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05/08/2021 | LUXEMBOURG | N°46263

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 05 août 2021, 46263


Tribunal administratif N° 46263 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 juillet 2021 chambre de vacation Audience publique extraordinaire du 5 août 2021 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 28 (1), L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46263 du rôle et déposée le 20 juillet 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Ibtihal EL

BOUYOUSFI, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au ...

Tribunal administratif N° 46263 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 juillet 2021 chambre de vacation Audience publique extraordinaire du 5 août 2021 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 28 (1), L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46263 du rôle et déposée le 20 juillet 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Ibtihal EL BOUYOUSFI, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … au … (Soudan), de nationalité soudanaise, assigné à résidence à la structure d’hébergement d’urgence du Kirchberg (SHUK), sise à L-1734 Luxembourg, 11, rue Carlo Hemmer, tendant à l’annulation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 5 juillet 2021 de le transférer vers l’Italie comme étant l’Etat membre responsable pour connaître de sa demande de protection internationale ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 30 juillet 2021 ;

Vu l’article 1er de la loi du 19 décembre 2020 portant adaptation temporaire de certaines modalités procédurales en matière civile et commerciale1 ;

Vu la communication de Maître Marc-Olivier ZARNOWKSI, en remplacement de Maître Ibtihal EL BOUYOUSFI, du 3 août 2021 suivant laquelle elle marque son accord à ce que l’affaire soit prise en délibéré sans sa présence ;

Vu la communication du délégué du gouvernement du 3 août 2021 suivant laquelle il marque son accord à ce que l’affaire soit prise en délibéré sans sa présence ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport à l’audience publique de vacation du 4 août 2021.

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Le 27 avril 2021, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, ci-après désigné par « le ministère », une demande en obtention d’une protection internationale au sens de la loi 1 « Les affaires pendantes devant les juridictions administratives, soumises aux règles de la procédure écrite et en état d’être jugées, pourront être prises en délibéré sans comparution des mandataires avec l’accord de ces derniers. » 1 modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par la « loi du 18 décembre 2015 ».

Le même jour, Monsieur … fut entendu par un agent de la Police Grand-Ducale, service de police judiciaire, section criminalité organisée – police des étrangers, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg. Il s’avéra à cette occasion, suite à la comparaison des empreintes digitales de Monsieur … avec la base de données EURODAC et suite aux déclarations de ce dernier, qu’il avait franchi irrégulièrement la frontière italienne le 28 février 2021 et qu’il y avait fait l’objet d’une prise de ses empreintes dactyloscopiques le 1er mars 2021.

Toujours le même jour, Monsieur … fut encore entendu par un agent du ministère en vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ci-après désigné par « le règlement Dublin III ».

Le 28 avril 2021, l’autorité ministérielle luxembourgeoise adressa aux autorités italiennes une demande de prise en charge de Monsieur … sur base de l’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III.

Par arrêté du 11 mai 2021, notifié à l’intéressé le lendemain, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », ordonna l’assignation à résidence de Monsieur … à la structure d’hébergement d’urgence du Kirchberg, ci-après dénommée « SHUK », pour une durée de trois mois.

Par courrier du 17 mai 2021, les autorités italiennes acceptèrent la prise en charge de Monsieur … sur base de l’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III.

Par décision du 5 juillet 2021, notifiée à l’intéressé par courrier recommandé envoyé le même jour, le ministre informa Monsieur … de sa décision de le transférer dans les meilleurs délais vers l’Italie, sur base des dispositions de l’article 28, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 et de celles de l’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III, la décision étant libellée comme suit : « [ …] Vous avez introduit une demande de protection internationale au Luxembourg en date du 27 avril 2021 au sens de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire (ci-après « la loi du 18 décembre 2015 »). En vertu des dispositions de l'article 28(1) de la loi précitée et des dispositions de l'article 13(1) du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 (ci-après « le règlement DIII »), le Grand-Duché de Luxembourg n'examinera pas votre demande de protection internationale et vous serez transféré vers l'Italie qui est l'Etat membre responsable pour traiter cette demande.

Les faits concernant votre demande, la motivation à la base de la présente décision, les bases légales sur lesquelles elle s'appuie, de même que les informations quant aux voies de recours ouvertes sont précisés ci-après.

2 En mains le rapport de Police Judiciaire du 27 avril 2021 et le rapport d'entretien Dublin III sur votre demande de protection internationale du 27 avril 2021. En mains également le certificat médical du 7 juin 2021 que vous avez transmis au ministère.

1. Quant aux faits à la base de votre demande de protection internationale En date du 27 avril 2021, vous avez introduit une demande de protection internationale auprès du service compétent de la Direction de l'immigration.

La comparaison de vos empreintes dactyloscopiques avec la base de données Eurodac a révélé que vous avez franchi irrégulièrement la frontière italienne en date du 1er mars 2021.

Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat responsable, un entretien Dublin III a été mené en date du 27 avril 2021.

Sur cette base, la Direction de l'immigration a adressé en date du 28 avril 2021 une demande de prise en charge aux autorités italiennes sur base de l'article 13(1) du règlement DIII, demande qui fut acceptée par lesdites autorités italiennes en date du 17 mai 2021.

2. Quant aux bases légales En tant qu’Etat membre de l'Union européenne, l’Etat luxembourgeois est tenu de mener un examen aux fins de déterminer l'Etat responsable conformément aux dispositions du règlement DIII établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride.

S'il ressort de cet examen qu'un autre Etat est responsable du traitement de la demande de protection internationale, la Direction de l'immigration rend une décision de transfert après que l'Etat requis a accepté la prise ou la reprise en charge du demandeur.

Aux termes de l'article 28(1) de la loi du 18 décembre 2015, le Luxembourg n'est pas responsable pour le traitement d'une demande de protection internationale si cette responsabilité revient à un autre Etat.

Lorsqu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, du règlement DIII, notamment des données visées au règlement (UE) n° 603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d'un État membre dans lequel il est entré en venant d'un État tiers, cet État membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale, conformément à l'article 13(1) du règlement DIII.

En application de l'article 3(2), alinéa 2, du règlement DIII, il y a lieu d'analyser s'il existe de sérieuses raisons de croire que la procédure de demande de protection internationale ou les conditions d'accueil des demandeurs de protection internationale présentent des défaillances systémiques susceptibles d'entraîner un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (ci-après « la Charte UE ») ou de l'article 3 de la Convention du 4 novembre 3 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (ci-après la « CEDH »).

Un Etat n'est pas non plus autorisé à transférer un demandeur vers l'Etat normalement responsable lorsqu'il existe des preuves ou indices avérés qu'un demandeur risquerait dans son cas particulier d'être soumis dans cet Etat à un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 3 CEDH ou 4 de la Charte UE.

3. Quant à la motivation de la présente décision de transfert En l'espèce, il ressort des résultats du 27 avril 2021 de la comparaison de vos données dactyloscopiques avec celles enregistrées dans la base de données Eurodac que vous avez franchi irrégulièrement la frontière italienne en date du 1er mars 2021.

Selon vos déclarations, vous auriez quitté le Soudan en septembre 2017 en direction de la Libye où vous seriez resté trois ans et demi et où vous auriez subi des maltraitances de la part de vos passeurs libyens. En date du 27 février 2021, vous seriez monté à bord d’une embarcation en direction de l’Italie. Après un mois, vous auriez continué votre voyage en direction du Luxembourg où vous seriez arrivé en date du 25 avril 2021.

Monsieur, vous indiquez avoir quitté l'Italie parce que le Luxembourg aurait toujours été la destination de votre choix, étant donné que les étrangers seraient les bienvenus et qu’il n’y aurait pas de racisme.

Lors de votre entretien Dublin III en date du 27 avril 2021, vous n'avez pas fait mention de souffrir de problèmes d’estomac et de digestion suite aux maltraitances subies en Libye. Vous soumettez dans ce contexte une ordonnance du 7 juin 2021 selon laquelle vous présenteriez plusieurs lésions qui pourraient être la conséquence des maltraitances que vous auriez subies en Libye.

Rappelons à cet égard que l'Italie est liée à la Charte UE et est partie à la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (ci-après « la Convention de Genève »), à la CEDH et à la Convention du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (« Conv. torture »).

Il y a également lieu de soulever que l'Italie est liée par la Directive (UE) n° 2013/32 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale [refonte] (« directive Procédure ») et par la Directive (UE) n° 2013/33 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale [refonte] (« directive Accueil »).

Soulignons en outre que l'Italie profite, comme tout autre Etat membre, de la confiance mutuelle qu'elle respecte ses obligations découlant du droit international et européen en la matière. S'il est notoire que les autorités italiennes connaissent des problèmes quant à leurs capacités d'accueil des demandeurs de protection internationale, qui peuvent être confrontés à d'importantes difficultés sur le plan de l'hébergement et des conditions de vie, il n'y a toutefois aucune sérieuse raison de croire qu'il existe, en Italie, des défaillances systémiques dans la procédure de demandes de protection internationale et les conditions 4 d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la Charte UE.

Notons dans ce contexte que l’Italie a adopté en date du 21 octobre 2020 le décret n° 130/2020 qui remplace la loi n° 132/2018 du 1er décembre 2018 et met en place le SAI (Sistema di accoglienza e integrazione). Ce nouveau système de protection en matière d’accueil et d’intégration a réformé le système établi en 2018 et permet depuis lors d’améliorer l’accueil pour les demandeurs de protection internationale.

Par conséquent, en l'absence d'une pratique actuelle avérée en Italie de violation systématique de ces normes minimales de l'Union européenne, cet Etat est présumé respecter ses obligations tirées du droit international public, en particulier le principe de non-refoulement énoncé expressément à l'article 33 de la Convention de Genève, ainsi que l'interdiction des mauvais traitements ancrée à l'article 3 CEDH et à l'article 3 Conv. torture, de même que les conditions minimales d'accueil fixées dans la directive Accueil.

Par ailleurs, il n’existe en particulier aucune jurisprudence de la Cour EDH ou de la CJUE, de même qu'il n’existe aucune recommandation de l'UNHCR visant de façon générale à suspendre les transferts vers l'Italie sur base du règlement (UE) n° 604/2013.

Monsieur, vous n’avez pas non plus démontré que, dans votre cas concret, vos conditions d'existence en Italie revêtiraient un tel degré de pénibilité et de gravité qu’elles seraient constitutives d'un traitement contraire à l'article 3 CEDH ou encore à l'article 3 Conv. torture.

Relevons dans ce contexte que vous avez la possibilité, dès votre arrivée en Italie, d'introduire une demande de protection internationale et si vous deviez estimer que les autorités italiennes ne respectent pas vos droits élémentaires, il vous appartient de saisir les autorités compétentes italiennes, notamment judiciaires.

Au vu de ce qui précède, l'application de l'article 3(2), alinéa 2, du règlement DIII ne se justifie pas.

Aussi, les informations à ma disposition ne sauraient donner lieu à l'application des articles 8, 9, 10 et 11 du règlement DIII.

Il n'existe en outre pas non plus de raisons pour une application de l'article 16(1) du règlement DIII pouvant amener le Luxembourg à assumer la responsabilité de l'examen au fond de votre demande de protection internationale.

Il convient encore de souligner qu'en vertu de l'article 17(1) du règlement DIII (clause de souveraineté), chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par le ressortissant d'un pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement, pour des raisons humanitaires ou exceptionnelles. Les autorités luxembourgeoises disposent d'un pouvoir discrétionnaire à cet égard, et l'application de la clause de souveraineté ne constitue pas une obligation.

5 Il ne ressort pas de l'ensemble des éléments de votre dossier que les autorités luxembourgeoises auraient dû faire application de la clause de souveraineté prévue à l'article 17(1) du règlement DIII. En effet, vous ne faites valoir aucun élément humanitaire ou exceptionnel qui ne serait pas couvert par les dispositions du règlement DIII et qui devrait amener les autorités luxembourgeoises à se déclarer responsables pour le traitement de votre demande de protection internationale.

Pour l'exécution du transfert vers l'Italie, seule votre capacité de voyager est déterminante et fera l'objet d'une détermination définitive dans un délai raisonnable avant le transfert.

Si votre état de santé devait temporairement constituer un obstacle à l'exécution de votre renvoi vers l'Italie, l'exécution du transfert serait suspendue jusqu'à ce que vous seriez à nouveau apte à être transféré. Par ailleurs, si cela s'avère nécessaire, la Direction de l'immigration prendra en compte votre état de santé lors de l'organisation du transfert vers l'Italie en informant les autorités italiennes conformément aux articles 31 et 32 du règlement DIII à condition que vous exprimiez votre consentement explicite à cette fin.

D'autres raisons individuelles pouvant éventuellement entraver la remise aux autorités italiennes n'ont pas été constatées. […] ».

En date 23 juillet 2021, le ministre s’adressa encore au service de police judiciaire, service criminalité organisée - police des étrangers, de la Police Grand-Ducale en vue d’organiser le transfert de Monsieur … vers l’Italie.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 20 juillet 2021, inscrite sous le numéro 46263 du rôle, Monsieur … a introduit un recours en annulation contre la décision ministérielle précitée du 5 juillet 2021.

L’article 35, paragraphe (4), de la loi du 18 décembre 2015, introduit par la loi du 16 juin 2021 portant modification de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, publiée au Mémorial en date du 1er juillet 2021, prévoit dorénavant un recours en réformation, suspensif de plein droit, contre les décisions visées à l’article 28, paragraphe (1), de la même loi.

Le tribunal constate à cet égard que le demandeur a introduit un recours en annulation contre la décision ministérielle du 5 juillet 2021 alors que la loi du 18 décembre 2015, telle que modifiée, prévoit un recours en réformation.

Dans la mesure où un recours en annulation a été introduit dans une matière prévoyant un recours au fond n’est pas de nature à entraîner l’irrecevabilité du recours, alors qu’il est de jurisprudence constante que si, dans une matière dans laquelle la loi a institué un recours en réformation, le demandeur conclut à la seule annulation de la décision attaquée, le recours est néanmoins recevable dans la mesure où le demandeur se borne à invoquer des moyens de légalité et à condition d'observer les règles de procédure spéciales pouvant être prévues et des délais dans lesquels le recours doit être introduit2.

2 Trib. adm., 3 mars 1997, n° 9693 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Recours en réformation, n° 2 et les autres références y citées.

6 Le recours en annulation est partant recevable dans la mesure des moyens d’annulation proposés, ledit recours ayant été, par ailleurs, introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur rappelle tout d’abord les faits et rétroactes à la base de la décision déférée, tout en insistant en particulier sur son état de santé dont il avait fait état lors de son entretien Dublin III, en donnant à considérer qu’il ressortirait d’une note du 4 juin 2021 adressée par la Direction de la Santé à son médecin traitant qu’il souffrirait d’une tuberculose latente qui devrait être traitée, ainsi que d’une ordonnance médicale du 7 juin 2021 de la Direction de l’Inspection sanitaire qu’il présenterait plusieurs lésions et cicatrices liées à des coups de fouet reçus lors de son séjour en Lybie.

En droit, il conclut en premier lieu à l’annulation de la décision litigieuse pour abus du principe de confiance mutuelle et de la présomption de respect des droits fondamentaux alors que le ministre aurait manifestement méconnu la situation prévalant en Italie, en se méprenant sur les conditions matérielles d’accueil des demandeurs de protection internationale, comprenant le logement, la nourriture et l’habillement, en nature ou en espèces qui seraient insuffisantes. Il reproche au ministre de s’être contenté de témoigner sans aucune prudence à l’égard de l’Italie, une « confiance mutuelle manifestement fictive » lui permettant de se « défaire simplement et rapidement d’une partie de sa charge de traitement » de sa demande d’asile au moyen des critères établis dans le règlement Dublin III et de ne pas s’être référé à un quelconque élément objectif de preuve ou à une explication cohérente et pertinente en affirmant par une formule stéréotypée que le système d’accueil des demandeurs de protection internationale transférés vers l’Italie en vertu du règlement Dublin III fonctionnerait correctement. En s’appuyant sur la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne, ci-après la « CJUE »3, 4 et de la Cour européenne des droits de l’homme, ci-après « la CourEDH »5, en la matière, il conclut encore que le ministre aurait appliqué le principe de la confiance mutuelle, tout en présumant la protection des droits fondamentaux des demandeurs de protection internationale par l’Italie, sans cependant avoir pris en compte les informations publiquement disponibles qui établiraient un risque de violation de ses droits fondamentaux garantis par l’article 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ci-après la « CEDH », respectivement de l’article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ci-après la « Charte ».

Dans ce contexte, il cite un rapport d’« Asylum Information Database » (AIDA), intitulé « Country Report : Italy, 2020 Update » mis à jour le 3 juin 2021, un rapport de l’« Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) », intitulé « Conditions d’accueil en Italie. Rapport actualisé sur la situation en Italie des personnes requérantes d’asile et des bénéficiaires d’une protection, en particulier des personnes renvoyées dans le cadre de Dublin » de janvier 2020, un rapport de l’OSAR et de l’organisation « borderline-europe », intitulé « Aufnahmebedingungen in Italien. Aktuelle Entwicklungen » du 10 juin 2021 et un rapport de l’OSAR intitulé « Conditions d’accueil en Italie : pas d’amélioration en vue » du 17 juin 2021, desquels il se dégagerait que le système italien d’accueil des demandeurs et bénéficiaires de protection internationale présenterait des défaillances systémiques. Il se dégagerait plus particulièrement de ces rapports que si les ressortissants de pays tiers faisant 3 CJUE, 21 décembre 2011, affaires jointes C-411/10, N.S. c. Secretary of State for the Home Department et C-493/10.

4 CJUE, 19 mars 2019, affaire C-297/17, Ibrahim.

5 CEDH, grande chambre, 21 janvier 2011, M.S.S. c. Belgique et Grèce, n°30696/09.

7 l’objet d’une décision de transfert Dublin avaient en principe un droit à un hébergement après leur transfert en Italie, dans la pratique, un nombre important d’entre eux se retrouverait dans la rue ou, au mieux, dans des centres d’hébergement d’urgence gérés par des organisations non gouvernementales. Par ailleurs, suivant ces rapports, la procédure d’asile concernant ces ressortissants de pays tiers transférés en vertu du règlement Dublin III serait soumise aux mêmes délais d’attente que celle des autres demandeurs d’asile, ce à quoi s’ajouterait le fait que le nouveau gouvernement italien aurait décidé de réduire les budgets alloués notamment aux centres d’hébergement ce qui impliquerait une nouvelle aggravation de la situation des demandeurs de protection internationale dans ce pays.

Il fait encore valoir qu’il ne ressortirait pas des pièces du dossier administratif ni de la décision querellée que le ministre aurait pris en compte la situation de « déliquescence » du système d’accueil des demandeurs de protection internationale en Italie, tout en reprochant au ministre de ne pas avoir écarté l’application du principe de confiance mutuelle à l’égard de l’Italie malgré les informations publiquement disponibles concernant les conditions d’accueil en Italie, qui établiraient un risque « énorme et réel » de violation de ses droits fondamentaux du fait des difficultés de trouver un hébergement, d’accéder aux soins de santé et d’accéder effectivement à la procédure en cas de transfert.

A cet égard, il sollicite la saisine de la CJUE, d’une question préjudicielle sur le fondement de l’article 267, alinéa 1er, points (a) et (b), et alinéa 3, du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) afin que celle-ci se prononce sur l’interprétation à donner à l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III eu égard aux conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale en Italie et aux rapports précités qui laisseraient manifestement conclure à l’existence dans ce pays de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale et à un risque de traitements inhumains ou dégradants au sens de l’article 4 de la Charte.

En deuxième lieu, le demandeur se prévaut d’une violation de l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III, en soutenant que son transfert vers l’Italie l’exposerait à un risque réel de violation de ses droits fondamentaux garantis par l’article 4 de la Charte respectivement de l’article 3 de la CEDH, conformément aux principes retenues par la CJUE6.

En se basant sur une définition de défaillances systémiques donnée par un tribunal allemand7, un arrêt de la CJUE8, ainsi que sur les mêmes rapports précités, il soutient que le système d’accueil italien des demandeurs de protection internationale et en particulier des demandeurs transférés vers l’Italie en vertu du règlement Dublin III, serait défaillant en ce qui concerne l’accès et les conditions matérielles d’accueil, comprenant le logement, la nourriture et l’habillement, en nature ou en espèces.

En troisième lieu, le demandeur s’empare d’une violation, par le ministre, de l’article 3 de la CEDH en ce que celui-ci aurait commis une erreur manifeste d’appréciation quant aux conditions minimales d’accueil des demandeurs de protection internationale en Italie, ainsi que quant à sa situation personnelle. En se basant sur un arrêt de la CourEDH9, suivant lequel il appartient en principe au requérant de produire des éléments susceptibles de démontrer qu’il y a 6 CEDH, grande chambre, 21 janvier 2011, M.S.S. c. Belgique et Grèce, n°30696/09.

7 OVG Lüneburg, Urt. V. 29 janvier 2018 – 10 LB 82/17.

8 CJUE, grande chambre, 19 mars 2019, affaire C-163/17, Abubacarr Jawo c. Bundesrepublik Deutschland.

9 CEDH, 12 janvier 2014, FG c. Suède, n° 43611/11.

8 des raisons sérieuses de penser que, si la mesure incriminée était mise à exécution, il serait exposé à un risque réel de se voir infliger un traitement contraire à l’article 3 de la CEDH, mais qu’eu égard à la situation particulière dans laquelle se trouvent souvent les demandeurs d’asile, il serait fréquemment nécessaire de leur accorder le bénéfice du doute pour apprécier la crédibilité de leurs déclarations et des documents qui les appuient, le demandeur fait encore valoir que les rapports et articles précités démontreraient la situation délicate en matière d’accueil des demandeurs de protection internationale en Italie, de sorte qu’il existerait un risque sérieux et réel qu’il serait accueilli dans des conditions matérielles contraires à l’article 3 de la CEDH.

Finalement, le demandeur invoque une violation de l’article 17, paragraphe (1), du règlement Dublin III, en faisant valoir que le ministre aurait dû se déclarer compétent pour connaître de sa demande de protection internationale, compte tenu des difficultés pour les demandeurs de protection internationale d’accéder en Italie aux conditions matérielles minimales d’accueil telles que mises en avant par les rapports versés en cause, témoignant de son risque réel de subir des traitements inhumains et dégradants contraires aux articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte en cas de transfert en Italie, et au vu de sa vulnérabilité et de son risque de se retrouver à la rue sans aucune aide étatique.

Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours pour n’être fondé dans aucun de ses moyens.

L’article 28, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 prévoit ce qui suit : « Si, en application du règlement (UE) n°604/2013, le ministre estime qu’un autre Etat membre est responsable de la demande, il sursoit à statuer sur la demande jusqu’à la décision du pays responsable sur la requête de prise ou de reprise en charge. Lorsque l’Etat membre requis accepte la prise en charge ou la reprise en charge du demandeur, le ministre notifie à la personne concernée la décision de la transférer vers l’Etat membre responsable et de ne pas examiner sa demande de protection internationale ».

Il s’ensuit que si le ministre estime qu’en application du règlement Dublin III, un autre pays est responsable de l’examen de la demande de protection internationale et si ce pays accepte la prise, respectivement la reprise en charge de l’intéressé, le ministre décide de transférer la personne concernée vers l’Etat membre responsable et de ne pas examiner la demande de protection internationale introduite au Luxembourg.

L’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III, sur lequel le ministre s’est basé pour conclure à la responsabilité des autorités italiennes pour procéder à l’examen de la demande de protection internationale de Monsieur …, prévoit que : « Lorsqu’il est établi, sur la base de preuves ou d’indices tels qu’ils figurent dans les deux listes mentionnées à l’article 22, paragraphe 3, du présent règlement, notamment des données visées au règlement (UE) n° 603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d’un État membre dans lequel il est entré en venant d’un État tiers, cet État membre est responsable de l’examen de la demande de protection internationale. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière. ».

Le tribunal constate de prime abord qu’il est constant en cause que la décision de transférer le demandeur vers l’Italie et de ne pas examiner sa demande de protection 9 internationale a été adoptée par le ministre en application de l’article 28, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 et de l’article 13, paragraphe (1) du règlement Dublin III, au motif que l’Etat responsable de l’examen de la demande de protection internationale du demandeur serait l’Italie, en ce qu’il aurait franchi irrégulièrement la frontière italienne en date du 28 février 2021 et que les autorités italiennes ont accepté sa prise en charge le 17 mai 2021, de sorte que c’est a priori à bon droit que le ministre a décidé de le transférer vers ledit Etat membre et de ne pas examiner sa demande de protection internationale.

Force est ensuite de constater que le demandeur ne conteste pas la compétence de principe de l’Italie, respectivement l’incompétence de principe de l’Etat luxembourgeois, mais soutient qu’un transfert en Italie l’exposerait à un risque de subir des traitements inhumains et dégradants en violation des articles 3, paragraphe (2), alinéa 2 et 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III, respectivement des articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte, en raison des conditions d’accès et des conditions matérielles d’accueil résultant des rapports versés en cause.

Or, les possibilités légales pour le ministre de ne pas procéder au transfert d’un demandeur de protection internationale, malgré la compétence de principe d’un autre Etat membre, et d’examiner, le cas échéant, sa demande sont prévues, d’une part, par l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2 du règlement Dublin III, lequel présuppose l’existence de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la Charte, auquel cas le ministre ne peut pas transférer l’intéressé dans cet Etat tout en poursuivant la procédure de détermination de l’Etat membre responsable, ainsi que, d’autre part, par l’article 17, paragraphe (1) du même règlement, accordant au ministre la simple faculté d’examiner la demande de protection internationale nonobstant la compétence de principe d’un autre Etat membre pour ce faire.

A cet égard, le tribunal se doit tout d’abord de relever que la décision déférée du 5 juillet 2021 a été prise en application de l’article 28, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 et de l’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III, cette dernière disposition visant une hypothèse distincte du cas d’un demandeur ayant introduit une demande de protection internationale dans un premier Etat membre, hypothèse plus particulièrement visée à l’article 18 du règlement Dublin III, étant, à cet égard, relevé qu’il est constant en cause pour résulter également des propres déclarations du demandeur auprès de la police grand-

ducale le 27 avril 2021 ainsi qu’auprès d’un agent ministériel lors de son entretien le même jour qu’il a quitté l’Italie sans y avoir introduit une demande de protection internationale.

Dans la mesure où le demandeur n’a pas eu la qualité de demandeur de protection internationale lors de son séjour en Italie, les autorités italiennes ayant d’ailleurs, tel que retenu ci-avant, expressément accepté de le prendre en charge sur base de l’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III, il n’est en tout état de cause pas en mesure de se prévaloir de défaillances systémiques dans le système d’accueil et d’accès aux soins des demandeurs de protection internationale en Italie au sens de l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2 du règlement Dublin III qu’il aurait personnellement pu y rencontrer.

D’autre part, même si, conformément au principe de l’examen de la demande par un seul Etat membre (« one chance only »), le demandeur sera dorénavant considéré par les autorités italiennes comme demandeur de protection internationale, force est de constater qu’il 10 ne fournit aucun élément pertinent permettant de conclure qu’il craint avec raison qu’en tant que demandeur de protection internationale en Italie, les conditions minimales d’accueil n’y seraient pas assurées en raison de défaillances systémiques.

Force est en effet de constater que les éléments produits en cause ne permettent de dégager ni dans son cas particulier ni d’une manière générale l’existence de défaillances systémiques en Italie au sens de l’article 3,paragraphe (2), alinéa 2 du règlement Dublin III prévoit ce qui suit : « Lorsqu’il est impossible de transférer un demandeur vers l’État membre initialement désigné comme responsable parce qu’il y a de sérieuses raisons de croire qu’il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, l’État membre procédant à la détermination de l’État membre responsable poursuit l’examen des critères énoncés au chapitre III afin d’établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. ».

Cette disposition impose à l’Etat membre procédant à la détermination de l’Etat responsable de l’examen de la demande de protection internationale d’un demandeur d’asile de s’abstenir de transférer l’intéressé vers l’Etat membre initialement désigné comme responsable, en application des critères prévus par le règlement Dublin III, s’il y a de sérieuses raisons de croire qu’il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la Charte, respectivement de l’article 3 de la CEDH.

La situation visée par ledit article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III est celle de l’existence de défaillances systémiques empêchant tout transfert de demandeurs d’asile vers un Etat membre déterminé10.

A cet égard, le tribunal relève que l’Italie est tenue au respect, en tant que membre de l’Union européenne et signataire de ces conventions, des droits et libertés prévus par la CEDH, le Pacte international des droits civils et politiques ou la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que du principe de non-refoulement prévu par la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, ci-après désignée par « la Convention de Genève », et dispose a priori d’un système de recours efficace contre les violations de ces droits et libertés. Il y a encore lieu de souligner, dans ce contexte, que le système européen commun d’asile a été conçu dans un contexte permettant de supposer que l’ensemble des Etats y participant qu’ils soient Etats membres ou Etats tiers, respectent les droits fondamentaux, en ce compris les droits trouvant leur fondement dans la Convention de Genève, ainsi que dans la CEDH, et que les Etats membres peuvent s’accorder une confiance mutuelle à cet égard11. C’est précisément en raison de ce principe de confiance mutuelle que le législateur de l’Union européenne a adopté le règlement Dublin III en vue de rationaliser le traitement des demandes d’asile et d’éviter l’engorgement du système par l’obligation, pour les autorités des Etats, de traiter des demandes multiples introduites par un même demandeur, d’accroître la sécurité juridique en 10 CJUE, 16 février 2017, C. K., H. F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16, pt. 92.

11 CJUE, 21 décembre 2011, affaires jointes C-411/10, N.S. c. Secretary of State for the Home Department et C-

493/10, M.E. et al. c. Refugee Applications Commissioner Minister for Justice, Equality and Law Reform., point 78.

11 ce qui concerne la détermination de l’Etat responsable du traitement de la demande d’asile et ainsi d’éviter le « forum shopping », l’ensemble ayant pour objectif principal d’accélérer le traitement des demandes tant dans l’intérêt des demandeurs d’asile que des Etats participants12. Dès lors, comme ce système européen commun d’asile repose sur la présomption – réfragable – que l’ensemble des Etats y participant respectent les droits fondamentaux, en ce compris les droits trouvant leur fondement dans la Convention de Genève, et que les Etats membres peuvent s’accorder une confiance mutuelle à cet égard, il appartient au demandeur de rapporter la preuve matérielle de défaillances avérées13. Dans son arrêt du 16 février 2017, la CJUE a, d’ailleurs, expressément réaffirmé l’existence tant de ce principe de confiance mutuelle que de la présomption réfragable s’en dégageant du respect des droits fondamentaux par les Etats participant au système européen commun d’asile14, tout en apportant des précisions quant à l’interprétation de l’article 4 de la Charte et aux obligations en découlant pour les Etats membres.

Le tribunal est également amené à souligner que le système Dublin III est basé sur l’hypothèse que tous les Etats membres de l’Union européenne sont des Etats de droit dans lesquels les demandeurs de protection internationale peuvent faire valoir leurs droits et requérir l’aide des organes étatiques, notamment judiciaires, au cas où ils estiment que leurs droits ont été lésés. S’il est exact qu’il est admis qu’une acceptation de prise en charge par un Etat membre peut être remise en cause par un demandeur de protection internationale lorsqu’il existe des défaillances systémiques de la procédure d’asile et des conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale dans cet Etat membre, il n’en reste pas moins que ces défaillances systémiques requièrent, pour être de nature à s’opposer à un transfert, d’être qualifiées de traitements inhumains et dégradants au sens de la Charte.

En effet, suivant la jurisprudence des juridictions administratives15, reposant elle-même sur un arrêt de la CJUE16, des défaillances systémiques au sens de l’article 3, précité, requièrent, pour être de nature à s’opposer à un transfert, d’être qualifiées de traitements inhumains et dégradants au sens des articles 4 de la Charte et 3 de la CEDH. Telle est encore la conclusion à laquelle arrive la CJUE dans son arrêt, précité, du 16 février 201717.

Quant à la preuve à rapporter par le demandeur à l’appui de son moyen tiré de la violation de l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2 du règlement Dublin III, il y a lieu de préciser qu’il se dégage d’un arrêt de la CJUE du 19 mars 201918 que pour relever de l’article 4 de la Charte, auquel ladite disposition du règlement Dublin III renvoie, des défaillances existant dans l’Etat membre responsable, au sens dudit règlement, doivent atteindre un seuil particulièrement élevé de gravité, qui dépend de l’ensemble des données de la cause. Aux termes de ce même arrêt, ce seuil particulièrement élevé de gravité serait atteint lorsque l’indifférence des autorités d’un Etat membre aurait pour conséquence qu’une personne entièrement dépendante de l’aide publique se trouverait, indépendamment de sa volonté et de ses choix personnels, dans une situation de dénuement matériel extrême, qui ne lui permettrait 12 Ibidem, point. 79 ; Voir également : Trib. adm., 26 février 2014, n° 33956 du rôle, trib. adm., 17 mars 2014, n° 34054 du rôle, ainsi que trib. adm., 2 avril 2014, n° 34133 du rôle, disponibles sur www.ja.etat.lu.

13 Voir aussi Verwaltungsgerichtshof Baden-Württemberg, 8 janvier 2015, n° A11 S 858/14.

14 CJUE, 16 février 2017, C. K., H. F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16, pt. 95.

15 Trib. adm., 26 avril 2016, n° 37591, disponible sur: www.ja.etat.lu.

16 CJUE, 10 décembre 2013, C-394/12, Shamso Abdullahi c. Bundesasylamt, point 62.

17 CJUE, 16 février 2017, C.K., H.F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16.

18 CJUE, grande chambre, 19 mars 2019, affaire C-163/17, Abubacarr Jawo c. Bundesrepublik Deutschland, pt.

91.

12 pas de faire face à ses besoins les plus élémentaires, tels que notamment ceux de se nourrir, de se laver et de se loger, et qui porterait atteinte à sa santé physique ou mentale ou la mettrait dans un état de dégradation incompatible avec la dignité humaine19. Ledit seuil ne saurait donc couvrir des situations caractérisées même par une grande précarité ou une forte dégradation des conditions de vie de la personne concernée, lorsque celles-ci n’impliquent pas un dénuement matériel extrême plaçant cette personne dans une situation d’une gravité telle qu’elle peut être assimilée à un traitement inhumain ou dégradant20.

Le demandeur remettant en question cette présomption du respect par l’Italie des droits fondamentaux, puisqu’il affirme y risquer des traitements inhumains et dégradants, il lui incombe de fournir des éléments concrets permettant de la renverser.

Or, le tribunal ne s’est pas vu soumettre d’éléments permettant de conclure à l’existence de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale en Italie, qui entraîneraient un risque de traitements inhumains ou dégradants au sens de l’article 4 de la Charte, empêchant tout transfert de demandeurs d’asile vers ce pays.

En effet, le tribunal se doit tout d’abord de relever que le demandeur se limite à citer de manière générale les dispositions des articles 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III, 4 de la Charte et 3 de la CEDH, de même qu’à se référer à la jurisprudence de la CJUE et de la CourEDH, ainsi qu’à des rapports internationaux sans mise en relation de leur contenu avec sa situation particulière.

En outre, il est certes exact qu’il ressort des documents invoqués par le demandeur que les autorités italiennes ont connu et connaissent toujours de sérieux problèmes quant à leur capacité d’accueil des demandeurs d’asile, impliquant que ceux-ci risquent de se voir confrontés à des difficultés plus ou moins importantes, suivant le cas de figure dans lequel ils se trouvent, au niveau de l’accès à l’hébergement et aux soins, ainsi que des conditions de vie en général, et que la situation régnant en Italie semble inquiétante.

Force est toutefois de constater que les documents invoqués par le demandeur sont insuffisants pour permettre de retenir de manière générale l’existence de défaillances systémiques en Italie, à savoir que les conditions matérielles d’accueil des demandeurs de protection internationale en Italie seraient caractérisées par des carences structurelles d’une ampleur telle qu’il y aurait lieu de conclure d’emblée, et quelles que soient les circonstances du cas d’espèce, à l’existence de risques suffisamment réels et concrets, pour l’ensemble des demandeurs de protection internationale, indépendamment de leur situation personnelle, d’être systématiquement exposés à une situation de dénuement matériel extrême, qui ne leur permettrait pas de faire face à leurs besoins les plus élémentaires, tels que notamment ceux de se nourrir, de se laver et de se loger, et qui porterait atteinte à leur santé physique ou mentale ou les mettrait dans un état de dégradation incompatible avec la dignité humaine, au point que leur transfert dans ce pays constituerait en règle générale un traitement prohibé par l’article 3 de la CEDH et par l’article 4 de la Charte.

En effet, il en ressort des rapports versés par le demandeur que suite à l’abolition des 19 Ibid., pt. 92.

20 Ibid., pt. 93.

13 décrets dits « Salvini » du 24 septembre 2018 ayant mis en place, notamment, une réorganisation du système d’accueil des demandeurs d’asile, qui ont été regroupés dans de grands centres d’accueil, les efforts de répartition sur le territoire pour favoriser l’intégration étant désormais réservés aux mineurs isolés et aux réfugiés reconnus, et suite à l’adoption de nouveaux décrets en date du 21 octobre 2020 confirmés par une loi du 18 décembre 2020, un certain nombre de restrictions mises en place par les décrets du 24 septembre 2018 ont été abolies de sorte que les conditions des demandeurs se sont améliorées. Il ressort également d’articles publiés sur le site internet www.lesechos.fr, dont fait état le délégué du gouvernement, que dorénavant l’utilisation de centres d’accueil plus petits pour héberger les demandeurs d’asile a de nouveau été rendue possible. Les demandeurs d’asile peuvent aussi s’inscrire sur registres de l’état civil et donc posséder d’un domicile légal leur permettant de bénéficier des prestations sanitaires ou d’ouvrir un compte bancaire et les personnes ayant obtenu un permis de séjour peuvent plus facilement le convertir en permis de travail. A cela s’ajoute qu’une protection spéciale est accordée aux personnes qui risquent des « traitements inhumains ou dégradants » en cas de retour dans leur pays d’origine, ou dans le cas où une expulsion irait « à l’encontre du droit à la vie privée et familiale » et les expulsions ou les rapatriements vers des pays où les droits de l’Homme ne sont pas respectés sont suspendus.

Par ailleurs, il convient de relever que le demandeur n’invoque pas non plus de jurisprudence de la CourEDH relative à une suspension générale des transferts vers l’Italie, voire une demande en ce sens de la part de l’UNHCR. Il ne fait pas non plus état de l’existence d’un rapport ou d’un avis émanant de l’UNHCR, ou d’autres institutions ou organismes internationaux, interdisant ou recommandant l’arrêt des transferts vers l’Italie dans le cadre du règlement Dublin III en raison plus particulièrement de la politique d’asile italienne qui exposerait tout demandeur de protection internationale à un traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la Charte.

Au vu des considérations qui précèdent, le moyen tiré d’une violation de l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2 du règlement Dublin III, voire d’une violation du « principe de confiance mutuelle » invoqué par le demandeur dans ce contexte, encourt le rejet.

Il en est de même en ce qui concerne la demande du demandeur de saisir la CJUE d’une question préjudicielle sur le fondement de l’article 267, alinéa 1er, points a) et b) et alinéa 3 du TFUE, dans la mesure où, tel que cela ressort des jurisprudences de la CJUE sur lesquelles le tribunal vient de fonder son analyse, la CJUE s’est d’ores et déjà prononcée sur le principe de confiance mutuelle entre Etats membres et sur l’interprétation à donner à l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III en cas de transfert d’une personne en application dudit règlement, en retenant notamment que si le principe de la confiance mutuelle n’exclut pas qu’un demandeur puisse encourir un risque de traitement contraire à l’article 4 de la Charte, la charge de la preuve de défaillances systémiques ou d’un traitement inhumain et dégradant au sens des dispositions précitées incombe aux demandeurs de protection internationale qui s’en prévalent et s’est pareillement prononcée sur le seuil de gravité à prendre en considération à cet égard.

Il s’ensuit que la question préjudicielle est à rejeter pour défaut de pertinence.

Néanmoins, dans ce cadre, si les Etats membres sont dans l’obligation d’appliquer les règlements européens, il ressort de la jurisprudence de la CourEDH que, dans certains cas, il ne peut être exclu que l’application des règles prescrites par le règlement Dublin III puisse 14 entraîner un risque de violation de l’article 3 de la CEDH, corollaire de l’article 4 de la Charte, la présomption selon laquelle les Etats participants respectent les droits fondamentaux prévus par la CEDH n’étant en effet pas irréfragable21.

Dans ce contexte, la CJUE a suivi le raisonnement de la CourEDH en décidant que, même en l’absence de raisons sérieuses de croire à l’existence de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs dans l’État membre responsable de l’examen de la demande d’asile, le transfert d’un demandeur d’asile dans le cadre du règlement Dublin III ne peut être opéré que dans des conditions excluant que ce transfert entraîne un risque réel et avéré que l’intéressé subisse des traitements inhumains ou dégradants, au sens de l’article 4 de la Charte22, et qu’il est indifférent, aux fins de l’application dudit article 4 de la Charte, que ce soit au moment même du transfert, lors de la procédure d’asile ou à l’issue de celle-ci que la personne concernée encourrait, en raison de son transfert vers l’Etat membre responsable, au sens du règlement Dublin III, un risque sérieux de subir un traitement inhumain et dégradant23.

En l’espèce, si le demandeur explique ne pas avoir introduit de demande de protection internationale en Italie, au motif que « Depuis mon départ de la Libye, je voulais venir ici au Luxembourg car ici, on aime les étrangers & il n’y a pas de racisme »24 et « Je ne veux pas retourner en Italie. Les gens ne sont pas bien là-bas. C’est des racistes »25, il ne fournit néanmoins pas le moindre détail quant à des démarches qu’il aurait concrètement entreprises en vue de l’introduction d’une demande de protection internationale et de l’obtention d’un hébergement et quant aux obstacles qu’il aurait rencontrés à cet égard. Au contraire, il se dégage des affirmations du demandeur lors de son entretien Dublin III, qu’il avait été dans un camp pour migrants lors de son séjour en Italie. Dans ces circonstances, le tribunal retient qu’il n’est pas établi que les droits du demandeur n’auraient pas été respectés lors de son séjour en Italie.

Par ailleurs, le demandeur n’apporte pas la preuve que de manière générale, les droits des demandeurs ou des bénéficiaires d’une protection internationale en Italie ne seraient automatiquement et systématiquement pas respectés, ou encore que ceux-ci n’auraient en Italie aucun droit ou aucune possibilité de les faire valoir auprès des autorités italiennes en usant des voies de droit adéquates26, étant encore relevé que l’Italie est signataire de la Charte, de la CEDH et de la Convention du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, de la Convention de Genève ainsi que du Protocole additionnel du 31 janvier 1967 relatif aux réfugiés et, à ce titre, est censée en appliquer les dispositions.

En ce qui concerne ensuite l’état de santé du demandeur, force est au tribunal de 21 CEDH, grande chambre, 4 novembre 2014, Tarakhel c. Suisse, n°29217/12; CEDH, grande chambre, 21 janvier 2011, M.S.S. c. Belgique et Grèce, n°30696/09 22 CJUE, 16 février 2017, C.K., H.F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16, pts. 65 et 96 23 CJUE, grande chambre, 19 mars 2019, affaire C-163/17, Abubacarr Jawo c. Bundesrepublik Deutschland, pt.

88 24 Entretien en vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement Dublin III, page 5.

25 Ibid., page 6.

26 Voir, pour les demandeurs de protection internationale : article 26 de la directive n°2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale.

15 constater, d’une part, qu’il n’invoque à cet égard aucun moyen en droit, et d’autre part, qu’il ne ressort ni du dossier administratif, ni d’un quelconque autre élément lui soumis, et notamment d’un certificat médical, que celui-ci serait tel qu’il constituerait un obstacle à son transfert en Italie, le simple fait que le demandeur affirme, en particulier, souffrir d’une tuberculose latente, étant en tout état de cause insuffisant à cet égard.

En outre, le tribunal relève qu’il ne se dégage d’aucun élément tangible soumis à son appréciation que les demandeurs de protection internationale, voire les migrants en situation irrégulière en Italie n’auraient aucun accès à des traitements médicaux en cas de besoin d’une manière générale.

Il convient, par ailleurs, de souligner que si le demandeur devait estimer que le système d’aide italien serait à tel point avilissant qu’il impliquerait per se un traitement inhumain et dégradant contraire à l’article 4 de la Charte, respectivement à l’article 3 de la CEDH, il lui appartiendrait de faire valoir ses droits directement auprès des autorités italiennes en usant des voies de droit adéquates, respectivement devant les instances européennes adéquates. Il en va de même si le demandeur devait estimer que le système italien ne serait pas conforme aux normes européennes ; dans ce cas, il appartiendrait au demandeur de faire valoir ses droits sur base de la directive n° 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale (« directive Procédure »), ainsi que de la directive n° 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale (« directive Accueil »), directement auprès des autorités italiennes en usant des voies de droit adéquates.

Dans ces circonstances et dans la mesure où le demandeur n’a pas fait état d’autres éléments dont il se dégagerait que compte tenu de sa situation personnelle, il serait exposé à un risque réel de subir des traitements contraires aux articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte, nonobstant le constat fait ci-avant de l’absence, en Italie, de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs, au sens de l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III, le tribunal retient que le moyen tiré de la violation desdits articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte encourt le rejet.

Quant au moyen tiré d’une violation de l’article 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III, au motif de la non-application de la clause discrétionnaire y inscrite, le tribunal relève que ledit article prévoit ce qui suit : « Par dérogation à l’article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d’examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. […] ». A cet égard, le tribunal précise que la possibilité, pour le ministre, d’appliquer cette disposition du règlement Dublin III relève de son pouvoir discrétionnaire, s’agissant d’une disposition facultative qui accorde un pouvoir d’appréciation étendu aux Etats membres27, le caractère facultatif du recours à la disposition en question ayant encore été souligné dans l’arrêt, précité, de la CJUE du 16 février 201728. Si un pouvoir discrétionnaire des autorités administratives ne s’entend certes pas comme un pouvoir absolu, inconditionné ou à tout égard arbitraire, mais comme la faculté qu’elles ont de choisir, dans le cadre des lois, la solution qui leur paraît préférable pour 27 CJUE, 21 décembre 2011, N.S. e.a., C-411/10 et C-493/10, point 65.

28 CJUE, 16 février 2017, C. K., H. F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16, pts. 88 et 97.

16 la satisfaction des intérêts publics dont elles ont la charge29, et s’il appartient au juge administratif de vérifier si les motifs invoqués ou résultant du dossier sont de nature à justifier la décision attaquée30, de sorte que lorsque l’autorité s’est méprise, à partir de données fausses en droit ou en fait, sur ses possibilités de choix et sur les limites de son pouvoir d’appréciation, il y a lieu d’annuler la décision en question, encore faut-il que pareille erreur dans le chef de l’autorité administrative résulte effectivement des éléments soumis au tribunal.

En l’espèce, le demandeur invoque des difficultés pour les demandeurs de protection internationale d’accéder en Italie aux conditions matérielles minimales d’accueil telles que mises en avant par les rapports versés en cause, témoignant de son risque réel de subir des traitements inhumains et dégradants contraires aux articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte en cas de transfert en Italie, de sorte de risquer de se retrouver à la rue sans aucune aide étatique.

Or, étant donné qu’il vient de rejeter les moyens tirés d’une violation de l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III et des articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte, le tribunal retient qu’il n’est pas établi qu’en ne faisant pas usage de la clause discrétionnaire prévue à l’article 17, paragraphe (1), précité, du règlement Dublin III, le ministre se serait mépris sur ses possibilités de choix et sur les limites de son pouvoir d’appréciation, étant encore rappelé qu’il ne ressort d’aucun élément soumis à l’appréciation du tribunal que le demandeur se trouve dans une situation de vulnérabilité particulière empêchant un transfert vers l’Italie, de sorte que ses allégations en ce sens sont à rejeter pour être dénuées de fondement.

Au vu des développements qui précèdent, le tribunal retient que le moyen tiré de la violation de l’article 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III est à rejeter.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours en annulation est à rejeter pour n’être fondé en aucun de ses moyens.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation contre la décision ministérielle du 5 juillet 2021 en la forme dans la limite des moyens de légalité y invoqués ;

au fond, déclare le recours non justifié, partant en déboute ;

rejette la demande de surseoir à statuer en vue de la saisine de la CJUE d’une question préjudicielle ;

condamne le demandeur aux frais et dépens.

29 Trib. adm., 10 octobre 2007, n° 22641 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Recours en annulation, n° 55 et les autres références y citées.

30 CdE, 11 mars 1970, Pas. 21, p.339.

17 Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique extraordinaire du 5 août 2021 par :

Thessy Kuborn, vice-président, Alexandra Bochet, juge, Marc Frantz, juge, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 5 août 2021 Le greffier du tribunal administratif 18


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 46263
Date de la décision : 05/08/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 11/08/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2021-08-05;46263 ?

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