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04/08/2021 | LUXEMBOURG | N°46124

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 04 août 2021, 46124


Tribunal administratif N° 46124 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 11 juin 2021 3e chambre Audience publique de vacation du 4 août 2021 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 28 (1), L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46124 du rôle et déposée le 11 juin 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Ibtihal EL BOUYOUSFI, avocat

à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …,...

Tribunal administratif N° 46124 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 11 juin 2021 3e chambre Audience publique de vacation du 4 août 2021 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 28 (1), L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46124 du rôle et déposée le 11 juin 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Ibtihal EL BOUYOUSFI, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Soudan), de nationalité soudanaise, assigné à résidence à la structure d’hébergement d’urgence du Kirchberg (SHUK) sise à L-1734 Luxembourg, 11, rue Carlo Hemmer, tendant à l’annulation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 21 mai 2021 de le transférer vers Malte, l’Etat membre responsable de l’examen de sa demande de protection internationale ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 29 juin 2021 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport ainsi que Maître Marc-Olivier ZARNOWSKI, en remplacement de Maître Ibtihal EL BOUYOUSFI et Madame le délégué du gouvernement Sarah ERNST et, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 7 juillet 2021.

Le 21 avril 2021, Monsieur …, alias …, ci-après désigné par « Monsieur … », introduisit auprès du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, une demande de protection internationale au sens de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, désignée ci-après par « la loi du 18 décembre 2015 ».

Le même jour, Monsieur … fut entendu par un agent de la Police Grand-Ducale, service de police judiciaire, section criminalité organisée – police des étrangers, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg. Il s’avéra à cette occasion, ainsi que sur base de la comparaison des empreintes digitales de Monsieur … dans la base de données EURODAC, qu’il a franchi irrégulièrement la frontière maltaise en date du 10 avril 2020 et qu’il a fait l’objet d’une prise de ses empreintes dactyloscopiques à Malte le 4 mai 2020.

Le 22 avril 2021, Monsieur … fut encore entendu par un agent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection 1internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ci-après désigné par « le règlement Dublin III».

Par arrêté du 23 avril 2021, notifié à l’intéressé en mains propres le même jour, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », assigna Monsieur … à résidence à la structure d’hébergement d’urgence du Kirchberg pour une durée de trois mois.

En date du 26 avril 2021, les autorités luxembourgeoises contactèrent les autorités maltaises aux fins de la reprise en charge de Monsieur … sur base de l’article 13, paragraphe (2), du règlement Dublin III.

Par courrier électronique du 28 avril 2021, les autorités maltaises acceptèrent la prise en charge de Monsieur … sur base de l’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III.

Par décision du 21 mai 2021, notifiée à l’intéressé par courrier recommandé envoyé le même jour, le ministre informa Monsieur … de sa décision de le transférer dans les meilleurs délais vers Malte, sur base des dispositions de l’article 28, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 et de celles de l’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III, la décision étant libellée comme suit :

« […] En mains le rapport de Police Judiciaire du 21 avril 2021 et le rapport d'entretien Dublin III sur votre demande de protection internationale du 22 avril 2021.

1.

Quant aux faits à la base de votre demande de protection internationale En date du 21 avril 2021, vous avez introduit une demande de protection internationale auprès du service compétent de la Direction de l'immigration.

La comparaison de vos empreintes dactyloscopiques avec la base de données Eurodac a révélé que vous avez précédemment franchi irrégulièrement la frontière maltaise en date du 10 avril 2020 et que vos empreintes ont été enregistrées en date du 4 mai 2020.

Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat responsable, un entretien Dublin III a été mené en date du 22 avril 2021.

Sur cette base, la Direction de l'immigration a adressé en date du 26 avril 2021 une demande de prise en charge aux autorités maltaises sur base de l'article 13(2) du règlement DIII, demande qui fut acceptée par lesdites autorités maltaises en date du 28 avril 2021 sur base de l'article 13(1) du règlement précité.

2.

Quant aux bases légales En tant qu'Etat membre de l'Union européenne, l'Etat luxembourgeois est tenu de mener un examen aux fins de déterminer l'Etat responsable conformément aux dispositions du règlement DIII établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride.

2S'il ressort de cet examen qu'un autre Etat est responsable du traitement de la demande de protection internationale, la Direction de l'immigration rend une décision de transfert après que l'Etat requis a accepté la prise ou la reprise en charge du demandeur.

Aux termes de l'article 28(1) de la loi du 18 décembre 2015, le Luxembourg n'est pas responsable pour le traitement d'une demande de protection internationale si cette responsabilité revient à un autre Etat.

Lorsqu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, du règlement DIII, notamment des données visées au règlement (UE) n° 603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d'un État membre dans lequel il est entré en venant d'un État tiers, cet État membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale, conformément à l'article 13(1) du règlement DIII.

Un Etat n'est pas autorisé à transférer un demandeur vers l'Etat normalement responsable lorsqu'il existe des preuves ou indices avérés qu'un demandeur risquerait dans son cas particulier d'être soumis dans cet Etat à un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 3 de la Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (ci-après la « CEDH ») ou 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (ci-après « la Charte UE »).

3.

Quant à la motivation de la présente décision de transfert En l'espèce, il ressort des résultats du 21 avril 2021 de la comparaison de vos données dactyloscopiques avec celles enregistrées dans la base de données Eurodac que vous avez franchi irrégulièrement la frontière maltaise en date du 10 avril 2020 et que vos empreintes ont été enregistrées en date du 4 mai 2020.

Selon vos déclarations, vous auriez quitté le Soudan en février 2018 pour vous rendre en Libye où vous seriez resté pendant onze mois. Vous y auriez travaillé sans rémunération et vous auriez subi de la violence et la torture. En avril 2020, vous seriez monté à bord d'une embarcation en direction de l'Italie, mais vous auriez été secouru en mer et déposé à Malte.

Vous y auriez vécu pendant un an sans introduire une demande de protection internationale avant de vous cacher sur un ferry en direction de l'Italie. Vous auriez ensuite pris le train vers Calais/France, mais vous y n'auriez pas réussi la traversée vers l'Angleterre. Vous n'auriez pas non plus réussi à introduire une demande de protection internationale en France et vous vous seriez retrouvé accidentellement au Luxembourg.

Lors de votre entretien Dublin III en date du 22 avril 2021, vous n'avez pas fait mention d'éventuelles particularités sur votre état de santé ou autres problèmes généraux empêchant un transfert vers Malte qui est l'Etat membre responsable pour traiter votre demande de protection internationale.

Monsieur, vous indiquez ne pas vouloir retourner à Malte parce que vous vous y retrouveriez en prison.

Rappelons à cet égard que Malte est liée à la Charte UE et est partie à la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (ci-après « la Convention de Genève »), à la 3CEDH et à la Convention du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (« Conv. torture »).

Il y a également lieu de soulever que Malte est liée par la Directive (UE) n° 2013/32 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale [refonte] (« directive Procédure ») et par la Directive (UE) n° 2013/33 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale [refonte] (« directive Accueil »).

Soulignons en outre que Malte profite, comme tout autre Etat membre, de la confiance mutuelle qu'elle respecte ses obligations découlant du droit international et européen en la matière.

Par conséquent, Malte est présumée respecter ses obligations tirées du droit international public, en particulier le principe de non-refoulement énoncé expressément à l'article 33 de la Convention de Genève, ainsi que l'interdiction des mauvais traitements ancrée à l'article 3 CEDH et à l'article 3 Conv. torture, de même que les conditions minimales d'accueil fixées dans la directive Accueil.

Par ailleurs, il n'existe en particulier aucune jurisprudence de la Cour EDH ou de la CJUE, de même qu'il n'existe aucune recommandation de I'UNHCR visant de façon générale à suspendre les transferts vers Malte sur base du règlement (UE) n° 604/2013.

Monsieur, vous n'avez pas non plus démontré que, dans votre cas concret, vos conditions d'existence à Malte revêtiraient un tel degré de pénibilité et de gravité qu'elles seraient constitutives d'un traitement contraire à l'article 3 CEDH ou encore à l'article 3 Conv.

torture.

Relevons dans ce contexte que vous avez la possibilité, dès votre arrivée à Malte, d'introduire une demande de protection internationale et si vous deviez estimer que les autorités maltaises ne respectent pas vos droits élémentaires, il vous appartient de saisir les autorités compétentes maltaises, notamment judiciaires.

Aussi, les informations à ma disposition ne sauraient donner lieu à l'application des articles 8, 9, 10 et 11 du règlement DIII.

Il n'existe en outre pas non plus de raisons pour une application de l'article 16(1) du règlement DIII pouvant amener le Luxembourg à assumer la responsabilité de l'examen au fond de votre demande de protection internationale.

Il convient encore de souligner qu'en vertu de l'article 17(1) du règlement DIII (clause de souveraineté), chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par le ressortissant d'un pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement, pour des raisons humanitaires ou exceptionnelles. Les autorités luxembourgeoises disposent d'un pouvoir discrétionnaire à cet égard, et l'application de la clause de souveraineté ne constitue pas une obligation.

4Il ne ressort pas de l'ensemble des éléments de votre dossier que les autorités luxembourgeoises auraient dû faire application de la clause de souveraineté prévue à l'article 17(1) du règlement DIII. En effet, vous ne faites valoir aucun élément humanitaire ou exceptionnel qui ne serait pas couvert par les dispositions du règlement DIII et qui devrait amener les autorités luxembourgeoises à se déclarer responsables pour le traitement de votre demande de protection internationale.

Pour l'exécution du transfert vers Malte, seule votre capacité de voyager est déterminante et fera l'objet d'une détermination définitive dans un délai raisonnable avant le transfert.

Si votre état de santé devait temporairement constituer un obstacle à l'exécution de votre renvoi vers Malte, l'exécution du transfert serait suspendue jusqu'à ce que vous seriez à nouveau apte à être transféré. Par ailleurs, si cela s'avère nécessaire, la Direction de l'immigration prendra en compte votre état de santé lors de l'organisation du transfert vers Malte en informant les autorités maltaises conformément aux articles 31 et 32 du règlement DIII à condition que vous exprimiez votre consentement explicite à cette fin.

D'autres raisons individuelles pouvant éventuellement entraver la remise aux autorités maltaises n'ont pas été constatées. […] ».

En date du 27 mai 2021, le ministre s’adressa encore au service de police judiciaire de la Police grand-ducale, section criminalité organisée – police des étrangers, en vue d’organiser le transfert de Monsieur … vers Malte, tout en précisant que le transfert ne pourra être organisé avant le 8 juin 2021.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 11 juin 2021, inscrite sous le numéro 46124 du rôle, Monsieur … a fait introduire un recours en annulation contre la décision ministérielle, précitée, du 21 mai 2021 décidant de le transférer vers Malte, l’Etat membre responsable du traitement de sa demande de protection internationale.

Etant donné que l’article 35, paragraphe (3) de la loi du 18 décembre 2015, en sa version applicable au jour de la prise de la décision litigieuse, prévoit un recours en annulation contre les décisions de transfert visées à l’article 28, paragraphe (1), de la même loi, telle que la décision litigieuse, un recours en annulation a valablement pu être introduit à l’encontre de celle-ci. Le recours en annulation est encore recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.

A cet égard, le tribunal relève que si la loi du 16 juin 2021 portant modification de la loi du 18 décembre 2015 publiée au Mémorial en date du 1er juillet 2021 et donc entrée en vigueur trois jours francs après cette publication, a modifié en ce qui concerne les décisions de transfert non seulement la procédure contentieuse devant le tribunal administratif, mais également les voies de recours, en prévoyant dorénavant la possibilité d’introduire un recours en réformation, et que si une nouvelle loi est applicable aux instances en cours quand elle se contente de modifier les formes ou la procédure du recours, le tribunal relève qu’elle ne l’est pas lorsqu’elle affecte la recevabilité même du recours qui doit être appréciée selon la loi en vigueur au jour où la décision a été prise. En d’autres termes, l’existence d’une voie de recours est régie, en l’absence de mesures transitoires, tel que cela est le cas en l’espèce, par la loi sous l’empire de laquelle a été rendue la décision attaquée.

5S’agissant dès lors non pas d’une simple loi de procédure, applicable aux instances en cours, mais d’une loi de fond, la loi du 16 juin 2021 est applicable aux seules décisions ayant été prises sous son égide, de sorte que la recevabilité du présent recours sera appréciée par rapport à l’article 35, paragraphe (3) de la loi du 18 décembre 2015 en sa version applicable au jour de la prise de la décision attaquée à savoir le 21 mai 2021.

A l’appui de son recours, le demandeur rappelle tout d’abord les faits et rétroactes à la base de la décision déférée. Il souligne qu’il n’aurait pas déposé de demande internationale à Malte en raison du fait qu’« il n’y a pas de sécurité à Malte » et que « Nous étions mal traités » et qu’il aurait dès lors présenté des motifs valables pour que le Grand-Duché de Luxembourg prenne en charge l’examen de sa demande de protection internationale.

En droit, le demandeur, en se basant sur l’article 13 du règlement Dublin III, reproche une erreur manifeste d’appréciation au ministre dans la mesure où celui-ci aurait omis de prendre en compte la « déliquescence » du fonctionnement du système d’asile maltais, le demandeur estimant en effet qu’il y existerait actuellement des défaillances systémiques telles que prévues par l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III.

Le demandeur ajoute que suivant la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, dénommée ci-après « la CJUE »1, ainsi que celle de la Cour européenne des droits de l’homme, ci-après « la CourEDH »2, une défaillance systémique au sens de l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III serait un manque de structure dans la procédure d’asile d’un Etat, qui, en tant que condition nécessaire mais non suffisante, causeraient des violations de la loi.

Dans ce contexte, il cite un rapport de l’organisation Asylum Information Database (AIDA), intitulé « Country Report : Malta, 2020 Update », mis à jour en mai 2021, duquel il ressortirait que des demandeurs d’asile qui auraient été transférés sur base du règlement Dublin III auraient des difficultés à accéder aux procédures après leur retour à Malte et que les personnes qui auraient quitté Malte sans autorisation courraient le risque d’être signalés et faire l’objet de poursuites pénales après leur retour. A cet égard, il fait valoir qu’en cas de transfert à Malte, il serait transféré dans un centre de détention et poursuivi devant un tribunal pénal.

Il s’appuie encore sur un article de presse, intitulé « UN slams ‘shocking’ conditions for migrants in Malta — Little access to daylight, clean water or sanitation, report says », publié le 2 octobre 20203 sur le site d’information « Times of Malta », corroborant, selon lui, ses déclarations dont il a fait état lors de son entretien Dublin III par rapport à sa rétention administrative et les conditions de vie exécrables des demandeurs de protection internationale à Malte.

Il se prévaut ensuite d’un rapport du Comité pour la prévention de la torture du Conseil de l’Europe, ci-après le « CPT » du 11 mars 2021, selon lequel les conditions de détention dans les centres pénitentiaires dans lesquels seraient détenus les demandeurs de protection internationale ne respecteraient pas les exigences minimales définies par ses soins et que ce dernier aurait, lors de sa visite en septembre 2020, critiqué la taille des cellules, les conditions d’hygiène, l’accès restreint à l’eau potable et le manque de protection contre les températures extrêmes.

1 CJUE, 14 novembre 2013, affaire C-4/11, Kaveh PUID c. Bundesrepublik Deutschland.

2 CourEDH, 4 novembre 2014, Requête no 29217/12, Tarakhel c. Suisse.

3 https://timesofmalta.com/articles/view/un-slams-shocking-conditions-for-migrants-in-malta.821692.

6 L’organisation Global Detention Project critiquerait également dans une publication de juin 2019 intitulée « Immigration Detention in Malta : Betraying European Values ? », la politique maltaise relative aux détentions illimitées de temps des demandeurs d’asile.

Il se base encore sur un communiqué de presse de l’Observatoire Euro-Méditerranéen des Droits de l’Homme du 7 février 2021 intitulé « La brutalité de Malte envers les demandeurs d’asile nécessite l’intervention de la Commission européenne » critiquant le traitement réservé aux demandeurs d’asile dans cet Etat membre.

En deuxième lieu, le demandeur s’empare d’une violation, par le ministre, de l’article 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ci-après désignée par « la CEDH », en ce que celui-ci aurait commis une erreur manifeste d’appréciation quant au traitement prévisible que les autorités maltaises lui réserveraient en cas de transfert dans la mesure où il risquerait d’être arrêté et placé en détention après sa remise aux autorités maltaises, le demandeur se basant à cet égard sur un arrêt de la CourEDH4, suivant lequel les conditions actuelles de détention des demandeurs de protection internationale pourraient entraîner une violation de l’article 3 de la CEDH.

Le demandeur fait encore valoir que le ministre n’aurait pas pris en compte la situation du système d’accueil des demandeurs de protection internationale en Malte, mais aurait appliqué le principe de la confiance mutuelle, tout en présumant la protection des droits fondamentaux des demandeurs de protection internationale par Malte, sans cependant avoir pris en compte ses explications dans le cadre de son entretien Dublin III et en particulier les mauvais traitements et sa détention ainsi que les informations publiquement disponibles qui établiraient un risque pour violation de ses droits fondamentaux garantis par l’article 3 de la CEDH, respectivement de l’article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ci-après désignée par « la Charte ». Il reproche, à cet égard, au ministre de ne pas avoir écarté le principe de confiance mutuelle à l’égard de Malte en raison des publications pré mentionnées, en faisant valoir qu’en adoptant une telle approche, le ministre aurait ignoré les arrêts de la CourEDH de 20115 suivant lesquels il ne serait plus question de faire « aveuglement » confiance aux Etats membres de l’Union européenne dans le cadre de l’application du règlement Dublin III, mais que chaque Etat membre devrait s’enquérir au préalable de la manière dont les autorités étrangères appliqueraient en pratique la législation en matière d’asile. A cela s’ajouterait que la condamnation récente de Malte par la CourEDH6 rendrait la réalisation du « risque réel » de son exposition à des traitements inhumains et dégradants, « certaine » et pour le « moins impossible à écarter ».

En troisième lieu, le demandeur invoque une violation de l’article 17, paragraphe (1), du règlement Dublin III, en faisant valoir que le ministre aurait dû se déclarer compétent pour connaître de sa demande de protection internationale, compte tenu (i) des difficultés pour les demandeurs de protection internationale d’accéder à la procédure d’asile après leur retour à Malte, et exposant les personnes qui auraient illégalement quittés Malte à des poursuites pénales après leur transfert tel que mis en avant par le rapport d’AIDA, et (ii) du risque réel d’être immédiatement arrêté à son retour à Malte et placé en détention dans des conditions inhumaines et dégradantes.

4 CEDH, 3 mai 2016, Abdi Mahamud c. Malte, n° 56796/13.

5 CourEDH, 21 janvier 2011, MSS c. Belgique et Grèce, n° 30696/09.

6 CEDH, 11 mars 2021, Feilazoo. c. Malte, n° 6865/19.

7Finalement, il sollicite la saisine de la CJUE, d’une question préjudicielle sur le fondement de l’article 267, point (b), paragraphe 2, du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) afin que celle-ci se prononce sur l’interprétation à donner à l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III eu égard aux conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale à Malte et la condamnation récente de l’Etat maltais par la CEDH qui laisseraient manifestement conclure à l’existence dans ce pays de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale et à un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la Charte.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours pour n’être fondé dans aucun de ses moyens.

L’article 28, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 prévoit ce qui suit : « Si, en application du règlement (UE) n°604/2013, le ministre estime qu’un autre Etat membre est responsable de la demande, il sursoit à statuer sur la demande jusqu’à la décision du pays responsable sur la requête de prise ou de reprise en charge. Lorsque l’Etat membre requis accepte la prise en charge ou la reprise en charge du demandeur, le ministre notifie à la personne concernée la décision de la transférer vers l’Etat membre responsable et de ne pas examiner sa demande de protection internationale ».

Il s’ensuit que si le ministre estime qu’en application du règlement Dublin III, un autre pays est responsable de l’examen de la demande de protection internationale et si ce pays accepte la prise, respectivement la reprise en charge de l’intéressé, le ministre décide de transférer la personne concernée vers l’Etat membre responsable et de ne pas examiner la demande de protection internationale introduite au Luxembourg.

L’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III, sur lequel le ministre s’est basé pour conclure à la responsabilité des autorités maltaises pour procéder à l’examen de la demande de protection internationale de Monsieur …, prévoit que : « Lorsqu’il est établi, sur la base de preuves ou d’indices tels qu’ils figurent dans les deux listes mentionnées à l’article 22, paragraphe 3, du présent règlement, notamment des données visées au règlement (UE) n° 603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d’un État membre dans lequel il est entré en venant d’un État tiers, cet État membre est responsable de l’examen de la demande de protection internationale. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière. ».

Le tribunal constate de prime abord qu’il est constant en cause que la décision de transférer le demandeur vers Malte et de ne pas examiner sa demande de protection internationale a été adoptée par le ministre en application de l’article 28, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 et de l’article 13, paragraphe (1) du règlement Dublin III, au motif que l’Etat responsable de l’examen de la demande de protection internationale du demandeur serait Malte, en ce qu’il aurait franchi irrégulièrement la frontière maltaise en date du 10 avril 2020 et que les autorités maltaises ont accepté sa prise en charge, de sorte que c’est a priori à bon droit que le ministre a décidé de le transférer vers ledit Etat membre et de ne pas examiner sa demande de protection internationale.

Force est ensuite de constater que le demandeur ne conteste pas la compétence de principe de Malte, respectivement l’incompétence de principe de l’Etat luxembourgeois, mais 8soutient qu’un transfert à Malte l’exposerait à un risque de subir des traitements inhumains et dégradants en violation des article 3, paragraphe (2), alinéa 2 et 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III, respectivement de l’article 3 de la CEDH.

Or, les possibilités légales pour le ministre de ne pas procéder au transfert d’un demandeur de protection internationale, malgré la compétence de principe d’un autre Etat membre, et d’examiner, le cas échéant, sa demande sont prévues, d’une part, par l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2 du règlement Dublin III, lequel présuppose l’existence de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la Charte, auquel cas le ministre ne peut pas transférer l’intéressé dans cet Etat tout en poursuivant la procédure de détermination de l’Etat membre responsable, ainsi que, d’autre part, par l’article 17, paragraphe (1) du même règlement, accordant au ministre la simple faculté d’examiner la demande de protection internationale nonobstant la compétence de principe d’un autre Etat membre pour ce faire.

L’article 3, paragraphe (2), alinéa 2 du règlement Dublin III prévoit ce qui suit :

« Lorsqu’il est impossible de transférer un demandeur vers l’État membre initialement désigné comme responsable parce qu’il y a de sérieuses raisons de croire qu’il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, l’État membre procédant à la détermination de l’État membre responsable poursuit l’examen des critères énoncés au chapitre III afin d’établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. ».

Cette disposition impose à l’Etat membre procédant à la détermination de l’Etat responsable de l’examen de la demande de protection internationale d’un demandeur d’asile de s’abstenir de transférer l’intéressé vers l’Etat membre initialement désigné comme responsable, en application des critères prévus par le règlement Dublin III, s’il y a de sérieuses raisons de croire qu’il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la Charte.

La situation visée par ledit article 3, paragraphe (2), du règlement Dublin III est celle de l’existence de défaillances systémiques empêchant tout transfert de demandeurs d’asile vers un Etat membre déterminé7.

A cet égard, le tribunal relève tout d’abord que l’Etat maltais est tenu en tant que membre de l’Union européenne et signataire de la CEDH, au respect des dispositions de celle-

ci et de celles du Pacte international des droits civils et politiques et de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ainsi que du principe de non-refoulement prévu par la Convention de Genève et dispose a priori d’un système de recours efficace contre les violations de ces droits et libertés. Il y a encore lieu de souligner, dans ce contexte, que le système européen commun d’asile a été conçu dans un contexte permettant de supposer que l’ensemble des Etats y participant qu’ils soient Etats membres ou Etats tiers, respectent les droits fondamentaux, en ce compris les droits trouvant leur fondement dans la Convention de Genève, ainsi que dans la CEDH, et que les Etats 7 CJUE, 16 février 2017, C. K., H. F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16, pt. 92.

9membres peuvent s’accorder une confiance mutuelle à cet égard8. C’est précisément en raison de ce principe de confiance mutuelle que le législateur de l’Union européenne a adopté le règlement Dublin III en vue de rationaliser le traitement des demandes d’asile et d’éviter l’engorgement du système par l’obligation, pour les autorités des Etats, de traiter des demandes multiples introduites par un même demandeur, d’accroître la sécurité juridique en ce qui concerne la détermination de l’Etat responsable du traitement de la demande d’asile et ainsi d’éviter le « forum shopping », l’ensemble ayant pour objectif principal d’accélérer le traitement des demandes tant dans l’intérêt des demandeurs d’asile que des Etats participants9.

Dès lors, comme ce système européen commun d’asile repose sur la présomption – réfragable – que l’ensemble des Etats y participant respectent les droits fondamentaux, en ce compris les droits trouvant leur fondement dans la Convention de Genève, et que les Etats membres peuvent s’accorder une confiance mutuelle à cet égard, il appartient au demandeur de rapporter la preuve matérielle de défaillances avérées10.

Dans son arrêt du 19 mars 2019, la CJUE a confirmé ce principe selon lequel le droit de l’Union repose sur la prémisse fondamentale selon laquelle chaque Etat membre partage avec tous les autres Etats membres, et reconnaît que ceux-ci partagent avec lui, une série de valeurs communes sur lesquelles l’Union est fondée11. Cette prémisse implique et justifie l’existence de la confiance mutuelle entre les Etats membres dans la reconnaissance de ces valeurs et, donc, dans le respect du droit de l’Union qui les met en œuvre, ainsi que dans le fait que leurs ordres juridiques nationaux respectifs sont en mesure de fournir une protection équivalente et effective des droits fondamentaux reconnus par la Charte, notamment par les articles 1er et 4 de celle-ci, qui consacrent l’une des valeurs fondamentales de l’Union et de ses Etats membres, de sorte qu’il doit être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d’une protection internationale dans chaque Etat membre est conforme aux exigences de la Charte, de la Convention de Genève ainsi que de la CEDH.

Il résulte, par ailleurs, de l’arrêt, précité, du 19 mars 2019, que pour relever de l’article 4 de la Charte, auquel l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2 du règlement Dublin III renvoie, des défaillances existant dans l’Etat membre responsable, au sens dudit règlement, doivent atteindre un seuil particulièrement élevé de gravité, qui dépend de l’ensemble des données de la cause. Aux termes de ce même arrêt, ce seuil particulièrement élevé de gravité serait atteint lorsque l’indifférence des autorités d’un Etat membre aurait pour conséquence qu’une personne entièrement dépendante de l’aide publique se trouverait, indépendamment de sa volonté et de ses choix personnels, dans une situation de dénuement matériel extrême, qui ne lui permettrait pas de faire face à ses besoins les plus élémentaires, tels que notamment ceux de se nourrir, de se laver et de se loger, et qui porterait atteinte à sa santé physique ou mentale ou la mettrait dans un état de dégradation incompatible avec la dignité humaine.12 Partant, ce seuil de gravité ne saurait couvrir des situations caractérisées même par une grande précarité ou une forte dégradation des conditions de vie de la personne concernée, lorsque celles-ci n’impliquent pas un dénuement matériel extrême plaçant cette personne dans 8 CJUE, 21 décembre 2011, affaires jointes C-411/10, N.S, c. Secretary of State for the Home Department et C-

493/10, M.E. et al c. Refugee Applications Commissioner Minister for Justice, Equality and Law Reform., point 78.

9 Ibidem, point. 79 ; Voir également : Trib. adm 26 février 2014, n° 33956 du rôle, trib. adm. 17 mars 2014, n° 34054 du rôle, ainsi que trib. adm. 2 avril 2014, n° 34133 du rôle, disponibles sur www.jurad.etat.lu.

10 Voir aussi Verwaltungsgerichtshof Baden-Württemberg, 8 janvier 2015, n° A11 S 858/14.

11 CJUE, 19 mars 2019, Jawo c/ Bundesrepublik Deutschland, n° C-163/17.

12 Idem, point 92.

10une situation d’une gravité telle qu’elle peut être assimilée à un traitement inhumain ou dégradant : le seul fait que la protection sociale et/ou les conditions de vie sont plus favorables dans l’Etat membre requérant que dans l’Etat membre normalement responsable de l’examen de la demande de protection internationale n’est ainsi pas de nature à conforter la conclusion selon laquelle la personne concernée serait exposée, en cas de transfert vers ce dernier Etat membre, à un risque réel de subir un traitement contraire à l’article 4 de la Charte.

Le demandeur remettant en question cette présomption du respect par l’Etat maltais des droits fondamentaux, puisqu’il affirme risquer des traitements inhumains et dégradants dans ce pays, il lui incombe de fournir des éléments concrets permettant de la renverser. Force est de constater qu’à l’appui de ses affirmations, il se prévaut d’un rapport d’Asylum Information Database (AIDA), intitulé « Country Report : Malta, 2020 Update », mise à jour en mai 2021, d’un article de presse, intitulé « UN slams ‘shocking’ conditions for migrants in Malta — Little access to daylight, clean water or sanitation, report says », publié le 2 octobre 2020 sur le site d’information « Times of Malta », d’un rapport du CPT du 10 mars 2021, d’une publication de juin 2019 intitulé « Immigration Detention in Malta : Betraying European Values ? » de l’organisation Global Detention Project ainsi qu’un rapport et une publication du 11 mars 2021, d’un communiqué de presse de l’Observatoire Euro-Méditerranéen des Droits de l’Homme du 7 février 2021 intitulé « La brutalité de Malte envers les demandeurs d’asile nécessite l’intervention de la Commission européenne » et d’un arrêt de la CEDH du 11 mars 202113.

Or, il ne résulte ni théoriquement, ni concrètement des documents ainsi soumis au tribunal que des défaillances systémiques atteignant un tel seuil particulièrement élevé de gravité caractériseraient la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale à Malte.

En effet, force est d’abord de relever que le demandeur n’a fait état d’éléments concrets de son vécu personnel permettant de conclure à l’existence de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale à Malte, qui entraîneraient un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la Charte dans son chef, empêchant son transfert vers ce pays, son affirmation non autrement étayée selon laquelle il ne se serait pas senti en sécurité à Malte, et qu’il y aurait été maltraité, n’étant en tout état de cause pas suffisante à cet égard.

Ensuite et s’il ressort certes des pièces versées en cause par le demandeur, et notamment du rapport de l’AIDA, que les autorités maltaises connaissent certains problèmes quant à leur capacité d’accueil due à la grande vague de demandeurs d’asile, impliquant que ceux-ci risquent, suivant les situations, de se voir confrontés à des lenteurs dans la procédure de dépôt de leur demande de protection internationale, ainsi qu’à des difficultés en termes d’hébergement, de conditions de vie et d’accès aux soins, il ne s’en dégage néanmoins pas que les conditions matérielles d’accueil des demandeurs de protection internationale à Malte soient caractérisées par des carences structurelles d’une ampleur telle qu’il y aurait lieu de conclure d’emblée et quelles que soient les circonstances du cas d’espèce, à l’existence de risques suffisamment réels et concrets pour tout demandeur de protection internationale d’être systématiquement exposé à une situation de dénuement matériel extrême au sens de la jurisprudence précité de la CJUE, et ce, au point que son transfert dans ce pays constituerait en règle générale un traitement prohibé par l’article 4 de la Charte.

13 CEDH, 11 mars 2021, Feilazoo. c. Malte, n° 6865/19.

11 S’agissant ensuite plus précisément des critiques avancées par le demandeur par rapport aux conditions d’accueil, force est tout d’abord de constater que celles-ci concernent principalement les demandeurs de protection internationale et ressortissants tiers qui ont dépassé la validité de leur visa, sinon les primo-arrivants, et non pas les demandeurs de protection internationale transférés à Malte en vertu du règlement Dublin III, tel que c’est le cas du demandeur, les autorités maltaises ayant, en effet, accepté sa reprise en charge sur base de l’article 13, paragraphe (1) du règlement Dublin III.

Ainsi, et si les extraits du rapport du CPT, le rapport et la publication de l’organisation Global Detention Project ainsi que l’article de presse cités par le demandeur à l’appui de son argumentation confirment certes certains problèmes de fait et de droit en ce qui concerne l’accueil immédiat des migrants, à savoir le passage obligatoire dans des centres fermés pour des raisons sanitaires et ce, pour une durée plus ou moins longue, il n’en reste pas moins que comme le demandeur sera transféré à Malte en vertu du règlement Dublin III, il ne sera a priori et à défaut d’éléments en sens contraire soumis au tribunal, plus considéré comme un primo-

arrivant, susceptible de devoir passer à nouveau des tests sanitaires. En ce qui concerne en particulier le mélange de migrants testés positifs au COVID-19 avec des migrants non atteints de ce même virus dans le « Initial Reception Center » de Marsa tel que relevé dans le rapport de l’organisation Global Detention Project, les autorités maltaises ont précisé dans leur réponse du 2 novembre 2020 à l’attention du CPT que cette situation était exceptionnelle en raison du manque de place pour isoler les migrants concernés au sein de l’établissement et que les étages en cause dudit établissement ont été déclarés comme exemptes du virus en octobre 2020 et qu’il n’y avait plus de cas positif dans l’établissement à la date du 2 novembre 202014.

En ce qui concerne les violences qui seraient commises à l’égard des demandeurs d’asile dans les centres de rétention tel que retenu dans le communiqué de presse de l’Observatoire Euro-Méditerranéen des Droits de l’Homme, le CPT relève dans son rapport qu’il a généralement reçu que très peu d'allégations de mauvais traitements physiques délibérément infligés par des officiers de police et/ou le personnel des centres de détention à des migrants lors de leur arrestation ou de leur mise en détention15, de sorte qu’il n’est pas établi qu’il serait exposé à des traitements inhumains ou dégradants au sens de l’article 4 de la Charte en cas de transfert à Malte.

Il ressort également du rapport du CPT, qu’en ce qui concerne les conditions sanitaires et de vie dans les centres de rétention, mises en cause par le CPT et par l’Observatoire Euro-Méditerranéen des Droits de l’Homme, que des mesures nécessaires pour remédier à la situation critiquée semblent avoir été prises par les autorités maltaises afin d’améliorer les conditions de vie des demandeurs de protection internationale dans les centres de rétention.

Au vu de ce qui précède, il y a dès lors lieu de conclure que si des problèmes affectant le système d’accueil à Malte en raison du nombre important de demandeurs de protection internationale sont certes décelables compte tenu des pièces versées en cause, il n’apparaît toutefois pas que la procédure de demande d’asile ou les conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale à Malte soient affectées par des défaillances systémiques atteignant le seuil de gravité défini par la CJUE dans son arrêt du 19 mars 2019 cité ci-dessus, à savoir que ces conditions exposeraient le demandeur, indépendamment de sa volonté et de ses choix 14 Rapport du CPT, point 23, page 12 et point 77 page 32.

15 Rapport du CPT, point 18, page 10.

12personnels, à une situation de dénuement matériel extrême, qui ne lui permettrait pas de faire face à ses besoins les plus élémentaires, tels que notamment ceux de se nourrir, de se laver et de se loger, et qui porterait atteinte à sa santé physique ou mentale ou la mettrait dans un état de dégradation incompatible avec la dignité humain.

Par ailleurs, il convient de relever que le demandeur n’invoque pas non plus de jurisprudence de la CourEDH relative à une suspension générale des transferts vers Malte, voire une demande en ce sens de la part de l’UNHCR. Il ne fait pas non plus état de l’existence d’un rapport ou d’un avis émanant de l’UNHCR, ou d’autres institutions ou organismes internationaux, interdisant ou recommandant l’arrêt des transferts vers Malte dans le cadre du règlement Dublin III en raison plus particulièrement de la politique d’asile maltaise qui exposerait tout demandeur de protection internationale à un traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la Charte.

Le moyen tiré d’une violation de l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2 du règlement Dublin III, ensemble le reproche au ministre de ne pas avoir davantage analysé le risque pour le demandeur d’être soumis à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour à Malte, encourent partant le rejet.

Il en est de même en ce qui concerne la demande du demandeur de saisir la CJUE d’une question préjudicielle sur le fondement de l’article 267, point b) paragraphe 2 du TFUE, dans la mesure où, tel que cela ressort des jurisprudences de la CJUE sur lesquelles le tribunal vient de fonder son analyse, la CJUE s’est d’ores et déjà prononcée sur le principe de confiance mutuelle entre Etats membres et sur l’interprétation à donner à l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III en cas de transfert d’une personne en application dudit règlement, en retenant notamment que si le principe de la confiance mutuelle n’exclut pas qu’un demandeur puisse encourir un risque de traitement contraire à l’article 4 de la Charte, la charge de la preuve de défaillances systémiques ou d’un traitement inhumain et dégradant au sens des dispositions précitées incombe aux demandeurs de protection internationale qui s’en prévalent et s’est pareillement prononcée sur le seuil de gravité à prendre en considération à cet égard.

Il s’ensuit que la question préjudicielle est à rejeter pour défaut de pertinence.

En ce qui concerne ensuite la violation alléguée de l’article 3 de la CEDH, il convient de rappeler que si les Etats membres sont dans l’obligation d’appliquer les règlements européens, il ressort de la jurisprudence de la CourEDH que, dans certains cas, il ne peut être exclu que l’application des règles prescrites par le règlement Dublin III puisse entraîner un risque de violation de l’article 3 de la CEDH, corollaire de l’article 4 de la Charte, la présomption selon laquelle les Etats participants respectent les droits fondamentaux prévus par la CEDH n’étant en effet pas irréfragable16.

Dans ce contexte, la CJUE a suivi le raisonnement de la CourEDH en décidant que, même en l’absence de raisons sérieuses de croire à l’existence de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs dans l’État membre responsable de l’examen de la demande d’asile, le transfert d’un demandeur d’asile dans le cadre du règlement Dublin III ne peut être opéré que dans des conditions excluant que ce transfert entraîne un risque réel et avéré que l’intéressé subisse des traitements inhumains ou dégradants, 16 CEDH, grande chambre, 4 novembre 2014, Tarakhel c. Suisse, n° 29217/12; CEDH, grande chambre, 21 janvier 2011, M.S.S. c. Belgique et Grèce, n°30696/09.

13au sens de l’article 4 de la Charte17, et qu’il est indifférent, aux fins de l’application dudit article 4 de la Charte, que ce soit au moment même du transfert, lors de la procédure d’asile ou à l’issue de celle-ci que la personne concernée encourrait, en raison de son transfert vers l’Etat membre responsable, au sens du règlement Dublin III, un risque sérieux de subir un traitement inhumain et dégradant18.

En l’espèce, si le demandeur explique ne pas avoir introduit de demande de protection internationale à Malte, au motif qu’« Il n’y a pas de sécurité à Malte »19 et que « Nous étions mal traités »20, force est de constater que il ne fournit pas le moindre détail quant à des vécus personnels en tant que demandeur de protection internationale qui permettrait de conclure à l’existence de traitements contraires à l’article 3 de la CEDH. Ce constat n’est pas énervé par le fait qu’il ait passé 5 à 6 mois en rétention, dans la mesure où il n’a pas introduit de demande de protection internationale à Malte et qu’il s’y trouvait partant en séjour irrégulier de sorte que son placement en rétention était a priori conforme à la législation européenne applicable en la matière, à savoir la directive du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.

En ce qui concerne la crainte du demandeur qu’en cas de retour à Malte, outre le fait d’être considéré comme ayant retiré sa demande de protection internationale, il serait exposé à des poursuites pénales et à des sanctions administratives, force est de rappeler que les autorités maltaises ont accepté la reprise en charge du demandeur sur base de l’article 13, paragraphe (1) du règlement Dublin III, le demandeur n’ayant dès lors jamais déposé de demande de protection internationale à Malte.

Ensuite, et même si les demandeurs de protection internationale retournés à Malte en application du règlement Dublin III sont susceptibles de connaître certains problèmes en ce qui concerne la reprise en charge de l’examen de leur demande de protection internationale, et notamment le risque de se voir infliger une condamnation pénale pour avoir quitté illégalement le territoire maltais, la source internationale citée par le demandeur confirme que les personnes concernées se voient néanmoins désigner un avocat dans le cadre de l’assistance judiciaire21, de sorte que si ladite procédure, respectivement les conséquences pénales de celle-ci, étaient de nature à violer les articles 3 de la CEDH ou 4 de la Charte, il appartiendra au demandeur de faire valoir ses droits directement auprès des autorités maltaises en usant des voies de droit adéquates, respectivement devant les instances européennes compétentes, étant relevé que le demandeur ne fournit pas d’éléments mettant valablement en cause le fait que l’Etat maltais est a priori un Etat de droit où une personne, estimant être privée de ses droits, dispose de voies de recours idoines, Malte étant censée, en tant que membre de l’Union européenne et signataire de la CEDH, du Pacte international des droits civils et politiques ou de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que de la Convention de Genève, respecter les droits et libertés prévus par ces textes internationaux et disposer d’un système de recours efficace contre les violations de ces droits et libertés.

17 CJUE, 16 février 2017, C.K., H.F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16, pts. 65 et 96.

18 CJUE, grande chambre, 19 mars 2019, affaire C-163/17, Abubacarr Jawo c. Bundesrepublik Deutschland, pt.

88.

19Entretien en vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement Dublin III, page 5.

20 Ibidem.

21 Page 35 du rapport AIDA.

14 Dans ce contexte, force est, par ailleurs, de relever que le fait même de limiter ou de restreindre totalement ou partiellement l’accès aux conditions matérielles d’accueil à des demandeurs de protection internationale ayant quitté sans autorisation leur lieu d’hébergement est explicitement autorisé par la législation européenne, à savoir par l’article 20 de la directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale, dénommée ci-après « la directive Accueil ». En effet, ladite directive prévoit expressément la possibilité de limiter, voire de retirer, le bénéfice des conditions matérielles d’accueil, notamment lorsqu’un demandeur abandonne le lieu de résidence fixé par l’autorité compétente sans en avoir informé ladite autorité ou, si une autorisation est nécessaire à cet effet, sans l’avoir obtenue.

Par ailleurs, le demandeur n’apporte pas la preuve que de manière générale, les droits des demandeurs ou des bénéficiaires d’une protection internationale à Malte ne seraient automatiquement et systématiquement pas respectés, ou encore que ceux-ci n’auraient à Malte aucun droit ou aucune possibilité de les faire valoir auprès des autorités maltaises en usant des voies de droit adéquates22, étant encore relevé que Malte est signataire de la Charte, de la CEDH et de la Convention du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, de la Convention de Genève ainsi que du Protocole additionnel du 31 janvier 1967 relatif aux réfugiés et, à ce titre, est censée en appliquer les dispositions.

Cette conclusion n’est pas énervée par l’arrêt de la CourEDH du 11 mars 2021 soulevé par le demandeur afin de faire constater un risque réel de subir des traitements inhumains et dégradants en cas de transfert vers Malte, dans la mesure où la situation du demandeur diffère de celle qui a été soumise à l’appréciation de la CourEDH. Il résulte de l’arrêt précité que l’intéressé, séjournant irrégulièrement sur le territoire maltais, avait été placé en isolement pour sa propre sécurité et à sa propre demande et que l’Etat maltais a été condamné pour violation de l’article 3 de la CEDH en raison de la durée de l’isolement de la personne concernée, des conditions dans lesquelles elle avait été maintenue en isolément, du fait de ne pas avoir évalué si la santé physique et mentale du concerné permettaient son maintien en isolement, et d’avoir placé le concerné, à la suite de son isolement dans des locaux destinés à la mise en quarantaine de nouveaux arrivants au Centre de rétention en question23. A cela s’ajoute qu’il s’agissait d’un ressortissant de pays tiers en séjour irrégulier placé en rétention administrative en vue de la préparation de la procédure d’éloignement vers son pays d’origine, situation qui diffère diamétralement de celle de Monsieur …, lequel sera transféré à Malte en application du règlement Dublin III.

Dans ces circonstances et dans la mesure où le demandeur n’a pas fait état d’autres éléments dont il se dégagerait que compte tenu de sa situation personnelle, il serait exposé à un risque réel de subir des traitements contraires à l’article 3 de la CEDH, nonobstant le constat fait ci-avant de l’absence, à Malte, de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs, au sens de l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III, le tribunal retient que le moyen tiré de la violation de l’article 3 de la CEDH encourt le rejet.

Quant au moyen tiré d’une violation de l’article 17, paragraphe (1) du règlement Dublin 22 Voir, pour les demandeurs de protection internationale : article 26 de la directive n°2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale.

23 CEDH, 11 mars 2021, Feilazoo. c. Malte, n°6865/19, points 89-93.

15III, au motif de la non-application de la clause discrétionnaire y inscrite, le tribunal relève que ledit article prévoit ce qui suit : « Par dérogation à l’article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d’examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. […] ». A cet égard, le tribunal précise que la possibilité, pour le ministre, d’appliquer cette disposition du règlement Dublin III relève de son pouvoir discrétionnaire, s’agissant d’une disposition facultative qui accorde un pouvoir d’appréciation étendu aux Etats membres24, le caractère facultatif du recours à la disposition en question ayant encore été souligné dans l’arrêt, précité, de la CJUE du 16 février 201725. Si un pouvoir discrétionnaire des autorités administratives ne s’entend certes pas comme un pouvoir absolu, inconditionné ou à tout égard arbitraire, mais comme la faculté qu’elles ont de choisir, dans le cadre des lois, la solution qui leur paraît préférable pour la satisfaction des intérêts publics dont elles ont la charge26, et s’il appartient au juge administratif de vérifier si les motifs invoqués ou résultant du dossier sont de nature à justifier la décision attaquée27, de sorte que lorsque l’autorité s’est méprise, à partir de données fausses en droit ou en fait, sur ses possibilités de choix et sur les limites de son pouvoir d’appréciation, il y a lieu d’annuler la décision en question, encore faut-il que pareille erreur dans le chef de l’autorité administrative résulte effectivement des éléments soumis au tribunal.

En l’espèce, le demandeur invoque (i) des difficultés pour les demandeurs de protection internationale d’accéder à la procédure après leur retour à Malte, et exposant les personnes qui auraient illégalement quittés Malte à des poursuites pénales après leur transfert tel que mis en avant par le rapport d’AIDA, et (ii) du risque réel d’être immédiatement arrêté à son retour à Malte et placé en détention dans des conditions inhumaines et dégradantes.

Or, étant donné qu’il vient de rejeter les moyens tirés d’une violation de l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III et de l’article 3 de la CEDH, le tribunal retient qu’il n’est pas établi qu’en ne faisant pas usage de la clause discrétionnaire prévue à l’article 17, paragraphe (1), précité, du règlement Dublin III, le ministre se serait mépris sur ses possibilités de choix et sur les limites de son pouvoir d’appréciation, et qu’il ne ressort d’aucun élément soumis à l’appréciation du tribunal que le demandeur s’exposerait à des poursuites pénales et serait arrêté et placé en rétention dans des conditions inhumaines et dégradantes, de sorte que ses allégations en ce sens sont à rejeter pour être dénuées de fondement.

Au vu des développements qui précèdent, le tribunal retient que le moyen tiré de la violation de l’article 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III est à rejeter.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours en annulation est à rejeter pour n’être fondé en aucun de ses moyens.

Par ces motifs le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

24 CJUE, 21 décembre 2011, N.S. e.a., C-411/10 et C-493/10, point 65.

25 CJUE, 16 février 2017, C. K., H. F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16, pts. 88 et 97.

26 Trib. adm., 10 octobre 2007, n° 22641 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Recours en annulation, n° 55 et les autres références y citées.

27 CdE, 11 mars 1970, Pas. 21, p.339.

16 reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit non justifié, partant en déboute ;

rejette la demande de surseoir à statuer en vue de la saisine de la CJUE d’une question préjudicielle ;

condamne le demandeur aux frais et dépens.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique de vacation du 4 août 2021 par :

Thessy Kuborn, vice-président, Géraldine Anelli, premier juge, Marc Frantz, juge, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 4 août 2021 Le greffier du tribunal administratif 17


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 46124
Date de la décision : 04/08/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 21/10/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2021-08-04;46124 ?

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