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18/08/2021 | LUXEMBOURG | N°46279

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 18 août 2021, 46279


Tribunal administratif N° 46279 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 juillet 2021 Audience publique du 18 août 2021 Requête en institution d’un sursis à exécution introduite par Madame A et consort, …, contre une décision du bourgmestre de la commune de Steinsel, en présence de Madame B et consort, …, en matière de permis de construire

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 46279 du rôle et déposée le 22 juillet 2021 au greffe du tribunal administra

tif par Maître Hervé HANSEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats ...

Tribunal administratif N° 46279 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 juillet 2021 Audience publique du 18 août 2021 Requête en institution d’un sursis à exécution introduite par Madame A et consort, …, contre une décision du bourgmestre de la commune de Steinsel, en présence de Madame B et consort, …, en matière de permis de construire

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 46279 du rôle et déposée le 22 juillet 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Hervé HANSEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de Madame A et de Monsieur C, demeurant ensemble à L-…, tendant à voir ordonner qu’il soit sursis à l’exécution de la décision du bourgmestre de la Commune de Steinsel du 16 avril 2021, référencée sous le n° …, autorisation émise au profit de Madame B et de Monsieur D, demeurant ensemble à L-…, pour la construction d’une maison unifamiliale sur la parcelle portant le numéro cadastral n° … de la section … de …, à L-…, cette autorisation ayant encore été attaquée au fond par une requête en réformation, sinon en annulation, introduite le 21 juillet 2021, portant le numéro 46271 du rôle ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Véronique REYTER, demeurant à Luxembourg, du 23 juillet 2021, portant signification desdites requêtes en réformation sinon en annulation, respectivement en institution d’une mesure provisoire, à l’administration communale de Steinsel ainsi qu’à Madame B et à Monsieur D ;

Vu l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Vu la note de plaidoiries déposée par Maître Steve HELMINGER pour Madame A et de Monsieur C, en date du 10 août 2021 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Maître Hervé HANSEN, assisté de Maître Michel Meyers, pour les requérants, ainsi que Maître Adrien KARIGER en remplacement de Maître Steve HELMINGER, pour d’administration communale de Steinsel, entendus en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 11 août 2021.

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Par décision du 16 avril 2021 référencée sous le numéro …, le bourgmestre de la commune de Steinsel, ci-après dénommé le « bourgmestre », autorisa Madame B et Monsieur D, ci-après désignés par les consorts « D-B », à procéder à la construction d’une maison 1 unifamiliale jumelée sur la parcelle portant le numéro cadastral n° … de la section … de …, à L-

…, ci-après désignée par « la parcelle D-B ».

Par requête déposée le 21 juillet 2021, inscrite sous le numéro 46271 du rôle, Madame A et Monsieur C ont fait introduire un recours tendant à l’annulation de cette autorisation de bâtir du 16 avril 2021 et, par requête déposée le lendemain, inscrite sous le numéro 46279 du rôle, ils sollicitent le sursis à exécution de cette autorisation.

S’agissant de la recevabilité de la présente requête, il échet de relever qu’un moyen d’irrecevabilité de la requête en institution d’un sursis à exécution a été soulevé par l’administration communale de Steinsel pour défaut d’intérêt à agir des requérants en ce qui concerne les moyens en relation avec les reculs postérieurs prétendument non respectés par rapport à des parcelles appartenant à des tiers.

A cet égard, il convient de rappeler que la compétence du président du tribunal est restreinte à des mesures essentiellement provisoires et ne saurait en aucun cas porter préjudice au principal. Il doit s'abstenir de préjuger les éléments soumis à l'appréciation ultérieure du tribunal statuant au fond, ce qui implique qu'il doit s'abstenir de prendre position de manière péremptoire, non seulement par rapport aux moyens invoqués au fond, mais même concernant les questions de recevabilité du recours au fond. En revanche, il doit examiner et trancher les questions concernant la recevabilité de la demande dont il est personnellement saisi. Saisi d'une demande de sursis à exécution, il doit apprécier l'intérêt à agir du demandeur par rapport aux mesures sollicitées et débouter celui-ci s'il apparaît qu'il ne justifie pas d'un intérêt à agir suffisamment caractérisé1.

En l’espèce, le soussigné constate que le moyen sous examen vise expressément la recevabilité de la requête en institution d’un sursis à exécution, et non pas celle du recours au fond. Or, étant donné, d’une part, que dans le cadre d’une demande de sursis à exécution, l’intérêt à agir s’apprécie par rapport aux mesures sollicitées, tel que relevé ci-avant, et, d’autre part, qu’en l’espèce, l’administration communale se borne à soulever un défaut d’intérêt à agir par rapport à certains des moyens invoqués au fond, sans justifier en quoi, le requérant, en sa qualité de propriétaire de la parcelle adjacente à celle accueillant la construction faisant l’objet de l’autorisation litigieuse, respectivement les requérants, en leur qualité d’habitants de la maison d’habitation implantée sur cette parcelle, n’auraient pas d’intérêt à solliciter un sursis à exécution de ladite autorisation, le soussigné conclut que le moyen d’irrecevabilité sous examen est à rejeter pour ne pas être fondé. La question de savoir si les moyens ainsi critiqués par l’administration communale sont susceptibles d’être pris en considération pour justifier l’octroi du sursis à exécution sollicité par les requérants sera abordée ci-après.

En l’absence d’autres moyens d’irrecevabilité, la requête sous examen est à déclarer recevable pour avoir été introduite dans les formes de la loi.

A l’appui de leur requête sous examen, Madame A et Monsieur C exposent que Monsieur C serait le propriétaire de la parcelle portant le numéro cadastral n° …, section … de …, à Steinsel, sise à L-…, directement attenante à la parcelle D-B, appartenant aux consorts D-

B sur laquelle une maison unifamiliale jumelée serait actuellement en construction.

1 Trib. adm. prés., 29 avril 2004, n° 17836 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Procédure contentieuse, n° 559, et autres références y citées.

2 Ils expliquent qu’en date du 31 juillet 2020, le bourgmestre aurait accordé deux autorisations de bâtir, portant les numéros … respectivement … pour construire deux maisons unifamiliales jumelées et un garage sur la parcelle portant le numéro cadastral n° … de la section … de …, à L-…, respectivement sur la parcelle D-B. Ils auraient, par la suite, déposé en date du 20 novembre 2020, un recours en réformation sinon en annulation contre lesdites autorisations, inscrit sous le numéro 45255 du rôle, actuellement pendant devant la 1ère chambre du tribunal administratif dont l’audience de plaidoiries serait prévue pour le 2 mars 2022.

En date du 12 mars 2021, les requérants auraient été informés par le bourgmestre que les consorts D-B auraient demandé une nouvelle autorisation de bâtir sur la parcelle D-B. Ils auraient par la suite sollicité une entrevue avec le bourgmestre tout en proposant d’inviter les consorts D-B afin de trouver une solution, proposition à laquelle le bourgmestre n’aurait donné aucune suite.

Face au silence du bourgmestre, les requérants auraient soumis leurs observations écrites à celui-ci en expliquant que la nouvelle demande d’autorisation de bâtir des consorts D-

B ne résoudrait pas les problèmes soulevés dans le cadre de leur recours en réformations sinon en annulation du 20 novembre 2020.

Par courrier du 16 avril 2021, le bourgmestre aurait informé les requérants qu’en date du 16 avril 2021, l’autorisation de bâtir portant le numéro … aurait été annulée et qu’il aurait délivré aux consorts D-B une nouvelle autorisation portant le numéro ….

Les requérants font soutenir que les conditions légales, telles que prévues par l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après dénommée la « loi du 21 juin 1999 », seraient remplies en cause et ils demandent à voir suspendre les effets de l’autorisation querellée en attendant la solution de leur recours au fond.

Au titre d’un préjudice grave et définitif, les requérants soutiennent qu’une fois que le permis du bourgmestre aura été exécuté, il ne serait plus, en vertu de la jurisprudence des juridictions judiciaires en la matière, possible pour eux d’obtenir la démolition des constructions autorisées.

Ils exposent en outre que la construction projetée serait immédiatement adjacente à leur parcelle et qu’en particulier un mur de garage serait érigé en limite de propriété avec leur jardin qui serait d’une longueur de 10,65 mètres et d’une hauteur de 3,50 mètres de sorte que cette construction conduirait à la dégradation de leur qualité de vie et de leur jouissance de leur terrain, qui perdrait ainsi son charme. En raison du fait que la construction projetée serait érigée dans un quartier résidentiel à Steinsel, les requérants pourraient légitiment s’attendre à ce que les constructions sur les parcelles voisines correspondraient au caractère résidentiel des alentours et ne pourraient pas s’attendre à voir construire en limite de leur propriété un mur d’une surface de 37,28 m2 qui réduirait « fortement » la valeur de la propriété de Monsieur C.

Les requérants estiment ensuite que leurs moyens développés à l’appui de leur recours au fond seraient suffisamment sérieux, dans la mesure où ils seraient manifestement de nature à entraîner l’annulation de l’autorisation litigieuse.

A cet égard, ils soutiennent que le permis litigieux serait illégal dans la mesure où les reculs prévus par la partie écrite du plan d’aménagement particulier – « quartier existant », ci-

3 après désigné par le « PAP-QE » ne seraient pas respectés. Au soutien de leurs allégations, les requérants font valoir que les prescriptions dimensionnelles de la construction projetée prévues à l’article 11 de la partie écrite du PAP-QE et en particuliers les reculs prévus aux articles 11.4 et 11.5 de cette dernière ne seraient pas respectés. Dans la mesure où la parcelle D-B donnerait sur le domaine public de deux côtés, la situation prévue par l’article 11.5 de la partie graphie du PAP-QE où une construction serait située à l’angle de deux voies desservantes serait applicable. Ainsi, la partie de la parcelle D-B adjacente à leur parcelle serait à qualifier de recul postérieur.

A titre principal, les requérants font valoir que le recul postérieur de la construction projetée des consorts D-B par rapport à leur parcelle ne serait pas respecté étant donné que l’article 1.2.4 de la partie écrite du PAP-QE prévoirait un recul postérieur de 10 mètres alors que le garage serait construit en limite de parcelle et l’immeuble projeté des consorts D-B n’observerait qu’un recul postérieur de 3 mètres.

A titre subsidiaire et au cas où le recul tel que considéré par les requérants comme recul postérieur devrait néanmoins être considéré comme recul latéral, ils font valoir que le principe de l’article 1.2.3 de la partie écrite du PAP-QE concernant les reculs latéraux n’aurait pas été respecté, dans la mesure où le garage projeté sur la parcelle D-B se trouverait sur la limite latérale de leur parcelle et qu’il n’y avait pas eu deux projets de constructions accolées sur la limite cadastrale latérale commune présentés simultanément. En outre, le bourgmestre aurait dénaturé le concept de garage quant aux dimensions dans la mesure où le garage projeté en limite de la parcelle D-B aurait une hauteur de 3,5 mètres et 10,65 mètres de profondeur alors que l’article 11.13.2 de la partie écrite du PAP-QE n’admettrait en recul latéral uniquement un garage de 3,5 mètres de largeur et 7 mètres de profondeur. Il aurait également dénaturé le concept de garage quant à sa portée dans la mesure où une partie du mur serait une prolongation à l’extérieur du garage de sorte à ne pas faire partie de ce dernier et ainsi interdit dans le recul latéral. Finalement il aurait dénaturé le concept de garage quant à son affectation dans la mesure où le garage serait selon les plans non seulement un garage mais un « Garage / Rangements ».

A titre encore plus subsidiaire, les requérants font valoir que l’article 11.13.2, alinéa 6 de la partie écrite du PAP-QE ne serait pas respecté dans la mesure où deux garages seraient autorisés dans deux reculs latéraux si une parcelle aurait au moins 18 mètres de largeur, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce dans la mesure où la parcelle D-B et la parcelle n° … n’auraient pas une largeur de 18 mètres et que malgré ce fait, deux garages auraient été autorisés sur les deux parcelles.

Les requérants soulèvent ensuite une violation de l’article 11.13.2, alinéa 3 de la partie écrite du PAP-QE qui prévoirait que les garages ne seraient autorisés dans le recul postérieur que lorsqu’il existerait un garage en limite de propriété sur la parcelle adjacente, en l’occurrence celle des requérants, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce. En outre, le même article prévoirait une taille de garage qui serait limitée à 3,5 mètres de largeur et 7 mètres de profondeur, dimensions qui ne seraient pas respectées par la construction faisant l’objet de l’autorisation attaquée.

Les requérants arguent ensuite que l’article 11.13.2, alinéa 5 de la partie écrite du PAP-QE ne serait pas respecté, article qui permettrait la construction d’un garage dans le recul postérieur si la limite postérieure du terrain serait aux abords d’une rue existante, d’un chemin existant ou d’une servitude de passage existante, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce.

4 Les requérants font ensuite valoir une violation de l’article 1.2.4 de la partie écrite du PAP-QE dans la mesure où le recul postérieur de 10 mètres ne serait pas respecté par rapport aux parcelles portant les numéros cadastraux n° … et n° … de la section … de ….

Les requérants invoquent ensuite une violation de l’article 1.2.3 de la partie écrite du PAP-QE qui ne permettrait une construction hors sol dans le recul latéral que dans des conditions très spécifiques qui ne seraient pas remplies en l’espèce dans la mesure où le bourgmestre aurait autorisé une construction dans le recul latéral coté « Nord » de la parcelle D-B, c’est-à-dire dans le recul latéral par rapport à la parcelle portant le numéros cadastral n° … de la section … de ….

Finalement, les requérants font valoir une violation de l’article 1.2, alinéa 1er de la partie écrite du PAP-QE concernant les agencements des constructions principales dans la mesure où les maisons projetées sur la parcelle D-B et sur parcelle n° … ne formeraient pas une entité architecturale concernant la hauteur à la corniche et au faîte, le gabarit et la forme de la toiture.

L’administration communale de Steinsel fait soutenir qu’aucune des conditions pour justifier une mesure provisoire ne serait remplie en cause, en ce sens que les requérants ne justifieraient pas de l’existence d’un préjudice grave dans leur chef et que leur recours au fond n’aurait que peu de chances de succès, respectivement que les moyens formulés à son appui manqueraient de fondement.

En vertu de l’article 11 (2) de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, un sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer aux requérants un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux. Le sursis est rejeté si l’affaire est en état d’être plaidée et décidée à brève échéance.

L’affaire au fond ayant été introduite le 21 juillet 2021 et compte tenu des délais légaux d’instruction fixés par la loi du 21 juin 1999 précitée, l’affaire ne saurait être considérée comme pouvant être plaidée à brève échéance.

Concernant les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la demande, le juge appelé à en apprécier le caractère sérieux ne saurait les analyser et discuter à fond, sous peine de porter préjudice au principal et de se retrouver, à tort, dans le rôle du juge du fond. Il doit se borner à se livrer à un examen sommaire du mérite des moyens présentés, et accorder le sursis, respectivement la mesure de sauvegarde lorsqu’il paraît, en l’état de l’instruction, de nature à pouvoir entraîner l’annulation de la décision critiquée, étant rappelé que comme le sursis d’exécution doit rester une procédure exceptionnelle, puisque qu’il constitue une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère.

L’exigence tirée du caractère sérieux des moyens invoqués appelle le juge administratif à examiner et à apprécier, au vu des pièces du dossier et compte tenu du stade de l’instruction, les chances de succès du recours au fond. Pour que la condition soit respectée, le juge doit arriver à la conclusion que le recours au fond présente de sérieuses chances de succès.

Ainsi, le juge du référé est appelé, d’une part, à procéder à une appréciation de l’instant au vu des éléments qui lui ont été soumis par les parties à l’instance, cette appréciation étant 5 susceptible de changer par la suite en fonction de l’instruction de l’affaire et, d’autre part, non pas à se prononcer sur le bien-fondé des moyens, mais à vérifier, après une analyse nécessairement sommaire des moyens et des arguments présentés, si un des moyens soulevés par le demandeur apparaît comme étant de nature à justifier avec une probabilité suffisante l’annulation de la décision attaquée.

Il s’ensuit que, face à une situation où le caractère sérieux des moyens soulevés au fond n’apparaît pas comme étant évident à première lecture, le juge du référé ne peut pas admettre que les moyens en question sont suffisamment sérieux pour justifier une mesure provisoire : en d’autres termes, les moyens doivent offrir une apparence de droit suffisante ou un degré de vraisemblance tel que l’on peut nourrir des doutes importants quant à la légalité de l’acte2.

Ainsi, un moyen est sérieux lorsqu’il laisse présager, aux termes d’une analyse sommaire, une probable réformation ou annulation : un moyen sérieux fait pressentir une annulation, tandis que l’examen du caractère sérieux d’un tel moyen se caractérise par son caractère prima facie. Ce caractère de sérieux peut résulter d’une situation de fait ou de droit manifeste (un élément matériel important a été ignoré, une disposition légale n’a été manifestement pas appliquée) ou encore d’une jurisprudence à tout le moins solidement établie.

C’est pourquoi le juge du provisoire doit pour cela prendre en considération les solutions jurisprudentielles bien établies, étant donné que lorsque de telles solutions existent, l’issue du litige - que ce soit dans le sens du succès du recours ou de son échec - n’est plus affectée d’un aléa.

Ne présente en revanche pas un caractère sérieux suffisant, un moyen soulevant un simple doute quant à l’issue du recours, un moyen basé sur une jurisprudence fluctuante ou minoritaire ou lorsqu’il n’existe pas de jurisprudence qui permettrait de répondre aisément aux questions devant être tranchées en l’espèce par le jugement à rendre ultérieurement sur le fond, surtout lorsqu’il s’agit de questions de principe inédites qui ne sauraient être tranchées, pour la première fois, par le juge des référés, mais requièrent un examen approfondi dans le cadre de la procédure principale.

Le soussigné tient enfin à rappeler qu’il convient aussi de tenir compte du fait que la procédure de référé, fondée sur un examen prima facie, n’est pas conçue pour établir la réalité de faits complexes et hautement controversés : en effet, le juge des référés ne dispose pas des moyens nécessaires pour procéder à de tels examens et, dans de nombreux cas, il ne serait que difficilement à même d’y parvenir en temps utile.

Sur cette toile de fond, en ce qui concerne la violation alléguée de l’article 11.5 de la partie écrite du PAP-QE qui vise les mesures des marges de reculement, force est de constater, au terme d’une lecture nécessairement sommaire de la disposition invoquée, que la parcelle D-

B se trouve au bout d’une seule rue, en l’espèce la …, et est exclusivement desservie par cette dernière. Dans la mesure où l'orientation de la construction projetée est a priori dictée par la voirie desservante qui serait la seule …, il s’ensuit que la parcelle D-B ne se trouve a priori pas à l’angle de deux rues et donc face à deux voies desservantes de sorte que la partie de ladite parcelle adjacente à la partie de la parcelle des requérants est, a priori, à qualifier de recul latéral conformément à l’article 11.5 de la partie graphique du PAP-QE, raisonnement, qui semble avoir également été suivi lors de l’autorisation de la construction du numéro … de la … se 2 Trib. adm. prés., 14 avril 2016, n° 37733 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Procédure contentieuse, n° 592, et les autres références y citées.

6 trouvant en face de la parcelle D-B. Le moyen afférent, tiré d’une violation de l’article 11.5 de la partie écrite du PAP-QE, ne présente dès lors en l’état pas le sérieux nécessaire.

Dans la suite logique de ce qui précède, dans la mesure où la partie de la parcelle D-B adjacente à la parcelle des requérants est a priori à considérer comme recul latéral et non pas comme recul postérieur, le moyen concernant le non-respect du recul postérieur de la parcelle D-B par rapport à celle des requérants, les moyens et arguments s’appuyant sur la considération selon laquelle cette partie de ladite parcelle serait à considérer comme recul postérieur ainsi que les moyens considérant que le garage projeté des consorts D-B serait implanté dans le recul postérieur de la parcelle D-B, reposent a priori sur des prémisses erronées et ne présentent dès lors en l’état non plus le sérieux nécessaire.

En ce qui concerne le moyen concernant la violation de l'article 1.2.3 de la partie écrite du PAP-QE qui dispose que « la construction principale hors sol et en sous-sol n’a pas de recul sur les limites latérales si la construction voisine est implantée sur la limite de propriété ou si le parcellaire impose une implantation sur la limite de propriété.

Dans le cas suivant, la construction principale a un recul sur la limite latérale:

- si une autorisation de lotissement impose un recul;

- si une construction existante sur un terrain attenant accuse un recul sur la limite latérale, le recul est de 3,00 mètres au minimum; », Une construction hors sol et en sous-sol peut être implantée sur la limite latérale, à condition que deux projets comportant deux constructions adjacentes accolées sur la limite cadastrale latérale commune soient présentés simultanément. » Il appert d’un examen sommaire de cet article que celui-ci ne vise que les reculs latéraux des constructions principales hors sol et en sous-sol et ne vise en principe pas les constructions telles qu’un garage. Il appert d’une analyse nécessairement sommaire des plans de la construction projetée des consorts D-B versés par les requérants qu’a priori le recul sur la limite latérale de 3,00 mètres par rapport à la limite cadastrale de la parcelle des requérants est respecté et que la situation où une construction hors sol et en sous-sol peut être implantée sur la limite latérale, à condition que deux projets comportant deux constructions adjacentes accolées sur la limite cadastrale latérale commune soient présentés simultanément n’est pas applicable en l’espèce dans la mesure où la construction principale ne se situe pas sur la limite cadastrale des requérants de sorte que ce moyen ne convainc pas en l’état actuel du dossier.

En ce qui concerne le caractère autorisable d’un garage dans le recul latéral de la parcelle D-B, celle-ci ressort a priori de l'article 11.13.2, alinéa 6 de la partie écrite du PAP-QE qui dispose que « Les emplacements de stationnement, garages et car-ports sont autorisés dans un seul recul latéral, sauf si une parcelle a au moins 18,00 mètres de largeur, mesurée aux abords du domaine public. Dans ce cas, les emplacements de stationnement, garages et car-ports sont autorisés dans deux reculs latéraux, sous condition que l’aménagement des accès ne se fasse pas au détriment d’emplacement de stationnement et/ou de plantation sur le domaine public. ».

L'article 11.13.2, alinéa 8 de la partie écrite du PAP-QE quant à lui vise la possibilité de construire un garage dans le recul latéral sur la limite cadastrale d’une parcelle en précisant que « les emplacements de stationnement, garages, et car-ports dans le recul latéral peuvent être implantés sur les limites de propriété. ». Il appert au vu des articles précités qu’un garage peut a priori être construit dans le recul latéral sur la limite cadastrale de la parcelle D-B, de sorte que le moyen tiré d’une violation des articles 1.2.3 et 11.13.2, alinéas 6 et 8 de la partie écrite du PAP-QE ne convainc pas non plus en l’état actuel du dossier.

7 En ce qui concerne le moyen des requérants, selon lequel l'article 11.13.2, alinéa 6 précité n’aurait pas été respecté alors que deux garages auraient été prévus sur la parcelle D-B et sur la parcelle n° … alors que ces parcelles n’auraient pas la largeur requise de 18 mètres, force est de constater que cette disposition est applicable au cas où une seule parcelle a une largeur de 18 mètres, hypothèse dans laquelle deux garages seraient autorisables dans les reculs latéraux de la construction principale. Dans la mesure où la parcelle D-B n’accueille a priori qu’un seul garage dans le recul latéral gauche, la disposition de l'article 11.13.2, alinéa 6 invoquée par les requérantes n’est a priori pas applicable à la parcelle D-B.

En ce qui concerne les allégations des requérants concernant un surdimensionnement du garage autorisé dans le recul latéral de la parcelle D-B, il appert d’un examen sommaire de la partie écrite du PAP-QE que celle-ci limite a priori uniquement les dimensions des garages implantés dans les reculs postérieurs en prévoyant un maximum de 3,5 mètres de largeur et de 7 mètres de profondeur mais ne prévoit a priori pas de dimensions à respecter pour un garage dans le recul latéral d’une parcelle tant que les autres reculs réglementaires seraient respectés, de sorte que le bourgmestre pouvait a priori autoriser le garage litigieux avec les dimensions de 3,5 mètres de hauteur et de 10,65 mètres de profondeur, de sorte que le moyen concernant le surdimensionnement du garage projeté sur la parcelle D-B ne présente dès lors en l’état non plus le sérieux nécessaire.

Concernant ensuite les moyens en relation avec une prétendue dénaturalisation de la notion de « concept de garage » par le bourgmestre tant en ce qui concerne sa portée tant en ce qui concerne son affectation, ainsi que le moyen concernant la prétendue violation de l’article 1.2, alinéa 1er de la partie écrite du PAP-QE concernant les agencements des constructions principales dans la mesure où les maisons projetées sur la parcelle D-B et sur parcelle n° … ne formeraient pas une entité architecturale concernant la hauteur à la corniche et au faîte, le gabarit et la forme de la toiture, force est de constater que ces moyens soumettent essentiellement au juge administratif une question d’appréciation, dont la réponse n’est à première vue pas évidente, mais qui requiert une analyse plus poussée et une discussion au fond, à laquelle le juge du provisoire ne saurait utilement s’adonner sous peine d’empiéter sur les pouvoirs du juge du fond. Or, face à une situation, telle que celle de l’espèce, où le caractère sérieux d’un moyen soulevé au fond n’apparaît pas comme étant évident à première lecture, le juge du référé ne peut pas admettre que le moyen en question soit suffisamment sérieux pour justifier une mesure provisoire.

Comme relevé ci-avant, les requérants invoquent encore une violation de l’article 1.2.4 de la partie écrite du PAP-QE dans la mesure où le recul postérieur de 10 mètres ne serait pas respecté par rapport aux parcelles portant les numéros cadastraux n° … et n° … de la section … de … ainsi qu’une prétendue violation de l’article 1.2.3 de la partie écrite du PAP-QE qui ne permettrait une construction hors sol dans le recul latéral que dans des conditions très spécifiques qui ne seraient pas remplies en l’espèce dans la mesure où le bourgmestre aurait autorisé une construction dans le recul latéral coté « Nord » de la parcelle D-B, c’est-à-dire dans le recul latéral par rapport à la parcelle portant le numéros cadastral n° … de la section … de ….

Il y a d’abord lieu de rappeler que la demande de suspension a pour objet d’empêcher, temporairement, la survenance d’un préjudice grave et définitif ; les effets de la suspension étant d’interdire à l’auteur de l’acte de poursuivre l’exécution de la décision suspendue. Par ailleurs, comme le sursis à exécution doit rester une procédure exceptionnelle, puisqu’il constitue une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des 8 décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère.

Il en résulte qu’un sursis à exécution ne saurait être ordonné que si le préjudice invoqué par les requérants résulte de l’exécution immédiate de l’acte attaqué, la condition légale n’étant en effet pas remplie si le préjudice ne trouve pas sa cause dans l’exécution de l’acte attaqué : en d’autres termes, la décision contestée doit porter préjudice ou atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, aux intérêts des requérants.

Dans cette optique, propre au cadre strict et exceptionnel des demandes en obtention de mesures provisoires devant le juge administratif, ce dernier n’est pas tenu d’examiner tous les moyens du requérant, en ce compris des moyens dépourvus de toute incidence sur la situation concrète de celui-ci, mais peut se limiter à analyser sommairement les seuls moyens du requérant en relation directe avec le préjudice grave et irréversible allégué, le propre du référé administratif étant, comme relevé ci-avant, précisément d’éviter à un administré la survenance d’un préjudice grave et irréparable. En d’autres termes, le juge du provisoire n’est pas tenu d’examiner des moyens qui éventuellement pourraient aboutir à l’annulation de la décision déférée, mais qui, s’agissant de moyens sans incidence de fait ou de droit sur la situation de l’administré, ne présentent aucun lien avec le préjudice allégué qu’il conviendrait d’éviter d’urgence3.

Il suit partant de ce qui précède que le préjudice grave et définitif est à apprécier par rapport aux travaux envisagés, en ce que ceux-ci sont susceptibles de nuire aux requérants. En effet, dans ce contexte, il importe de vérifier en quoi la situation de voisin se trouve aggravée par un quelconque élément de l’autorisation de construire critiquée, de sorte qu’un requérant n’est pas recevable à faire contrôler sommairement la légalité de moyens tirés d’éléments qui n’ont pas d’impact direct sur sa situation personnelle. Par ailleurs, l’exposé du préjudice grave et définitif ne saurait se limiter à un exposé théorique, se cantonner à la seule évocation de précédents ou encore consister en des considérations générales.

En l’espèce, force est d’abord au soussigné de constater que le préjudice mis en avant par les requérants, résulterait de la mise en place d’un mur de garage érigé en limite de propriété avec leur jardin qui serait d’une longueur de 10,65 mètres et d’une hauteur de 3,50 mètres de sorte que cette construction, d’une part, conduirait à la dégradation de leur qualité de vie et de leur jouissance de leur terrain, qui perdra ainsi son charme et, d’autre part, réduirait la valeur de la propriété de Monsieur C.

Il en résulte qu’un éventuel non-respect du recul postérieur par rapport aux parcelles portant les numéros cadastraux n° … et n° … de la section … de … cause manifestement pas de grief aux requérants dans la mesure où ils ne sont pas propriétaires desdites parcelles et que ces parcelles ne font pas partie de leur jardin de sorte que le soussigné ne saurait retenir de grief dans le chef des requérants y relatif.

Il en résulte que finalement, les différents moyens d’annulation ne sont pas de nature à justifier l’instauration d’une mesure provisoire.

3 Trib. adm. prés. 28 juin 2016, n° 37996 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Procédure contentieuse, n° 596, et les autres références y citées.

9 Par ces motifs, le soussigné, juge du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique ;

rejette le recours en obtention d’une mesure provisoire ;

condamne les requérants aux frais et dépens.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 18 août 2021 par Marc Frantz, juge au tribunal administratif, en présence du greffier Luana Poiani.

s. Luana Poiani s. Marc Frantz Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, 18 août 2021 Le greffier du tribunal administratif 10


Synthèse
Numéro d'arrêt : 46279
Date de la décision : 18/08/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 25/08/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2021-08-18;46279 ?

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