, partant la part majeure, de leur offre. Dans ce même contexte, la soussignée est amenée à retenir que les parties requérantes restent en défaut de produire le moindre élément soutenant leur affirmation que la décision déférée porterait atteinte à leur réputation, respectivement qu’ils risqueraient de perdre une partie de leur clientèle, étant précisé à cet égard et plus particulièrement quant à la crainte des parties requérantes de perdre parmi leur clients les écoles, respectivement stages, qu’il ressort du fichier relevant les annulations de réservation que, contrairement à l’allégation des parties requérantes, la grande majorité des écoles, services d’éducation et d’accueil (maisons relais) ou associations 4 ont maintenu leur réservation.

3 Trib. adm. Prés, 27 avril 2006, n° 21266 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Procédure contentieuse, n° 637.

4 ….

7 A défaut de tout effet grave et immédiat avéré, notamment sur leur situation économique, de l’acte déféré, les parties requérantes sont à débouter de leur demande en institution d’une mesure provisoire sans qu’il y ait lieu d’examiner davantage la question de l’existence éventuelle de moyens sérieux avancés devant les juges du fond, les conditions afférentes devant être cumulativement remplies, de sorte que la défaillance de l’une de ces conditions entraîne à elle seule l’échec de la demande.

Par ces motifs, la soussignée, premier juge du tribunal administratif, siégeant en remplacement des président et magistrats plus anciens en rang, légitiment empêchés, statuant contradictoirement et en audience publique, rejette la requête en obtention d’un sursis à exécution ;

condamne les parties requérantes aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 23 juillet 2021 par Michèle Stoffel, premier juge du tribunal administratif, en présence de Xavier Drebenstedt, greffier en chef.

s. Xavier Drebenstedt s. Michèle Stoffel Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, 23 juillet 2021 Le greffier du tribunal administratif 8


Synthèse
Numéro d'arrêt : 46236
Date de la décision : 23/07/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2021-07-23;46236 ?

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