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18/10/2021 | LUXEMBOURG | N°46491

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 18 octobre 2021, 46491


Tribunal administratif N° 46491 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 septembre 2021 Audience publique du 18 octobre 2021 Requête en institution d’un sursis à exécution introduite par Madame A et Monsieur B, …, par rapport à des décisions de l’administration communale de Walferdange en présence de Monsieur C, …, en matière de permis de construire

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 46491 du rôle et déposée le 22 septembre 2021 au greffe du tribu

nal administratif par la société anonyme KRIEGER ASSOCIATES S.A., inscrite sur la liste V d...

Tribunal administratif N° 46491 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 septembre 2021 Audience publique du 18 octobre 2021 Requête en institution d’un sursis à exécution introduite par Madame A et Monsieur B, …, par rapport à des décisions de l’administration communale de Walferdange en présence de Monsieur C, …, en matière de permis de construire

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 46491 du rôle et déposée le 22 septembre 2021 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme KRIEGER ASSOCIATES S.A., inscrite sur la liste V du Tableau de l’Ordre des Avocats du Barreau de Luxembourg, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Georges KRIEGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de Madame A et de Monsieur B, demeurant à …, tendant à voir « suspendre l’exécution de l’autorisation du bourgmestre de l’administration communale de Walferdange du 26 mars 2021 accordée à Monsieur et Madame C-D, pour la construction d’une maison unifamiliale jumelée sur le terrain inscrit au cadastre de la commune de Walferdange - section … de Helmsange - sous le numéro X (…) » cette autorisation étant encore attaquée au fond par une requête en annulation introduite le 25 juin 2021, portant le numéro 46175 du rôle ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Christine KOVELTER, en remplacement de l’huissier de justice Frank SCHAAL, demeurant à Luxembourg, du 27 septembre 2021, portant signification de ladite requête en sursis à exécution à l’administration communale de Walferdange ainsi qu’à Monsieur C;

Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 29 septembre 2021 par la société à responsabilité limitée Elvinger Dessoy Marx SARL, inscrite au barreau de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-1462 Luxembourg, 31, rue d’Eich, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B251584, représentée aux fins du présent recours par Maître Serge MARX, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Walferdange ;

Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 4 octobre 2021 par Maître Philippe HOFFMANN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur C ;

Vu les articles 11 et 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées ;

Maître Georges KRIEGER, pour les requérants, ainsi que Maître Serge MARX, pour l’administration communale de Walferdange, et Maître Philippe HOFFMANN, pour Monsieur C, entendus en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 6 octobre 2021.

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Le 8 juin 2020, le bourgmestre de la commune de Walferdange, désigné ci-après par « le bourgmestre », délivra à Madame A et Monsieur B, en leur qualité de propriétaires de la parcelle inscrite au cadastre de la commune de Walferdange, section … de Helmsange, sous le numéro Y, désignée ci-après par « la parcelle Y », une autorisation de construire une maison unifamiliale jumelée.

Le 26 mars 2021, le bourgmestre délivra aux propriétaires de la parcelle voisine, inscrite sous le numéro cadastral X, à savoir à Madame D et Monsieur C, une autorisation de construire une maison unifamiliale jumelée, devant s’accoler à la maison à ériger sur la parcelle voisine Y.

Par requête déposée le 25 juin 2021 et inscrite sous le numéro 46175 du rôle, Madame A et Monsieur B ont fait introduire un recours en annulation contre la décision précitée du 26 mars 2021. Par requête séparée déposée postérieurement le 22 septembre 2021, inscrite sous le numéro 46491 du rôle, ils ont demandé à voir prononcer un sursis à exécution de la décision déférée en attendant la solution du recours au fond.

Madame A et Monsieur B exposent que la construction de leur maison unifamiliale jumelée sur leur parcelle X serait presque achevée, tandis que les travaux de construction de la maison unifamiliale jumelée sur la parcelle voisine ne seraient que sur le point de commencer.

Ils font soutenir que l’exécution de l’autorisation de construire délivrée aux propriétaires de la parcelle voisine risquerait de leur causer un préjudice grave et définitif en leur qualité de propriétaire et voisins immédiats de la construction projetée.

Au titre de l’existence d’un risque de préjudice grave et définitif ils exposent que la construction de la maison unifamiliale jumelée sur la parcelle voisine impliquerait des risques de préjudice après son achèvement à savoir :

• Une perte d'ensoleillement dans leur jardin, sur leur terrasse et sur leur balcon ainsi qu’une perte de luminosité dans les pièces situées à l'arrière de leur maison. Ces effets résulteraient du fait que le terrain voisin se situerait au sud de leur maison et l’envergure de ces effets serait fonction de la hauteur du toit et de la profondeur de la future maison, qui seraient plus élevées que la hauteur du toit et la profondeur de leur maison. Ces deux préjudices dépasseraient ce qui serait acceptable dans le cadre d'un développement urbanistique normal.

• Une atteinte à leur sphère privée en raison du fait que l'avant-corps situé à l'arrière de la maison voisine et la toiture terrasse s'avanceraient plus loin vers l'arrière que la façade arrière de leur maison.

• La dévalorisation esthétique de leur maison. Les autres maisons jumelées de la rue et du quartier auraient les mêmes pentes et les mêmes positions du faîte. Par ailleurs, les façades et couvertures des toitures en seraient réalisées dans les mêmes matériaux, d'où un aspect global homogène. Dans le cas des maisons jumelées, que formeront leurmaison et la maison du voisin, il n'y aurait pas les mêmes pentes, ni les mêmes positions du faîte, de sorte qu'elles ne formeraient pas un ensemble harmonieux.

• Un risque d'infiltration d'eau au niveau du joint entre les murs des deux maisons, en raison de la différence des pentes des toitures ainsi que les coûts d'entretien qui y seraient liés.

• Une moins-value en cas de revente de leur maison en raison des problèmes énumérés ci-avant.

Les demandeurs exposent encore que la construction de la maison voisine impliquerait un risque de préjudice imminent lors de la phase de chantier et ce dès le début des travaux.

L’empêchement de ce genre de dommages devrait rentrer par excellence dans la compétence du juge des référés. Il s'agirait en l’occurrence notamment de la menace d'instabilité pour leur maison au moment de l'excavation en vue des fondations sur la limite des parcelles, sur une profondeur d'environ 3 mètres, alors que le dossier d'autorisation ne comporterait ni de calcul statique établissant la stabilité des murs porteurs, ni d'indication du mode de construction, ni d'indication de matériaux à utiliser.

Il en résulterait un risque permanent de dommages dès le début du chantier qui s'aggraveraient pendant la phase de construction et qui seraient irréversibles après la finition de la construction. Ce risque qui résulterait de l'absence de l'indication du mode de construction serait en l’espèce aggravé par les conditions du site, et notamment par le caractère argileux du sol et la nappe phréatique élevée, due à la proximité de Alzette.

Les demandeurs estiment, ensuite, que leur recours au fond présenterait de sérieuses chances de voir annuler l’autorisation de construire querellée alors que les moyens qu’ils invoquent au fond seraient sérieux. Ils se réfèrent à l’égard de la notion du sérieux des moyens à une ordonnance du président du tribunal administratif du 14 juillet 2021, inscrite sous le numéro 46144 du rôle.

Ils exposent que la décision litigieuse du bourgmestre du 26 mars 2021 constituerait, premièrement, une violation du plan d’aménagement général, désigné ci-après par « le PAG », deuxièmement, une violation du règlement particulier relatif au projet de remembrement-

lotissement, qu’ils qualifient de plan d’aménagement particulier, désigné ci-après par « PAP », intitulé : « auf der Thonn », et, troisièmement, une violation du règlement sur les bâtisses, les voies publiques et les sites datant de janvier 2009. Enfin, quatrièmement, les plans comporteraient une série d'incohérences qui aboutiraient à une difficulté d'exécution de l'autorisation de bâtir.

Quant au PAG, ils affirment concrètement qu’en l’espèce l'article 11.1.3.1.1. du PAG qui dispose que : « Le coefficient d'occupation du sol (COS) maximal admis est de 0,3 et le coefficient maximum d'utilisation du sol (CMU) est fixé à 0,6 » serait violé étant donné que les valeurs du COS et du CMU ne seraient pas respectées. Or, l'imperméabilisation des sols augmenterait l'absorption et la réflexion de la chaleur, ce qui impacterait « le micro-climat autour de la maison », provoquerait une diminution de la capacité des sols à retenir 1'eau et pourrait pertuber le bilan hydrologique des sols avoisinants. Ils joignent à leur requête « la réglementation de l'Union européenne concernant la protection des sols », en argumentant qu’une emprise au sol dépassant les prescriptions risquerait de préjudicier la propriété du voisin.Enfin, toujours dans le même contexte de la violation du PAG, ils ajoutent que diverses mesures, tels que la largeur et la longueur du terrain ne seraient pas indiquées sur les plans.

Les demandeurs invoquent ensuite une violation du règlement particulier « Auf der Thonn » et plus particulièrement de son article 4.2, en que les marges de reculement avant, latéral et arrière ne seraient pas respectées. Ainsi, la marge de reculement avant serait en l'espèce de 5.50 mètres ce qui ne serait pas suffisant d'après la réglementation qui prévoirait qu'elle soit au moins de 6 mètres.

En ce qui concerne la marge de reculement latérale, elle devrait être supérieure à 3,50 mètres étant donné que l'ensemble des constructions aurait une profondeur dépassant 13 mètres.

Or, au niveau de la rampe du garage, la marge de reculement par rapport au terrain voisin, qui est constitué par une voie piétons, est de 0 mètres, le mur de la rampe et le toit terrasse étant adossé à la limite de la voie piétons. Au niveau de la maison, le reculement de la maison par rapport au terrain voisin, c'est-à-dire par rapport à la voie piétons, s'élèverait à 3,32 mètres respectivement à 2,83 mètres. Les demandeurs concluent que les reculements latéraux ne seraient donc pas respectés.

Ils soulignent de nouveau que la largeur du terrain ne serait pas indiquée sur les plans.

Finalement, ils affirment que la marge de reculement vers la limite arrière du terrain devrait être de 10 mètres, alors que par rapport à la terrasse elle ne s'élèverait qu'à 8,15 mètres. Dès lors, aucune des valeurs-limites énoncées à l'article 4.2. du règlement particulier « Auf der Thonn » ne serait respectée.

Les demandeurs concluent que le dépassement de la profondeur admissible engendrerait divers préjudices à savoir une perte d'ensoleillement dans leur jardin, sur leur terrasse et sur leur balcon et la perte de luminosité dans les pièces situées à l'arrière de leur maison.

Quant aux violations alléguées du règlement particulier « Auf der Thonn » les demandeurs invoquent en second lieu une violation de son article 4.4. aux termes duquel : « Les maisons jumelées présenteront la même hauteur de corniche, la même hauteur de faîte, les mêmes pentes de toiture et les mêmes types de couvertures et de façades. La première autorisation primera. ». Ils expliquent que leur autorisation de construire daterait du 8 juin 2020, alors que celle des voisins daterait du 26 mars 2021, de sorte que leur autorisation devrait primer. Toutefois, la pente des toits des deux maisons ne serait pas identique et cette différence entraînerait une différence des hauteurs des faîtes. Ils ajoutent que le point de référence ferait défaut sur les plans, de sorte que la hauteur finale de la construction ne serait pas déterminée et que les bénéficiaires de l’autorisation litigieuse seraient libres de positionner la maison d'une hauteur de 11,90 mètres de hauteur à un niveau différent.

Les demandeurs signalent qu’étant donné que leur autorisation de construire primerait en ce qui concerne les critères de « la même hauteur de corniche, la même hauteur de faîte, les mêmes pentes de toiture », elle primerait aussi en ce qui concerne celui de la même profondeur.

Le non-respect de la prescription prévue au point 4.4. du règlement particulier engendrerait pour leur propriété un dommage consistant dans la perte d'ensoleillement à l'arrière de la maison et dans la perte de luminosité dans les pièces situées à l'arrière de la maison. Par ailleurs, le non-respect de la règle du PAP concernant l'égalité des pentes des toits, engendrerait une diminution de la valeur esthétique des maisons, et partant une diminution de la plus-value en cas de revente. Enfin, les demandeurs affirment qu’étant donné que les deux toits ne serejoignent pas, il faudrait prévoir le long de ce joint des mesures pour assurer l'étanchéité ainsi qu'un entretien régulier. Ainsi, le non-respect de la règle urbanistique leur causerait des frais supplémentaires.

Quant aux violations alléguées du règlement particulier « Auf der Thonn » les demandeurs invoquent en troisième lieu une violation de son article 6.1., intitulé, « Toitures », aux termes duquel : « Les toitures auront au moins deux versants. Sans préjudice des dispositions suivant l'article 4.3. alinéa 3, les pentes de toitures doivent se situer entre 30 et 50 degrés. Les toitures plates et les toitures-terrasses ne sont pas admises. ». Or, une partie du toit à l'arrière du bâtiment projeté serait constituée d'une toiture plate. Le fait que la profondeur et la hauteur de la toiture, seraient toutes les deux plus élevées que la toiture de leur maison aggraverait la situation sur leur terrain par rapport à la diminution de l'ensoleillement.

De surplus, une partie de la terrasse se trouverait sur le garage, de sorte que la terrasse formerait le toit du garage et qu’il s’agirait d'une toiture-terrasse. La toiture-terrasse se situerait à 53 cm au-dessus du niveau 00. Toutefois, étant donné que le point de référence ne serait pas indiqué, le voisin pourrait le déterminer lui-même et il serait libre de fixer le niveau 00. En positionnant le niveau 00 à l'altitude 231,10 cm, la toiture terrasse se retrouverait à 231,63 cm, alors que leur terrain naturel et leur jardin ne se situeraient qu’à une hauteur de 230,34 cm. Il s'ensuivrait que la toiture terrasse s'élèverait à une hauteur de 1,30 mètres par rapport à leur terrain, qui, lui, se trouverait au niveau du terrain naturel.

Selon les demandeurs, même en admettant que le point de référence correspondrait à une valeur de 230,89 cm, ce qui serait la valeur apposée manuellement sur le plan par le responsable du service de l'urbanisme lors d'une entrevue à la maison communale, le toit-

terrasse se retrouverait à 231,45 cm, alors que leur terrain naturel et leur jardin se situeraient à 230, 34 cm. Il s'ensuivrait que la toiture terrasse s'élèverait à une hauteur de 1,10 mètres par rapport à leur terrain. De surplus, la toiture terrasse s'avancerait jusqu'à la limite des deux terrains. Il serait important de souligner dans ce contexte que le plan contiendrait à ce sujet une indication fausse. Il ferait état d'un prétendu écart qui existerait entre la toiture terrasse et la limite du terrain. Or, si le garage s'étend jusqu'à la limite du terrain, nécessairement la toiture terrasse le fait aussi, étant donné que la toiture terrasse est le toit du garage. Il serait évident que la situation de cette terrasse qui s'avancerait jusqu'à la limite de leur terrain et qui se situerait à 1,1 mètres au-dessus du niveau de leur jardin engendrerait une atteinte à la sphère privée qui serait considérable.

Les demandeurs concluent encore à une violation du règlement sur les bâtisses, les voies publiques et les sites datant de janvier 2009 et plus particulièrement de ses articles 63.3.1,point 2, 63.3.2., point 2, 63.3.3, 63.3.4, dans la mesure où, premièrement, les plans n’indiqueraient ni les volumes bâtis, ni le CMU, ni le COS, deuxièmement, la description exacte du mode de construction et des matériaux à utiliser ne figurerait pas sur les plans ayant fait l'objet de l'autorisation, troisièmement, les plans n'indiqueraient pas de point de repère, de sorte que tout contrôle des mesures indiquées deviendrait pratiquement impossible, quatrièmement, la construction projetée risquerait de générer des complications au niveau de la stabilité et même après l'achèvement de la construction un problème de sécurité pour les piétons, à savoir un risque de chute, persévérait étant donné que la rampe serait situé à l'endroit le plus profond à un niveau de plus de 2 mètres inférieur à celui du trottoir.

Aux yeux des demandeurs, l'épaisseur des murs de la maison projetée, devrait être d'environ 46 cm comme d'habitude, alors qu’elle ne paraîtrait s'élever qu'à 23,5 cm. Il existerait donc une menace d'instabilité pour leur maison au moment de l'excavation des fondations sur la limite des parcelles.

Les demandeurs signalent encore le caractère argileux du sol et la nappe phréatique élevée, due à la proximité de Alzette. Le sol argileux pourrait absorber de l'eau et ensuite se dessécher, il en résulterait le phénomène du « retrait-gonflement ».

Enfin, et en tout dernier lieu, les demandeurs font état de certaines incohérences dans les plans, ainsi que d’une violation du « principe de minutie » ou du principe de « bonne administration ». Les plans contiendraient un certain nombre d'incohérences, qui inciteraient à s'interroger sur la qualité du travail de l'architecte ainsi que du contrôle effectué par l'administration communale de Walferdange, désignée ci-après par « l’administration communale ». Une présentation incorrecte des faits, des omissions, des inexactitudes et des insuffisances entacheraient le dossier de telle sorte que l'autorité administrative ne pourrait pas prendre sa décision en toute connaissance de cause. Des incohérences pourraient ainsi être constatées au niveau de (i) la largeur et de la profondeur du terrain, (ii) des pentes, (iii) de la profondeur de la maison, (iv) de l’épaisseur de l'avant-corps à l'avant, en ce qui concerne la distance de l'avant-corps à l'avant par rapport au terrain des demandeurs, la distance de l'avant-

corps à l'arrière par rapport à leur terrain, la profondeur des maisons, la distance entre la terrasse et le toit, et, enfin, les reculements latéraux.

En guise de conclusion les demandeurs estiment qu’il ne serait pas équitable de leur faire supporter tous les frais de l’instance et sollicitent une indemnité de procédure de … euros, au motif qu’ils auraient été obligés de mener un procès en justice en raison des fautes commises par l’administration communale lors de l’émission de l’autorisation de construire, malgré leurs interventions auprès de l’administration communale durant la phase d’élaboration de l’autorisation, L’administration communale ainsi que Monsieur C concluent au rejet du recours au motif qu’aucune des conditions légales ne serait remplie en cause, leur litismandataire contestant le sérieux des moyens ainsi que, et surtout, l’existence d’un préjudice grave et définitif. L’administration communale insiste plus particulièrement sur le fait que le préjudice au sens de l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, désignée ci-après par « la loi du 21 juin 1999 », ne pourrait pas consister en une affirmation générale et hypothétique, telles qu’en l’espèce les allégations relatives à la perte d’ensoleillement, à une dévaluation esthétique ou à un microclimat. Le litismandataire du tiers intéressé s’est en substance rallié aux développements du litismandataire de l’administration communale tout en sollicitant l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de … euros à son mandant en expliquant que ce dernier aurait été contraint de se faire défendre en justice.

En vertu de l’article 11 (2) de la loi du 21 juin 1999, un sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au demandeur un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux. Le sursis est rejeté si l’affaire est en état d’être plaidée et décidée à brève échéance.

L’affaire au fond ayant été introduite le 25 juin 2021 et compte tenu des délais légaux d’instruction fixés par la loi du 21 juin 1999, l’affaire ne saurait être considérée comme pouvant être plaidée à brève échéance.

En ce qui concerne plus particulièrement le préjudice grave et définitif tel qu’invoqué, il convient de rappeler qu’un préjudice est grave au sens de l’article 11 de la loi précitée du 21 juin 1999 lorsqu’il dépasse par sa nature ou son importance les gênes et les sacrifices courants qu’impose la vie en société et doit dès lors être considéré comme une violation intolérable de l’égalité des citoyens devant les charges publiques. Il est définitif lorsque le succès de la demande présentée au fond ne permet pas ou ne permet que difficilement un rétablissement de la situation antérieure à la prise de l’acte illégal, la seule réparation par équivalent du dommage qui se manifeste postérieurement à son annulation ou sa réformation ne pouvant être considérée à cet égard comme empêchant la réalisation d’un préjudice définitif.

En l’espèce, l’exécution de la décision litigieuse, avant que le tribunal administratif ne se soit prononcé par rapport au recours au fond, se traduit par la construction d’une maison unifamiliale accolée à la maison des demandeurs et implique le risque pour ces derniers, dans l’hypothèse de la présence de certaines illégalités par rapport à la législation urbanistique, de ne plus pouvoir voir ces illégalités redressées, en raison de la jurisprudence des juridictions judiciaires qui refusent d’ordonner la démolition de constructions érigées sous le couvert d’une autorisation administrative annulée dans la suite. En fonction de l’importance des éventuelles illégalités, le préjudice afférent pourrait donc être qualifié de définitif, sinon, au moins, de difficilement réparable.

Toutefois, en ce qui concerne la question de la gravité du préjudice, il résulte d’une jurisprudence constante que le demandeur doit donner concrètement des indications concernant la nature et l’ampleur du préjudice prévu, qui démontrent le caractère difficilement réparable du préjudice1.

Plus particulièrement, en matière d’autorisation de construire le préjudice grave et définitif est à apprécier par rapport aux travaux envisagés, en ce que ceux-ci sont de nature à nuire au demandeur. Dans ce contexte, il importe de vérifier en quoi la situation de voisin se trouve aggravée par un quelconque élément de l’autorisation de construire critiquée de sorte à l’exposer à un risque de préjudice grave, c’est-à-dire dépassant par sa nature ou son importance les gênes et les sacrifices courants qu’impose la vie en société ni comme une violation intolérable de l’égalité des citoyens devant les charges publiques, et plus particulièrement dans quelle mesure le projet litigieux porterait une atteinte grave, aux conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de la propre propriété du demandeur.

En ce qui concerne la question de la gravité du préjudice, il convient d’ajouter qu’aux termes de la jurisprudence des juges du fond2, l’intérêt à agir s’apprécie non pas de manière abstraite, mais concrètement au regard de la situation de fait invoquée. Ainsi, le juge doit rechercher si la construction est susceptible d’avoir une incidence sur la situation du demandeur compte tenu de la proximité par rapport à son domicile ou des caractéristiques mêmes de la commune. Dès lors, un administré ne peut valablement recourir contre une décision individuelle qu’à condition que celle-ci lui fasse grief, c’est-à-dire qu’elle aggrave effectivement et réellement, à la date de l’introduction du recours, sa situation.

1 Trib. adm. (prés.) 10 juillet 2013, n° 32820, Pas. adm. 2020, V° Procédure contentieuse, n° 626.

2 Voir notamment trib. adm. 19 octobre 2015, n° 34271 du rôle.D’après la jurisprudence récente3, la seule et simple qualité de voisin ne suffit pas à établir l’intérêt pour agir contre un permis de construire ; alors que c’est au regard de l’incidence concrète du projet sur la situation du demandeur que l’intérêt pour agir de ce demandeur devant le juge de l’excès de pouvoir doit être apprécié. En effet, le juge tiendra compte pour apprécier la qualité de voisin d’une construction autorisée par le permis de construire querellé, à la fois, de la distance entre le projet et leurs domiciles respectifs, de la nature et de l’importance du projet, ainsi que de la configuration des lieux.

Ce durcissement de la jurisprudence relative à l’intérêt à agir en matière d’urbanisme a, de manière évidente, une incidence sur l’appréciation du préjudice grave et définitif, la seule situation de voisin, même direct, n’implique dès lors nécessairement pas, ipso facto, automatiquement, l’existence d’un préjudice grave et définitif4.

La reconnaissance d’un risque de préjudice grave nécessite par conséquent la démonstration d’un grief d’une intensité supérieure à celui requis pour justifier d’un intérêt à agir.

Il est certes vrai que l’appréciation du degré de gravité d’un tel préjudice comporte toujours, essentiellement, une large part de subjectivité ; il est encore vrai que faire preuve d’une sévérité excessive dans l’appréciation de cette condition aboutirait in fine à exclure toute possibilité de recourir en la matière de l’urbanisme à une mesure de suspension et de vider la possibilité ouverte par l’article 11 (2) de la loi du 21 juin 1999 de tout sens5. Néanmoins, même si traditionnellement le juge des référés ne procède pas une mise en balance des intérêts, il ne saurait toutefois ignorer que le contentieux administratif de l’urbanisme se traduit également par la recherche d’un équilibre entre le développement de la construction, sur la toile de fond spécifiquement luxembourgeoise d’une pression foncière importante, et le droit au recours.

D’ailleurs, la demande en obtention d’une mesure provisoire a pour objet d’empêcher, temporairement, la survenance d’un préjudice grave et définitif. Les effets de la suspension sont d’interdire à l’auteur de l’acte de poursuivre l’exécution de la décision suspendue. Par ailleurs, comme la procédure en obtention d’une mesure provisoire doit rester une procédure exceptionnelle, puisqu’elle constitue une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère.

Enfin, il convient encore de rappeler que l’appréciation d’un préjudice invoqué ne s’effectue pas théoriquement ou abstraitement, mais toujours in concreto, ce qui se traduit par une appréciation du préjudice au vu non seulement des plans, mais encore de la situation concrète du projet litigieux et de son environnement, ainsi que de la situation concrète du demandeur.

En l’espèce, les demandeurs estiment que l’exécution de la décision déférée leur causerait divers préjudices en leur qualité de voisins directs et accolés à la construction projetée, à savoir une perte d’ensoleillement, une atteinte à leur sphère privée, une dévalorisation esthétique, un risque d’infiltration d’eau, une moins-value en cas de revente de leur immeuble, ainsi qu’une menace d’instabilité pour leur maison.

3 Cour adm. 12 octobre 2017, n° 39490C ainsi que 17 octobre 2017, n° 39527C et 39542C.

4 Voir trib. adm. (prés.), 18 mars 2019, n° 42408.

5 Trib. adm. (prés.), 15 juin 2020, n° 42292.Cette argumentation est toutefois à nuancer.

Il convient à titre liminaire de relever que le principe même de la construction d’une maison accolée à la maison des demandeurs n’est pas contesté en l’espèce.

En ce qui concerne, ensuite, plus particulièrement l’allégation relative à une perte d’ensoleillement, il appert qu’en tout état de cause la vue et l’ensoleillement ne sauraient constituer des droits acquis, sauf à rendre impossible toute évolution du tissu construit, même s’il n’est pas urbain6.

Plus concrètement, et en l’espèce, il ressort, des plans versés en cause et notamment de l’extrait du plan cadastral, que la parcelle des demandeurs et celle de Monsieur C sont situées du côté est de la rue …, qui est, à son tour, située dans un quartier densément urbanisé de la localité de Helmsange. Par ailleurs, les deux parcelles en question qui sont directement adjacentes, sont destinées à la construction de deux maisons jumelées. Il ressort encore des plans versés en cause que la parcelle des demandeurs est située au nord, tandis que celle du tiers intéressé est située au sud. Au vu de cette configuration des lieux, il peut d’ores et déjà être constaté que toute construction érigée sur la parcelle du sud, à savoir celle appartenant au tiers intéressé, générera ipso facto une perte d’ensoleillement pour la parcelle du nord, à savoir celle appartenant aux demandeurs.

Si les demandeurs argumentent que la construction de la maison projetée du tiers intéressé augmenterait la perte d’ensoleillement de sorte à générer un préjudice dépassant le cadre de ce qui doit être accepté normalement en raison du fait que la hauteur du toit de la maison projetée dépasserait celle du toit de leur maison, il parait toutefois à première vue ressortir des plans versés en cause et plus particulièrement du plan 4/4 que les hauteurs au faîte des deux maisons sont parfaitement alignées.

Le litismandataire des demandeurs a encore longuement insisté au cours de l’audience des plaidoiries sur le fait que la perte d’ensoleillement sur la parcelle des demandeurs serait accentuée puisque la profondeur arrière de la maison voisine projetée ne serait pas identique à celle de la maison des demandeurs. S’il n’est pas contesté que la construction projetée du tiers intéressé, est dotée au premier étage d’une extension vers l’arrière, qualifiée de saillie par les parties en cause, il parait toutefois, au vu des plans versés en cause et plus particulièrement du plan 2/4 faisant partie de l’autorisation de bâtir litigieuse, que cette extension, indépendamment de sa qualification, ne dépasse la limite de la façade arrière de la maison projetée que de 49 cm et ce, pour rappel, uniquement au niveau du premier étage de l’immeuble projeté. Au vu de la configuration générale des lieux et du fait que la parcelle des demandeurs est située au nord de sorte que toute construction érigée sur la parcelle adjacente au sud générera inévitablement une perte d’ensoleillement sur leur parcelle, il ne parait donc pas que l’extension projetée d’une profondeur d’à peine un demi mètre au niveau du premier étage de la maison voisine privera les demandeurs outre mesure de l’ensoleillement.

En ce qui concerne l’atteinte à la sphère privée alléguée, résultant de la construction projetée d’une terrasse à l’arrière de la maison voisine, ainsi que l’extension projetée vers l’arrière du premier étage et de la vue ainsi générée sur la parcelle des demandeurs, il convient encore de rappeler la configuration générale des lieux. En effet, tel que constaté ci-avant, les maisons des demandeurs et du tiers intéressé sont situées en milieu fortement urbanisé et, de 6 Cour d’appel de Toulouse, 1ère chambre, 17 septembre 1991, n°2330/89 ; trib. adm. (prés.) 7 décembre 2020, n° 45232.surcroît, forment des maisons jumelées, de sorte qu’une vue directe d’une parcelle sur l’autre est inévitable que ce soit à partir du jardin ou à partir du premier ou deuxième étage. Une telle vue directe fait partie en milieu densément urbanisé des gênes et sacrifices courants qu’impose la vie en société. En l’espèce, cette vue directe ne saurait guère être accentuée par la construction d’une terrasse à la sortie immédiate de la maison en direction de la maison du tiers intéressé, ou encore par une extension d’une profondeur d’à peine un demi mètre vers l’arrière de la maison du tiers intéressé, de sorte qu’aucune atteinte outre mesure à la sphère privée ne saurait être constatée.

Les demandeurs invoquent encore une « dévalorisation esthétique » de leur maison en raison du fait que les deux maisons jumelées ne formeraient pas un ensemble harmonieux. A cet égard, il parait ressortir des plans versés en cause que la maison voisine projetée est dotée tant à l’avant au niveau du rez-de-chaussée, qu’à l’arrière au niveau du premier étage d’une extension, de sorte que son architecture ne correspond pas à l’identique à celle de la maison accolée des demandeurs. Cette considération s’avère toutefois être une appréciation essentiellement esthétique et le seul fait éminemment subjectif, de ne pas partager les choix architecturaux du maître d’ouvrage, respectivement de considérer l’architecture des deux maisons comme n’étant pas harmonieuse, ne saurait être considéré comme préjudice grave dépassant par sa nature ou son importance les gênes et les sacrifices courants qu’impose la vie en société et susceptible de justifier la suspension de l’autorisation de bâtir querellée, étant encore rappelé que les arguments relatifs à une différence de la hauteur des maisons au niveau du faîte, ainsi qu’à une différence au niveau de la pente des toitures ne paraissent, au vu des plans versés en cause, pas être avérés.

En ce qui concerne ensuite l’affirmation des demandeurs selon laquelle les « problèmes » énumérés dans la requête - donc a priori le risque de perte d’ensoleillement, d’atteinte à la sphère privée, de dévalorisation esthétique et d’infiltration d’eau - engendreraient une moins-value en cas de revente, il échet de constater qu’il s’agit d’une allégation purement hypothétique des demandeurs nullement étayée par des éléments concrets. Or, pour constituer un risque de préjudice grave et définitif, le risque de préjudice invoqué par le demandeur ne doit pas être aléatoire, mais réel et se dégager des circonstances concrètes de fait exposées par lui7. La seule allégation d’un préjudice, non autrement précisé et étayé, est donc insuffisante dans la mesure où l’exposé du préjudice grave et définitif ne peut se limiter à un exposé théorique ou encore consister en des considérations générales.

Enfin, quant à l’allégation des demandeurs relative au risque d’infiltration d’eau au niveau des joints entre les murs des deux maisons ainsi qu’au risque de préjudices imminents lors de la phase de chantier et plus particulièrement d’une menace d’instabilité de leur construction, il appert, au terme d’une analyse nécessairement sommaire, que la substance de cet argument réside dans la crainte, par les demandeurs, d’un préjudice apporté à leur propre propriété par la réalisation des travaux d’excavation et des travaux ultérieurs liés à la construction autorisée. Plus particulièrement, les demandeurs ne semblent pas critiquer la légalité même de l’autorisation mais les effets concrets de la réalisation de la construction.

Il convient d’abord de souligner que la loi ne permet pas au président du tribunal administratif ou au magistrat siégeant en son remplacement de prendre des mesures ayant pour objet des droits civils8.

7 trib. adm. (prés.) 18 novembre 2013, n° 33607 du rôle, Pas. adm. 2020, V°Procédure contentieuse, n°620 8 trib. adm. (prés.) 24 septembre 2008, n° 24817.Il convient ensuite de retenir que la requête semble a priori méconnaître la jurisprudence solidement établie9 selon laquelle une autorisation de construire consiste en substance en la constatation officielle par l’autorité compétente - en l’espèce le bourgmestre - de la conformité d’un projet de construction aux dispositions réglementaires (plan d’aménagement et règlement sur les bâtisses) applicables. En effet, d’après la jurisprudence, la finalité première d’une autorisation de construire consiste à certifier qu’un projet est conforme aux règles d’urbanisme applicables et par principe le propriétaire peut faire tout ce qui lui n’est pas formellement interdit par une disposition légale ou réglementaire. Ainsi, la conformité de la demande d’autorisation par rapport aux dispositions légales ou réglementaires existantes entraînerait en principe dans le chef de l’administration l’obligation de délivrer le permis sollicité, sous peine de commettre un abus respectivement un excès de pouvoir10.

Il résulte encore de cette jurisprudence que le bourgmestre, à l’occasion de la délivrance d’une autorisation de construire, ne doit prendre en considération que les prescriptions administratives et qu’il ne lui appartient pas de prendre en compte des considérations d’intérêt privé sans commettre un excès de pouvoir. Le bourgmestre, en délivrant l’autorisation de construire, se prononcerait donc uniquement du point de vue administratif, l’exécution concrète de l’installation, ainsi que les litiges sur le droit de propriété restant l’affaire des bénéficiaires de l’autorisation11.

Cette conclusion se dégagerait encore du fait que le permis de construire est délivré sous réserve des droits des tiers : les droits généralement quelconques des tiers étant réservés, il leur appartient de les faire valoir devant le juge compétent, à savoir les juridictions civiles. Ainsi, le bourgmestre, en délivrant l’autorisation de bâtir, constate dans la forme passive d’une autorisation que la réalisation du projet est permise. Cet acte d’administration ne peut avoir pour l’administration aucune conséquence civile : si le bâtisseur construit sur le bien d’autrui, ou si le bien est grevé de servitudes civiles, la demande est néanmoins accueillie, parce que l’administration ignore le point de droit civil et qu’elle ne prend aucune responsabilité technique12.

L’allégation d’un risque d’endommagement de la propriété des demandeurs causé non pas par l’autorisation déférée, respectivement par son objet, mais par le mode de réalisation matérielle et technique de la construction projetée, ne saurait partant justifier la mesure provisoire sollicitée.

Eu égard aux développements qui précèdent et compte tenu de la configuration des lieux et de la situation géographique des parcelles il n’appert pas que la réalisation du projet litigieux serait effectivement de nature à engendrer dans le chef des demandeurs un préjudice grave, c’est-à-dire dépassant par sa nature ou son importance les gênes et les sacrifices courants qu’impose la vie en société ni comme une violation intolérable de l’égalité des citoyens devant les charges publiques, la réalisation de ce projet pouvant tout au plus être considérée comme engendrant des désagréments, résultant de la construction d’une maison unifamiliale jumelée, donc directement accolée, sur la parcelle voisine et, ce, dans un quartier densément urbanisé.

9 Voir p.ex. trib. adm. 7 février 2017, n° 37219.

10 trib. adm. 21 octobre 2012, n°27540 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Urbanisme n° 663 et les autres références y citées.

11 trib. adm. 8 novembre 2012, n°28985 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Urbanisme, n° 757.

12 Cour adm. 17 décembre 2015, n°36487C du rôle, Pas. adm. 2020, V° Urbanisme, n° 770 et les autres références y citées.Il n’appert dès lors pas que le projet litigieux porte une atteinte grave aux conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de la propriété des demandeurs, dans le sens que la réalisation du projet litigieux voisin n’a pour effet ni de les priver de leur propriété, ni de porter à cette propriété une atteinte d’une gravité telle que le sens et la portée de ce droit s’en trouvent dénaturés, sinon considérablement amoindris.

En d’autres termes, le projet de construction litigieux n’est pas de nature à entraîner une atteinte démesurée, inacceptable, aux conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance des propriétés des demandeurs, n’ayant pas une incidence directe, concrète et significative sur leurs conditions de vie personnelle13.

Il convient par ailleurs de relever qu’une construction, même conforme aux règles d’urbanisme ou à un permis de construire effectivement délivré par l’autorité, est toujours délivrée sous réserve des droits des tiers, et notamment le droit de propriété des voisins, en application de l’article 544 du Code civil. Par ailleurs, la jurisprudence judiciaire admet que le principe des troubles anormaux de voisinage trouve également à s’appliquer au domaine de la construction immobilière, tandis que le juge judiciaire peut en tout état de cause réparer l’indemnisation de deux types de préjudices, à savoir la perte de valeur pour le propriétaire et le trouble de jouissance du bien pour ses occupants14.

Il s’ensuit que les demandeurs sont à débouter de leur demande en institution d’une mesure provisoire sans qu’il y ait lieu d’examiner davantage la question de l’existence éventuelle de moyens sérieux avancés devant les juges du fond, les conditions afférentes devant être cumulativement remplies, de sorte que la défaillance de l’une de ces conditions entraîne à elle seule l’échec de la demande.

Il convient toutefois de souligner que la solution ci-avant retenue, encore qu’à première vue favorable à l’administration communale et au tiers intéressé, est la conséquence du fait que l’une des conditions devant être cumulativement remplies pour prétendre à l’obtention d’une mesure provisoire n’est pas donnée en l’espèce, et ne préjudicie dès lors pas de l’issue future du recours au fond, ni ne signifie, à ce stade, que les moyens des demandeurs ne seraient pas suffisamment sérieux. Le préjudice grave et définitif ainsi que la démonstration de moyens sérieux sont en effet deux conditions distinctes du recours au référé administratif : en d’autres termes, la démonstration d’un moyen sérieux, même de manière manifeste, ne crée pas en tant que telle une situation de risque de préjudice grave et définitif, tandis que l’absence de préjudice grave et définitif, inversement, ne signifie pas l’absence de moyens sérieux.

Les demandes en allocation d’une indemnité de procédure des montants de … euros respectivement de … euros formulées par les demandeurs respectivement le tiers intéressé laissent d’être fondées, les conditions légales afférentes n’étant pas remplies en cause.

Par ces motifs, la soussignée, premier vice-président du tribunal administratif, siégeant en remplacement du président, légitimement empêché, statuant contradictoirement et en audience publique, 13 Voir C.E. belge, 5 novembre 2014, X, n° 229.076 ; C.E. belge, 16 septembre 2014, Leboeuf, n° 228.382.

14 Cass. fr. 19 janvier 2017, req. n°15-28591.rejette la demande en obtention d’un sursis à exécution ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de … euros telle que formulée par les demandeurs ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de … euros telle que formulée par Monsieur C ;

condamne les demandeurs aux frais et dépens.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 18 octobre 2021 par Françoise EBERHARD, premier vice-président du tribunal administratif, en présence du greffier en chef Xavier DREBENSTEDT.

s. Xavier DREBENSTEDT s. Françoise EBERHARD Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 18 octobre 2021 Le greffier du tribunal administratif 13


Synthèse
Numéro d'arrêt : 46491
Date de la décision : 18/10/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2021-10-18;46491 ?

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