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29/09/2023 | LUXEMBOURG | N°45498

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 29 septembre 2023, 45498


Tribunal administratif No 45498 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:45498 4e chambre Inscrit le 11 janvier 2021 Audience publique du 29 septembre 2023 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de la Sécurité intérieure en matière de promotion

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 45498 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 11 janvier 2021 par Maître Pol Urbany, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’

Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à L-…, tendant principale...

Tribunal administratif No 45498 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:45498 4e chambre Inscrit le 11 janvier 2021 Audience publique du 29 septembre 2023 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de la Sécurité intérieure en matière de promotion

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 45498 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 11 janvier 2021 par Maître Pol Urbany, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation, sinon subsidiairement à l’annulation de la décision du ministre de la Sécurité intérieure du 7 octobre 2020 portant rejet de sa demande du 10 juillet 2020 d’accéder au groupe de traitement A2, respectivement B1 au même titre que d’autres fonctionnaires et employés d’Etat et les fonctionnaires communaux ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 8 avril 2021 ;

Vu le mémoire en réplique de Maître Pol Urbany déposé au greffe du tribunal administratif le 10 mai 2021 pour le compte de son mandant ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 1er juin 2021 ;

Vu les pièces versées en cause, et notamment la décision critiquée ;

Le juge rapporteur entendu en son rapport et Maître Guillaume Vaysse, en remplacement de Maître Pol Urbany, ainsi que Madame le délégué du gouvernement Danitza Greffrath en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 14 juin 2022.

Vu l’avis du greffe du tribunal administratif du 19 janvier 2023 informant les parties du prononcé de la rupture du délibéré ;

Le juge rapporteur entendu en son rapport complémentaire et Maître Guillaume Vaysse, en remplacement de Maître Pol Urbany, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Daniel Ruppert en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 16 mai 2023.

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Par un courrier du 16 avril 2019 de son litismandataire, adressé au ministre de la Sécurité intérieure, ci-après dénommé « le ministre », Monsieur …, commissaire à la police grand-ducale, classé dans le groupe de traitement C1, demanda principalement d'être reclassé 1dans le groupe de traitement B1 au même titre que d’autres fonctionnaires de l’Etat détenteurs d’un diplôme luxembourgeois de fin d'études secondaires ou d'un diplôme équivalent, sinon subsidiairement, d’accéder au groupe de traitement B1 après avoir réussi à un examen, au même titre que les policiers de l’Inspection générale de la Police, ci-après désigné par « l’IGP », courrier qui fit l’objet d’un rappel de sa part le 6 août 2019.

En date du 22 août 2019, le ministre y répondit comme suit :

« (…) J'accuse bonne réception de votre demande du 16 avril 2019, introduite par l'intermédiaire de Maître Pol URBANY, par laquelle vous demandez à accéder au groupe de traitement B1 du cadre policier de la Police principalement au moyen d'un reclassement, sinon, subsidiairement, après avoir réussi à l'examen-concours du groupe de traitement B1.

Les fonctionnaires du cadre policier de la Police peuvent accéder au groupe de traitement immédiatement supérieur au leur par le biais de la carrière ouverte (art. 73ss de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale) ou du mécanisme temporaire de changement de groupe de traitement « voie expresse » (art. 94 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale).

Les fonctionnaires du groupe de traitement C1 du cadre policier de la Police qui sont détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires classiques ou générales ou d'un diplôme équivalent et qui ont auparavant suivi avec succès la formation professionnelle de base du groupe de traitement C1 ont par ailleurs la possibilité d'accéder au groupe de traitement B1 en se soumettant à l'examen-concours de ce groupe de traitement (art. 66 de la loi précitée de 2018).

Concernant la demande formulée à titre principal, force est de relever que la loi modifiée du 25 mars 2015 fixant le régime des traitements et les conditions et modalités d'avancement des fonctionnaires de l'Etat a intégré l'ancienne carrière de l'inspecteur dans le groupe de traitement D1. Depuis la loi du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, l'ancienne carrière de l'inspecteur appartient au groupe de traitement C1.

Il n'existe pas de base légale en vertu de laquelle les fonctionnaires du groupe de traitement C1 du cadre policier de la Police, furent-ils détenteurs d'un diplôme de fin d'études ou de fins d'études générales ou d'un diplôme équivalent, pourraient être intégrés automatiquement dans le groupe de traitement B1 du cadre policier de la Police.

Quant à la demande formulée à titre subsidiaire, vous êtes libre de vous présenter au prochain examen-concours organisé dans le groupe de traitement B1 du cadre policier de la Police grand-ducale. Vous pourrez, en cas de réussite et de classement en rang utile, accéder au groupe de traitement B1 selon les conditions fixées par la loi. (…) ».

Par courrier de son litismandataire du 23 janvier 2020, Monsieur … s’adressa au ministre dans les termes suivants :

« (…) Nous nous permettons de revenir vers vous au nom et pour le compte de Monsieur …, fonctionnaire de l'État, né le …, demeurant à L-….

Pour ce mandant, nous avons introduit, en date du 16 avril 2019, une demande d'accès au groupe de traitement B1 aux mêmes titres que d'autres fonctionnaires et employés de l'État (ci-joint).

2 A défaut de décision obtenue de votre part, nous vous avons envoyé un rappel de notre demande en date du 6 août 2019 (ci-joint).

Contrairement à plus d'une centaine d'autres dossiers similaires, vous ne nous avez cependant pas fait parvenir de décision quant à cette demande.

Comme l'absence de décision ministérielle nous parait être un simple oubli de ce dossier à votre ministère, nous vous prierions de bien vouloir nous transmettre, comme dans les autres dossiers, une décision ministérielle contre laquelle notre mandant sera en mesure d'introduire un recours administratif. (…) », courrier par rapport auquel le ministre répondit, par courrier recommandé envoyé le 29 janvier 2020, dans les termes suivants :

« (…) Je reviens vers vous suite à votre courrier du 23 janvier 2020 dans lequel vous sollicitez une décision ministérielle suite à votre demande d'accès au groupe de traitement B1 aux mêmes titres que d'autres fonctionnaires et employés de l'Etat du 6 août 2019.

A cet effet, je tiens à vous informer qu'une décision vous a été adressée en date du 22 août 2019, dont copie ci-jointe.

De plus, suite à l'entrevue avec le comité de l'A.D.E.S.P qui s'est tenue le 22 janvier 2020, des pistes sont actuellement analysées afin de remédier à cette problématique par une voie extrajudiciaire. (…) ».

Par courrier adressé au ministre le 10 juilllet 2020, Monsieur … demanda principalement d'être reclassé dans le groupe de traitement A2, sinon B1 au même titre que d’autres fonctionnaires de l’Etat, employés de l’Etat et fonctionnaires communaux détenteurs d’un diplôme luxembourgeois de fin d'études secondaires ou d'un diplôme équivalent, sinon subsidiairement, d’accéder au groupe de traitement B1 après avoir réussi à un examen, au même titre que les policiers de l’IGP.

Par courrier du 7 octobre 2020, le ministre refusa de faire droit à la demande de Monsieur … dans les termes suivants :

« (…) J'accuse bonne réception de votre demande du 10 juillet 2020, introduite au nom de votre mandant Monsieur …, par laquelle vous demandez à ce que Monsieur … accède au groupe de traitement A2, sinon au groupe de traitement B1 du cadre policier de la Police principalement au moyen d'un reclassement, sinon, subsidiairement, d'accéder au groupe de traitement B1 après avoir réussi à l'examen-concours de ce groupe de traitement.

Concernant votre demande d'un reclassement automatique de Monsieur … au groupe de traitement A2 du cadre policier de la Police grand-ducale, je tiens à vous informer qu'il n'existe pas de base légale en vertu de laquelle les fonctionnaires du groupe de traitement C1 ou B1 du cadre policier de la Police, furent-ils détenteurs d'un diplôme sanctionnant l'accomplissement avec succès d'un bachelor ou de son équivalent, pourraient être intégrés automatiquement dans le groupe de traitement A2 du cadre policier de la Police.

Quant à votre demande d'accès de Monsieur … au groupe de traitement B1, je vous renvoie au courrier du 22 août 2020 dans lequel mon prédécesseur Monsieur le Ministre François Bausch vous a déjà fourni une réponse quant aux mêmes demandes. Etant donné 3que votre demande ne présente pas d'éléments nouveaux quant à ce volet et en me référant à la décision de mon prédécesseur, j'ai le regret de vous informer que celle-ci est maintenue.

(…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 11 janvier 2021, Monsieur … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision précitée du ministre du 7 octobre 2020.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement soulève l’irrecevabilité du recours sous examen en ce qui concerne le reclassement de Monsieur … dans le groupe de traitement B1 au motif que le refus ministériel relatif à la demande afférente ne résulterait pas de la décision du 7 octobre 2020, visée par le recours sous examen, mais de la décision ministérielle du 22 août 2019, à laquelle la décision précitée du 7 octobre 2020 se serait référée.

Dans son mémoire en réplique, Monsieur … conclut au rejet du moyen d’irrecevabilité soulevé par la partie étatique en faisant valoir, d’une part, que la décision du 22 août 2019 ne lui aurait pas été notifiée, et, d’autre part, que sa demande du 10 juillet 2020 différerait de sa demande du 16 avril 2019, alors que sa situation, du fait d’avoir entretemps obtenu un diplôme de bachelor, aurait évoluée, raison pour laquelle Monsieur … aurait sollicité, dans le cadre de sa demande du 10 juillet 2020, principalement un reclassement dans le groupe de traitement A2.

Le délégué du gouvernement, dans son mémoire en duplique, réfute l’argumentation de Monsieur … consistant à soutenir que sa demande du 10 juillet 2020 aurait contenu des éléments nouveaux en ce qui concerne son reclassement au groupe de traitement B1, le seul élément nouveau véhiculé par ladite demande ayant été le reclassement au groupe de traitement A2, de sorte que la décision déférée aurait, à juste titre, renvoyé, en ce qui concerne le reclassement au groupe de traitement B1 à la décision ministérielle du 22 août 2019.

Force est au tribunal de constater que Monsieur …, dans sa demande du 10 juillet 2020, en réitérant sa demande d’accès au groupe de traitement B1, que ce soit par le biais d’un reclassement automatique, sinon par le biais de l’examen-concours, telle que ladite demande avait déjà été antérieurement formulée, dans son courrier du 16 avril 2019, a fait valoir un élément nouveau en comparant la situation des policiers à celle des fonctionnaires communaux, de sorte que contrairement à l’argumentation étatique, la demande de Monsieur … visant son reclassement au groupe de traitement B1 a également dû faire l’objet d’un refus à travers la décision déférée du 7 octobre 2020.

Il y a partant lieu de rejeter le moyen d’irrecevabilité afférent du délégué du gouvernement.

Quant à la question de la nature du recours aux termes duquel le tribunal est saisi en cette matière d’accès au groupe de traitement A2, respectivement B1, telle que soulevée par le délégué du gouvernement, il échet au tribunal de préciser que Monsieur … a conclu, dans le dispositif de sa requête introductive d’instance principalement à la réformation de la décision précitée du 7 octobre 2020 en demandant au tribunal de :

4« (…) pour autant que de besoin, dire que le groupe de traitement A2 et la catégorie de traitement B, dont le groupe de traitement B1, qui ont été créés par la loi du 18 juillet 2018 sur la Police comme nouvelle catégorie et nouveau groupe de traitement au sein de la Police grand-ducale, doivent figurer dans l'article 43 de la loi modifiée du 25 mars 2015, dans la rubrique « Armée, Police et Inspection générale de la Police », dire que l'article 43 de la loi modifiée du 25 mars 2015 doit prévoir, dans la rubrique « Armée, Police et Inspection générale de la Police », l'intégration des policiers détenteurs d'un diplôme de bachelor ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement A2, dire qu'en application de l'article 14 de la loi modifiée du 25 mars 2015, la Police grand-ducale doit pourvoir à des postes du groupe de traitement A2, dire que l'article 43 de la loi modifiée du 25 mars 2015 doit prévoir, dans la rubrique « Armée, Police et Inspection générale de la Police », l'intégration des policiers détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires classiques ou techniques ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement B1, dire que le requérant doit être intégré dans le groupe de traitement A2, sinon dans le groupe de traitement B1 en application de l'article 43 de la loi modifiée du 25 mars 2015, dire qu'en application de l'article 47 de la loi modifiée du 25 mars 2015, le requérant doit être classé dans le groupe de traitement au grade qui correspond à son ancienneté de service acquise depuis sa première nomination, en application des conditions et délais d'avancement fixés à l'article 14 de la loi modifiée du 25 mars 2015, en tenant compte du fait qu'il a déjà réussi à l'examen de promotion de la carrière de l'inspecteur de police, partant, dire que le requérant doit être reclassé dans le groupe de traitement A2 au grade de traitement F12, sinon dans le groupe de traitement B1 au grade de traitement F11, (…) ».

Dans son mémoire en réplique, Monsieur …, fait préciser à cet égard, que sa demande d'accès au groupe de traitement A2, sinon B1 au même titre que d'autres fonctionnaires et employés viserait un reclassement automatique aux prédits groupes de traitement, sinon par la voie expresse, sinon par la réussite à l’examen-concours, ce qui ne serait pas à confondre avec la procédure de changement de groupe de traitement, tel que le soutiendrait à tort le délégué du gouvernement dans son mémoire en réponse, tout en estimant que sa demande aurait clairement trait à la fixation de son traitement, de sorte à tomber dans le champ d'application de l'article 26 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat, dénommée ci-après « le statut général », prévoyant un recours au fond en ce qui concerne les contestations relatives à la fixation des traitement des fonctionnaires.

Le tribunal doit d’emblée relever que Monsieur … fait, à tort, valoir avoir formulé, par le biais de son courrier du 10 juillet 2020, une demande de bénéficier d’un reclassement dans le groupe de traitement A2, sinon B1 par la voie du mécanisme de la voie expresse, tel que prévu par l’article 94 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, ci-après désignée par « la loi du 18 juillet 2018 », une telle demande ne ressortant pas du prédit courrier, de sorte qu’il y a lieu de rejeter l’argumentation afférente pour être étranger à l’objet du litige sous examen.

5 Force est ensuite de relever que c’est à bon droit que la partie gouvernementale a encore fait dupliquer qu’aucune disposition législative n’attribue au tribunal une compétence au fond en matière de reclassement, de sorte que le tribunal doit se déclarer incompétent pour statuer sur le recours principal en réformation dirigé contre la décision déférée et ce, alors même qu’un changement de groupe de traitement engendre a priori des conséquences sur le traitement d’un fonctionnaire, étant relevé qu’il a été jugé qu’un recours au fond n'est pas admissible concernant les décisions qui n'ont qu'un effet indirect sur le traitement.1 Il s’ensuit que le tribunal doit décliner sa compétence en ce qui concerne le recours principal en réformation.

En ce qui concerne ensuite la recevabilité du recours subsidiaire en annulation, le délégué du gouvernement relève, quant à l’intérêt à agir de Monsieur …, que ce dernier ne pourrait raisonnablement soutenir qu'il se serait attendu à être reclassé dans le groupe de traitement A2, sinon dans le groupe de traitement B1 dès l'entrée en vigueur de la loi du 18 juillet 2018, alors que cette loi ne contiendrait aucune disposition prévoyant un reclassement des inspecteurs de police, furent-ils détenteurs d'un diplôme de bachelor, sinon de fin d'études secondaires dans le groupe de traitement A2, voire B1, ce qui serait d’ailleurs également relevé par Monsieur … lui-même, de sorte qu’en l'absence de base légale le ministre ne n’aurait pas pu faire droit à la demande visant à obtenir un reclassement d'office dans le groupe de traitement B1.

Le délégué du gouvernement précise encore que le reclassement automatique, tel que réclamé par Monsieur …, n’aurait d’ailleurs pas figuré parmi les revendications de la représentation du personnel, dans le cadre de l’élaboration du projet de loi ayant abouti à la loi du 18 juillet 2018, reclassement qui ne figurerait pas dans ladite loi, de sorte que le ministre n’aurait pas pu décider autrement que de rejeter la demande de Monsieur ….

Ayant justifié son intérêt à agir, dans sa requête introductive d’instance, par le fait que la décision déférée affecterait directement sa situation personnelle, professionnelle et financière, alors qu’il se serait attendu à être reclassé du groupe de traitement C1 vers le groupe de traitement A2, sinon B1 dès l'entrée en vigueur de la loi du 18 juillet 2018, Monsieur … fait répliquer que les développements du délégué du gouvernement dans ce contexte seraient à considérer comme étant hors sujet, alors que les allégations afférentes ne porteraient non pas sur son intérêt à agir, mais sur le fond de l'affaire.

En tout état de cause, il estime qu’il aurait clairement un intérêt à agir du fait d’être resté bloqué au groupe de traitement C1, en raison de la décision déférée, sans avoir pu accéder, à l’instar d’autres fonctionnaires et employés de l’Etat, au groupe de traitement B1.

Force est d’abord de rappeler que l’intérêt à agir est vérifiée par l’utilité que présente pour le demandeur la solution du litige qu’il demande au juge d’adopter2.

L'intérêt doit être direct et personnel et se mesure à la satisfaction que la prétention est censée procurer à une partie.

1 Cour adm. 6 mars 2014, n° 33591C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Fonction Publique, n° 485 et les autres références y citées.

2 Encyclopédie Dalloz, Contentieux administratif, V° Recours pour excès de pouvoir (Conditions de recevabilité), N°247.

6 L’intérêt à l’annulation d’un acte administratif doit non seulement exister au jour de l’introduction du recours, mais encore subsister jusqu’au prononcé du jugement. En cas de contestation de l’intérêt à agir au jour des plaidoiries et à défaut de justifier le maintien de l’intérêt à agir ayant existé au jour de la requête introductive, le recours doit être déclaré irrecevable3.

Etant donné que Monsieur … a expressément demandé d'être reclassé automatiquement dans le groupe de traitement A2, sinon B1 au même titre que d’autres fonctionnaires et employés de l’Etat et fonctionnaires communaux détenteurs d’un diplôme de bachelor, respectivement d’un diplôme luxembourgeois de fin d'études secondaires classiques, d’un diplôme luxembourgeois de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent, sinon d’y accéder par le biais de sa réussite à un examen et que cette demande lui a été expressément refusée à travers la décision litigieuse, décision qui lui cause grief de ce fait, il dispose d’un intérêt à agir contre ladite décision.

Il suit de ce qui précède que le moyen du délégué du gouvernement tenant à l’absence d’intérêt à agir dans le chef de Monsieur … est à rejeter.

A défaut d’autres moyens d’irrecevabilité, le recours subsidiaire en annulation est à déclarer recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours, la partie demanderesse reprend les rétroactes passés en revue ci-avant, tout en retraçant sa carrière professionnelle notamment au sein de la Police grand-ducale jusqu’à sa dernière nomination en grade de fonction et de traitement, ainsi que son cursus scolaire et les formations professionnelles suivies.

En droit et en guise d’introduction, la partie demanderesse, tout en soulignant avoir été engagée auprès de la police grand-ducale dans la carrière inférieure, en application de la loi modifiée du 31 mai 1999 portant création d'un corps de police grand-ducale et d'une inspection générale de la police, dénommée ci-après la « loi du 31 mai 1999 » et de la loi modifiée du 22 juin 1963 fixant le régime des traitements des fonctionnaires de l'État, dénommée ci-après la « loi du 22 juin 1963 », fait relever que contrairement à ce qui aurait été le cas dans la fonction publique générale, la police grand-ducale n’aurait pas connu de carrière moyenne regroupant les détenteurs de diplômes de fin d'études secondaires classiques ou techniques ou de diplômes équivalents.

La loi modifiée du 25 mars 2015 fixant le régime des traitements et les conditions et modalités d'avancement des fonctionnaires de l'État, dénommée ci-après « la loi du 25 mars 2015 », aurait procédé à une harmonisation de la structuration des carrières dans la fonction publique, en créant des catégories et groupes de traitements, tout en procédant au reclassement d’un certain nombre de carrières, compte tenu de l'évolution des études, d'une part, et de l'évolution des missions et sujétions, d'autre part, dans le but d'instaurer une plus grande égalité de traitement entre les différentes carrières.

Dans ce contexte, et par application des articles 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015, plusieurs carrières de la fonction publique qui, sous l'égide de la loi du 22 juin 1963 auraient 3 Trib. adm. 26 novembre 2009, n° 25191 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 28 et les autres références y citées.

7fait partie de la carrière inférieure de la fonction publique, voire de la carrière moyenne, auraient accédé à la carrière moyenne, respectivement à la carrière supérieure de la fonction publique.

Or, cette accession de la carrière inférieure à la carrière moyenne, respectivement de la carrière moyenne à la carrière supérieure ne se serait pas faite pour les fonctionnaires de l'Etat de la police grand-ducale, alors que l'article 43 de la loi du 25 mars 2015 aurait intégré tous ces policiers de l'ancienne carrière de l'inspecteur de police dans la catégorie de traitement D, dans le groupe de traitement D1, ce qui correspondrait toujours à la carrière inférieure de la fonction publique.

Ce n’aurait été qu’avec la loi du 18 juillet 2018 qu’aurait été créé le groupe de traitement B1 au sein de la police grand-ducale - les travaux parlementaires y relatifs ayant précisé à ce sujet que la structuration des carrières policières serait désormais greffée sur celle de l'administration générale de l'État, définie par la loi du 25 mars 2015, - sans pour autant procéder à l'intégration des anciens inspecteurs de police détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires classiques ou techniques ou d'un diplôme équivalent dans le nouveau groupe de traitement B1, de sorte que ces inspecteurs de police feraient toujours partie de la carrière inférieure de la fonction publique. Par ailleurs, malgré la création du groupe de traitement A2 pour les agents de la police grand-ducale, la partie demanderesse fait valoir qu’il n’aurait pas encore été pourvu à de tels postes, de sorte à bloquer toute accession des policiers détenteurs d’un diplôme de bachelor audit groupe.

La partie demanderesse relève qu’en se basant sur les promesses pourtant claires tant du ministre que de la secrétaire d'Etat à la Sécurité intérieure, elle aurait, à travers son courrier du 10 juillet 2020, demandé au ministre d'être reclassé automatiquement dans le groupe de traitement A2, sinon B1, sinon d’être reclassé dans ce dernier groupe de traitement après avoir réussi un examen, conformément aux articles 55 et 66 de la loi du 18 juillet 2018, possibilité qui aurait également été prévue pour les policiers de l’inspection générale de la police, conformément à l’article 23 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur l’inspection générale de la police, ci-après désignée par « la loi IGP ».

Dans son mémoire en réplique, la partie demanderesse complète encore ses propos introductifs, notamment en ce qui concerne l’élaboration du projet de loi sur la police grand-

ducale, en précisant qu’après le vote de la loi du 25 mars 2015, ayant procédé au reclassement de nombreux fonctionnaires et employés de l'État en fonction de leur niveau d'études, le ministre aurait clairement affirmé, lors d'une interview diffusée en direct à la radio en date du 12 septembre 2015, que : « (…) Mir wellen eng komplett nei Carrière aféieren bei der Police, well mer keng Redaktesch-Carrière an der Police hunn, fir all déi Leit déi z.B. de Redaktesch Examen hunn, also déi eng Première hunn, dass déi och wéi eng Première moar kénne bezuelt ginn. (…) », annonce qui aurait été répétée par la secrétaire d'État à la Sécurité intérieure lors de la traditionnelle fête patronale de la police grand-ducale, la Saint-Michel, en date du 29 septembre 2015 et qui y aurait même rajouté que « (…) l'introduction de nouvelles carrières au sein de la police (…) s'inscrit dans la réforme globale de la réforme de la fonction publique (…) ».

Ainsi, parallèlement à l'entrée en vigueur, en date du 1er octobre 2015, de la loi du 25 mars 2015, une enquête interne, lancée en date du 2 octobre 2015 au sein de la police grand-

ducale, aurait relevé un nombre d’environ 350 policiers de la carrière de l'inspecteur de police 8qui seraient détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent.

La partie demanderesse en conclut que suite à ces annonces gouvernementales et à ce recensement au niveau de la police grand-ducale, tous faits autour de l'entrée en vigueur de la grande réforme de la fonction publique, elle aurait valablement pu s'attendre à être reclassée au même titre que de nombreux autres fonctionnaires de l'État.

La partie demanderesse conteste ensuite l’affirmation du délégué du gouvernement, selon laquelle l'association du personnel représentative qui aurait été étroitement associée à l'élaboration du projet de loi ayant abouti à la loi du 18 juillet 2018, n’aurait pas revendiqué le reclassement des inspecteurs de police détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires dans le groupe de traitement B1, tout en précisant qu’il existerait plusieurs associations du personnel de la carrière à laquelle elle appartiendrait, à savoir notamment le Syndicat National de la Police Grand-Ducale, encore désigné par « le SNPGL », et l'Association du Personnel de la Police Judiciaire, encore désignée par « l’APPJ », lesquels auraient, tous les deux, revendiqué le reclassement des anciens inspecteurs de police dans la carrière moyenne de la fonction publique, la dernière étant encore intervenue à plusieurs reprises à ce sujet tant auprès du gouvernement qu'auprès de la Chambre des députés, et ce, encore après que le projet de loi sur la police grand-ducale y aurait été déposé en date du 31 août 2016, tels que par courriers des 27 novembre 2017 et 2 mai 2018.

Quant à l'obligation pour le ministre d'appliquer la loi en vigueur même en cas de violation du principe d'égalité des citoyens devant la loi, telle que mis en avant par le délégué du gouvernement, la partie demanderesse fait répliquer que le ministre, dans le cadre de l'application de l'article 55 de la loi du 18 juillet 2018, aurait ouvert le premier examen-concours non pas pour vingt postes qui seraient prévues par la loi, mais pour cent cinquante-six postes du groupe de traitement B1, de sorte que, contrairement à ce qui serait allégué dans la présente affaire, le ministre pourrait très bien déroger à ce qui serait prévu par la loi, ce dernier reconnaissant ainsi implicitement, par ce moyen, qu'il existerait une inégalité entre les policiers détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent et d'autres fonctionnaires de l'État et que la loi, que ce soit la loi du 18 juillet 2018 ou la loi du 25 mars 2015, violeraient l’article 10bis de la Constitution.

Quant au recrutement de policiers dans le groupe de traitement A2, la partie demanderesse réfute l’argumentation du délégué de gouvernement selon laquelle la politique de recrutement serait un choix politique appartenant à l’autorité administrative, de sorte à ne pas créer d’obligation dans son chef de procéder à un tel recrutement, alors qu’une telle approche méconnaîtrait les différentes catégories de traitement, et plus particulièrement le groupe de traitement A2, instaurées auprès de la police grand-ducale, de sorte à être contraire à l’un des objectifs de la réforme de celle-ci. La partie demanderesse relève encore, dans ce contexte, avoir postulé pour un poste du groupe de traitement A2 du cadre civil de la police grand-ducale, en l’occurrence un poste de coordinateur administratif des missions internationales, poste qu’il n’aurait cependant pas obtenu.

En ce qui concerne l’argumentation du délégué du gouvernement selon laquelle le choix du législateur de ne pas procéder à un reclassement automatique, mais d'instaurer divers mécanismes permettant à des policiers du groupe de traitement C1 d'accéder au nouveau groupe de traitement B1 serait un choix politique qui échapperait au contrôle du juge 9administratif, la partie demanderesse fait répliquer que la partie gouvernementale méconnaîtrait, ainsi, l'existence du contrôle, par voie d'exception, de la constitutionnalité des lois, découlant de l'article 95ter de la Constitution, la partie demanderesse rappelant, dans ce contexte, que, selon la doctrine, la définition du champ d'application des différents régimes légaux ne pourrait pas être arbitraire dans un Etat de droit, ce qui serait l'idée directrice même du principe d'égalité.

Au fond et quant au refus du ministre de procéder à son reclassement d’office dans le groupe de traitement A2, sinon B1, instauré par la loi du 18 juillet 2018, sur base du constat qu’il n’existerait pas de base légale en vertu de laquelle les fonctionnaires du groupe de traitement C1 du cadre policier, furent-ils détenteurs d'un diplôme de bachelor, sinon d’un diplôme de fin d'études ou de fins d'études générales ou d'un diplôme équivalent, pourraient être intégrés automatiquement dans le groupe de traitement A2, sinon B1 du cadre policier, la partie demanderesse conclut, en premier lieu, à une violation de l’article 10bis de la Constitution par les articles 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015, ayant intégré certains groupes de fonctionnaires dans le groupe de traitement A2, sinon B1 mais non pas l'ancienne carrière de l'inspecteur qui n’aurait été reclassée que dans le groupe de traitement D1, respectivement, dans une deuxième étape, depuis la loi du 18 juillet 2018, dans le groupe de traitement C1.

En effet, il n’aurait été tenu compte ni de l'évolution des études scolaires et postscolaires accomplies par ces policiers ni de l'évolution des missions et sujétions de ces derniers, tel que cela aurait été le cas pour les autres fonctionnaires.

La différenciation ainsi opérée par les articles 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015 ne serait dès lors aucunement justifiée et la violation de l'article 10bis de la Constitution serait à ce point manifeste, qu’il ne serait, au vœu de l'article 6 de la loi modifiée du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour constitutionnelle, dénommée ci-après « la loi du 27 juillet 1997 », pas nécessaire pour le tribunal de saisir la Cour constitutionnelle.

La partie demanderesse admet encore, dans ce contexte, l’absence de base légale permettant son reclassement automatique dans la carrière B1, en relevant que l’article 43 de la loi du 25 mars 2015, intégrant les carrières prévues dans la loi du 22 juin 1963 dans les nouvelles catégories et groupes de traitement, ne prévoirait même pas de carrière moyenne pour la rubrique « Armée, Police et Inspection générale de la Police », absence à laquelle la loi du 18 juillet 2018 aurait dû remédier par une modification dudit article 43. Cette seule absence, dans l’article 43 de la loi du 25 mars 2015, du groupe de traitement A2, respectivement B1, pour la police grand-ducale, comparée à la situation de tous les autres fonctionnaires d’Etat, serait déjà constitutive d’une violation du principe d’égalité devant la loi de l’article 10bis de la Constitution.

Elle précise encore, dans ce contexte que cette violation de la loi serait d'autant plus grave, d’une part, par rapport aux archivistes, assistants techniques viticoles, bibliothécaires, bibliothécaires-documentalistes, chimistes, cytotechniciens du laboratoire national de santé, ingénieurs techniciens, laborantins, agents de probation, d'assistant d'hygiène sociale, assistants scientifiques, assistants sociaux, diététiciens, éducateurs gradués, ergothérapeutes, infirmiers gradués, masseurs-kinésithérapeutes, orthophonistes, orthoptistes, pédagogues curatifs et psychorééducateurs et, d’autre part, par rapport aux expéditionnaires techniques détenteurs d'un diplôme luxembourgeois de technicien ou d'un diplôme équivalent, aux informaticiens diplômés, aux préposés de la nature et des forêts, aux techniciens diplômés, aux agents sanitaires, aux assistants techniques médicaux, aux éducateurs, aux infirmiers et 10aux infirmiers spécialisés, tous ces fonctionnaires ayant antérieurement fait partie de la carrière moyenne, respectivement inférieure de la fonction publique, qui auraient, contrairement aux agents de la police grand-ducale, en application de l'article 43 de la loi du 25 mars 2015, été intégrés dans la catégorie de traitement A2, voire B1, en se voyant reconnaître leurs diplômes bachelor, respectivement leurs diplômes de fins d’étude classiques ou techniques ou leurs diplômes équivalents, la situation de ces fonctionnaires d’Etat étant comparable à celle des policiers.

La comparaison la plus flagrante devrait, en l’occurrence, être faite par rapport aux expéditionnaires techniques pour lesquels l'article 43 de la loi du 25 mars 2015 aurait, en effet, distingué entre l'intégration des expéditionnaires techniques détenteurs d'un diplôme luxembourgeois de technicien ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement B1, et donc leur accession à la carrière moyenne, et l'intégration des expéditionnaires techniques non-détenteurs d'un diplôme luxembourgeois de technicien ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement C1, partant leur maintien dans la carrière inférieure, mécanisme qui aurait également dû être appliqué aux inspecteurs de police, lesquels auraient cependant été maintenus dans le groupe de traitement D1, puis C1, en violation de l’article 10bis de la Constitution. Au regard du caractère manifeste de cette violation constitutionnelle par l’article 43 de la loi du 25 mars 2015, la partie demanderesse estime que le tribunal pourrait directement prononcer l’annulation de la décision déférée.

Il insiste encore sur la circonstance que depuis la création du groupe de traitement A2, à travers la loi du 18 juillet 2018, au sein de la police grand-ducale, aucun policier ne ferait, jusqu’à l’heure actuelle, partie dudit groupe et aucune des voies d’accès audit groupe, en l’occurrence les mécanismes de la carrière ouverte, de l’examen-concours et de la voie expresse n’aurait encore été ouverte pour permettre aux agents concernés d’accéder audit groupe, contrairement à ce qui aurait été le cas dans l’administration générale de la fonction publique, situation qui constituerait une violation de l’article 10bis de la Constitution devant conduire à l’annulation de la décision déférée.

La partie demanderesse fait encore répliquer à ce sujet qu’elle ne contesterait pas l’absence de base légale permettant son reclassement automatique dans la carrière A2, respectivement B1, mais que ce serait justement cette absence qui créerait les différences de traitement dénoncées dans le présent recours par rapport aux situations prévues par les articles 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015, 18 et 19 de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l'État, dénommée ci-après « la loi du 25 mars 2015 (employés) », et 40 et 44 du règlement grand-ducal modifié du 28 juillet 2017 sur les fonctionnaires communaux, ci-après dénommé « le règlement grand-ducal du 28 juillet 2017 ».

La partie demanderesse insiste encore sur la circonstance que l’objectif de la réforme de la police grand-ducale, à travers la loi du 18 juillet 2018, aurait été d’harmoniser la structuration des carrières policières avec celle de l’administration générale de l’Etat, de sorte que, dans la mesure où les groupes de traitement A2 et B1 auraient été créés au niveau de la police grand-ducale, afin de tenir compte de l’évolution des diplômes et des sujétions, la partie demanderesse considère, au regard de ses diplômes, d’être en droit de demander son reclassement.

Par rapport à l’allégation du délégué du gouvernement selon laquelle les catégories de traitement A2 et B1 n'auraient pas encore existé pour les policiers, au moment du vote de la 11loi du 25 mars 2015, de sorte qu’il aurait été impossible de procéder au reclassement de tous ou partie des inspecteurs de police dans un groupe de traitement inexistant, la partie demanderesse riposte que la catégorie de traitement C et le groupe de traitement C1 de la police grand-ducale, dans lequel les inspecteurs de police seraient actuellement intégrés en application de la loi du 18 juillet 2018, n'auraient pas non plus existés au 1er octobre 2015, alors que la loi du 25 mars 2015 les aurait initialement classés dans la catégorie de traitement D, et plus particulièrement dans le groupe de traitement D1, de sorte qu’il serait totalement indifférent de relever qu’une certaine catégorie de traitement respectivement un certain groupe de traitement n’aurait pas existé au moment de l'entrée en vigueur de la loi du 25 mars 2015 laquelle aurait d’ailleurs déjà été modifiée à maintes reprises.

Dans ce contexte, la partie demanderesse cite, à titre d’exemple, la loi du 9 mai 2018 portant notamment modification de la loi modifiée du 25 mars 2015 qui aurait permis aux expéditionnaires informaticiens détenteurs d'un diplôme de technicien ou d'un diplôme équivalent de bénéficier du mécanisme de la voie expresse, modification justifiée selon les travaux parlementaires, par le constat que « (le) reclassement en 2015 a été opéré au profit des expéditionnaires techniques ayant pu se prévaloir de ce même diplôme et qui ont bénéficié d'un reclassement au groupe de traitement B1. La revalorisation en question se limitait (cependant) à la seule carrière de l'expéditionnaire technique. ». Il en résulterait que le législateur aurait donc bien réagi à une différence de traitement à l'égard des expéditionnaires informaticiens après l'entrée en vigueur de la loi du 25 mars 2015, ce qu’il n’aurait cependant pas fait pour les inspecteurs de police.

Ainsi, comme la loi du 18 juillet 2018 aurait intégré les policiers du groupe de traitement D1 dans le groupe de traitement C1, elle aurait également pu intégrer les policiers du groupe de traitement C1 par ailleurs détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent, dans le groupe de traitement B1.

Il s'y ajouterait que les modalités d'intégration des fonctionnaires de l'État reclassés dans les nouvelles catégories et les nouveaux groupes de traitement auraient encore été adaptées par une loi du 25 juillet 2018 portant reclassement de certaines carrières de fonctionnaires et employés de l'État, alors que, selon les documents parlementaires y relatifs, « le reclassement résultant des réformes dans la Fonction publique a été beaucoup moins favorable que celui dont ont bénéficié les instituteurs lors de la réforme de l'Enseignement fondamental en 2009 », ce qui démontrerait, encore une fois, qu'il serait en réalité indifférent que la loi du 25 mars 2015 ait déjà prévu le groupe de traitement B1 au niveau de la police grand-ducale, alors qu’une modification de l’article 43 de la loi du 25 mars 2015, un nouvel article de la loi du 25 mars 2015 ou une nouvelle loi auraient pu et dû prévoir cette intégration dans les groupes de traitement A2 et B1.

Finalement, la partie demanderesse fait relever que le délégué du gouvernement reconnaîtrait d'ailleurs lui-même, dans son mémoire en réponse, que l'inégalité de traitement à l'égard des policiers diplômés aurait pu être résolue par une disposition transitoire dans la loi du 18 juillet 2018, tout en précisant qu'une telle mesure n'aurait certainement pas manqué de créer le mécontentement des autres membres du groupe de traitement C1 ne détenant pas d'un tel diplôme, mais disposant d'une expérience professionnelle beaucoup plus grande. Or, ce faisant, le délégué du gouvernement aurait implicitement souligné toute la problématique de la présente affaire, à savoir que, tandis que la réforme de la fonction publique aurait conduit à un système des traitements et avancements fondé sur le niveau d'études, les 12compétences et les responsabilités des fonctionnaires de l'État, pour la police grand-ducale un système des traitements et avancements fondé sur l'ancienneté des fonctionnaires de l'État aurait été introduit, alors même que la loi du 25 mars 2015 s’appliquerait déjà à celle-ci.

Par rapport à la comparabilité de la situation des inspecteurs de police à celle des autres fonctionnaires de l’Etat, la partie demanderesse réfute encore l’argument du délégué du gouvernement selon lequel l'accès à la formation policière ne serait pas nécessairement et obligatoirement subordonné à la détention d'un diplôme de fin d'études secondaires, contrairement aux autres carrières reclassées en raison, d'une part, de l'évolution des critères d'études et, d'autre part, de l'évolution des missions et sujétions de ces carrières par opposition à celle du cadre policier. En effet, cette affirmation serait contredite par le commentaire des articles relatif à la nouvelle classification des carrières en quatre catégorie (A, B, C et D), où il aurait été expliqué que la nouvelle grille des rémunérations serait réagencée sur base de l'appréciation des deux critères de l'évolution des études et de l'évolution des missions et sujétions inhérentes aux fonctions, le rapport de la Commission sur les traitements, établi avant la réforme de la fonction publique, ayant relevé, au sujet de la carrière de l’inspecteur de police qu’au cours des vingt dernières années i) les missions de la carrière auraient connu une évolution importante, ii) le volume du travail aurait connu une évolution importante en raison de l'augmentation des missions de protection et iii) dans la majorité des cas, une évolution importante aurait eu lieu en ce qui concerne non seulement la qualité du travail, mais également les compétences requises. La partie demanderesse en conclut que la carrière de l'inspecteur de police aurait évolué de la même manière, voire de manière plus importante que les carrières des autres fonctionnaires de l'État ayant connu un reclassement automatique.

Dans ce contexte, la partie demanderesse estime encore que les tâches exécutées par les agents de la police grand-ducale seraient devenues plus complexes et les responsabilités des policiers plus importantes, ce qui serait encore confirmé par le ministre lui-même dans le plan de recrutement présenté en juin 2019, dans lequel il aurait reconnu, en ce qui concerne les groupes de traitement B1 et C1, que les missions de la police deviendraient de plus en plus complexes, les textes de loi de plus en plus difficiles, les exigences du public de plus en plus élevées et les règles procédurales de plus en plus importantes, aussi bien pour les missions de la police judiciaire que pour les tâches administratives.

Même si les inspecteurs de police n'auraient, certes, pas eu besoin de disposer nécessairement et obligatoirement d'un diplôme de fin d'études secondaires pour accéder à leur carrière, le recrutement de policiers diplômés aurait cependant permis à la police grand-

ducale, au cours des dernières années, de faire face à la complexité grandissante de ses missions et sujétions.

En ce qui concerne la justification de la différenciation entre les situations, la partie demanderesse fait encore répliquer que l’explication du délégué du gouvernement selon laquelle il serait constant que l'intention du législateur aurait été d’introduire les groupes de traitement A2 et B1 au sein de la police et non de remplacer le groupe C1 par le groupe B1, respectivement A2 ne fournirait pas d'indication sur le but légitime qui serait à l'origine de la différenciation opérée entre les policiers diplômés et les autres fonctionnaires de l'État, pour lesquels le reclassement prévu par les articles 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015, serait justifié afin de tenir compte de l'évolution des études, d'une part, et de l'évolution des missions et sujétions, d'autre part. En effet, l’absence de reclassement des policiers ne serait 13due qu’à une favorisation de l’ancienneté des policiers au détriment d’une reconnaissance de leurs études, comme ce serait le cas des autres fonctionnaires d’Etat.

Or, l'objectif de la loi du 18 juillet 2018 aurait été celui de greffer la structuration des carrières policières sur celle de l'administration générale de l'État afin de mettre fin à la « discordance des carrières policières de l'administration générale ».

Ainsi, la disparité créée en ce qui concerne l'accès des policiers diplômés au groupe de traitement A2, voire B1 ne serait pas rationnellement justifiée, ni adéquat, ni proportionné à l'objectif pourtant affiché par la loi du 18 juillet 2018, l’absence de base légale pour le reclassement sollicité violant ainsi l'article 10bis de la Constitution, violation devant directement conduire le tribunal à prononcer l’annulation de la décision déférée, sinon à soumettre, avant tout progrès en cause, les questions préjudicielles suivantes à la Cour constitutionnelle :

« 1) Les articles 43 et 47 de la loi modifiée du 25 mars 2015, en ce qu'ils ne prévoit pas de reclassement des policiers détenteurs d'un diplôme de bachelor ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement A2, sont-ils conformes à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où ils instituent une différence de traitement par rapport aux archivistes, assistants techniques viticoles, bibliothécaires, bibliothécaires-

documentalistes, chimistes, cytotechniciens du laboratoire national de santé, ingénieurs techniciens, laborantins, agents de probation, d'assistant d'hygiène sociale, assistants scientifiques, assistants sociaux, diététiciens, éducateurs gradués, ergothérapeutes, infirmiers gradués, masseurs-kinésithérapeutes, orthophonistes, orthoptistes, pédagogues curatifs et psychorééducateurs qui ont été reclassés au groupe de traitement A2 en application de ces mêmes articles ? 2) Les articles 43 et 47 de la loi modifiée du 25 mars 2015, en ce qu'ils ne prévoient pas de reclassement des policiers détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement B1, sont-ils conformes à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où ils instituent une différence de traitement par rapport aux expéditionnaires techniques détenteurs d'un diplôme de technicien, aux préposés de la nature et des forêts, aux agents sanitaires, aux assistants techniques médicaux, aux éducateurs, aux infirmiers, aux infirmiers anesthésistes, aux infirmiers chargés des services d'ergothérapie ou d'éducation physique, aux infirmiers psychiatriques ou aux puériculteurs qui ont été reclassés au groupe de traitement B1 en application de ces mêmes articles ? 3) Les articles 43 et 47 de la loi modifiée du 25 mars 2015, en ce qu'ils n'ont pas prévu le reclassement des policiers de la carrière de l'inspecteur de police ou du groupe de traitement C1, détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent, dans le groupe de traitement B1, sont-ils conformes à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où ils instituent une différence de traitement par rapport aux fonctionnaires de l'État de la carrière moyenne ou du groupe de traitement B1, détenteurs d'un diplôme de bachelor, qui ont été reclassés au groupe de traitement A2 en application de ces mêmes articles ? 4) La loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'elle n'a pas prévu le reclassement des policiers détenteurs d'un diplôme de bachelor ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement A2, est-elle conforme à l'article 10bis, paragraphe 141er de la Constitution, dans la mesure où elle institue une différence de traitement par rapport aux archivistes, assistants techniques viticoles, bibliothécaires, bibliothécaires-

documentalistes, chimistes, cytotechniciens du laboratoire national de santé, ingénieurs techniciens, laborantins, agents de probation, d'assistant d'hygiène sociale, assistants scientifiques, assistants sociaux, diététiciens, éducateurs gradués, ergothérapeutes, infirmiers gradués, masseurs-kinésithérapeutes, orthophonistes, orthoptistes, pédagogues curatifs et psychorééducateurs, qui ont été reclassés au groupe de traitement A2 en application des articles 43 et 47 de la loi modifiée du 25 mars 2015 ? 5) La loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'elle n'a pas prévu le reclassement des policiers détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement B1, est-elle conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où elle institue une différence de traitement par rapport aux expéditionnaires techniques détenteurs d'un diplôme de technicien, aux préposés de la nature et des forêts, aux agents sanitaires, aux assistants techniques médicaux, aux éducateurs, aux infirmiers, aux infirmiers anesthésistes, aux infirmiers chargés des services d'ergothérapie ou d'éducation physique, aux infirmiers psychiatriques ou aux puériculteurs qui ont été reclassés au groupe de traitement B1 en application des articles 43 et 47 de la loi modifiée du 25 mars 2015 ? 6) La loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'elle n'a pas prévu le reclassement des policiers de la carrière de l'inspecteur de police ou du groupe de traitement C1, détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent, dans le groupe de traitement B1, est-elle conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où elle institue une différence de traitement par rapport aux fonctionnaires de l'État de la carrière moyenne ou du groupe de traitement B1, détenteurs d'un diplôme de bachelor, qui ont été reclassés au groupe de traitement A2 en application des articles 43 et 47 de la loi modifiée du 25 mars 2015 ? ».

Le tribunal doit, à ce stade, relever que, dans un souci de logique juridique, il n’est pas obligé de suivre l’ordre de présentation des moyens d’une partie, mais peut lui-même le fixer, de sorte qu’il y a lieu de reprendre, après avoir exposé l’argumentation de la partie demanderesse consistant à faire état d’une violation du principe d’égalité dans le chef des agents de la police grand-ducale par rapport à d’autres fonctionnaires d’Etat, tout d’abord, l’argumentation de la partie demanderesse consistant à comparer la situation desdits agents encore à celle des employés de l’Etat, respectivement à celle des fonctionnaires communaux, avant d’aborder l’argumentation de la partie demanderesse relative aux différentes voies d’accès, pour les agents de la police grand-ducale, au groupe de traitement B1, présentation de moyens que la partie demanderesse a d’ailleurs également suivie dans son mémoire en réplique.

La partie demanderesse procède encore à une comparaison de sa situation par rapport au reclassement des employés de l'Etat, question sur laquelle le ministre n’aurait pas pris position, de sorte que le défaut de motivation y relative, en violation de l'article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l'État et des communes, dénommé ci-après « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », devrait conduire à l’annulation de la décision déférée de ce premier chef.

15Elle relève ensuite que dans le cadre de la réforme de la fonction publique, la loi du 25 mars 2015 (employés), aurait été votée parallèlement à la loi du 25 mars 2015, en prévoyant également un classement en catégories d'indemnité A, B, C et D.

À l'instar des articles 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015, les articles 18 et 19 de la loi du 25 mars 2015 (employés) prévoiraient un classement des employés de l'Etat en fonction de leurs conditions de diplôme et d'emploi, de sorte que depuis le 1er octobre 2015, date d'entrée en vigueur de la loi du 25 mars 2015 (employés), de nombreux employés de l'Etat auraient, sur base de ces nouvelles dispositions légales, été reclassés dans les nouvelles catégories et les nouveaux groupes d'indemnité en tenant compte de leur niveau d'études et de leur niveau de poste qu'ils auraient occupés, contrairement à ce qui aurait été le cas des agents de police qui se trouveraient cependant dans une situation comparable en raison de la détention d’un diplôme de bachelor, respectivement d'un diplôme de fin d'études secondaires classiques, secondaires techniques ou d'un diplôme équivalent et l’occupation d’un poste avec des responsabilités du groupe de traitement A2, respectivement B1, de sorte à constituer une violation de l’article 10bis de la Constitution, devant directement conduire à l’annulation, par le tribunal, de la décision litigieuse.

Dans son mémoire en réplique, la partie demanderesse fait préciser que si les fonctionnaires de l’Etat, d’un côté, et les employés de l’Etat, de l’autre côté, seraient certes soumis à des régimes statutaires différents, le législateur appliquerait néanmoins les mêmes règles en ce qui concerne leur reclassement, de sorte que contrairement à ce qui serait allégué par le délégué du gouvernement, les employés de l’Etat se trouveraient dans une situation parfaitement comparable à la sienne.

Le défaut de base légale d'un reclassement et d'une intégration des policiers détenteurs d'un diplôme de bachelor, respectivement d’un diplôme de fin d'études secondaires ou de diplômes reconnus équivalents au groupe de traitement A2, respectivement B1 violerait donc l'article 10bis de la Constitution, ce qui devrait conduire à l’annulation de la décision déférée, sinon à la soumission des questions préjudicielles suivantes à la Cour constitutionnelle :

« 7) Les articles 43 et 47 de la loi modifiée du 25 mars 2015, en ce qu'ils ne prévoient pas de reclassement des policiers détenteurs d'un diplôme de bachelor ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement A2, sont-ils conformes à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où ils instituent une différence de traitement par rapport aux employés de l'État qui ont été reclassés au groupe d'indemnité A2 en application des articles 18, 19 et 44 de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de 1 'État ? 8) Les articles 43 et 47 de la loi modifiée du 25 mars 2015, en ce qu'ils ne prévoient pas de reclassement des policiers détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement B1, sont-ils conformes à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où ils instituent une différence de traitement par rapport aux employés de l'État qui ont été reclassés au groupe d'indemnité B1 en application des articles 18, 19 et 45 de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l'État ? 9) La loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'elle n'a pas prévu le reclassement des policiers détenteurs d'un diplôme de bachelor ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement A2, est-elle conforme à l'article 10bis, paragraphe 161er de la Constitution, dans la mesure où elle institue une différence de traitement par rapport aux employés de l'État qui ont été reclassés au groupe d'indemnité A2 en application des articles 18, 19 et 44 de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l'État ? 10) La loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'elle n'a pas prévu le reclassement des policiers détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement B1, est-elle conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où elle institue une différence de traitement par rapport aux employés de l'État qui ont été reclassés au groupe d'indemnité B1 en application des articles 18, 19 et 45 de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l'État ? ».

La partie demanderesse se compare ensuite aux fonctionnaires communaux en précisant que leur reclassement serait prévu par les articles 40 et 44 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017, lesquels auraient repris la teneur des articles 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015.

Contrairement aux policiers, les fonctionnaires communaux se seraient ainsi vus reconnaître leurs diplômes de bachelor, respectivement de fin d'études secondaires, secondaires techniques ou équivalents ainsi que les missions et sujétions pesant sur eux dans le cadre de leur travail, alors qu’ils se trouveraient dans une situation tout à fait comparable à celle des policiers, détenteurs de tels diplômes effectuant un travail avec des responsabilités du groupe de traitement A2, respectivement B1.

A nouveau les articles 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015 et l'application qui en serait faite violeraient le principe d'égalité des citoyens devant la loi, prévu par l'article 10bis de la Constitution, violation devant conduire à l’annulation de la décision déférée.

Dans son mémoire en réplique, la partie demanderesse fait relever que la Cour constitutionnelle aurait déjà reconnu, dans son arrêt du 12 décembre 2014, inscrit sous le numéro 00116 du registre, que les fonctionnaires de l'État et les fonctionnaires communaux seraient comparables en leur qualité d'agent de droit public et au regard de leur situation statutaire, ce qui serait également le cas en l’espèce, étant donné que la procédure de reclassement des fonctionnaires communaux aurait été greffée sur celle prévue pour les fonctionnaires de l'État.

Or, la disparité ainsi créée en ce qui concerne l'accès des policiers diplômés au groupe de traitement B1, respectivement A2 ne serait pas rationnellement justifiée, ni adéquate ni proportionnée à l'objectif affirmé par la loi du 18 juillet 2018, de sorte qu’il y aurait lieu d’annuler directement la décision déférée, sinon de soumettre, avant tout progrès en cause, les questions préjudicielles suivantes à la Cour constitutionnelle :

« 11) Les articles 43 et 47 de la loi modifiée du 25 mars 2015, en ce qu'ils ne prévoient pas de reclassement des policiers détenteurs d'un diplôme de bachelor ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement A2, sont-ils conformes à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où ils instituent une différence de traitement par rapport aux bibliothécaires, chimistes, ingénieurs technicien et de laborantin, assistants d'hygiène sociale, assistants sociaux, diététiciens, éducateurs gradués, ergothérapeutes, infirmiers gradués, masseur-kinésithérapeutes, orthophonistes, orthoptistes, 17pédagogues curatifs, psychorééducateurs ou aux officiers commandant adjoints des sapeurs-

pompiers professionnels, qui ont été reclassés au groupe de traitement A2 en application des articles 40 et 44 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017 sur les fonctionnaires communaux ? 12) Les articles 43 et 47 de la loi modifiée du 25 mars 2015, en ce qu'ils ne prévoient pas de reclassement des policiers détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement B1, sont-ils conformes à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où ils instituent une différence de traitement par rapport aux expéditionnaires techniques détenteurs d'un diplôme de technicien, aux préposés de la nature et des forêts, aux agents sanitaires, aux assistants techniques médicaux, aux éducateurs, aux infirmiers, aux infirmiers anesthésistes, aux infirmiers chargés des services d'ergothérapie ou d'éducation physique, aux infirmiers psychiatriques, aux sages-femmes ou aux puériculteurs qui ont été reclassés au groupe de traitement B1 en application des articles 40 et 44 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017 sur les fonctionnaires communaux ? 13) La loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'elle n'a pas prévu le reclassement des policiers détenteurs d'un diplôme bachelor ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement A2, est-elle conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où elle institue une différence de traitement par rapport aux bibliothécaires, chimistes, ingénieurs technicien et de laborantin, assistants d'hygiène sociale, assistants sociaux, diététiciens, éducateurs gradués, ergothérapeutes, infirmiers gradués, masseur-kinésithérapeutes, orthophonistes, orthoptistes, pédagogues curatifs, psychorééducateurs ou aux officiers commandant adjoints des sapeurs-pompiers professionnels qui ont été reclassés au groupe de traitement A2 en application des articles 40 et 44 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017 sur les fonctionnaires communaux ? 14) La loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la police grand-ducale, en ce qu'elle n'a pas prévu le reclassement des policiers détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent dans le groupe de traitement B1, est-elle conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où elle institue une différence de traitement par rapport aux expéditionnaires techniques détenteurs d'un diplôme de technicien, aux préposés de la nature et des forêts, aux agents sanitaires, aux assistants techniques médicaux, aux éducateurs, aux infirmiers, aux infirmiers anesthésistes, aux infirmiers chargés des services d'ergothérapie ou d'éducation physique, aux infirmiers psychiatriques ou aux puériculteurs qui ont été reclassés au groupe de traitement B1 en application des articles 40 et 44 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017 sur les fonctionnaires communaux ? ».

La partie demanderesse passe ensuite en revue les différentes voies d’accès, pour les agents de la police grand-ducale classés au groupe de traitement C1, au groupe de traitement B1, telles qu’énumérés par le ministre dans la décision déférée, à savoir plus particulièrement la participation à l’examen-concours, conformément à l’article 66 de la loi du 18 juillet 2018, la carrière ouverte de l’article 73 de la même loi, ainsi que le mécanisme de la voie expresse prévue par l’article 94 de la même loi, mécanismes qui constitueraient également une violation de l’article 10bis de la Constitution en ce qui concerne l’accès des agents de la police grand-ducale au groupe de traitement B1.

18La partie demanderesse fait, dans ce cadre, tout d’abord valoir, que ces voies d’accès au groupe de traitement B1 prévoiraient des conditions d’application plus restrictives pour les agents concernés que le reclassement automatique des fonctionnaires d’Etat, tel que prévu par les article 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015, sans que cette divergence de traitement ne serait objectivement justifiée.

Ainsi, pour les policiers, l’article 66 de la loi du 18 juillet 2018 exigerait la tenue et la réussite à un examen-concours, l’article 73 de la même loi nécessiterait la publication d’un poste vacant, ainsi que le respect d’une condition d’ancienneté et de réussite de l’examen de promotion dans son groupe de traitement initial, tout comme la rédaction d’un mémoire, tandis que l’article 94 de la même loi prévoirait une ancienneté d’au moins 15 années de services, le classement à une fonction relevant du niveau supérieur, le placement en rang utile sur la liste d’ancienneté, ainsi que, pour les candidats sélectionnés, la rédaction d’un travail de réflexion.

Le régime juridique prévu par les articles 66, 73 et 94 de la loi du 18 juillet 2018, comparé aux articles 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015 violerait partant le principe d’égalité des citoyens devant la loi de l’article 10bis de la Constitution.

La partie demanderesse fait encore plus particulièrement valoir, en ce qui concerne l’accès au groupe de traitement B1 des agents de la police grand-ducale, par le biais de leur participation à l’examen-concours prévu à l’article 66 de la loi du 18 juillet 2018, que cet accès serait limité, conformément à l’article 55 de la même loi, à annuellement 20 postes, -

nonobstant la circonstance que le ministre aurait décidé de recruter, par le biais de ladite procédure, pour les années 2020 à 2022 davantage de candidats en relevant le nombre de postes disponibles de 20 à 140 par année - postes auxquelles, pour le surplus, pourraient par ailleurs postuler des personnes qui ne feraient pas partie de la police grand-ducale. En comparant cet accès limité au reclassement automatique de l’article 47 de la loi du 25 mars 2015, permettant l’accès de tous les fonctionnaires concernés au groupe de traitement B1, la violation de l’article 10bis de la Constitution devrait être retenue.

En ce qui concerne l’accès au groupe de traitement B1 par le biais du mécanisme de la voie expresse, tel que prévu par l’article 94 de la loi du 18 juillet 2018, la partie demanderesse argumente que l’accès audit mécanisme serait également tellement restreint qu’il ne saurait pas non plus être considéré comme une alternative au reclassement au sens de l’article 47 de la loi du 25 mars 2015.

Elle expose, tout d’abord, dans ce cadre, que la voie expresse serait un mécanisme temporaire ne jouant que pendant une période de dix ans, jusqu’au 1er août 2028. Par ailleurs, l’accès audit mécanisme serait soumis à une condition d’ancienneté faisant en sorte qu’elle ne pourrait pas directement y postuler, critère qui ne serait cependant pas prévu concernant des mécanismes similaires s’appliquant aux fonctionnaires d’Etat, conformément à l’article 54 de la loi du 25 mars 2015, respectivement aux policiers de l’Inspection générale de la police, conformément à l’article 30 de la loi IGP, alors que ces derniers imposeraient comme obligation d’occuper un poste comportant l’exercice de fonctions et d’attributions supérieures à celles revenant au groupe de traitement initial des agents concernés.

Au regard de ce critère d’ancienneté, ensemble avec la limitation du nombre maximum de policiers admissibles au mécanisme de la voie expresse, la partie demanderesse 19n’aurait, en réalité, pas accès audit mécanisme, de sorte que la décision déférée, pour avoir retenu le contraire, devrait encourir l’annulation.

La partie demanderesse soulève, en ce qui concerne l’accès au groupe de traitement B1 par la voie de l’examen-concours, encore une violation de l’article 10bis de la Constitution au détriment des agents de la police grand-ducale, violation devant directement conduire à l’annulation de la décision déférée.

Elle fait ainsi plus particulièrement valoir que l’accès au groupe de traitement B1 par le biais de l’examen-concours lui serait nettement moins favorable que le reclassement prévu à l’article 47 de la loi du 25 mars 2015, alors que son ancienneté de service ne serait pas reconnue, qu’elle devrait repasser un examen de promotion dans son nouveau groupe de traitement afin de bénéficier d’avancements en grade de traitements et que son traitement, ensemble avec les primes d’astreinte et de régime militaire, serait inférieur à celui perçu dans son groupe de traitement initial, de sorte qu’elle devrait toucher un supplément personnel en traitement.

Sur base des éléments qui précèdent, la partie demanderesse estime que le mécanisme de l’examen-concours, tel que prévu par l’article 66 de la loi du 18 juillet 2018, ne pourrait pas être considéré comme une alternative au reclassement automatique prévu aux articles 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015, de sorte qu’une violation de l’article 10bis de la Constitution, conduisant à l’annulation de la décision déférée, devrait être retenue en l’espèce.

En ce qui concerne sa demande subsidiaire de reclassement au groupe de traitement B1 par la voie de l’examen-concours, la partie demanderesse relève que les policiers, à travers l’article 55 de la loi du 18 juillet 2018, subiraient un traitement différencié non objectivement justifié par rapport aux membres de l’IGP, au sens de l’article 23 de la loi IGP, - les deux situations étant comparables du fait qu’ils auraient accompli la même formation de base, bénéficié des mêmes avancements et exerceraient le même travail de policier -, dans la mesure où pour les policiers le nombre de postes annuels à pourvoir par le biais de l’examen-

concours serait limité à 20, tandis que pour l’IGP, il n’y aurait pas de limitation de postes. La partie demanderesse réitère encore, dans ce cadre, son affirmation que les postes à pourvoir auprès de la police grand-ducale, par le biais de l’examen-concours, ne seraient pas réservés aux seuls policiers. La partie demanderesse conclut, sur base de ces éléments, à une violation de l’article 10bis de la Constitution devant directement conduire à l’annulation de la décision déférée.

La partie demanderesse met encore en avant une violation de l’article 10bis résultant de la circonstance que les conditions d’accès à l’examen-concours, prévues à l’article 66 de la loi du 18 juillet 2018 seraient moins restrictives que ceux, d’une part, de la voie d’accès au groupe de traitement B1 de la carrière ouverte, prévue à l’article 73 de la même loi, et, d’autre part, du mécanisme de la voie expresse, prévu à l’article 94 de la loi du 18 juillet 2018.

Une violation de l’article 10bis de la Constitution résulterait, selon la partie demanderesse, également des effets de l’accession au groupe de traitement B1 selon que ledit accès se ferait sur base de l’examen-concours, dans le cadre duquel les agents concernés ne bénéficieraient pas d’une reconnaissance de leur ancienneté et devraient repasser un examen de promotion dans leur nouveau groupe de traitement, respectivement sur base du mécanisme de la carrière ouverte, voire de la voie expresse, où ceci ne serait pas le cas.

20 Dans son mémoire en réplique, la partie demanderesse, tout en réitérant les différences de traitement non objectivement justifiées des agents de la police grand-ducale en ce qui concerne l’accès au groupe de traitement B1 par le biais de l’examen-concours, par rapport au reclassement des fonctionnaires étatiques, tel que prévu aux articles 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015, différences de traitement qui se matérialiseraient tant quant aux conditions d’accès à l’examen-concours, au niveau de la limitation des postes – limitation que le ministre n’aurait néanmoins pas appliquée, lequel aurait par le biais de l’examen-concours pourvu à 156 postes relevant du groupe de traitement B1 – que quant aux effets de l’accès au groupe de traitement B1 par cette voie, - la partie demanderesse précisant, dans ce contexte, que contrairement à son argumentation développée dans son recours, la direction de la police grand-ducale aurait entretemps considéré que l’article 8, paragraphe (3) de la loi du 25 mars 2015 serait applicable aux policiers ainsi reclassé – lesquels ne seraient pas équivalents à ceux d’un reclassement des fonctionnaires d’Etat sur base des articles 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015.

Ces différences de traitement seraient constitutives d’une violation de l’article 10bis de la Constitution, de sorte à devoir conduire directement à l’annulation de la décision déférée, sinon à la soumission de questions préjudicielles à la Cour constitutionnelle, questions libellées comme suit :

« 15) Les articles 55 et 66 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-

ducale, en ce qu'ils limitent le nombre de policiers du groupe de traitement C1 qui sont détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent, qui peuvent accéder tous les ans au groupe de traitement B1 par la réussite d'un examen-concours, sont-ils conformes à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où ils instaurent une différence de traitement par rapport aux articles 43 et 47 de la loi modifiée du 25 mars 2015, qui ont reclassé tous les autres fonctionnaires de l'État du groupe de traitement C1, qui disposent du niveau d'études requis et effectuent les missions et sujétions du groupe de traitement B1, dans le groupe de traitement B1 ? 16) L'article 66 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'il ne fait accéder les policiers du groupe de traitement C1, détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent, qui réussissent à l'examen-concours du groupe de traitement B1, qu'au grade F6 du groupe de traitement B1, est-il conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où il instaure une différence de traitement par rapport à l'article 47 de la loi modifiée du 25 mars 2015, qui a reclassé tous les autres fonctionnaires de l'État de la carrière inférieure ou du groupe de traitement C1, qui disposent du niveau d'études requis et effectuent les missions et sujétions du groupe de traitement B1, au grade correspondant à leur ancienneté de service dans le groupe de traitement B1 ? » En ce qui concerne la différence de traitement des agents de la police grand-ducale par rapport aux membres de l’IGP, quant à l’accès au groupe de traitement B1 par le biais de l’examen-concours, la partie demanderesse insiste sur la comparabilité des deux situations au regard de leurs formations et du travail identiques, tout en relevant que le pouvoir législatif, dans le cadre de travaux parlementaires, ainsi que le Conseil d’Etat auraient déjà reconnu l’équivalence de la situation des agents de la police grand-ducale avec celle des enquêteurs de l’IGP. Elle réfute encore, dans ce cadre, la justification avancée par le délégué du 21gouvernement à la base de la différence de traitement entre les policiers et les membres de l’IGP et basée sur la considération que ces derniers ne pourraient plus retourner vers la police grand-ducale, alors qu’une telle interdiction existerait également pour les policiers intégrant l’administration générale, sans que lesdits policiers ne garderaient leurs avantages, contrairement aux membres de l’IGP.

Sur base de ces éléments, la partie demanderesse réitère son moyen d’annulation de la décision déférée en raison d’une violation de l’article 10bis de la Constitution tirée de la circonstance que l’accès à l’examen-concours serait limité, pour les agents de la police grand-

ducale, à annuellement 20 postes, limitation qui n’existerait pas pour les membres de l’IGP.

Elle propose encore, dans ce contexte, de soumettre la question préjudicielle suivante à la Cour constitutionnelle :

« 17) L'article 66 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'il limite le nombre de policiers détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent, qui peuvent accéder tous les ans au groupe de traitement B1 par la réussite d'un examen-concours, est-il conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où il instaure une différence de traitement par rapport à l'article 23 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur l'Inspection générale de la Police, qui permet à tous les membres de l'Inspection générale de la Police détenteurs d'un diplôme de fin d'études secondaires, d'un diplôme de fin d'études secondaires générales ou d'un diplôme équivalent, qui réussissent à un examen, d'accéder au groupe de traitement B1 ? ».

La partie demanderesse fait encore état d’un traitement inégalitaire des policiers ayant déjà réussi à l’examen de promotion de la carrière de l’inspecteur de police, respectivement du groupe de traitement C1, lesquels accéderaient, par le biais de l’examen-concours, au groupe de traitement B1, par rapport aux fonctionnaires reclassés audit groupe en vertu des articles 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015, dans la mesure où les policiers en question devraient repasser un examen de promotion dans leur nouveau groupe de traitement, sans que cette différence serait objectivement justifiée.

Selon la partie demanderesse, il y aurait ainsi violation de l’article 10bis de la Constitution devant conduire directement à l’annulation de la décision déférée, sinon elle sollicite, avant tout progrès en cause, de saisir la Cour constitutionnelle d’une question préjudicielle libellée comme suit :

« 18) L'article 66 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'il oblige les policiers accédant par examen-concours au groupe de traitement B1, qui ont déjà réussi à l'examen de promotion de la carrière de l'inspecteur de police ou du groupe de traitement C1, à repasser l'examen de promotion du groupe de traitement B1, est-il conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où il instaure une différence de traitement par rapport à l'article 47 de la loi modifiée du 25 mars 2015, qui dispense les fonctionnaires de l'État reclassés, qui ont déjà réussi à l'examen de promotion de la carrière inférieure ou du groupe de traitement C1, de repasser l'examen de promotion du groupe de traitement B1 ? ».

La partie demanderesse insiste encore, en ce qui concerne l’accès des policiers au groupe de traitement B1 par le biais de l’examen-concours, sur une violation de l’article 2210bis de la Constitution tirée de la circonstance que lesdits policiers, d’une part, devraient repasser un examen de promotion dans leur nouveau groupe de traitement, ce qui ne serait pas le cas dans le cadre du mécanisme de la voie expresse, et, d’autre part, ne bénéficieraient pas des mêmes modalités d’avancement que les policiers ayant accédé au groupe de traitement B1 par le mécanisme de la voie expresse, sans que ces différences de traitement ne seraient objectivement justifiées. Selon la partie demanderesse, ces violations de l’article 10bis de la Constitution devraient directement conduire à l’annulation de la décision déférée, sinon elle propose, avant tout progrès en cause, de soumettre les questions préjudicielles suivantes à la Cour constitutionnelle :

« 19) L'article 66 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'il oblige les policiers accédant par examen-concours au groupe de traitement B1, qui ont déjà réussi à l'examen de promotion de la carrière de l'inspecteur de police ou du groupe de traitement C1, à repasser l'examen de promotion du groupe de traitement B1, est-il conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où il instaure une différence de traitement par rapport à l'article 94 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale et à l'article 54 de la loi modifiée du 25 mars 2015, qui dispensent les policiers et fonctionnaires de l'État accédant au groupe de traitement B1 par voie expresse, qui ont déjà réussi à l'examen de promotion de la carrière inférieure ou du groupe de traitement C1, de repasser l'examen de promotion de leur nouveau groupe de traitement ? ».

« 20) L'article 66 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'il fait accéder les policiers diplômés au grade F6 du groupe de traitement B1 et leur permet par la suite d'avancer tous les trois ans dans leur grade de traitement, est-il conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où il instaure une différence de traitement par rapport à l'article 94 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale et à l'article 54 de la loi modifiée du 25 mars 2015, qui font accéder les policiers et fonctionnaires de l'État à un grade de traitement supérieur à leur grade antérieur dans le groupe de traitement C1 et qui leur permettent par la suite d'avancer tous les ans dans leur grade de traitement ? ».

Finalement, en ce qui concerne l’accès des policiers au groupe de traitement B1 par le biais de l’examen-concours, la partie demanderesse soutient que pour certains policiers, les avancements en traitements seraient moins favorables dans ledit groupe de traitement que dans leur groupe de traitement initial C1. Cette situation existerait, pendant quelques années pour les policiers ayant une ancienneté inférieure à quinze ans, et, jusqu’à la fin de leur carrière pour ceux bénéficiant d’une ancienneté supérieure à quinze ans, sans qu’une telle différence de traitement ne serait objectivement justifiée, de sorte qu’il y aurait lieu de retenir, également dans ce cadre, une violation de l’article 10bis de la Constitution devant directement entraîner l’annulation de la décision déférée.

En relation avec cette problématique, elle formule encore une question préjudicielle à soumettre à la Cour constitutionnelle libellée comme suit :

« 21) L'article 66 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'il fait accéder les policiers diplômés au grade F6 du groupe de traitement B1 et leur permet par la suite d'avancer tous les trois ans dans leur grade de traitement, est-il conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où il instaure une différence de traitement par rapport à l'article 14, paragraphe 2 de la loi modifiée du 25 23mars 2015, qui permet à des policiers diplômés qui ont une certaine ancienneté au sein du groupe de traitement C1, de toucher un traitement plus élevé que les policiers diplômés qui ont la même ancienneté, mais qui ont accédé par la voie de l'examen-concours au groupe de traitement B1 ? » En ce qui concerne finalement l’accès au groupe de traitement B1 à travers le mécanisme de la voie expresse, prévu à l’article 94 de la loi du 18 juillet 2018, la partie demanderesse précise ne pas avoir sollicité, à travers son courrier du 10 juillet 2020, de se voir appliquer ledit mécanisme, mais elle aurait uniquement fait de plusieurs non-conformités au principe de l’égalité devant la loi affectant celui-ci.

Ainsi les agents de la police grand-ducale seraient victime d’une différence de traitement non objectivement justifiée, en ce qui concerne l’accès au groupe de traitement B1 par le biais du mécanisme de la voie expresse, par rapport aux autres fonctionnaires étatiques, par rapport aux membres de l’IGP et par rapport aux fonctionnaires communaux quant aux conditions d’accès audit mécanisme, dans la mesure où la condition d’occuper un poste comportant l’exercice de fonctions et d’attributions supérieures à celles revenant au groupe de travail initial de l’agent ne serait pas prévue pour les policiers.

Cette omission augmenterait, pour les policiers, le nombre de candidats pouvant introduire une demande fondée sur ledit mécanisme et serait contraire à l’intention du législateur dont l’objectif aurait été, concernant de manière générale le mécanisme de la voie expresse, la valorisation des compétences, des acquis de l’expérience professionnelle et des responsabilités endossées.

La partie demanderesse invoque encore, en ce qui concerne le mécanisme de la voie expresse, tel que prévu à l’article 94 de la loi du 18 juillet 2018, une violation de l’article 10bis de la Constitution, au motif que le contingent des agents de la police grand-ducale admissibles serait limité à 20 pourcents de l’effectif total du groupe de traitement C1 de ladite police, limitation qui n’existerait ni pour les membres de l’IGP ni pour les expéditionnaires informaticiens détenteurs d’un diplôme luxembourgeois de technicien ou d’un certificat d’études reconnu équivalent, sans que cette différence de traitement ne serait objective, rationnellement justifiée, adéquate et proportionnée à son but.

Finalement, la partie demanderesse fait valoir, concernant le mécanisme de la voie expresse, tel qu’il est applicable aux agents de la police grand-ducale, que ce dernier violerait l’article 10bis de la Constitution pour procéder à un favoritisme injustifié en fonction de l’ancienneté de service des policiers, alors même que l’essence dudit mécanisme aurait été de permettre à des fonctionnaires ayant acquis une expérience professionnelle et occupant des postes à responsabilité plus importante que ceux d’autres fonctionnaires de leur groupe de traitement, d’accéder au groupe de traitement supérieur.

Ainsi, en prévoyant un critère lié à l’ancienneté de service, contrairement à ce qui serait le cas pour les fonctionnaires d’Etat, les membres de l’IGP, ainsi que les fonctionnaires communaux, l’article 94 de la loi du 18 juillet 2018 violerait l’article 10bis de la Constitution.

Sur base de ces considérations, la partie demanderesse conclut à l’annulation de la décision déférée pour violation de l’article 10bis de la Constitution et propose de soumettre, au cas où le tribunal ne devrait pas directement accueillir son moyen d’annulation, quatre questions préjudicielles à la Cour constitutionnelle libellées dans les termes suivants :

24 22) L'article 94, paragraphe 3, alinéa 1er de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'il ne prévoit que deux conditions d'accès à la voie expresse, à savoir une ancienneté de quinze ans depuis la nomination et une fonction relevant du niveau supérieur, est-il conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où il institue une différence de traitement par rapport à l'article 54 de la loi modifiée du 25 mars 2015, à l'article 30 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur l'Inspection générale de la Police et l'article 51 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017, qui prévoient tous comme condition d'accès supplémentaire par rapport à ces deux conditions l'occupation d'un poste qui comporte l'exercice des fonctions et attributions supérieures à celles revenant à son groupe de traitement initial ? 23) L'article 94, paragraphe 3, alinéa 3 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'il limite le nombre maximum de policiers d'un groupe de traitement pouvant bénéficier du mécanisme temporaire de changement de groupe à vingt pour cent de l'effectif total de la catégorie de traitement C du cadre policier, est-il conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où il institue une différence de traitement par rapport à l'article 30 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur l'Inspection générale de la Police, qui ne prévoit aucune limitation du nombre de policiers pouvant bénéficier du mécanisme temporaire de changement de groupe ? 24) L'article 94, paragraphe 3, alinéa 3 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'il limite le nombre maximum de policiers d'un groupe de traitement pouvant bénéficier du mécanisme temporaire de changement de groupe à vingt pour cent de l'effectif total de la catégorie de traitement C du cadre policier, est-il conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où il institue une différence de traitement par rapport à l'article 54 de la loi modifiée du 25 mars 2015, modifié par l'article XII de la loi du 9 mai 2018 portant (notamment) modification de la loi modifiée du 25 mars 2015, qui ne prévoit, pendant une période de deux ans, aucune limitation du nombre d'expéditionnaires informaticiens détenteurs d'un diplôme luxembourgeois de technicien ou d'un diplôme équivalent pouvant bénéficier du mécanisme temporaire de changement de groupe ? 25) L'article 94, paragraphe 3, alinéa 5 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, en ce qu'il prévoit que la sélection des candidatures se basera également sur le critère de l'ancienneté de service, est-il conforme à l'article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, dans la mesure où il institue une différence de traitement par rapport à l'article 54 de la loi modifiée du 25 mars 2015, à l'article 30 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur l'Inspection générale de la Police et l'article 51 du règlement grand-

ducal du 28 juillet 2017, qui ne prévoient pas de tel critère de l'ancienneté de service pour la sélection des candidats ? Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours en tous ses moyens.

En présence de plusieurs moyens invoqués, le tribunal n'est pas lié par l'ordre dans lequel ils lui ont été soumis et détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l'effet utile s'en dégageant, de manière que les moyens tenant à la validité 25formelle d'une décision doivent être examinés, dans une bonne logique juridique, avant ceux portant sur son caractère justifié au fond.4 En ce qui concerne d’abord le moyen tenant à une violation de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, selon lequel « Toute décision administrative doit baser sur des motifs légaux.

La décision doit formellement indiquer les motifs par l´énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa base, lorsqu’elle (…) refuse de faire droit à la demande de l´intéressé ; (…) », il convient de souligner que l’article 6 précité n’impose pas une motivation exhaustive et précise, seule une motivation « sommaire » étant expressément exigée, de même que la jurisprudence admet que les motifs peuvent être précisés au plus tard au cours de la procédure contentieuse pour permettre à la juridiction administrative d'exercer son contrôle de légalité5.

En l’espèce, force est de constater que la décision déférée est motivée tant en fait qu’en droit, alors qu’elle fait expressément référence à la situation factuelle de la partie demanderesse et qu’elle fait état de ce qu’aucune base légale ne permettrait de faire droit à la demande de celle-ci, de sorte à suffire aux exigences de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979. Il s’ensuit que ce moyen encourt d’ores et déjà le rejet, sans que cette conclusion ne puisse être énervée par l’argumentation de la partie demanderesse selon laquelle le ministre n’aurait pas pris position sur tous les moyens et par rapport à tous les arguments invoqués dans son courrier du 10 juillet 2020, alors que l’obligation d’indiquer les motifs d’une décision, au sens de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, ne saurait impliquer, au-delà de l’obligation de fournir la justification en droit et en fait à sa base, que l’autorité administrative réponde obligatoirement à tout moyen, respectivement à toute argumentation contenue dans la demande de l’administré.

Au fond, en ce qui concerne, tout d’abord, la demande de reclassement automatique dans le groupe de traitement A2, sinon B1 que le ministre a refusé au motif qu’il n’existerait pas de base légale à cet effet, force est de constater que les parties sont en accord pour relever qu’il n’existe pas de base légale permettant le reclassement d’office d’un inspecteur de police, détenteur d’un diplôme de bachelor, respectivement d’un diplôme de fin d’études secondaires ou d’un diplôme équivalent, du groupe de traitement C1 dans le groupe de traitement A2, voire B1, de sorte que c’est a priori à bon droit que le ministre a retenu, dans la décision déférée du 7 octobre 2020 qu’il « (…) n'existe pas de base légale en vertu de laquelle un tel reclassement pourrait être effectué. ».

Or, la partie demanderesse estime cependant, en substance à travers l’ensemble de ses moyens, que cette absence de base légale dans les articles 43 et 47 de la loi du 25 mars 2015, articles qui n’incluraient pas les membres de la police grand-ducale, respectivement dans la loi du 18 juillet 2018, créerait une inégalité devant la loi, en violation de l’article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, en ce que les inspecteurs de police, détenteurs d’un diplôme de bachelor, respectivement d’un diplôme de fin d’études secondaires, seraient traités de manière moins favorable que d’autres catégories d’agents public pour lesquels le législateur aurait prévu une base légale permettant leur reclassement automatique dans le groupe de 4 Trib. adm., 31 mai 2006, n °21060 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 515 et les autres références y citées.

5 Trib. adm., 26 avril 2004, n° 17153 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure Administrative Non Contentieuse, n° 87 et les autres références y citées.

26traitement A2, respectivement B1, comme ce serait le cas pour les archivistes, assistants techniques viticoles, bibliothécaires, bibliothécaires-documentalistes, chimistes, cytotechniciens du laboratoire national de santé, ingénieurs techniciens, laborantins, agents de probation, d'assistant d'hygiène sociale, assistants scientifiques, assistants sociaux, diététiciens, éducateurs gradués, ergothérapeutes, infirmiers gradués, masseurs-

kinésithérapeutes, orthophonistes, orthoptistes, pédagogues curatifs et psychorééducateurs, respectivement pour les expéditionnaires informaticiens, les expéditionnaires techniques détenteurs d'un diplôme luxembourgeois de technicien ou d'un diplôme équivalent, les informaticiens diplômés, les préposés de la nature et des forêts, les techniciens diplômés, les agents sanitaires, des assistants techniques médicaux, des éducateurs, les infirmiers et les infirmiers spécialisés, ainsi que les employés de l’Etat, et finalement, les fonctionnaires communaux, sans que cette différence de traitement ne serait objectivement justifiée Aux termes de l’article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, « Les Luxembourgeois sont égaux devant la loi. (…) ».

Il échet de relever que ce principe constitutionnel interdit de traiter de manière différente des situations similaires, à moins que la différenciation ne soit objectivement justifiée.

Le contrôle de la constitutionalité d’une loi étant le monopole de la Cour constitutionnelle, il est rappelé que l’article 6 de la loi du 27 juillet 1997 dispose que :

« Lorsqu’une partie soulève une question relative à la conformité d’une loi à la Constitution devant une juridiction, celle-ci est tenue de saisir la Cour Constitutionnelle.

Une juridiction est dispensée de saisir la Cour Constitutionnelle lorsqu’elle estime que :

a) une décision sur la question soulevée n'est pas nécessaire pour rendre son jugement;

b) la question de constitutionnalité est dénuée de tout fondement;

c) la Cour Constitutionnelle a déjà statué sur une question ayant le même objet. (…) ».

Il y a, dans ce contexte, d’emblée lieu de rejeter l’argumentation de la partie demanderesse consistant à soutenir que le tribunal pourrait directement accueillir ses moyens relatif à la violation de l’article 10bis de la Constitution, au motif que celle-ci serait manifeste, alors qu’une telle manière de faire est contraire à l’article 6 de la loi du 27 juillet 1997 pour empiéter sur la compétence de la Cour constitutionnelle dont la saisine s’impose, sauf dans les cas y limitativement énumérés de dispense de saisine.

En l’espèce, la partie demanderesse propose quatorze questions de constitutionnalité tenant à une discrimination des inspecteurs de police, détenteurs d’un diplôme de fin d’études secondaires, qui, contrairement à différents autres agents de la fonction publique, n’ont été reclassés, ni par la loi du 25 mars 2015, ni par la loi du 18 juillet 2018, dans le groupe de traitement B1, respectivement A2, correspondant à leur niveau d’études.

Or, il ressort d’une série d’arrêts de la Cour administrative du 2 mai 2023, inscrits sous les numéros 46832, 46833, 46834 et 46835, dans le cadre desquels ladite Cour avait à connaître exactement des mêmes questions préjudicielles que celles actuellement litigieuses, 27numérotées 1 à 8, que celle-ci a retenu que « (…) la Cour constitutionnelle, à travers son arrêt précité du 26 novembre 2021, a dit que la situation du cadre policier de la Police est spécifique à tel point qu’elle doit être analysée à part et n’est pas comparable à celle des fonctionnaires de l’Etat en général, ni à celle des fonctionnaires expéditionnaires informaticiens, détenteurs d’un diplôme de technicien ou d’un diplôme équivalent, ni encore à celle des fonctionnaires communaux, ni plus loin à celle des fonctionnaires de l’IGP.

Or, les questions préjudicielles formulées par l’appelant en première instance tendent à voir comparer la situation des policiers du groupe de traitement C1 avec différentes catégories de fonctionnaires de l’Etat, les fonctionnaires communaux ainsi que les employés de l’Etat. En ce qui concerne les employés de l’Etat, bien que la Cour constitutionnelle ne se soit pas prononcée sur la comparabilité de la situation des membres du cadre policier de la Police avec celle des employés de l’Etat, l’arrêt susvisé de la Cour constitutionnelle du 26 novembre 2021 permet toutefois, par analogie, de faire le même constat en ce que la situation des membres du cadre policier de la Police n’est pas non plus comparable à celle des employés de l’Etat.

A défaut de comparabilité des situations à analyser, l’application de l’article 10bis, paragraphe 1, de la Constitution, ne saurait partant être utilement mise en oeuvre. », conclusion qu’il y a également lieu de retenir en l’espèce, de sorte que le tribunal doit rejeter les questions préjudicielles numérotées 1 à 14 relatives à une prétendue rupture de l’égalité devant la loi pour être dénuées de tout fondement, en ce qu’elles tablent sur la prémisse erronée que les situations visées seraient comparables, ce qui n’est pas le cas.

En application de l’article 6, alinéa 2, point b) de la loi du 27 juillet 1997, le tribunal n’est dès lors pas amené à soumettre les questions préjudicielles numérotées 1 à 14 à la Cour constitutionnelle.

Le tribunal doit ensuite relever, en ce qui concerne l’argumentation de la partie en relation avec les différentes voies d’accès légalement prévues pour le groupe de traitement B1, ainsi que sa demande subsidiaire visant plus particulièrement l’accès au groupe de traitement B1 par le biais de l’examen-concours, que les conclusions du tribunal quant à son impossibilité de procéder directement à l’annulation de la décision déférée pour violation de l’article 10bis de la Constitution, tel que retenu ci-avant, doivent également, pour les mêmes raisons, s’appliquer à ce volet du recours.

Quant aux questions préjudicielles formulées dans ce contexte par la partie demanderesse, le tribunal doit, tout d’abord, rejeter, conformément à l’article 6, alinéa 2, point b) de la loi du 27 juillet 1997, les questions préjudicielles numérotées 15 à 20, - étant précisé que les questions 19 et 20 n’étant ici uniquement visées dans leur volet fondé sur l’article 54 de la loi du 25 mars 2015 -, relatives à une prétendue rupture de l’égalité devant la loi pour être dénuées de tout fondement, en ce qu’elles tablent sur la prémisse erronée que les situations y visées seraient comparables, solution déjà retenue par l’arrêt, précité, de la Cour constitutionnelle du 26 novembre 2021 et qu’il y a lieu d’entériner, en l’espèce, par analogie.

Le tribunal doit encore rejeter, conformément à l’article 6, alinéa 2, point b) de la loi du 27 juillet 1997, la question préjudicielle numérotée 21 visant une comparaison des avancements des agents de la police grand-ducale ayant accédé par la voie de l’examen-

concours au groupe de traitement B1 par rapport aux avancements des agents du groupe de traitement C1, dans la mesure où il ressort d’un arrêt de la Cour constitutionnelle du 30 juin 282023, inscrit sous le numéro 00180 du registre, ayant eu à analyser la constitutionnalité de dispositions légales instituant une différence, en ce qui concerne le montant de différentes primes, en fonction du groupe de traitement des agents de la police grand-ducale que « (…) La définition et la délimitation des différentes carrières, les classements des fonctions en catégories de traitement, elles-mêmes réparties en groupes et sous-groupes de traitement, les conditions de recrutement, de rémunération et de perspectives d’évolution particulières, reflètent la volonté du législateur d’organiser les carrières au regard de la nature des tâches, permanentes ou temporaires, que chacune des carrières a pour mission d’accomplir.

Les différences de statut en résultant d’une catégorie de traitement à une autre, voire d’un groupe de traitement à un autre, fût-ce à l’intérieur d’une même carrière ou d’une même catégorie de traitement, ne se heurtent pas au principe de l’égalité devant la loi, lequel n’est pas synonyme d’uniformité et ne s’oppose pas à la liberté d’organisation et de structuration des différentes carrières et catégories de traitement voire des différents groupes de traitement.

Ni une identité de situation ni encore une comparabilité des situations n’existent ainsi entre fonctionnaires de groupes de traitement distincts. (…) », solution qu’il y a lieu d’entériner, par analogie, dans le présent cas d’espèce.

En ce qui concerne finalement les questions préjudicielles numérotées 19 et 20, dans leur volet basé sur l’article 94 de la loi du 18 juillet 2018, ainsi que les questions préjudicielles numérotées 22 à 25, le tribunal doit relever que par arrêt de la Cour constitutionnelle du 9 décembre 2022, inscrit sous le numéro 00174 du registre, cette dernière disposition légale fut déclarée non conforme à l’article 10bis de la Constitution, constat qui emporte pour conséquence, conformément à l’article 95ter de la Constitution, actuellement l’article 112, paragraphe (8) de la Constitution, que ledit article cesse en principe d’avoir un effet juridique le lendemain de la publication de l’arrêt en question, à moins que la Cour constitutionnelle n’ait ordonné un autre délai, ce qui ne fut pas le cas en l’espèce.

Il s’ensuit que l’article 94 de la loi du 18 juillet 2018 ne saurait actuellement plus faire l’objet d’une question préjudicielle à soumettre à la Cour constitutionnelle, de sorte que le tribunal doit, dans le litige sous examen, se considérer comme étant dispensé de saisir ladite Cour des questions préjudicielles numérotées 19 et 20, dans leur volet visant le prédit article, ainsi que les questions préjudicielles numérotées 22 à 25, sur le fondement de l’article 6, alinéa 2, point b) de la loi du 27 juillet 1997.

En l’absence d’autres moyens dont le tribunal est valablement saisi, force est dès lors de retenir que le recours est à rejeter en tous ses moyens, alors que c’est à bon droit que la décision déférée a refusé le reclassement automatique de la partie demanderesse dans le groupe de traitement B1 en raison de l’absence de base légale afférente.

Au vu de l’issue du litige, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 1.500 euros présentée par la partie demanderesse en application de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;

29 se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation introduit contre la décision du ministre de la Sécurité intérieure du 7 octobre 2020 ;

reçoit en la forme le recours subsidiaire en annulation introduit contre la décision précitée du ministre de la Sécurité intérieure du 7 octobre 2020 portant rejet de la demande de reclassement dans le groupe de traitement A2, respectivement B1;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure sollicitée par la partie demanderesse ;

laisse les frais et dépens de l’instance à charge de la partie demanderesse ;

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 29 septembre 2023 par :

Paul Nourissier, vice-président, Emilie Da Cruz De Sousa, premier juge, Laura Urbany, premier juge, en présence du greffier Marc Warken.

s.Marc Warken s.Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 29 septembre 2023 Le greffier du tribunal administratif 30


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 45498
Date de la décision : 29/09/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 07/10/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-09-29;45498 ?

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