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01/09/2021 | LUXEMBOURG | N°43794

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 01 septembre 2021, 43794


Tribunal administratif N° 43794 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 15 novembre 2019 3e chambre Audience publique de vacation du 1er septembre 2021 Recours formé par la société civile immobilière …, …, contre deux délibérations du conseil communal de Bertrange et contre une décision du ministre de l’Intérieur, en matière de plan d’aménagement général

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 43794 du rôle et déposée au greffe du tribunal administrat

if le 15 novembre 2019 par Maître Serge MARX, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre de...

Tribunal administratif N° 43794 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 15 novembre 2019 3e chambre Audience publique de vacation du 1er septembre 2021 Recours formé par la société civile immobilière …, …, contre deux délibérations du conseil communal de Bertrange et contre une décision du ministre de l’Intérieur, en matière de plan d’aménagement général

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 43794 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 15 novembre 2019 par Maître Serge MARX, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société civile immobilière …, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son gérant actuellement en fonctions, tendant à l’annulation de :

1) la délibération du conseil communal de la commune de Bertrange du 8 juin 2018 portant mise sur orbite de la procédure de refonte du plan d’aménagement général de la commune de Bertrange ;

2) la délibération du conseil communal de la commune de Bertrange du 10 janvier 2019 portant adoption du projet d’aménagement général, parties graphique et écrite, de la commune de Bertrange, et ;

3) la décision du ministre de l’Intérieur du 19 juillet 2019 portant approbation de la délibération du conseil communal de la commune de Bertrange du 10 janvier 2019 et ayant déclaré recevable, mais non fondée sa réclamation ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Laura GEIGER, en remplacement de l’huissier de justice Carlos CALVO, demeurant à Luxembourg, du 18 novembre 2019, portant signification de ce recours à l’administration communale de Bertrange, établie à L-8058 Bertrange, 2, Beim Schlass, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ;

Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 21 novembre 2019 par Maître Steve HELMINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la commune de Bertrange, préqualifiée ;

Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 2 décembre 2019 par la société anonyme ARENDT & MEDERNACH SA, inscrite au barreau de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2082 Luxembourg, 41A, avenue J.F.

Kennedy, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B186371, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Christian POINT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du 1 Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 7 février 2020 par Maître Steve HELMINGER, au nom de la commune de Bertrange ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 17 février 2020 par la société anonyme ARENDT & MEDERNACH SA, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 17 mars 2020 par Maître Serge MARX au nom de la société civile immobilière …, préqualifiée ;

Vu la constitution de nouvel avocat de la société à responsabilité limitée ELVINGER DESSOY MARX SARL, inscrite au barreau de Luxembourg, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B251584, représentée aux fins de la présente instance par Maître Serge MARX, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre de avocats de Luxembourg, déposée le 20 avril 2021 au greffe du tribunal administratif pour compte de la société civile immobilière …, préqualifiée ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 21 avril 2020 par Maître Steve HELMINGER, au nom de la commune de Bertrange ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 25 juin 2020 par la société anonyme ARENDT & MEDERNACH SA, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu les pièces versées en cause ainsi que les actes critiqués ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Serge MARX, Maître Ben HUBERT, en remplacement de Maître Steve HELMINGER et Maître Martial BARBIAN, en remplacement de Maître Christian POINT, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 21 avril 2021.

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Lors de sa séance publique du 8 juin 2018, le conseil communal de Bertrange, ci-après dénommé le « conseil communal », fut saisi par le collège des bourgmestre et échevins de la même commune, ci-après dénommé le « collège échevinal », en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après désignée par la « loi du 19 juillet 2004 », d’un projet d’aménagement général pour la commune de Bertrange qu’il mit sur orbite en conséquence à travers un vote positif, de sorte que le collège échevinal put procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 2004.

Par courrier adressé au collège échevinal du 11 juillet 2018, la société civile immobilière …, ci-après désignée par la « société … », propriétaire de deux parcelles inscrites au cadastre de la commune de Bertrange sous les numéros … et …, soumit ses objections à l’encontre du projet d’aménagement général de ladite commune.

Lors de sa séance publique du 10 janvier 2019, le conseil communal décida ce qui suit : « […] B. décide avec toutes les voix sur 13 membres présents :

2 1. d’adopter les propositions faites par le collège des bourgmestre et échevins en ce qui concerne les suites à réserver aux réclamations conformément au document annexé, daté au 3 janvier 2019, composant 65 pages, et faisant partie intégrante de la présente décision, […] C. avec toutes les voix sur 13 membres présents :

adopte le projet d’aménagement général, partie écrite et partie graphique, telle qu’elles ont été modifiées suite aux réclamations et avis ministériels reçus et à l’ensemble des décisions énoncées ci-avant, […] », les propositions du collège échevinal concernant les objections de la société … ayant été libellées comme suit :

« […] Réclamation n°32— … Le réclamant demande le classement de la parcelle … en zone « Mix-u », et demande en outre la suppression pure et simple sur les parcelles … et … de toute information relative aux « biotopes protégés ».

Conclusions du collège échevinal :

La réclamation introduite par Me Serge MARX pour le compte de la société civile immobilière …, portant la date du 11 juillet 2018, réceptionnée par la commune de Bertrange en date du 11 juillet 2018, est recevable quant à la forme pour avoir été introduite dans les délais légaux.

Le réclamant a été convoqué à une réunion en date du 13 novembre 2018 à 10h20 en vue de l’aplanissement des différends, réunion à laquelle se sont présentés M. … de la société susmentionnée, ainsi que leur conseil juridique, Me Serge Marx.

La réunion précitée a principalement fait ressortir l’enjeu urbanistique de la présente réclamation, qui est directement lié à l’urbanisation éventuelle du triangle Helfent, et plus particulièrement à la prolongation de la rue Pletzer. Cette dernière est conçue de manière à revêtir la forme d’une rue principale, et il semble en conséquence primordial que les façades principales, voire les entrées soient orientées sur la rue Pletzer.

Or, l’intégration de la prolongation de la rue Pletzer dans le périmètre d’agglomération ne pouvant se réaliser que dans le cadre d’un projet d’ensemble sur tout le triangle Helfent, entre autres pour des considérations environnementales, le collège échevinal propose au conseil communal d’ajouter sur une profondeur de +-35 mètres de l’axe du bord de la future rue une zone d’aménagement différé.

Pour le bon ordre, le collège échevinal tient encore à souligner que les parcelles en question n’étaient, contrairement aux allégations contenues dans la réclamation sous objet, pas classées en zone spéciale dans le PAG en vigueur, mais en zone potentielle de développement qui est à considérer comme une zone en dehors du périmètre d’agglomération.

L’inscription de la surface en « Habitats protégés » a été faite sur base de l’étude SUP et de ses documents de base. Or, il y a lieu de constater qu’il s’agit uniquement d’une information à titre indicatif, informatif et non exhaustif dépourvu de toute valeur 3 réglementaire. L’idée est exclusivement d’informer toute personne intéressée sur les contraintes environnementales auxquelles un terrain peut éventuellement être soumis, et de renforcer ainsi la sécurité juridique.

C’est dans cette logique, et après concertation avec le ministère de l’Intérieur, que le collège échevinal propose, d’un côté, de maintenir la représentation des « Biotopes protégés » et des « Habitats protégés » au niveau de la partie graphique, et de l’autre côté, de supprimer l’avant dernière phrase de l’article 28 de la partie écrite du projet de refonte du PAG qui stipule que « La fidélité, l’exactitude, l’actualité, la fiabilité et l’intégralité des informations relatives à ces biotopes et habitats doivent être confirmées, à charge du porteur de projet, chaque fois qu’un projet d’aménagement et/ou de construction porte sur les terrains concernés par la présence d’un ou plusieurs de ces biotopes et/ou habitats ».

Le collège échevinal propose partant au conseil communal de faire partiellement droit à la réclamation de la société civile immobilière … en procédant aux modifications évoquées ci-dessus. […] ».

Par courrier de son mandataire du 30 janvier 2019, la société … introduisit auprès du ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par le « ministre » une réclamation à l’encontre de la décision du conseil communal du 10 janvier 2019 portant adoption définitive du projet d’aménagement général.

Par décision du 19 juillet 2019, le ministre approuva la délibération du conseil communal du 10 janvier 2019 portant adoption du projet d’aménagement général et déclara recevable mais non fondée la réclamation de la société ….

Ladite décision ministérielle est libellée comme suit :

« […] Par la présente, j’ai l’honneur de vous informer que j’approuve les délibérations du conseil communal du 10 janvier 2019 et 15 mars 2019 portant adoption du projet de la refonte du plan d’aménagement général (dénommé ci-après « PAG ») de la commune de Bertrange, présenté par les autorités communales.

La procédure d’adoption du projet d’aménagement général s’est déroulée conformément aux exigences des articles 10 et suivants de la loi précitée du 19 juillet 2004.

La Commission d’aménagement a donné son avis sur les réclamations introduites auprès du ministre de l’Intérieur en date du 8 mai 2019.

Le conseil communal a donné son avis sur les réclamations introduites auprès du ministre de l’Intérieur en date du 13 mai 2019.

Conformément à l’article 18 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, j’ai fait droit à certaines objections et observations formulées par les réclamants à l’encontre du projet d’aménagement général.

Les modifications ainsi apportées à la partie graphique sont illustrées dans la présente décision et en font partie intégrante. Les autorités communales sont tenues de me faire parvenir les plans et documents modifiés suite aux réclamations déclarées fondées par la présente décision, pour signature. Les autorités communales sont également tenues de me 4 faire parvenir les documents adaptés à la présente décision ayant trait au « plan d’aménagement particulier "quartier existant" [PAP QE] ».

Il est statué sur les réclamations émanant de […] Maître Serge Marx au nom et pour le compte de la société … […] Ad réclamation […] … […] Dans le cadre de la refonte, les parcelles des réclamants sont situées respectivement en « zone agricole [AGR] », en « zone de parc public [PARC] » ou en « zone mixte urbaine [MIX-u] », certaines parties étant par ailleurs superposées à titre indicatif d’une « zone de biotopes protégés », respectivement d’une « zone d’aménagement différé [ZAD] ».

Les réclamants demandent le reclassement en « zone mixte urbaine [MIX-u] », sinon en zone destinée à être urbanisée avec le cas échéant une « zone soumise à l’établissement d’un plan d’aménagement particulier "nouveau quartier" [PAP NQ] ». Elles demandent par ailleurs la suppression du « couloir pour projets routiers », ainsi que de la « zone d’aménagement différé [ZAD] ».

D’un point de vue urbanistique, il est exact que les parcelles en question se prêtent à l’urbanisation en raison de leur localisation centrale. En effet, le développement d’un nouveau quartier en ces lieux permettrait notamment de connecter l’ancien centre de Bertrange au pôle commercial sis le long de la route de Longwy.

Toutefois, dans la mesure où elles se situent en « zone verte », une intégration en zone destinée à être urbanisée doit obligatoirement être précédée d’études environnementales poussées, voire très poussées en considérant la proximité de la « zone protégée d’intérêt communautaire-Réseau NATURA 2000 ».

En ce qui concerne plus particulièrement la revendication de supprimer la « zone d’aménagement différé [ZAD] », il convient de relever que la commune de Bertrange dispose d’ores et déjà d’un potentiel de croissance suffisant.

Il s’y rajoute que le reclassement sollicité constitue un impact considérable sur l’économie du plan et que l’autorité de tutelle n’est pas autorisée à s’immiscer dans la gestion du service décentralisé, sous peine de violer le principe de l’autonomie communale consacré par l’article 107 de la Constitution.

En ce qui concerne les zones de biotopes, il convient de rappeler qu’il est explicitement précisé qu’elles ne figurent sur la partie graphique qu’à titre indicatif et dans un souci de simplification administrative, sans pour autant recenser une valeur juridique propre et sans qu’il n’en découle une quelconque servitude, comme confirmé notamment par la Cour administrative dans un arrêt du 17 février 2017, numéro du rôle 38207C.

La réclamation est partant non fondée. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 15 novembre 2019, la société … a fait introduire un recours tendant à l’annulation de :

1) la délibération du conseil communal du 8 juin 2018 portant mise sur orbite de la 5 procédure de refonte du plan d’aménagement général de la commune ;

2) la délibération du conseil communal du 10 janvier 2019 portant adoption du projet d’aménagement général, parties graphique et écrite, et ;

3) la décision du ministre de l’Intérieur du 19 juillet 2019 portant approbation de la délibération du conseil communal du 10 janvier 2019 et ayant déclaré recevable, mais non fondée sa réclamation.

I. Quant à la compétence Les décisions sur les projets d’aménagement, lesquels ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé1, étant précisé que le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend également au volet de la décision ministérielle du 19 juillet 2019 ayant statué sur les réclamations introduites par la société demanderesse, intervenue dans le processus général de l’élaboration de l’acte approuvé.

Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par la « loi du 7 novembre 1996 », seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire.

II. Quant à la recevabilité La commune de Bertrange et la partie étatique soulèvent l’irrecevabilité du recours en ce qu’il vise la délibération du conseil communal du 8 juin 2018, au motif, en substance, qu’il ne s’agirait que d’un accord – dépourvu de caractère décisionnel – donné au collège échevinal pour entamer la procédure d’adoption du PAG, et ne constituerait ni un acte administratif à caractère réglementaire ni une décision administrative individuelle, ainsi que cela se dégagerait de la jurisprudence des juridictions administratives.

La société … se rapporte à prudence de justice en ce qui concerne le moyen d’irrecevabilité lui ainsi opposé.

L’acte administratif susceptible de faire l’objet d’un recours contentieux doit constituer une véritable décision de nature à faire grief, c’est-à-dire un acte susceptible de produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle et patrimoniale de celui qui réclame. N’ont pas cette qualité de décision faisant grief, comme n’étant pas destinées à produire, par elles-mêmes, des effets juridiques, les informations données par l’administration, tout comme les déclarations d’intention ou les actes préparatoires d’une décision2.

Dans un arrêt du 15 décembre 2016, portant le numéro 38139C du rôle, la Cour administrative a précisé la nature juridique du vote du conseil communal prévu par l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004. Dans l’arrêt en question, la Cour administrative, après avoir relevé 1 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2020, V° Actes réglementaires, n° 51 et les autres références y citées.

2 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, confirmé sur ce point par Cour adm., 19 février 1998, n° 10263C du rôle, Pas. adm. 2020, V° Actes administratifs, n° 63 et les autres références y citées.

6 qu’avant la prise d’effet des modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par celle du 28 juillet 2011, les plans d’aménagement généraux étaient soumis à la « […] procédure classique d’adoption et d’approbation […] en deux temps [qui] comprenait d’abord un vote provisoire par le conseil communal contre lequel des objections étaient ouvertes, elles-mêmes vidées par le même conseil communal à travers le vote définitif, contre lequel des réclamations pouvaient être introduites devant le ministre de l’Intérieur qui, dans le cadre de ses attributions de tutelle d’approbation, était amené à vider les réclamations ainsi portées devant lui, et à approuver ou non le PAG, de sorte à revêtir une double casquette à ce sujet.

[…] », et après avoir précisé que dans le cadre de cette procédure classique « […] le conseil communal, en adoptant provisoirement un projet de PAG, avait en quelque sorte fait sien le projet d’une manière effective en l’adoptant à un premier stade, quitte à ce que des objections puissent être formulées relativement à cette première adoption communale […] », a constaté que cette procédure avait été modifiée par ladite loi du 28 juillet 2011. Ainsi, l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit, dans sa version modifiée, que le conseil communal délibère sur le projet d’aménagement général, tel qu’il lui est présenté par le collège échevinal, ensemble avec l’étude préparatoire, le rapport de présentation ainsi que, le cas échéant, le rapport sur les incidences environnementales, et qu’en cas de vote positif, le collège échevinal peut lancer les différentes procédures de consultation. L’article 14 de la même loi, quant à lui, prévoit, dans sa version modifiée, que le projet d’aménagement général ensemble avec toutes les pièces mentionnées à l’article 10 est soumis au conseil communal avec l’avis de la commission d’aménagement et, le cas échéant, avec l’avis du ministre ayant dans ses attributions l’environnement, le rapport sur les incidences environnementales, les réclamations et les propositions de modifications du collège échevinal. Le conseil communal peut ensuite approuver le projet tel que présenté ou y apporter des modifications issues des propositions de la commission d’aménagement, de l’avis émis par le ministre de l’Environnement ou encore des observations et objections présentées. Enfin, le conseil communal peut renvoyer le dossier devant le collège des bourgmestre et échevins – qui est tenu de recommencer la procédure prévue aux articles 10 et suivants – lorsqu’il entend apporter d’autres modifications au projet d’aménagement général.

A partir d’une lecture combinée des articles 10 à 14 de la loi du 19 juillet 2004, tels que résultant de la modification du 28 juillet 2011, la Cour administrative est arrivée à la conclusion que le vote du conseil communal prévu à l’article 10, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, dans sa version applicable depuis la modification par la loi du 28 juillet 2011, n’est plus comparable à l’adoption provisoire du plan d’aménagement général – prévue par l’ancienne version dudit article – et ne peut dès lors plus être analysé en adoption du projet de plan, mais en une sorte de « mise sur orbite » dudit projet, respectivement en un « feu vert » donné au collège échevinal pour procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la même loi. La Cour administrative a encore retenu que l’opération visée à l’article 14 consiste en règle générale dans l’adoption unique et définitive par le conseil communal du projet d’aménagement général qui devient le plan d’aménagement général adopté par l’organe compétent de la commune. Cette adoption peut se faire soit sous la forme originale, soit, dans la majorité des cas, sur les modifications opérées par le conseil communal compte tenu des consultations menées.

Ainsi, le vote positif émis par le conseil communal, en application de l’article 10, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, ne constitue qu’une « […] mise sur orbite [du] projet […] », respectivement un « feu vert » que le conseil communal donne au collège échevinal pour continuer la procédure et pour procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 7 de la loi du 19 juillet 2004, après avoir constaté que le projet est suffisamment élaboré à cette fin.

Or, une telle « mise sur orbite », respectivement un tel « feu vert », qui n’emporte aucune adoption ou approbation du projet d’aménagement général, mais qui traduit le seul constat du conseil communal que le projet est suffisamment élaboré pour que le collège échevinal puisse continuer la procédure, ne fait que préparer l’adoption ultérieure de ce projet, sans être susceptible de produire par elle-même, respectivement par lui-même des effets juridiques sur la situation personnelle ou patrimoniale des administrés, de sorte à constituer, non pas un acte administratif de nature à faire grief, mais un simple acte préparatoire ne pouvant, en tant que tel, faire l’objet d’un recours contentieux3.

Il s’ensuit que le recours en annulation est à déclarer irrecevable pour autant qu’il vise la délibération du conseil communal du 8 juin 2018.

En l’absence d’autres moyens d’irrecevabilité et au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le tribunal est amené à conclure que le recours en annulation est recevable, pour autant qu’il vise les décisions du conseil communal et du ministre des 10 janvier 2019 et 19 juillet 2019 portant adoption, respectivement approbation du PAG de la commune de Bertrange.

III. Quant au fond Il appartient tout d’abord au tribunal de vérifier la légalité externe de l’acte lui déféré, avant de se livrer, par le biais de l’examen de la légalité et du bien-fondé des motifs, au contrôle de la légalité interne.

A. Quant à la légalité externe des décisions litigieuses 1. Quant au moyen tiré d’un défaut de motivation En ce qui concerne la légalité externe de la décision ministérielle déférée, la société demanderesse critique le ministre pour avoir répondu, dans sa décision, de façon agrégée à une série de réclamants dont les situations seraient non comparables et pour ne pas avoir pris position de façon plus circonstanciée par rapport à sa propre réclamation. Le ministre n’aurait ainsi pas examiné in concreto les considérations qui auraient plaidé en faveur d’un classement de la parcelle n° … en zone [MIX-u].

Dans son mémoire en réplique, la société demanderesse ajoute, de manière générale, que le rôle de l’autorité de tutelle ne se limiterait pas à vérifier la conformité de l’approbation communale avec les dispositions de la loi du 19 juillet 2004, de ses règlements d’exécution et avec l’intérêt général, et que le ministre aurait deux compétences en vertu de l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004, à savoir un pouvoir d’approbation et un pouvoir de statuer sur les réclamations portées devant lui. Le ministre aurait ainsi, tel que jugé par la Cour constitutionnelle dans son arrêt du 20 juin 2014, n° 00111 du registre, un véritable pouvoir de réformation dans le cadre de l’adoption et de l’approbation des PAG, plus particulièrement lorsqu’il statue sur les réclamations portées devant lui dans le cadre de l’aplanissement des difficultés. La possibilité d’une réclamation auprès de l’autorité de tutelle constituerait donc 3 Trib. adm., 25 septembre 2017, n° 37637 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Actes règlementaires, n° 58 et les autres références y citées.

8 une véritable garantie supplémentaire pour un propriétaire pour que ses doléances soient entendues, de sorte qu’il appartiendrait au ministre de statuer sur le fond de chaque réclamation et qu’il ne saurait limiter son contrôle à un simple contrôle formel. La société demanderesse indique également dans ce contexte que dans le cadre du recours en annulation les juridictions administratives devraient vérifier si les modifications apportées par un instrument d’aménagement résultent de considérations d’ordre urbanistique et politique pertinentes répondant à une finalité d’intérêt général et se justifient eu égard à la situation factuelle et par rapport aux différents motifs avancés ou si elles sont constitutives d’une « erreur d’appréciation », la demanderesse précisant encore que l’exigence d’une « erreur manifeste d’appréciation » devrait être abandonnée suivant un arrêt de la Cour administrative du 21 mars 2019, nos 41948C et 41949C du rôle.

Concernant l’affirmation étatique que sa situation serait identique à celles des autres réclamants regroupés dans la décision ministérielle du 19 juillet 2019, la société demanderesse rétorque que les différentes parcelles regroupées par le ministre se trouveraient localisées différemment et présenteraient toutes leurs particularités spécifiques. Par ailleurs, la situation de ses propres parcelles serait fondamentalement différente des parcelles des autres réclamants, en ce qu’elles devraient faire partie intégrante du plan d’aménagement particulier nouveau quartier de Helfent, ci-après désigné par « PAP NQ Helfent ». Le ministre se serait toutefois borné et limité à examiner la situation des parcelles litigieuses de façon vague et générale par rapport au triangle Helfent ce qui ne correspondrait pas à une prise de position circonstanciée, de sorte que le ministre n’aurait pas examiné de façon individuelle et circonstanciée sa réclamation et que la décision ministérielle devrait encourir l’annulation sous cet aspect.

La partie étatique et la commune de Bertrange concluent au rejet du moyen pour ne pas être fondé.

Concernant le défaut de motivation de la décision ministérielle du 19 juillet 2019, voire le défaut d’examen in concreto de la réclamation de la société demanderesse, l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004 dispose dans son alinéa 1er que « Le ministre statue sur les réclamations dans les trois mois qui suivent le délai prévu à l’article 16 alinéa 1, respectivement dans les trois mois suivant la réception des avis de la commission d’aménagement et du conseil communal prévus à l’article qui précède, en même temps qu’il décide de l’approbation définitive du projet d’aménagement général, qui prend dès lors la désignation de plan d’aménagement général. ».

Il s’ensuit que le ministre est appelé, d’une part, à statuer sur les réclamations et, d’autre part, à décider de l’approbation définitive du projet d’aménagement général, dans le cadre de la décision qu’il est amené à prendre en application de l’article 18 précité.

En ce qui concerne la question de la motivation à indiquer dans la décision ministérielle pour justifier la prise d’un tel acte, le tribunal relève d’abord que les actes administratifs à caractère réglementaire doivent reposer sur de justes motifs légaux devant avoir existé au moment où ils ont été respectivement pris, motifs dont le juge administratif est appelé à vérifier tant l’existence que la légalité. Ces motifs doivent être retraçables, à la fois par la juridiction saisie et par les administrés intéressés, afin de permettre l’exercice effectif du contrôle juridictionnel de légalité prévu par la loi4.

4 Cour adm. 23 février 2006, n° 20173C du rôle, Pas. adm. 2020, V° Actes réglementaires, n° 30 et les autres références y citées.

9 En l’espèce, il ressort du libellé de la décision ministérielle déférée, reproduite par extraits ci-dessus, que le ministre a indiqué les raisons l’ayant amené à rejeter la réclamation de la société … tendant au reclassement de sa parcelle n° … en zone constructible, à savoir (i) qu’une intégration de la parcelle en question en zone destinée à être urbanisée devrait obligatoirement être précédée d’études environnementales poussées, voire très poussées en considérant la proximité de la zone Natura 2000, (ii) que la commune de Bertrange disposerait d’ores et déjà d’un potentiel de croissance suffisant, (iii) que le reclassement sollicité constituerait un impact considérable sur l’économie et que la gestion y relative incomberait à la seule commune, et (iv), que les zones de biotopes ne figureraient sur la partie graphique du PAG qu’à titre indicatif et dans un souci de simplification administrative, sans pour autant recenser une valeur juridique propre. Il s’ensuit qu’indépendamment du bien-

fondé de la justification ainsi avancée, le ministre a amplement motivé tant en droit qu’en fait sa décision.

Si le ministre a répondu à une série des réclamants par une même motivation et n’a ainsi certes pas pris position de manière individuelle quant à la réclamation de la société demanderesse, la partie étatique a néanmoins amplement motivé le rejet de ses arguments dans le cadre de la présente procédure, motivation qui est suffisamment précise pour permettre à la société demanderesse d’assurer utilement la défense de ses intérêts à travers le présent recours. A cela s’ajoute que la circonstance de répondre à une série des réclamants par une même motivation ne saurait laisser conclure à une motivation insuffisante par rapport à la réclamation de la société demanderesse, la partie étatique ayant encore expliqué cette façon de procéder par la considération que plusieurs réclamants, propriétaires des parcelles dans le triangle Helfent, ont présenté des revendications comparables et que les réponses à y apporter pouvaient être regroupées.

La décision ministérielle du 19 juillet 2019 comporte dès lors une indication suffisante de la motivation à sa base, de sorte que le moyen d’annulation tiré d’une absence de motivation est à rejeter pour ne pas être fondé 2. Quant au moyen tiré d’une illégalité procédurale La société demanderesse fait valoir que lors de l’adoption du projet de PAG en séance publique du 10 janvier 2019 par le conseil communal, sa parcelle n° … aurait été superposée d’une « Zone d’aménagement différé (Art 18 – PE PAG) », ci-après désignée par « zone d’aménagement différé » qui ne figurerait pas sur la partie graphique du projet de PAG tel que « mis sur orbite ». Elle estime à cet égard, que d’un point de vue procédural, il ne serait pas possible de rajouter des servitudes et obligations aggravant la situation des propriétaires entre la « mise sur orbite » du projet de PAG et son approbation, en ce qu’elle aurait ainsi été privée du « premier échelon » précontentieux, à savoir l’objection devant le conseil échevinal et la possibilité de participer à une réunion d’aplanissement des différends.

La commune et la partie étatique concluent au rejet de ce moyen.

L’article 14 de la loi 19 juillet 2004 dispose en son alinéa 3 que : « [Le conseil communal] peut approuver le projet dans sa forme originale ou y apporter des modifications qui soit sont proposées par la commission d’aménagement, soit répondent en tout ou en partie à l’avis émis par le ministre ayant l’Environnement dans ses attributions, soit prennent en compte en tout ou en partie des observations et objections présentées. ».

10 Il résulte de la disposition légale précitée que si le conseil communal peut adopter le projet d’aménagement général dans sa forme originale, il peut également y apporter des modifications. Ces modifications sont en principe issues de propositions pouvant émaner de manière formelle de trois sources, à savoir qu’elles peuvent émaner des propositions de la commission d’aménagement, sinon répondre en tout ou en partie à l’avis émis par le ministre ayant l’environnement dans ses attributions et finalement résulter de la prise en compte de toute ou partie des objections présentées par le public intéressé.

En l’espèce, il n’est pas contesté que la modification litigieuse résulte de la prise en compte de toute ou partie des observations et objections présentées par le public intéressé, à savoir, en l’espèce, des discussions menées entre la société demanderesse et le collège échevinal lors de la séance de l’aplanissement des différents lors de laquelle le réclamant peut présenter ses observations, l’article 13, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, disposant à cet égard que : « Au cas où une ou plusieurs réclamations écrites ont été présentées dans le délai, le collège des bourgmestre et échevins convoque les réclamants qui peuvent, en vue de l’aplanissement des différends, présenter leurs observations. ». En effet, il ressort tant de la proposition du conseil échevinal concernant les suites à réserver aux objections de la société …, citée in extenso ci-avant, que des affirmations non contestées de la commune, tout comme des affirmations mêmes de la partie demanderesse, que la superposition de la parcelle n° … d’une zone d’aménagement différé a été discutée en vue d’un aménagement futur lors de la réunion de l’aplanissement des différends, de sorte que la société demanderesse ne saurait valable argumenter qu’elle aurait été privée du « premier échelon » précontentieux, à savoir l’objection devant le conseil échevinal et la possibilité de participer à une réunion d’aplanissement des différends, alors que le contraire est le cas.

Concernant plus particulièrement l’argumentation de la société demanderesse qu’il ne serait pas possible de rajouter des servitudes et obligations aggravant la situation, force est de constater que, d’un côté, la société demanderesse ne se prévaut d’aucune base légale violée à l’appui de cet argument, et, de l’autre côté, et tel que souligné à juste titre par la partie étatique, la notion de « prendre en compte » figurant à l’article 14, alinéa 3 de la loi 19 juillet 2004 n’implique pas nécessairement que le conseil communal ne soit pas autorisé d’apporter des modifications plus contraignantes, étant rappelé à cet égard que l’objectif de la procédure d’adoption d’un PAG, telle que mise en place par la loi du 19 juillet 2004, va essentiellement dans le sens que les intéressés doivent pouvoir formuler respectivement leurs avis et objections en connaissance de cause par rapport au projet d’aménagement général tel que soumis au vote du conseil communal portant approbation dudit projet prévu à l’article 14 de la loi du 19 janvier 2004, ce qui a été le cas en l’espèce, tel que constaté ci-avant.

A cela s’ajoute que l’article 16 de la loi du 19 janvier 2004 disposant dans son dernier alinéa que : « Sont recevables les réclamations des personnes ayant introduit leurs observations et objections conformément à l’article 13 et les réclamations dirigées contre les modifications apportées au projet par le conseil communal lors du vote. » prévoit explicitement la possibilité pour les intéressés n’ayant pas présenté des observations et objections au collège échevinal sur base de l’article 13 de la loi du 19 janvier 2004 de réclamer contre les modifications apportées au projet par le conseil communal lors du vote prévu par l’article 14 de la même loi. Ainsi, la situation, telle que critiquée par la société demanderesse, est expressément prévue par l’article précité.

11 Le moyen tiré d’une illégalité procédurale encourt dès lors le rejet pour ne pas être fondé.

A. Quant à la légalité interne des décisions litigieuses En ce qui concerne la légalité interne des décisions incriminées, la société …, après avoir rappelé les faits et rétroactes à la base des décisions entreprises, rappelle que sa parcelle n° … aurait été classée en « Zone agricole (Art. 11 – PE PAG) » ci-après désignée par « zone [AGR] » et que sa parcelle n° … aurait été classé en « Zone mixte urbaine (Art. 4.1 – PE PAG) », ci-après désignée par « zone [MIX-u] » superposée d’une « Zone soumise à un plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » », ci-après désignée par « zone [PAP-NQ] » et d’une zone d’aménagement différé. Les deux parcelles seraient encore couvertes par des informations relatives aux « biotopes protégés ».

Elle indique à cet égard critiquer (i) le refus de classer la parcelle n° … en zone [MIX-

u] et la superposition de la parcelle … d’une zone d’aménagement différé, tout comme (iii) le maintien des informations relatives aux biotopes protégés sur les deux parcelles.

1. Quant au refus de classer la parcelle n° … en zone [MIX-u] et la superposition de la parcelle … d’une zone d’aménagement différé En ce qui concerne le refus de classer la parcelle n° … en zone [MIX-u], la société demanderesse estime que classement opéré en zone [AGR] ne serait justifié par aucune considération urbanistique, en avançant qu’à l’ouest de cette parcelle se trouverait une zone commerciale et à l’est une zone [Mix-u], de sorte qu’un classement de sa parcelle aurait permis de créer un arrondi du périmètre au lieu de laisser subsister une « encoche disgracieuse » sur la partie graphique du PAG.

Elle souligne encore que la circonstance que le classement des parcelles litigieuses en zone constructible aurait dû être précédé d’une évaluation environnementale stratégique, dite « SUP » ne saurait constituer un argument pour refuser le classement demandé, étant donné que les considérations urbanistiques exigeant le classement demandé auraient dû prévaloir, d’autant plus qu’il n’existerait aucun argument environnemental s’opposant à ce classement.

Elle estime dès lors que les autorités ne sauraient, d’un côté, se retrancher derrière l’absence de SUP pour justifier leur refus, tout en admettant, de l’autre côté, que le classement serait justifié par des considérations urbanistiques.

Concernant la « zone Natura 2000 » se trouvant à proximité des parcelles litigieuses, la société demanderesse estime que celle-ci ne saurait pas non plus motiver le refus de classement, étant donné que cette zone de protection spéciale « Région du Lias Moyen », désignée par un règlement grand-ducal du 4 janvier 2016 modifiant le règlement grand-ducal du 30 novembre 2012 portant désignation des zones de protection spéciale, ci-après désigné par le « règlement grand-ducal du 30 novembre 2012 » aurait été déclaré illégal et annulé par un jugement du tribunal administratif du 16 novembre 2017, n° 37748 du rôle.

Dans son mémoire en réplique, la société … ajoute par rapport aux développements de la commune de Bertrange quant au refus de classement de la parcelle en question en zone constructible [MIX-u], que le triangle Helfent ferait l’objet d’un « patchwork » de classements divers et variés le long des différents axes de circulation et qu’un classement en zone destinée à être urbanisée de l’ensemble du triangle Helfent complèterait et améliorerait 12 cette amorce de développement passée en garantissant un développement futur harmonieux et cohérent du site. Un tel classement serait d’autant plus justifié que l’ensemble du triangle Helfent serait situé en zone périurbaine, facilement accessible et à proximité des commerces et des bureaux, ce qui serait conforme avec l’esprit de la loi du 19 juillet 2004 qui aurait voulu, en forçant les communes à procéder à la refonte de leurs PAG, que celles-ci disposaient de PAG permettant des développements ordonnés et répondant aux défis de l’époque, la société demanderesse soulignant encore que l’accord des propriétaires concernés ne saurait constituer un obstacle au classement en zone destinée à être urbanisée, pour ne pas correspondre à une considération urbanistique.

Concernant plus particulièrement la parcelle n° …, la société demanderesse souligne que le refus de classement de cette parcelle en zone constructible serait « absurde » étant donné qu’il servirait à créer un arrondi du périmètre. La société demanderesse critique encore la commune, qui admettrait dans son mémoire en réponse, qu’elle ne s’opposerait pas à la viabilisation du triangle de Helfent et qui aurait, selon elle, uniquement refusé le classement sollicité par peur de refus du ministre de l’Environnement. A cet égard, elle souligne qu’il n’appartiendrait pas au ministre de l’Environnement de refuser de façon générale et abstraite et sans motif valable son approbation en cas de modification de la zone verte si cette modification est dûment justifiée par des raisons urbanistiques, la société demanderesse citant, dans ce contexte, un arrêt de la Cour administrative du 13 juillet 2017, n° 38895C du rôle. Elle en conclut qu’en l’espèce, il n’existerait aucun argument basé sur les dispositions de la législation relative à la protection de la nature et des ressources naturelles qui justifierait un refus de la part du ministre de l’Environnement, tout en soulignant que l’argument mis en avant par ledit ministre concernant l’existence de la zone de protection spéciale « Région du Lias Moyen » serait inopérant, étant donné que le règlement grand-ducal du 4 janvier 2016 à la base de ce classement aurait été annulé par jugement de tribunal administratif.

En ce qui concerne ensuite la superposition de la parcelle … d’une zone d’aménagement différé, la société demanderesse fait valoir que des considérations urbanistiques plaideraient en faveur d’une urbanisation du triangle Helfent dans son ensemble et que la plus grande partie dudit site ne serait pas soumise à une zone d’aménagement différé.

Il n’existerait, par ailleurs, aucune raison objective pour soumettre cette « petite parcelle » à un tel régime. Cette parcelle ferait partie intégrante du PAP NQ Helfent, de sorte qu’il ne ferait aucun sens de la superposer d’une zone d’aménagement différé, d’autant plus qu’à l’est de la zone d’aménagement différé se trouverait encore une « appendicite » constructible, la partie demanderesse indiquant que l’ensemble de planification serait dépourvu de cohérence à cet endroit.

Il résulterait encore du schéma directeur que la parcelle litigieuse ferait partie intégrante du site PAP NQ Helfent, de sorte qu’il ne serait pas justifié de la superposer, contrairement aux autres parcelles faisant partie dudit schéma directeur et du PAP NQ Helfent, d’une zone d’aménagement différé, la société demanderesse concluant à cet égard à une violation du principe de l’égalité devant la loi tel qu’ancré à l’article 10bis de la Constitution. Elle indique qu’en cas de viabilisation du PAP NQ Helfent, il fallait respecter obligatoirement ce schéma directeur, de sorte qu’il n’existerait aucune raison de croire que le développement de la parcelle litigieuse serait préjudiciable à la commune et qu’il serait faux de prétendre qu’il risquerait de porter atteinte aux visions urbanistiques de la commune. Elle soutient ensuite que le but essentiel d’une zone d’aménagement différée serait, suivant l’article 28, alinéa 3 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, de constituer une réserve 13 foncière, ce qui ne serait pas possible en l’espèce, étant donné que sa parcelle serait trop petite.

La société … ajoute ensuite, et concernant l’argumentation étatique suivant laquelle l’annulation du règlement grand-ducal du 4 janvier 2016 soumettrait le triangle Helfent à une zone de protection spéciale « de fait », que le PAG n’identifierait pas de zone protégée d’intérêt communautaire sur ses propres parcelles, de sorte que la partie étatique ne saurait se prévaloir d’une telle zone « de fait ». Elle rappelle dans ce contexte encore qu’une zone de protection spéciale légalement désignée par un Etat membre serait soumise aux obligations prévues à l’article 6 de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, dite la « directive habitats », à savoir l’évaluation Natura 2000 et que si en dépit de conclusions négatives résultant de l’évaluation Natura 2000 un projet doit être réalisé pour des raisons impératives d’intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et lorsqu’il n’existe pas de solutions alternatives, le projet pourrait être autorisé sous condition que des mesures compensatoires soient mises en œuvre. Une zone de protection spéciale « de fait » serait encore soumise aux obligations prévues par l’article 4, paragraphe 4, première phrase, de la directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages, dite « directive oiseaux » et pourrait être identifiée, notamment, sur base de l’inventaire dit « International Bird Area ». Bien que ledit article 4 de la directive oiseaux n’interdirait pas toute atteinte à l’environnement, mais uniquement celles qui auraient un effet significatif sur les objectifs fixés audit article 4, il n’en demeurerait pas moins qu’aucune exigence économique ou sociale ne pourrait justifier des interventions portant atteinte à l’environnement des zones de protection spéciale « de fait ». Concernant toutefois le triangle Helfent, la société demanderesse estime que la partie étatique ne pourrait en aucun cas se prévaloir d’un raisonnement par rapport à une telle zone de protection spéciale « de fait ». En ce qui concerne les zones importantes pour la conservation des oiseaux, dites « ZICO », telles qu’identifiées sur le site internet de « Birdlife » et parmi lesquelles figurerait également la zone du règlement grand -ducal illégal du 4 janvier 2016 « Région du Lias Moyen » s’étendant sur le triangle Helfent, la société demanderesse fait valoir que les zones ZICO n’auraient aucune valeur juridique contraignante mais pourraient uniquement valoir preuve qu’un site donné serait à classer par un Etat membre en ZICO. Si la Cour de Justice de l’Union européenne, ci-après désignée par la « CJUE », aurait certes admis que les zones ZICO pourraient être utilisées par elle comme élément de référence permettant d’apprécier si un Etat membre a classé un nombre et une superficie suffisants de territoires en zones de protection spéciale, la société demanderesse indique néanmoins, d’un côté, que la désignation des zones ZICO ne serait pas opposable aux administrés dans la mesure où les arrêts de la CJUE dont question auraient uniquement concerné des litiges entre la Commission européenne et un Etat membre dans le cadre d’une transposition incomplète de la directive oiseaux et que la désignation des zones de protection spéciale devrait être précédée d’une participation effective du public, ce qui n’aurait pas été fait, de sorte qu’elles n’auraient aucune valeur légale à l’égard du public, ne lui seraient pas opposables et ne pourraient pas servir pour désigner les zones litigieuses dans le PAG. De l’autre côté, la société demanderesse souligne que la CJUE aurait admis que les zones ZICO ne seraient juridiquement pas contraignantes. Elle explique ensuite la procédure de désignation d’une zone ZICO et cite une étude « Alterra » de 2012 sur la fiabilité des données scientifiques se trouvant à la base des zones ZICO, laquelle aurait confirmé l’absence de fiabilité des données à la base desdites zones. La société demanderesse souligne encore que la grande majorité des 14 données se trouvant à la base de la zone ZICO seraient très vieilles pour remonter à plus de cinq ans et n’auraient pas été établis suivant une méthode scientifique et seraient dès lors dépourvues de toute fiabilité, la société … citant dans ce contexte les méthodologies plus fiables, telles que « Punkt-Stopp-Zählung », « Linien-Kartierung » et « Revierkartierung », qui n’auraient pas été appliquées aux recensements se trouvant à la base des zones ZICO. Les zones ZICO ne seraient dès lors basées sur aucune étude scientifique fiable et représentative, et la zone « Région du Lias Moyen », qu’elle soit « de fait » ou désignée par règlement grand-ducal jugé illégal, n’aurait pas de consistance juridique ni de fondement scientifique, de sorte que la partie étatique ne saurait s ’en prévaloir.

Les décisions litigieuses devraient dès lors être annulées.

La partie étatique et la commune de Bertrange concluent au rejet de ces moyens pour ne pas être fondés.

En ce qui concerne le classement des parcelles litigieuses, il convient d’abord de rappeler que saisi d’un recours en annulation, la mission de juge de la légalité exclut le contrôle des considérations d’opportunité et notamment d’ordre politique, à la base de l’acte administratif attaqué et inclut la vérification, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, de ce que les faits et considérations sur lesquels s’est fondée l’administration sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute. Dans cette démarche de vérification des faits et des motifs à la base de l’acte déféré, le tribunal est encore amené à analyser si la mesure prise est proportionnelle par rapport aux faits dont l’existence est vérifiée, le tribunal étant ainsi appelé à opérer une balance valable et équilibrée des éléments en cause et à vérifier plus particulièrement si l’acte posé est proportionné à son but5.

Il échet ensuite de rappeler qu’aux termes de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004 « Les communes ont pour mission de garantir le respect de l’intérêt général en assurant à la population de la commune des conditions de vie optimales par une mise en valeur harmonieuse et un développement durable de toutes les parties du territoire communal par:

(a) une utilisation rationnelle du sol et de l’espace tant urbain que rural en garantissant la complémentarité entre les objectifs économiques, écologiques et sociaux;

(b) un développement harmonieux des structures urbaines et rurales, y compris les réseaux de communication et d’approvisionnement compte tenu des spécificités respectives de ces structures, et en exécution des objectifs de l’aménagement général du territoire;

(c) une utilisation rationnelle de l’énergie, des économies d’énergie et une utilisation des énergies renouvelables;

(d) le développement, dans le cadre des structures urbaines et rurales, d’une mixité et d’une densification permettant d’améliorer à la fois la qualité de vie de la population et la qualité urbanistique des localités;

(e) le respect du patrimoine culturel et un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage lors de la poursuite des objectifs définis ci-

dessus;

(f) la garantie de la sécurité, la salubrité et l’hygiène publiques. ».

5 Cour adm. 12 janvier 2021, n°44684C du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu.

15 L’article 6 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit, quant à lui, que « Le plan d’aménagement général a pour objectif la répartition et l’implantation judicieuse des activités humaines dans les diverses zones qu’il arrête aux fins de garantir le développement durable de la commune sur base des objectifs définis par l’article 2 de la loi. ».

Il s’ensuit que les autorités communales, lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement, doivent être mues par des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement des agglomérations et d’ordre politique tirées de l’organisation de la vie en commun sur le territoire donné, tendant les unes et les autres à une finalité d’intérêt général et dans ce contexte, lesdites autorités doivent veiller tant à la conservation de l’esthétique urbaine qu’au développement rationnel des agglomérations.

Il échet encore de noter que la modification d’un PAG est, dans son essence même, prise dans l’intérêt général, cette caractéristique étant présumée jusqu’à preuve du contraire6.

Il convient ensuite de rappeler que la mutabilité des PAG relève de leur essence même, consistant à répondre à des contraintes variables à travers le temps concernant à la fois les aspects urbanistiques de l’aménagement des agglomérations et le volet politique de la vie en commun sur le territoire donné7. Il s’ensuit qu’en se fondant sur des considérations d’ordre urbanistique correspondant à une finalité d’intérêt général, les autorités communales peuvent procéder à des modifications de leur règlementation urbanistique, pourvu toutefois que la décision soit proportionnelle à son objectif et qu’elle soit dépourvue d’erreur d’appréciation, analyse qui sera effectuée ci-après.

En l’espèce, et concernant la parcelle n° …, il est constant en cause pour ne pas être contesté que sous l’ancien PAG, ladite parcelle était classée en zone non constructible avec indication « zone potentielle de développement » et que le PAG sous analyse classe, quant à lui, ladite parcelle en zone [AGR] pour la maintenir ainsi en zone non constructible, l’argumentation de la société demanderesse tendant, en substance, à établir que ladite parcelle se prêterait à un classement en zone constructible et à contester la motivation à la base de son maintien en zone verte en dénonçant l’absence de considérations urbanistiques et d’intérêt général dans la démarche des autorités compétentes. La parcelle n° …, quant à elle, a été classée en zone [MIX-u], superposée d’une zone [PAP-NQ], non litigieuse en l’espèce et d’une zone d’aménagement différé, dont l’argumentation de la société demanderesse tend à demander la suppression.

Face aux contestations ainsi soulevées par la société demanderesse à l’encontre des motifs avancés par les autorités communale et ministérielle à la base du classement de la parcelle n° … en zone [AGR] et de la superposition de la parcelle n° … d’une zone d’aménagement différé, il convient d’abord de préciser qu’en matière d’urbanisme, une commune bénéficie d’un droit d’appréciation très étendu en vertu du principe de l’autonomie communale inscrit à l’article 107 de la Constitution8, l’analyse de la légalité des décisions étant à opérer par les juridictions administratives selon les préceptes ci-avant détaillés.

6 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Recours en annulation, n° 10 et les autres références y citées.

7 Trib. adm., 7 mars 2001, n° 12233 du rôle, confirmé par Cour adm., 20 décembre 2001, n° 13291C du rôle, Pas. adm. 2020, V° Urbanisme, n° 192 et les autres références y citées.

8 Trib. adm., 30 septembre 2013, n° 30838 du rôle, Pas. adm. 2019, V° Tutelle administrative, n° 35, de même que Trib. adm., 9 juillet 2007, n° 22242 du rôle, Pas. adm. 2019, V° Tutelle administrative, n° 37 et les autres références y citées.

16 Appliquées au recours sous examen, les considérations qui précèdent impliquent que même dans l’hypothèse où la société demanderesse argumentait à raison que ses parcelles se prêteraient à un aménagement, le droit d’appréciation très étendu dont bénéficient les autorités communales n’en pâtirait pas et les autorités communales resteraient libres de décider de l’affectation du site concerné, sans être liées par l’appréciation de la société demanderesse.

Il ressort ensuite des pièces versées en cause, de même que des explications de part et d’autre, que les parcelles litigieuses font partie du triangle Helfent, lequel se situe entre le centre de Helfent et le noyau de Bertrange et est limité par la route de Longwy au sud et la route de Luxembourg au nord, lesdites parcelles se trouvent plus particulièrement en deuxième, voire troisième position par rapport aux centres commerciaux longeant la route de Longwy. La parcelle n° … est, par son côté sud directement adjacente à la zone [MIX-u] et de ses côtés nord, est et ouest, à la zone [AGR]. La parcelle n° … par contre est, par ses côtés sud et est directement adjacente à d’autres parcelles faisant partie de la zone [MIX-u] et superposées d’une zone d’aménagement différé, et de ses côtés nord et ouest de parcelles classées en zone [AGR], la parcelle n° … constituant ainsi la dernière parcelle du côté nord de la zone [MIX-u] longeant la route de Longwy.

Force est ensuite de constater que pour justifier leur refus de classement de la parcelle n° … en zone constructible, voire, de supprimer la zone d’aménagement différé de la parcelle n° …, la commune et le ministre ont avancé, le souhait d’urbaniser les parcelles litigieuses dans le cadre d’un projet d’ensemble concernant tout le triangle Helfent, ains que la nécessité de procéder aux études environnementales poussées en considérant la proximité de la zone Natura 2000 et finalement le potentiel de croissance suffisant de la commune de Bertrange.

Quant au bien-fondé du motif de refus ayant trait à l’élaboration d’un projet d’ensemble pour le triangle Helfent, force est de constater à l’instar des parties en cause qu’il ressort effectivement de la partie graphique du PAG de la commune de Bertrange, qu’une urbanisation dudit triangle, dont les parcelles litigieuses font partie intégrante, permettrait effectivement de raccorder harmonieusement le centre de Helfent avec le noyau de Bertrange, de sorte à arrondir à cet endroit le tissu urbain existant.

Force est ensuite de constater que la commune souhaite procéder à la viabilisation du triangle Helfent et que sa vision consiste à une viabilisation par un projet d’ensemble cohérent et de qualité comportant notamment le long du cours d’eau un considérable espace de verdure aménagé pour partie en parc qui puisse être approuvé par tous les propriétaires et toutes les instances compétentes impliquées et qui s’inscrit dans un développement harmonieux et durable de la commune de Bertrange. Plus particulièrement, il est encore envisagé que la voirie principale d’accès vers le triangle Helfent serait réalisée à partir de la rue Pletzer par un boulevard notamment sur les terrains de la société demanderesse et qu’afin d’éviter la réalisation de nouveaux constructions « tournant le dos » au futur boulevard, la parcelle constructible n° …, tout comme les parcelles adjacentes faisant partie de la zone [MIX-u], ont été superposées d’une zone d’aménagement différé en attendant la réalisation dudit boulevard.

Or, ces considérations tenant à un projet de viabilisation global pour le triangle Helfent, considérations qui ne sont d’ailleurs aucunement remis en cause par la société demanderesse, relèvent du pouvoir discrétionnaire de la commune, s’agissant de considérations de pure opportunité politique qui échappent à la compétence du juge administratif, étant rappelé, comme retenu ci-avant, que la mission du juge de la légalité 17 conférée au tribunal à travers l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 exclut le contrôle des considérations d’opportunité et notamment d’ordre politique, à la base de l’acte administratif attaqué et inclut uniquement la vérification, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, de ce que les faits et considérations sur lesquels s’est fondée l’administration sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute.

Dans la mesure où il n’est, par ailleurs, pas contesté en cause que la vision urbanistique de la commune, consistant à une viabilisation future du triangle Helfent par un projet d’ensemble cohérent et de qualité répond à une finalité d’intérêt général et s’inscrit dès lors dans les objectifs visés à l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, et dans la mesure où il s’ensuit qu’un classement de la parcelle n° … en zone constructible et l’enlèvement de la zone d’aménagement différé de la parcelle n° … ne permettrait pas d’atteindre ce but, mais favoriserait, au contraire, un saucissonnage du site, ce que la commune souhaite justement à éviter, il échet de constater que le maintien de la parcelle n° … en zone non-constructible et le maintien de la zone d’aménagement différée sur la parcelle n° … sont proportionnelles à son but, de sorte qu’aucune erreur d’appréciation ne saurait être reproché aux autorités communale et ministérielle.

Cette constatation n’est pas énervée par les affirmations de la société demanderesse, suivant lesquelles un classement de sa parcelle n° … en zone [MIX-u] aurait permis de créer un arrondi du périmètre, étant donné, d’un côté, et tel que retenu ci-avant, qu’il ressort des considérations de la commune qu’elle ne souhaite pas procéder au classement des parcelles du triangle Helfent avant l’élaboration d’un projet d’ensemble pour l’intégralité du site, considérations, qui relèvent, comme retenu ci-avant, de la pure opportunité politique et, de l’autre côté, que lesdites affirmation tombent en tout état de cause à faux. En effet, il ressort de la partie graphique du PAG sous examen que la parcelle dont question est uniquement par son côté sud adjacente à la zone [MIX-u] et que les parcelles situées aux nord, est et ouest de celle-ci sont également classées en zone [AGR], de sorte qu’un classement de ladite parcelle en zone [MIX-u] décalerait le périmètre constructible d’avantage vers le nord.

Elle n’est pas non plus énervée par les allégations de la société demanderesse qu’une superposition de sa parcelle n° … d’une zone d’aménagement différé, qui serait, suivant l’article 28, alinéa 3 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, destinée de constituer une réserve foncière, ne donnerait pas de sens en raison de la taille de ladite parcelle, étant donné qu’il résulte clairement de la partie graphique du PAG que deux autres parcelles sont également couvertes par la zone d’aménagement différé litigieuse, les trois parcelles dont question étant destinées à accueillir notamment le boulevard principal d’accès vers le triangle Helfent à partir de la rue Pletzer.

Concernant les allégations de la société demanderesse suivant lesquelles une superposition de sa parcelle n° … d’une zone d’aménagement différé ne donnerait pas de sens en raison de la circonstance qu’à l’est de la zone d’aménagement différé se trouverait encore une « appendicite » constructible, force est au tribunal de constater, à l’instar de la commune, qu’il résulte de la partie graphique du PAG en question que cette « appendicite » est superposée par une zone de servitude « Couloirs et espaces réservés – couloirs pur projets routiers », de sorte à ne pas être directement constructible contrairement aux affirmations de la société demanderesse.

Concernant finalement les développements de la société demanderesse relatives au schéma directeur, force est au tribunal de constater, d’un côté, qu’aucune disposition 18 règlementaire ou légale n’interdit au PAG de classer une parcelle en zone d’aménagement différé au motif qu’elle est incluse dans une zone PAP-NQ soumise aux orientations d’un schéma directeur, et, de l’autre côté, et tel que souligné à juste titre par la commune, qu’il ressort du schéma directeur litigieux, que celui-ci ne permet pas d’assurer à lui seul un développement cohérent de la zone suivant les visions urbanistiques de la commune, mais qu’une partie de celui-ci devra être orientée vers l’extension de la rue Petzler destinée comme accès principal vers le triangle Helfent. Dans contexte, il convient encore de rejeter les considérations de la société demanderesse relatives à une violation de l’article 10bis de la Constitution, suivant lequel tous les Luxembourgeois sont égaux devant la loi, étant donné, d’un côté, et tel que retenu ci-avant, que deux autres parcelles dans la zone PAP-NQ sont également couvertes par la zone d’aménagement différé litigieuse pour se prêter à accueillir notamment le boulevard d’accès vers le triangle Helfent à partir de la rue Pletzer, et, de l’autre côté, que toutes les autres parcelles faisant partie de la zone PAP-NQ ne se prêtent pas pour accueillir le boulevard d’accès, la situation de la société demanderesse n’est pas comparable à celle des autres propriétaires de parcelles de la zone PAP-NQ.

Il s’ensuit que c’est à bon droit que les autorités communales et ministérielle ont refusé le classement de la parcelle n° … en zone [MIX-u] ainsi que la suppression de la zone d’aménagement différé sur la parcelle n° …, sans qu’il n’y a lieu d’analyser les autres motifs de refus avancés par la commune et le ministre, cet examen devenant surabondant.

2. Concernant le maintien des informations relatives aux biotopes protégés sur les parcelles nos … et … La société demanderesse conteste la superposition des parcelles nos … et … par une zone « Biotopes protégés » en arguant que le projet du PAG, tel qu’il a été mis sur orbite par le conseil communal en date du 8 juin 2018, aurait prévu une zone superposée « Biotopes protégés » suivant les articles 17 et 20 de la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, ci-après désignée par la « loi du 19 janvier 2004 », tandis que suite à l’approbation du projet du PAG par le conseil communal en date du 10 janvier 2019, cette zone aurait été « mutée » en zone « Biotopes protégés » suivant les articles 17 et 21 de la loi du 18 juillet 2018 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, ci-après désignée par la « loi du 18 juillet 2018 ». Selon la société demanderesse, un tel changement de base légale en cours de procédure ne serait pas possible, étant donné que (i) en absence de dispositions transitoires de la loi du 18 juillet 2018, la loi abrogée du 19 janvier 2004, ayant existé au moment de la mise sur orbite du projet de PAG, aurait dû être maintenue, (ii) en changeant la base légale en cours de procédure, les autorités administratives auraient supprimé pour l’administré « l’échelon de l’objection » par rapport à cette base légale, de sorte qu’elles auraient dû recommencer la procédure d’adoption du PAG en indiquant la nouvelle base légale, et (iii) la partie écrite du PAG renverrait, dans son article 29, expressément à la loi du 19 janvier 2004, de sorte que la légalité de la zone critiquée devrait être examinée par rapport au seul article 17 de la loi du 19 janvier 2004.

La société demanderesse soutient ensuite que la zone « Biotopes protégés » serait illégale sous différents aspects.

Premièrement et à titre principal, elle fait valoir qu’un PAG ne pourrait pas prendre ex nihilo des mesures de protection de la nature basées sur la loi du 19 janvier 2004, étant donné que l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, visant en son point (e) un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage, ne permettrait pas aux communes de créer de façon 19 autonome des zones basées sur la loi du 19 janvier 2004. Aussi, l’article 38 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement d’une commune, ci-après désigné par le « règlement grand-ducal du 8 mars 2017 », viserait uniquement à faire transposer par le PAG des zones de protection de nature et des ressources naturelles ayant valeur légale ou réglementaire, c’est-à-dire, des zones Natura 2000 ou des zones protégées d’intérêt national. En revanche, les biotopes au sens de l’article 17 de la loi du 19 janvier 2004 ne constitueraient pas de zones pouvant être désignées par un PAG, ce que la Cour administrative aurait déjà confirmé dans un arrêt du 13 juillet 2017, n° 38895C du rôle. Elle en conclut que par le biais de la loi du 19 janvier 2004, le législateur aurait réservé la protection de la nature et des ressources naturelles à l’Etat, tandis que l’aménagement du territoire ferait l’objet d’une compétence répartie entre l’Etat et les communes, de sorte que les communes ne sauraient pas prendre ex nihilo des mesures de protection de la nature par le biais de leurs instruments d’aménagement communaux, compétence qui incomberait exclusivement au législateur et au Grand-Duc. Même si la commune aurait instauré la zone en question « à titre indicatif », il n’en resterait pas moins qu’un texte règlementaire, tel qu’un PAG, ne pourrait pas contenir des zones indicatives en violation avec l’article 38 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017. Ainsi, il n’existerait aucun texte légal qui conférerait à des biotopes au sens de l’article 17 de la loi du 19 janvier 2004 une valeur réglementaire, de sorte qu’une transposition de tels concepts par un PAG serait forcément illégale, la société demanderesse renvoyant, dans ce contexte à la procédure de refonte du PAG de la Ville de Luxembourg au cours de laquelle les zones superposées « biotopes » auraient été abandonnées.

En deuxième lieu et à titre subsidiaire, la société demanderesse, après avoir rappelé qu’un PAG constituerait un acte réglementaire, c’est-à-dire un acte normatif à portée générale et impersonnelle, fait valoir qu’un tel acte réglementaire ne pourrait contenir des informations à titre indicatif. Ainsi, dans un texte de nature réglementaire, il y aurait lieu d’omettre les dispositions n’ayant pas de caractère normatif, c’est-à-dire celles qui auraient qu’une valeur explicative ou explicative. Une telle façon de procéder remettrait, selon la société demanderesse, en question les fondements-mêmes du fonctionnement de l’ordre juridique.

Troisièmement, la société demanderesse fait plaider que le PAG litigieux ne saurait désigner des « Biotopes protégés » au sens de l’article 17 de la loi du 19 janvier 2004, sans violer l’ordre juridique, dans la mesure où ledit article 17 ne prévoirait pas son exécution par voie réglementaire. Or, si le PAG désignerait des « Biotopes protégés » au sens dudit article, il ne se contenterait pas seulement d’une simple mesure de transposition, mais il muterait en instrument d’exécution de la loi du 19 janvier 2004, de sorte à sortir de sa sphère de compétence limitée à la loi du 19 juillet 2004.

En quatrième lieu, et à supposer que la commune puisse désigner par son PAG des « Biotopes » de façon autonome en exécution de la loi du 19 janvier 2004, la société … fait plaider que l’article 17 de ladite loi, en qualifiant automatiquement et systématiquement de biotopes tous mares, marécages, marais, sources, pelouses sèches, landes tourbières, couvertures végétales constituées par des roseaux ou des joncs, haies, broussailles ou bosquets, serait contraire à l’article 1er du Protocole additionnel à la CEDH et à l’article 16 de la Constitution en ce que les sites énumérés par ledit article 17 ne constitueraient pas ipso facto un milieu particulier à des espèces protégées, de sorte qu’il impliquerait un système de protection disproportionné car automatique et sans nuance s’analysant en une véritable privation de propriété en interdisant tout simplement la « réduction, la destruction ou le changement de biotopes ». Tout en admettant que des limitations par la loi du droit de 20 propriété, tel que garanti par l’article 16 de la Constitution et l’article 1er du Protocole additionnel à la CEDH, seraient possibles, la société demanderesse est toutefois d’avis qu’il faudrait que ces limitations restaient proportionnelles au but recherché, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce. Après avoir cité deux arrêts de la Cour de cassation belge, la société demanderesse rappelle que l’article 17 de la loi du 19 janvier 2004 aurait déjà été déclaré inconstitutionnel par la Cour constitutionnelle dans l’arrêt n° 00138 du 6 juin 2018, arrêt invoqué par la Cour administrative dans un arrêt du 13 décembre 2018, n° 41.111C du rôle, pour déclarer illégale une décision du ministre de l’Environnement par laquelle celui a constaté l’existence d’un prétendu « biotope inventorié » sur base de l’article 17 précité.

La société demanderesse souligne, par ailleurs, que l’article 17 en question ne se suffirait pas à lui-même en ce qu’il ne définirait pas ce qu’il fallait entendre par « Biotope ».

A cet égard, elle indique que l’« instruction d’application des dispositions de l’article 17 », élaboré par le ministre de l’Environnement n’aurait aucune valeur juridique, dans la mesure où de tels circulaires ou instructions seraient des prescriptions générales que les chefs de service donneraient aux fonctionnaires placés sous leur autorité en ce qui concerne l’interprétation et l’application des lois et règlements et que de pareilles circulaires ou instructions n’auraient, à l’égard des administrés, aucune force obligatoire. Elle se base ensuite sur différentes sources et notamment sur une réponse à une question parlementaire du 20 juillet 2007, pour souligner l’imprécision de l’article 17 de la loi du 19 janvier 2004, et alléguer que l’article 17 aurait, le cas échéant, dû être complété par règlement grand-ducal. En limitant, voire en supprimant, l’exercice du droit de propriété, l’article 17 en question toucherait une matière réservée par la Constitution à la loi qui ne pourrait pas faire l’objet d’une exécution générale par voie de règlement grand-ducal.

La société demanderesse en conclut que l’article 17 de la loi du 19 janvier 2004 devrait énumérer limitativement les critères dont l’élaboration serait confiée au Grand-Duc, ce qui ne serait cependant par le cas, de sorte « qu’il » serait essayé de mettre ledit article en exécution en recourant à une série « d’instruments variés non prévus à cet effet », comme des instructions ministérielles, le « cadastre des biotopes » ou encore, comme en l’espèce, les instruments d’aménagement communal comme le PAG. La demanderesse estime dès lors qu’admettre la désignation de biotopes, même à titre indicatif, dans le cadre d’un PAG sur base de l’article 17 de la loi du 19 janvier 2004, reviendrait à « court-circuiter les vices », dont notamment l’inconstitutionnalité, affectant cet article 17.

Cinquièmement et finalement, la société demanderesse estime que même si un PAG pouvait désigner des « Biotopes protégés », cette désignation ne serait ni fondée, ni justifiée en l’espèce, étant donné que la désignation d’un « Biotope protégé » ne pourrait pas se baser sur des critères péremptoires, mais son identification devrait découler d’une analyse in concreto au sens de l’article 17 de la loi du 19 janvier 2004. En se basant sur un jugement du tribunal administratif du 28 mars 2018, n° 38859 du rôle, suivant lequel il appartiendrait aux autorités de fournir des éléments concrets de nature à justifier la qualification de biotope compte tenu de la situation factuelle donnée, qui devrait se justifier par rapport à des éléments concrets et non seulement reposer sur une simple probabilité ou une simple éventualité, la société demanderesse fait valoir que ces parcelles ne seraient recouvertes par aucun biotope correspondant à ces critères et qu’aucun milieu qualifiable de biotope n’aurait été concrètement identifié sur les parcelles litigieuses, de sorte que le classement critiqué serait encore à annuler sous cet aspect.

21 La partie étatique et la commune de Bertrange concluent au rejet du moyen pour ne pas être fondé.

En ce qui concerne le maintien des informations relatives aux biotopes protégés sur les parcelles nos … et …, force est au tribunal de constater qu’il ressort tant des explications de part et d’autre que des pièces versées en cause et plus particulièrement de l’extrait de la partie graphique du PAG que les parcelles de la société demanderesse ont été superposées d’un « Biotopes protégés (article 17 de la loi du 18 juillet 2018 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, à titre indicatif et non exhaustif) », lequel figure d’après la légende de la même partie graphique sous la rubrique « Informations à titre indicatif et non exhaustif », le projet d’aménagement général tel que « mis sur orbite » prévoyait quant à lui l’indication suivante : « Biotopes protégés (article 17 de la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, à titre indicatif et non exhaustif) ».

Force est encore de constater que toutes les contestations de la société demanderesse relatives à cette superposition basent sur la prémisse que celle-ci aurait un caractère contraignant pour figurer dans un acte normatif réglementaire. La société demanderesse critique, en effet, le changement de l’indication de la base légale, à savoir de la loi du 19 janvier 2004 à la loi du 18 juillet 2018, en cours de procédure d’adoption. Elle conteste encore, d’une part, que les autorités communales puissent créer ex nihilo des biotopes, en les incluant dans leur PAG pour qu’ils en fassent partie intégrante, en court-circuitant ainsi les dispositions légales découlant de la loi du 19 janvier 2004 et en empiétant les compétences du Grand-Duc en la matière, et, d’autre part, que l’article 17 de la loi du 19 janvier 2008, lequel serait en tout état de cause inconstitutionnel et contraire à l’article 1er du Protocole additionnel à la CEDH, permette aux autorités communales de créer de tels biotopes.

Il convient de rappeler qu’aux termes de l’article 5 de la loi du 19 juillet 2004 « Le plan d’aménagement général est un ensemble de prescriptions graphiques et écrites à caractère réglementaire qui se complètent réciproquement et qui couvrent l’ensemble du territoire communal qu’elles divisent en diverses zones dont elles arrêtent l’utilisation du sol […] », prescriptions dont toute violation est sanctionnée pénalement conformément à l’article 107 de la même loi, lequel dispose en effet que « Sont punis d’un emprisonnement de huit jours à deux mois et d’une amende de 251 à 125.000 euros, ou d’une de ces peines seulement, tous ceux qui enfreignent de quelque manière que ce soit les prescriptions des plans ou projets d’aménagement généraux ou particuliers, du règlement sur les bâtisses, les voies publiques et les sites ou des autorisations de bâtir. ».

Il ressort des dispositions légales qui précèdent que les prescriptions contenues dans un PAG, serait-ce dans sa partie écrite ou dans la partie graphique, ont un caractère réglementaire et contraignant et que toute violation de ces mêmes prescriptions entraîne, par ailleurs, des sanctions pénales.

Force est toutefois de constater qu’en l’espèce et en ce qui concerne la superposition critiquée, les autorités communales ont, comme retenu ci-avant, explicitement précisé dans la partie graphique même du PAG, approuvée en tant que telle par le ministre, qu’il ne s’agit non pas d’une prescription réglementaire aux sens des dispositions légales précitées, mais bien d’une « Information à titre indicatif ». A cet égard, il convient de relever que l’existence - ou la non-existence - d’un biotope est fonction de la nature des choses, mais elle ne dépend 22 pas d’un recensement par l’administration ou d’une mention dans une partie graphique d’un PAG.

S’il existe, au vu des indications de la légende de la partie graphique du PAG, un rapport direct indéniable entre ladite superposition et l’article 17 de la loi du 18 juillet 2018, ayant abrogée la loi du 19 janvier 2004, l’on ne saurait toutefois retenir qu’elle a été décidée en exécution de ladite disposition légale, la superposition en question ne constituant en effet qu’une disposition purement informative sur une situation matérielle, sans pour autant constituer une norme juridique susceptible d’entraîner des servitudes ou autres limitations du droit de propriété, ce qui est encore confirmé l’article 29 de la partie écrite du PAG intitulé « Biotopes protégés, habitats protégés et habitats d’espèces protégées à titre indicatif et non exhaustif9 », figurant sous la section 5, intitulée « Indications sans valeur réglementaire ».

Ainsi, l’indication relative à la présence de biotopes dans le PAG ne peut servir qu’à localiser de manière indicative et a priori non-contraignante, des biotopes et orienter les autorités, et notamment le ministre ayant la protection de l’environnement dans ses attributions, dans le cadre de leurs prises de décisions. La seule indication dans le PAG de l’existence de biotopes sur des parcelles spécifiques ne permet pas au même ministre de refuser de faire droit à une demande spécifique d’un administré concerné au seul motif que le terrain concerné constituerait un biotope tombant sous les dispositions protectrices la loi du 18 juillet 2018, ledit ministre étant en effet tenu à chaque fois d’analyser et de justifier in concreto l’existence d’un site ou de végétation méritant la qualification de biotope et ne saurait se retrancher derrière les seules données factuelles et indicatives figurant au PAG pour qualifier automatiquement un terrain donné de biotope10.

Force est encore de souligner à cet égard que dans les parties graphiques des PAG en général figurent de nombreux renseignements purement indicatifs, tels que les délimitations des parcelles cadastrales, les courbes de niveau ou encore les cours d’eau. Cette manière de procéder ne prête pas à critique à condition que le caractère purement informatif de ses données, lesquelles n’ont dès lors aucune valeur juridique, résulte, comme en l’espèce à suffisance du PAG même.

Dans ce contexte, et concernant plus particulièrement le moyen de la société demanderesse relatif au changement de base légale en cours de procédure, le tribunal relève que cette modification portant, tel que constaté ci-avant, sur des éléments fournies à titre indicatif, c’est à dire dépourvus de valeur réglementaire, n’a de ce fait pas directement affecté les droits des parties par rapport au contenu précis du projet de PAG et n’a pas changé le contenu même du projet de PAG d’une manière telle qu’un membre du public aurait eu un intérêt nouveau ou différent de faire une objection ou qu’un des deux organes étatiques appelés à faire son avis ait pu arriver à un avis différent en rapport avec le point modifié11.

En tout état de cause, il ressort encore de la jurisprudence de la Cour administrative12 que dans le cadre d’un recours dirigé à l’encontre d’un PAG, un moyen critiquant une simple indication n’ayant qu’un caractère indicatif et point réglementaire, tel que c’est le cas des moyens sous analyse, doit être regardé comme étant inopérant.

9 Souligné par le tribunal.

10 Trib. adm., 17 septembre 2019, n° 41567 du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu.

11 Trib. adm., 20 mai 2021, n° 43853 du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.

12 Cour adm., 27 février 2020, n° 43709C du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.

23 Au vu des considérations qui précèdent, l’ensemble des développements de la société demanderesse relative à l’article 17 de la loi du 19 janvier 2004, voire à l’article 17 de la loi du 18 juillet 2018 sont à rejeter pour défaut de pertinence.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent et à défaut de tout autre moyen soulevé en cause, le recours sous analyse est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours en annulation irrecevable, dans la mesure où il vise la délibération du conseil communal de Bertrange du 8 juin 2018 portant mise sur orbite de la procédure de refonte du plan d’aménagement général de la commune de Bertrange ;

pour le surplus, reçoit le recours en annulation en la forme ;

quant au fond, le déclare non justifié, partant le rejette ;

condamne la société demanderesse aux frais et dépens.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique de vacation du 1er septembre 2021 par :

Thessy Kuborn, vice-président, Géraldine Anelli, premier juge, Marc Frantz, juge, en présence du greffier Marc Warken.

s.Marc Warken s.Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 1er septembre 2021 Le greffier du tribunal administratif 24


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 43794
Date de la décision : 01/09/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 21/10/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2021-09-01;43794 ?

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