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18/12/2023 | LUXEMBOURG | N°46489

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 18 décembre 2023, 46489


Tribunal administratif N° 46489 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46489 2e chambre Inscrit le 21 septembre 2021 Audience publique du 18 décembre 2023 Recours formé par la société à responsabilité limitée “A” SARL, …, contre des décisions du conseil communal de la commune de Mondercange et une décision du ministre de l’Intérieur, en matière de plan d’aménagement général et en matière de plan d’aménagement particulier

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46489 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif l

e 21 septembre 2021 par la société anonyme Krieger Associates SA, inscrite sur la liste V du Ta...

Tribunal administratif N° 46489 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46489 2e chambre Inscrit le 21 septembre 2021 Audience publique du 18 décembre 2023 Recours formé par la société à responsabilité limitée “A” SARL, …, contre des décisions du conseil communal de la commune de Mondercange et une décision du ministre de l’Intérieur, en matière de plan d’aménagement général et en matière de plan d’aménagement particulier

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46489 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 21 septembre 2021 par la société anonyme Krieger Associates SA, inscrite sur la liste V du Tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2146 Luxembourg, 63 - 65, rue de Merl, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B240929, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Georges Krieger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée “A” SARL, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro B72939, représentée par son gérant actuellement en fonctions, tendant à l’annulation :

- de la « décision de Madame la Ministre de l’Intérieur du 3 juin 2021, approuvant la délibération du conseil communal du 30 octobre 2020 portant approbation du projet de la refonte du PAG de la commune de Mondercange » ;

- de la « décision du conseil communal du 30 octobre 2020 portant adoption du projet d’aménagement général de la commune de Mondercange » ; et - de la « décision du conseil communal du 30 octobre 2020 portant adoption du projet d’aménagement particulier « quartier existant » de la commune de Mondercange » ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Kelly Ferreira Simoes, en remplacement de l’huissier de justice Frank Schaal, demeurant à Luxembourg, du 28 septembre 2021, portant signification de ce recours à l’administration communale de Mondercange, ayant sa maison communale à L-3919 Mondercange, 18, rue Arthur Thinnes, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 1er octobre 2021 par la société anonyme Arendt & Medernach SA, inscrite sur la liste V du Tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2082 Luxembourg, 41A, avenue J.F. Kennedy, immatriculée au registre de commerce et des sociétés sous le numéro B186371, représentée aux fins des présentes par Maître Christian Point, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-

Duché de Luxembourg ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 22 octobre 2021 par Maître Steve Helminger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Mondercange, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 21 décembre 2021 par la société anonyme Arendt & Medernach SA, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 27 décembre 2021 par Maître Steve Helminger, au nom de l’administration communale de Mondercange, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 27 janvier 2022 par la société anonyme Krieger Associates SA, au nom de la société à responsabilité limitée “A”, préqualifiée ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 28 février 2022 par la société anonyme Arendt & Medernach SA, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 28 février 2022 par Maître Steve Helminger, au nom de l’administration communale de Mondercange, préqualifiée ;

Vu les pièces versées en cause ainsi que les décisions attaquées ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Sébastien Couvreur, en remplacement de Maître Georges Krieger, Maître Steve Helminger et Maître Gilles Dauphin, en remplacement de Maître Christian Point, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 25 septembre 2023.

Vu l’avis du tribunal administratif du 15 novembre 2023 ayant informé les parties de la rupture du délibéré ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport complémentaire, ainsi que Maître Sébastien Couvreur, en remplacement de Maître Georges Krieger, Maître Adrien Kariger, en remplacement de Maître Steve Helminger, et Maître Gilles Dauphin, en remplacement de Maître Christian Point, en leurs plaidoiries respectives complémentaires à l’audience publique du 4 décembre 2023.

___________________________________________________________________________

Lors de sa séance publique du 14 octobre 2019, le conseil communal de Mondercange, ci-après désigné par le « conseil communal », émit un vote favorable, en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, désignée ci-après par « la loi du 19 juillet 2004 », sur le projet d’aménagement général et chargea le collège des bourgmestre et échevins, ci-après désigné par « le collège échevinal », de procéder aux consultations et publications prévues aux articles 11, 12 et 13 de la loi du 19 juillet 2004, ainsi qu’à l’article 7 de la loi modifiée du 22 mai 2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, ci-après désignée par « la loi du 22 mai 2008 ».

En date du même jour, le collège échevinal décida de soumettre le projet d’aménagement particulier « quartier existant » à la procédure d’adoption prévue aux articles 30 et suivants de la loi du 19 juillet 2004.

Toujours le 14 octobre 2019, le collège échevinal constata la conformité du projet d’aménagement particulier « quartier existant » de la commune de Mondercange avec le projet d’aménagement général.

Par courrier du 18 novembre 2019 adressé au collège échevinal, la société à responsabilité limitée “A” SARL, désignée ci-après par « la société “A” », déclarant agir en sa qualité de propriétaire de la parcelle inscrite au cadastre de la commune de Mondercange, section … de …, sous le numéro …, désignée ci-après par « la parcelle … », fit valoir ses objections à l’encontre du projet d’aménagement général de ladite commune, et plus particulièrement à l’encontre du classement projeté d’une partie de sa parcelle en tant que zone superposée « zone soumise à un plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » », ci-

après désignée par « PAP NQ ». Ladite société critiqua notamment les affectations admissibles dans ladite zone, ainsi que les prescriptions relatives à la hauteur des constructions et toitures découlant du projet d’aménagement particulier « quartier existant ».

En date du 27 février 2020, le ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable, ci-après désigné par « le ministre de l’Environnement », émit son avis sur le projet d’aménagement général en application de l’article 5 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, ci-après désignée par « la loi du 18 juillet 2018 », ainsi que son avis sur le rapport sur les incidences environnementales et sur le projet d’aménagement général en application des dispositions de la loi du 22 mai 2008, avis suite auquel, la commune fit établir un addendum au « Umweltbericht ».

En date du 29 avril 2020, la commission d’aménagement auprès du ministère de l’Intérieur communiqua son avis quant à ce même projet tel qu’émis lors de sa séance du 5 février 2020.

Lors de sa séance publique du 30 octobre 2020, le conseil communal décida d’adopter le projet d’aménagement général en y apportant des modifications tenant compte des avis ministériels et des objections, tout en réservant partiellement une suite favorable aux objections dirigées à l’encontre dudit projet par la société “A”.

Le même jour, le conseil communal procéda à l’adoption du projet d’aménagement particulier « quartier existant », tout en accueillant là aussi partiellement les objections émises par la société “A” à l’encontre du projet en question.

Par courrier du 20 novembre 2020, la société “A” introduisit auprès du ministre de l’Intérieur une réclamation à l’encontre de la susdite délibération du conseil communal du 30 octobre 2020 portant adoption du projet d’aménagement général en ce qu’il n’y a été fait droit que partiellement à ses objections dirigées à l’encontre de ce même projet. A cette occasion, elle sollicita notamment le reclassement de l’ensemble de sa parcelle en zone soumise à un plan d’aménagement particulier « quartier existant » (« PAP QE »), sinon subsidiairement une révision du coefficient d’utilisation du sol (« CUS ») pour la partie de sa parcelle classée en zone soumise à un PAP NQ.

Aux termes d’une décision du 25 janvier 2021, le ministre de l’Environnement approuva le projet d’aménagement général adopté le 30 octobre 2020 par le conseil communal.

Lors de sa séance publique du 5 mars 2021, le conseil communal émit son avis sur les réclamations introduites auprès du ministre de l’Intérieur, tandis que la commission d’aménagement en fit de même le 17 mai 2021.

Par décision du 3 juin 2021, le ministre de l’Intérieur approuva la délibération, précitée, du conseil communal du 30 octobre 2020 portant adoption du projet d’aménagement général, tout en statuant sur les réclamations lui soumises, dont notamment la réclamation introduite par la société “A”, qu’il déclara irrecevable en ce qu’elle vise le projet d’aménagement particulier « quartier existant » et non fondée pour le surplus. Les passages de la décision ministérielle, précitée, se rapportant à cette réclamation sont libellés comme suit :

« […] Ad réclamation “A” (rec 9) La réclamante conteste que la parcelle cadastrale n°…, sise à …, soit classée en partie en zone soumise à un « plan d’aménagement particulier ”quartier existant” [PAP QE] » et en partie en zone soumise à un « plan d’aménagement particulier ”nouveau quartier” [PAP NQ] ». Elle souhaite que l’ensemble de la parcelle soit soumise à un « plan d’aménagement particulier ”quartier existant” [PAP QE] ». Subsidiairement elle demande la fixation du CUS au taux de 1,8.

La réclamation est non fondée, alors que la typologie du terrain d’une forme allongée justifie la soumission d’une partie de la parcelle litigieuse à un « plan d’aménagement particulier ”nouveau quartier” [PAP NQ] ». En effet, un tel classement permettra le développement en profondeur des fonds litigieux. La soumission de l’entièreté de la parcelle à un « plan d’aménagement particulier ”quartier existant” [PAP QE] » serait contraire à l’article 2 de la loi en ce que le développement du terrain sous cette norme ne favoriserait pas un développement rationnel du sol.

Concernant le coefficient CUS, le taux de 1,5 est actuellement cohérent mais pourra éventuellement être augmenté selon le projet concret qui sera par la suite présenté. La réclamation est également non fondée sur ce point.

Pour le surplus, la réclamation, sur les prescriptions du « plan d’aménagement particulier ”quartier existant” [PAP QE] », est irrecevable, alors que la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain ne prévoit aucune faculté de réclamation devant le ministre en cette matière. […] ».

Par décision du même jour, le ministre de l’Intérieur approuva la délibération du conseil communal du 30 octobre 2020 portant adoption du projet de plan d’aménagement particulier « quartier existant ».

Aux termes d’une décision du 17 août 2021, le ministre de l’Environnement approuva les modifications de la délimitation de la zone verte découlant de la décision du ministre de l’Intérieur du 3 juin 2021 ayant fait droit à certaines réclamations.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 21 septembre 2021, la société “A” a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la « décision de Madame la Ministre de l’Intérieur du 3 juin 2021, approuvant la délibération du conseil communal du 30 octobre 2020 portant approbation du projet de la refonte du PAG de la commune de Mondercange », de la « décision du conseil communal du 30 octobre 2020 portant adoption du projet d’aménagement général de la commune de Mondercange » et de la « décision du conseil communal du 30 octobre 2020 portant adoption du projet d’aménagement particulier « quartier existant » de la commune de Mondercange ».

1. Quant à la compétence du tribunal Le tribunal relève que les décisions sur les projets d’aménagement, lesquels ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à ériger, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre de l’Intérieur participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé1, étant précisé qu’en ce qui concerne la procédure d’adoption du plan d’aménagement général (« PAG »), le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend également au volet de la décision ministérielle du 3 juin 2021 ayant statué sur la réclamation introduite par la société demanderesse, intervenue dans le processus général de l’élaboration de l’acte approuvé.

Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, désignée ci-après par « la loi du 7 novembre 1996 », seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire.

Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours en annulation sous examen.

2. Quant à la recevabilité du recours Par avis du 15 novembre 2023, le tribunal a informé les parties qu’il avait prononcé la rupture du délibéré afin de leur permettre de prendre position oralement quant à la question de la recevabilité ratione temporis du recours en annulation sous analyse en ce qu’il est dirigé contre « la décision du conseil communal du 30 octobre 2020 portant adoption du projet d’aménagement particulier « quartier existant » de la commune de Mondercange » et ce, sur la toile de fond que la publication de la décision du ministre de l’Intérieur du 3 juin 2021 portant approbation de ladite décision du conseil communal du 30 octobre 2020 semblait avoir été effectuée le 11 juin 2021.

A l’audience publique du 4 décembre 2023, à laquelle l’affaire a été refixée à cette fin pour continuation des débats, le litismandataire de la société demanderesse a conclu à la recevabilité ratione temporis de ce volet de son recours en faisant plaider, en substance, que même si la loi du 19 juillet 2004 ne prévoyait pas de forme particulière de notification en matière de plan d’aménagement particulier (« PAP »), il n’en resterait pas moins que toute personne ayant réclamé dans le cadre d’un projet d’aménagement particulier « quartier existant » serait à considérer comme partie intéressée et devrait, de ce fait, se voir notifier individuellement la décision ministérielle d’approbation dudit projet. Ce serait cette 1 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Actes réglementaires, n° 55 et les autres références y citées.notification qui ferait alors courir le délai de recours contentieux et non pas la date de publication de la décision ministérielle d’approbation de la délibération du conseil communal portant adoption d’un projet d’aménagement particulier « quartier existant ». Afin d’appuyer son argumentation le litismandataire de la société demanderesse s’est référé à des jugements du tribunal administratif des 14 juillet 2020 et 20 mai 2021, inscrits respectivement sous les numéros 43070 et 43853 du rôle, tout en insistant sur le fait que comme la procédure d’approbation en matière de projet d’aménagement particulier « quartier existant » serait intimement liée à celle en matière de projet d’aménagement général, la notification de la décision ministérielle d’approbation en matière de PAP devrait suivre la même forme que celle en matière de PAG.

Le représentant de la commune a, quant à lui, conclu à l’irrecevabilité ratione temporis du recours dirigé contre la délibération du conseil communal du 30 octobre 2020 portant adoption du projet d’aménagement particulier « quartier existant », tout en insistant sur le fait que, contrairement à ce qui serait le cas en matière de projet d’aménagement général, la loi du 19 juillet 2004 ne prévoirait pas de possibilité de formuler une réclamation auprès du ministre de l’Intérieur contre les prescriptions d’un projet d’aménagement particulier « quartier existant ». Comme il faudrait s’en tenir au texte légal, et à défaut de disposition contraire, ce serait bien l’affichage de l’avis ayant informé le public de l’approbation ministérielle du projet d’aménagement particulier « quartier existant » qui aurait, en l’espèce, fait courir le délai de recours contentieux.

La partie étatique s’est, quant à elle, en substance, ralliée aux développements du représentant de la commune, tout en insistant sur le fait qu’il y aurait une grande différence entre la procédure applicable en matière de projet d’aménagement général et celle en matière de projet d’aménagement particulier qui impliquerait que ni la commune ni le ministre de l’Intérieur ne sauraient clairement identifier les réclamants dans le cadre d’un projet d’aménagement particulier, pour conclure, à son tour, que ce serait bien l’affichage de l’avis ayant informé le public de l’approbation ministérielle du projet d’aménagement particulier « quartier existant » qui aurait, en l’espèce, fait courir le délai de recours contentieux et donc à l’irrecevabilité ratione temporis de ce volet du recours.

Il convient de prime abord de rappeler que les décisions d’approbation ou de refus d’approbation d’un PAP sont de nature réglementaire2.

En ce qui concerne le délai de recours contre les actes administratifs à caractère réglementaire, celui-ci est réglementé par l’article 16 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », article aux termes duquel : « Le délai d’introduction [du recours] est de trois mois à partir de la publication de l’acte attaqué ou, à défaut de publication, de la notification ou du jour où le requérant en a eu connaissance ».

Il ressort du libellé clair et précis de ladite disposition légale que le point de départ du délai pour introduire un recours contentieux contre un acte administratif à caractère réglementaire est en principe le jour de la publication de l’acte en question et à défaut de 2 Voir en ce sens Cour adm., 24 janvier 2006, n° 20233C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Tutelle administrative, n° 53.publication, le jour de la notification ou encore, faute de notification, le jour ou l’administré a eu connaissance dudit acte.

En l’espèce, il se dégage d’un avis au public émis par le collège échevinal, tel que versé en cause, que l’acte d’approbation du ministre de l’Intérieur du projet d’aménagement particulier « quartier existant » a fait l’objet d’une publication par voie d’affiches en date du 11 juin 2021.

A cet égard, il convient de relever que la loi du 19 juillet 2004 ne prévoit, en son article 30 intitulé « Procédure », aucun mode particulier de publication d’une décision d’adoption, respectivement d’approbation d’un PAP et ne prévoit en particulier aucune disposition relative à la notification individuelle d’une décision d’adoption, respectivement d’approbation d’un PAP, le législateur ayant, en effet, exclu l’obligation de procéder à une information de toutes les personnes intéressées, alors qu’une telle notification individuelle n’est pas possible pour des raisons pratiques, liées notamment à l’impossibilité d’identifier toutes les personnes susceptibles d’être intéressées. Il y a encore lieu de préciser que ce n’est que l’article 31 de la même loi, lequel règle l’entrée en vigueur des PAP, qui prévoit un mode de publication spécifique, à savoir une publication par voie d’affiches à la commune « conformément à la procédure prévue pour les règlements communaux, définie par l’article 82 de la loi communale du 13 décembre 1988, telle qu’elle a été modifiée »3, publication qui a, de manière non contestée, été effectuée, en l’espèce, le 11 juin 2021 par le biais de l’affichage d’un avis ayant informé le public de l’approbation ministérielle du projet d’aménagement particulier « quartier existant ».

Comme en matière de tutelle administrative le délai de recours contentieux court a priori à partir de la publication de l’acte d’approbation4 et qu’en l’espèce, ledit acte a été publié le 11 juin 2021 par voie d’affiches, le délai pour agir à l’encontre de la décision d’adoption du projet d’aménagement particulier « quartier existant » du 30 octobre 2020, telle qu’approuvée par décision ministérielle du 3 juin 2021, aurait en principe expiré trois mois après le 11 juin 2021, à savoir le 13 septembre 2021, alors que le 11 septembre 2021 était un samedi.

Tel que relevé ci-avant, la société demanderesse tente, quant à elle, d’argumenter que ce ne serait, en l’espèce, pas la publication de l’acte d’approbation ministérielle par la commune qui aurait fait courir le délai de recours contentieux à l’encontre de la délibération du conseil communal portant adoption du projet d’aménagement particulier « quartier existant », en affirmant, de l’entendement du tribunal, que comme la procédure d’adoption et d’approbation d’un projet d’aménagement particulier serait intimement liée à celle d’un projet d’aménagement général, la décision ministérielle d’approbation d’un projet d’aménagement particulier « quartier existant » devrait, à l’instar de ce qui serait admis par la jurisprudence en matière de PAG, être notifiée personnellement à un administré ayant réclamé contre ledit projet. Il s’ensuivrait que le délai de recours contentieux n’aurait pu commencer à courir à son encontre qu’à compter de cette notification individuelle.

Le tribunal relève, à cet égard, que certes, en matière de PAG, il est de jurisprudence5 qu’en tant qu’approbation tutélaire confirmant ex post la validité de la délibération communale 3 Trib. adm., 14 juillet 2020, n° 43070 du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.

4 Trib. adm., 23 mai 2000, n° 11206a du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 285 et les autres références y citées ; Cour adm., 6 novembre 1997, n° 10013C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Tutelle administrative, n° 31 et les autres références y citées.

5 Trib. adm., 20 mai 2021, n°43853 du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.d’adoption d’un projet d’aménagement général, la décision ministérielle d’approbation se greffe sur cette dernière et doit, par conséquent, suivre le même régime de publicité et de notification que la délibération du conseil communal - qui doit, conformément à l’article 15 de la loi du 19 juillet 2004, être notifiée par lettre recommandée avec avis de réception aux personnes ayant introduit une réclamation écrite -, de sorte qu’il est admis qu’une personne ayant introduit une réclamation auprès du ministre de l’Intérieur doit se voir notifier individuellement la décision ministérielle ayant statué sur sa réclamation et qu’une publicité par voie d’affichage est insuffisante pour déclencher utilement le délai de recours à son égard.

Or, si, au vu des considérations qui précèdent, le principe jurisprudentiel ainsi retenu fait tout son sens dans le cadre de la procédure d’approbation d’un projet d’aménagement général où seules les personnes ayant infructueusement réclamé contre le projet d’aménagement général devant le collège échevinal, conformément à l’article 13 de la loi du 19 juillet 2004, peuvent, conformément à l’article 16 de la même loi, adresser leurs réclamations contre le vote du conseil communal au ministre de l’Intérieur dans les quinze jours suivant la notification par lettre recommandée avec accusé de réception de la décision du conseil communal, ce principe n’est toutefois pas transposable en matière de projet d’aménagement particulier « quartier existant ». En effet, au-delà du fait que, tel que relevé ci-

avant, contrairement à ce qui est le cas de la délibération du conseil communal portant adoption d’un projet d’aménagement général, aucune disposition légale n’impose un régime particulier de publicité et de notification de la délibération du conseil communal portant adoption d’un projet d’aménagement particulier que la décision d’approbation ministérielle pourrait suivre, la loi du 19 juillet 2004 ne prévoit pas non plus, dans le chef des personnes intéressées ayant soumis au collège échevinal leurs observations et objections contre le projet d’aménagement particulier, de possibilité de formuler une réclamation auprès du ministre de l’Intérieur contre les prescriptions d’un projet d’aménagement particulier « quartier existant », ni a fortiori de possibilité pour ledit ministre de statuer sur de telles réclamations, le ministre de l’Intérieur ne faisant, au vœu de l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004, que vérifier, avant de statuer, « la conformité et la compatibilité du projet de plan d’aménagement particulier avec les dispositions de la [loi du 19 juillet 2004], et notamment les objectifs énoncés à l’article 2, avec ses règlements d’exécution ainsi qu’avec les plans rendus obligatoires en vertu de la loi précitée du 17 avril 2018 et avec les objectifs énoncés à l’article 1er de la prédite loi. ».

C’est encore en vain que la société demanderesse s’appuie sur un jugement du 14 juillet 2020, inscrit sous le numéro 43070 du rôle, pour sous-tendre son argumentation suivant laquelle le délai de recours contentieux n’aurait pu commencer à courir en l’espèce qu’à partir de la notification individuelle de la décision d’approbation ministérielle, puisque, dans cette affaire, le tribunal a été saisi d’un recours en annulation introduit par l’initiateur d’un projet d’aménagement particulier « nouveau quartier » contre une délibération du conseil communal portant refus d’adoption dudit projet laquelle avait uniquement fait l’objet d’une publication par voie d’affiches sans que l’initiateur du projet n’ait été personnellement informé du sort réservé à celui-ci. Si le tribunal a certes considéré que, dans ce contexte particulier, la seule publication de la décision de refus litigieuse par voie d’affiches ne saurait être considérée comme suffisante pour faire courir le délai de recours contentieux visé à l’article 16 de la loi du 21 juin 1999 à l’encontre de l’initiateur du projet d’aménagement en cause, mais que ce serait la date de la notification de la décision de refus litigieuse qui serait à prendre en compte, cette conclusion ne saurait être transposée au cas d’espèce qui n’a pas trait à une décision de rejet d’un projet d’aménagement particulier « nouveau quartier » dont la société demanderesse aurait été l’initiateur.

Au vu de toutes les considérations qui précèdent, il doit être admis qu’en l’espèce, le délai de recours contentieux pour agir contre la délibération du conseil communal portant adoption du projet d’aménagement particulier « quartier existant » du 30 octobre 2020 a bien commencé à courir à partir de la publication de l’acte d’approbation, soit le 11 juin 2021, pour expirer le 13 septembre 2021.

Dans la mesure où la requête introductive d’instance n’a toutefois été déposée au greffe du tribunal administratif qu’en date du 21 septembre 2021, le recours introduit à l’encontre de la délibération du conseil communal du 30 octobre 2020 portant adoption du projet d’aménagement particulier « quartier existant » de la commune de Mondercange est à déclarer irrecevable pour cause de tardivité.

En ce qui concerne le recours introduit à l’encontre des décisions du conseil communal du 30 octobre 2020 et du ministre de l’Intérieur du 3 juin 2021 portant adoption, respectivement approbation du PAG de la commune de Mondercange, il est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

3. Quant à la loi applicable La procédure d’adoption d’un PAG est prévue par la loi du 19 juillet 2004. Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises et dernièrement (i) par une loi du 28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au Mémorial A, n° 160 du 6 septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, publiée au Mémorial A, n° 113 du 17 juin 2015, (iv) par la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus », entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017, (v) par la loi du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire, (vi) par la loi du 18 juillet 2018 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, (vii) par la loi du 30 juillet 2021 relative au Pacte logement 2.0, dont l’entrée en vigueur est fixée au 1er janvier 2021, par l’article 16 de la loi en question et (viii) par la loi du 7 août 2023 relative au logement abordable.

Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation a pu être introduit à l’encontre des actes déférés et, d’autre part, que dans le cadre d’un tel recours, le juge administratif est amené à en apprécier la légalité en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où ils ont été pris6, les modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par les lois précitées des 30 juillet 2021 et 7 août 2023, entrées en vigueur postérieurement à la décision du conseil communal du 30 octobre 2020, ne sont pas à prendre en considération en l’espèce, étant plus particulièrement précisé à cet égard que les actes de tutelle administrative, tels que la décision ministérielle litigieuse, rétroagissent à la date de la décision approuvée et tombent dès lors sous le champ d’application des lois en vigueur à la date de la prise de décision de l’acte initial.

Il s’ensuit que la version de la loi du 19 juillet 2004 applicable au présent litige est celle résultant des modifications opérées par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013, 14 juin 2015, 3 mars 2017, 17 avril 2018 et 18 juillet 2018.

6 Trib. adm., 27 janvier 1997, n° 9724 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Recours en annulation, n° 21 et les autres références y citées.

4. Quant au fond Dans la mesure où le tribunal a retenu ci-avant dans le cadre de l’analyse de la recevabilité du recours que celui-ci, en ce qu’il vise la décision du conseil communal du 30 octobre 2020 portant adoption du projet d’aménagement particulier « quartier existant », est irrecevable, son analyse au fond se limitera aux contestations de la société demanderesse dirigées à l’encontre des décisions d’adoption, respectivement d’approbation du PAG de la commune de Mondercange, étant de toute façon relevé, dans ce contexte, que bien que suivant le dispositif de la requête introductive d’instance, le recours en annulation est également dirigé contre la délibération du conseil communal portant adoption du projet d’aménagement particulier « quartier existant », aucun moyen en droit n’a été développé contre cette décision, les contestations de la société demanderesse tournant en substance exclusivement autour du classement d’une partie de la parcelle … en tant que zone soumise à un PAP NQ, respectivement, subsidiairement, si ce classement était maintenu, portent sur le CUS retenu dans le schéma directeur pour la partie de la parcelle soumise à un PAP NQ.

A l’appui de son recours dirigé contre les décisions d’adoption et d’approbation du projet d’aménagement général en cause, la société demanderesse, après avoir expliqué que, suite à la refonte du PAG, la parcelle … a été classée en « zone spéciale « … » [SPEC-F] », soumise en partie à un PAP NQ et en partie à un PAP QE, (1) critique le principe même de la division de sa parcelle en deux zones distinctes, (2) conteste le classement d’une partie de sa parcelle en zone soumise à un PAP NQ en invoquant, à cet égard, (i) une violation des articles 25 et 2 de la loi du 19 juillet 2004 et (ii) une absence de motivation suffisante « du reclassement projeté », (3) reproche une violation de l’article 8 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu de l’étude préparatoire d’un projet d’aménagement général, (4) invoque la violation du principe général de confiance légitime et enfin (5) revendique l’application d’un CUS plus élevé en ce qui concerne la partie de sa parcelle superposée d’une zone PAP NQ.

Le tribunal rappelle que, saisi d’un recours en annulation, la mission de juge de la légalité exclut le contrôle des considérations d’opportunité et notamment d’ordre politique, à la base de l’acte administratif attaqué et inclut la vérification, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, de ce que les faits et considérations sur lesquels s’est fondée l’administration sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute. Dans cette démarche de vérification des faits et des motifs à la base de l’acte déféré, le tribunal est encore amené à analyser si la mesure prise est proportionnelle par rapport aux faits dont l’existence est vérifiée, le tribunal étant ainsi appelé à opérer une balance valable et équilibrée des éléments en cause et à vérifier plus particulièrement si l’acte posé est proportionné à son but7.

4.1. Quant aux contestations ayant trait au principe même de la division de la parcelle litigieuse en deux zones distinctes Arguments des parties 7 Cour adm., 12 janvier 2021, n°44684C du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu. A l’appui de ce moyen, la société demanderesse fait valoir que, selon elle, le « découpage » de sa parcelle pour partie en zone soumise à un PAP QE et pour partie en zone PAP NQ ne permettrait pas d’y développer un concept urbanistique d’ensemble en ce que plus particulièrement l’étroitesse de la partie de sa parcelle soumise à une zone PAP NQ impliquerait de nombreuses difficultés pour développer un projet. Elle est, par conséquent, d’avis que, pour permettre un développement cohérent de la parcelle litigieuse, il aurait fallu que sa parcelle soit soumise entièrement ou bien à un PAP QE ou bien à un PAP NQ.

Les parties défenderesses concluent, quant à elles, au rejet de ce moyen pour ne pas être fondé.

Analyse du tribunal En l’espèce, il est constant en cause que la parcelle …, appartenant à la société demanderesse, qui a été classée par le PAG en « zone spéciale « … » [SPEC-F] », avec un classement partiel en zone superposée « zone de bruit » non litigieux en l’espèce, a été soumise en partie à un PAP NQ et en partie à un PAP QE, intitulé « Zone spéciale « … » [SPEC-F] ».

Il y a lieu de relever qu’outre le fait que la société demanderesse reste en défaut d’invoquer la moindre disposition légale ou réglementaire qui imposerait de classer une parcelle cadastrale en une seule et même zone, il est constant en cause que déjà avant la refonte du PAG, la parcelle litigieuse, qui présente une contenance non négligeable de 1ha 77a 15 ca et une forme particulière, était soumise à deux classements distincts. En effet, la partie de la parcelle qui accueille d’ores et déjà deux bâtiments était précédemment classée en zone industrielle communale, donc en zone constructible, tandis que l’autre partie, vierge de toute construction, était classée en zone de verdure et donc en zone inconstructible. Il se dégage encore des explications de l’administration communale que l’idée communale était de classer en zone soumise à un PAP QE la partie de la parcelle d’ores et déjà urbanisée et de soumettre à un PAP NQ la partie de la parcelle anciennement classée en zone de verdure et donc non encore urbanisée afin d’y permettre le développement d’un projet d’ensemble adapté à la situation d’espèce, sans devoir être tributaire des règles d’un PAP QE, instrument urbanistique que l’administration communale a considéré comme n’étant pas adapté à la situation et à la forme particulière de la partie de la parcelle en cause.

Enfin, il y a lieu de constater que l’affirmation non autrement sous-tendue de la société demanderesse suivant laquelle le classement de sa parcelle pour partie en zone soumise à un PAP QE et pour partie en zone soumise à un PAP NQ empêcherait d’y développer un concept urbanistique d’ensemble, voire engendrerait, sur la partie soumise à un PAP NQ, un certain nombre de difficultés pour y développer un projet, reste de toute façon à l’état de pure allégation.

Au vu des considérations qui précèdent, le principe même de la division de la parcelle litigieuse en deux zones distinctes ne porte pas à critique et ce, indépendamment de la question du caractère justifié ou non de soumettre une partie de la parcelle en cause à un PAP NQ, question qui sera traitée ci-dessous.

4.2. Quant aux contestations ayant trait au classement d’une partie de la parcelle litigieuse en zone soumise à un PAP NQ (i) Quant à la violation alléguée des articles 25 et 2 de la loi du 19 juillet 2004 11 Arguments des parties A l’appui de ce moyen, après avoir cité l’article 25 de la loi du 19 juillet 2004, la société demanderesse fait valoir que comme sa parcelle serait viabilisée et accueillerait des constructions, elle répondrait à la définition d’une zone urbanisée devant être soumise à un PAP QE. La décision de « reclasser » une partie de sa parcelle en zone soumise à un PAP NQ serait dès lors le fruit d’une erreur manifeste d’appréciation pour ne pas être fondée sur des considérations tenant à la viabilisation ou à l’urbanisation de la parcelle, mais uniquement à la forme allongée de celle-ci.

Elle ajoute qu’un PAP NQ serait « généralement utilisé pour fixer le développement urbain en lot, guidé par les schémas directeurs » et qu’en l’occurrence, le schéma directeur ne prévoirait qu’une seule grande zone destinée à l’artisanat, sans donner aucune autre information, de sorte qu’elle ne comprendrait pas ce qui a pu motiver la commune à classer une partie de sa parcelle en zone soumise à un PAP NQ. Son incompréhension serait d’autant plus grande qu’il s’agirait de la seule partie de parcelle de toute la « zone spéciale … [SPEC-

F] » à avoir été classée en zone soumise à un PAP NQ, sans que des considérations tenant à une urbanisation cohérente et rationnelle justifieraient ce choix.

La société demanderesse continue en donnant à considérer que le classement d’une partie du terrain en zone soumise à un PAP NQ serait « grandement contraignant » et que, comme les prescriptions urbanistiques applicables à la zone PAP QE et celles applicables à la zone PAP NQ ne seraient pas conciliables, seule l’uniformité du classement de sa parcelle permettrait de viabiliser et de développer un projet harmonieux, tout en tenant compte des caractéristiques de la parcelle et du tissu urbain existant. Tout en se référant au cadre fixé par le schéma directeur et à l’article 6 de la partie écrite du PAP QE relatif à la « zone spéciale « … » [SPEC-F] », elle fait valoir qu’il ne s’en dégagerait pas la nécessité de classer une partie de sa parcelle en zone soumise à un PAP NQ. A cela s’ajouterait qu’en ce qui concerne « l’affectation de la zone SPEC-F », le schéma directeur n’en prévoirait qu’une seule, à savoir l’artisanat, tandis que la « zone SPEC-F » permettrait des affectations plus diversifiées.

Au vu de ces considérations, il devrait être admis qu’en l’espèce, une seule et même parcelle serait soumise à des prescriptions différentes sans que cette différenciation ne soit motivée. Le « reclassement » d’une partie de sa parcelle en zone soumise à un PAP NQ ne ferait dès lors aucun sens pour ne pas s’inscrire dans une logique de bon aménagement des lieux ni même dans l’intérêt général, ce qui serait contraire au prescrit de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004.

Dans son mémoire en réplique, la société demanderesse se rapporte, en substance, à ses écrits contentieux antérieurs, tout en insistant plus particulièrement sur le fait que sa parcelle répondrait à la définition d’une zone urbanisée devant être soumise à un PAP QE et que ce serait justement l’uniformité du classement qui permettrait de la viabiliser et d’y développer un projet harmonieux en tenant compte des caractéristiques de la parcelle et du tissu urbain, tandis que sa division en deux parties qui ne répondraient pas aux mêmes prescriptions urbanistiques entraînerait des difficultés certaines dans l’élaboration d’un projet immobilier cohérent. A cela s’ajouterait qu’il se dégagerait du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement particulier « quartier existant » et du plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », qu’un PAP QE, en ce qu’il prévoirait également le mode et le degré d’utilisation du sol, permettrait tout aussi bien d’assurer ledéveloppement d’un projet harmonieux et cohérent, de sorte que le recours à un PAP NQ ne serait pas la seule solution permettant une urbanisation cohérente du site.

Les parties défenderesses concluent, quant à elles, au rejet de ce moyen pour ne pas être fondé.

Analyse du tribunal Le tribunal relève que les autorités communales, lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement, doivent être mues par des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement des agglomérations et d’ordre politique tirées de l’organisation de la vie en commun sur le territoire donné, tendant les unes et les autres à une finalité d’intérêt général et dans ce contexte, lesdites autorités doivent veiller tant la conservation de l’esthétique urbaine qu’au développement rationnel des agglomérations8.

Dans ce contexte, il y a lieu d’insister sur le fait que, saisi d’un recours en annulation, le juge administratif est appelé à vérifier, d’un côté, si, au niveau de la décision administrative querellée, les éléments de droit pertinents ont été appliqués et, d’un autre côté, si la matérialité des faits sur lesquels l’autorité de décision s’est basée est établie. Au niveau de l’application du droit aux éléments de fait, le juge de l’annulation vérifie encore s’il n’en est résulté aucune erreur d’appréciation se résolvant en dépassement de la marge d’appréciation de l’auteur de la décision querellée. Le contrôle de légalité à exercer par le juge de l’annulation n’est pas incompatible avec le pouvoir d’appréciation de l’auteur de la décision qui dispose d’une marge d’appréciation. Ce n’est que si cette marge est dépassée que la décision prise encourt l’annulation pour erreur d’appréciation. Ce dépassement peut notamment consister dans une disproportion dans l’application de la règle de droit aux éléments de fait. Le contrôle de légalité du juge de l’annulation s’analyse alors en contrôle de proportionnalité9.

S’il est certes vrai que le choix d’entériner ou de ne pas entériner la modification d’un plan d’aménagement relève d’une dimension politique et échappe comme tel au contrôle des juridictions de l’ordre administratif saisies d’un recours en annulation, il n’en demeure pas moins que tout acte administratif doit reposer sur un motif dont le juge administratif vérifie tant l’existence que la légalité. Cette exigence découle du fait que le juge administratif a l’obligation de vérifier si les autorités administratives compétentes n’ont pas violé la loi, commis un excès de pouvoir ou un détournement de pouvoir et cette obligation de motivation existe également pour les actes à caractère réglementaire qui, quoique discrétionnaires, doivent être pris dans l’intérêt général, de sorte qu’il importe que les autorités administratives compétentes fassent connaître le ou les motifs qui les ont guidées dans leur décision, le contrôle exercé par le juge de l’annulation ne portant dès lors pas sur l’opportunité, mais sur la réalité et la légalité des motifs avancés10.

Quant aux objectifs devant guider les autorités communales lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagements, ainsi que l’autorité ministérielle, dans le cadre de l’exercice de son contrôle tutélaire, il y a lieu de se référer à l’article 2 de la loi du 19 juillet 8 Trib. adm., 20 octobre 2004, n° 17604 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Urbanisme, n° 201 et les autres références y citées.

9 Cour adm., 9 novembre 2010, n° 26886C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Recours en annulation, n° 39 et les autres références y citées.

10 Trib. adm., 23 mars 2005, n° 18463 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Urbanisme, n° 761 et les autres références y citées.2004, aux termes duquel : « Les communes ont pour mission de garantir le respect de l’intérêt général en assurant à la population de la commune des conditions de vie optimales par une mise en valeur harmonieuse et un développement durable de toutes les parties du territoire communal par:

(a) une utilisation rationnelle du sol et de l’espace tant urbain que rural en garantissant la complémentarité entre les objectifs économiques, écologiques et sociaux;

(b) un développement harmonieux des structures urbaines et rurales, y compris les réseaux de communication et d’approvisionnement compte tenu des spécificités respectives de ces structures, et en exécution des objectifs de l’aménagement général du territoire;

(c) une utilisation rationnelle de l’énergie, des économies d’énergie et une utilisation des énergies renouvelables;

(d) le développement, dans le cadre des structures urbaines et rurales, d’une mixité et d’une densification permettant d’améliorer à la fois la qualité de vie de la population et la qualité urbanistique des localités;

(e) le respect du patrimoine culturel et un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage lors de la poursuite des objectifs définis ci-

dessus;

(f) la garantie de la sécurité, la salubrité et l’hygiène publiques. ».

L’article 6 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit, quant à lui, que « Le plan d’aménagement général a pour objectif la répartition et l’implantation judicieuse des activités humaines dans les diverses zones qu’il arrête aux fins de garantir le développement durable de la commune sur base des objectifs définis par l’article 2 de la loi. ».

Il convient encore de noter que la décision d’adopter, respectivement de modifier un PAG est, dans son essence même, prise dans l’intérêt général, cette caractéristique étant présumée jusqu’à preuve du contraire11.

En l’espèce, en ce qui concerne tout d’abord l’affirmation de la société demanderesse suivant laquelle, au regard du fait que sa parcelle serait viabilisée et accueillerait des constructions, seul un classement de l’intégralité de celle-ci en zone soumise à un PAP QE aurait fait du sens, il convient tout d’abord de rappeler, d’une part, que seule une partie de la parcelle litigieuse a été classée en zone soumise à un PAP NQ, tandis que l’autre partie de la parcelle - d’ores et déjà urbanisée - a été soumise à un PAP QE et que, d’autre part, le tribunal a retenu ci-avant que le principe même de la division de la parcelle litigieuse en deux zones distinctes ne portait pas à critique sous réserve toutefois du caractère justifié de la soumission d’une partie de la parcelle en cause à un PAP NQ, analyse qui se fera ci-après.

Il convient, à cet égard, de relever qu’aux termes de l’article 25 de la loi du 19 juillet 2004 : « Le plan d’aménagement particulier précise et exécute les dispositions réglementaires du plan d’aménagement général concernant une zone ou partie de zone. Il revêt la forme d’un plan d’aménagement particulier « nouveau quartier ». Les communes peuvent toutefois définir dans leur plan d’aménagement général des terrains ou ensembles de terrains constituant une zone urbanisée pour lesquels un plan d’aménagement particulier « quartier existant » est à élaborer.

11 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Recours en annulation, n° 10 et les autres références y citées.

On entend par zone urbanisée des terrains ou ensembles de terrains qui sont entièrement viabilisés conformément à l’article 23 alinéa 2, sans préjudice de la nécessité de procéder à d’éventuels travaux accessoires de voirie appliqués aux accotements et trottoirs ou impliquant une réaffectation partielle de l’espace routier. […] ».

L’article 23, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit que « [les travaux de voirie et d’équipements publics nécessaires à la viabilité du plan d’aménagement général] comprennent la réalisation des voies publiques, l’installation des réseaux de télécommunication, ainsi que des réseaux d’approvisionnement en eau potable et en énergie, des réseaux d’évacuation des eaux résiduaires et pluviales, de l’éclairage, de l’aménagement des espaces collectifs, des aires de jeux et de verdure ainsi que des plantations. ».

Il suit des dispositions qui précèdent que le PAP NQ est la forme de droit commun, tandis que le PAP QE constitue l’exception. Les PAP NQ sont ainsi exigés pour l’aménagement de zones non encore urbanisées ou seulement partiellement urbanisées tandis que les PAP QE peuvent s’appliquer aux zones entièrement urbanisées12. Il y a lieu de relever que suivant les documents parlementaires à la base de la loi du 3 mars 201713, le législateur a prévu dorénavant un seul critère « d’application plus aisée et répondant davantage aux besoins des autorités communales lors de l’exécution du PAG », à savoir que le terrain en cause soit viabilisé, permettant aux communes « une plus grande flexibilité […] lors du classement de terrains en zone urbanisée pour lesquels un plan d’aménagement particulier « quartier existant » est à élaborer [ alors que la version de l’article 25 de la loi du 19 juillet 2004 en vigueur avant la loi du 3 mars 2017 disposait] que seuls les terrains ou ensembles de terrains dont au moins la moitié des parcelles [était] construite et qui [étaient] viabilisés [pouvaient] être considérés comme zone urbanisée ». Cette première condition menait « constamment à une certaine insécurité juridique étant donné que des critères clairs et précis [faisaient] défaut pour déterminer si un terrain [était] construit ou non et pour quantifier les parcelles d’ores et déjà construites ». S’il est vrai que le seul critère pour déterminer si une parcelle est classée dans une zone soumise à l’élaboration d’un PAP QE est dorénavant la viabilisation de la parcelle, il n’en reste pas moins que la possibilité pour une commune d’identifier des zones soumises à l’élaboration d’un PAP QE ne fait du sens que dans des zones qui sont d’ores et déjà urbanisées contenant les éléments énumérés à l’article 23 de la loi du 19 juillet 200414.

Il s’ensuit encore que la décision de définir des zones soumises à l’obligation d’élaborer un PAP QE relève d’un pouvoir discrétionnaire du conseil communal dans la mesure où les communes disposent de la faculté mais non pas de l’obligation de définir de telles zones dans leur PAG, conformément à l’article 25 de la loi du 19 juillet 2004. Ainsi, même en présence d’un terrain entièrement viabilisé, l’autorité communale n’est pas obligée de le soumettre à un PAP QE, mais conserve le droit de privilégier un classement en zone soumise à un PAP NQ sous réserve que ce choix ne soit pas affecté par une erreur d’appréciation.

12 Avis du Conseil d’Etat n° 49.260 du 7 juin 2011 sur le projet de règlement grand-ducal concernant le contenu du plan d’aménagement particulier «quartier existant» et du plan d’aménagement particulier «nouveau quartier» portant exécution du plan d’aménagement général d’une commune.

13 Doc. Parl. 6704-13, rapport de la commission de la Fonction publique et de la Réforme administrative, page 19.

14 Trib. adm., 25 mai 2020, n° 40556 du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.La désignation relève donc d’un choix d’opportunité politique qu’il n’appartient pas au tribunal de vérifier sauf s’il apparaît que ce faisant, l’autorité a dépassé sa marge d’appréciation.

L’analyse du tribunal s’effectuera dès lors dans ce contexte15.

Or, en l’espèce, il n’apparaît pas, à la lumière des éléments soumis au tribunal que le classement d’une partie de la parcelle de la société demanderesse en zone soumise à un PAP NQ, tel que décidé par le conseil communal et approuvé par le ministre de l’Intérieur, serait entaché d’une erreur d’appréciation.

En effet, tel que relevé ci-avant, il est constant en cause que déjà avant la refonte du PAG, la parcelle litigieuse était soumise à deux classements distincts et que la partie de la parcelle qui a été soumise à un PAP NQ était préalablement à la refonte du PAG classée en zone de verdure, donc non-constructible, qu’elle n’a jusqu’à présent jamais accueilli de construction et qu’une seule petite partie au nord de la parcelle en cause comporte un accès à la route. Il n’est dès lors pas établi que la partie litigieuse de la parcelle puisse être considérée comme étant viabilisée au sens de l’article 23 de la loi du 19 juillet 2004, précité.

Au-delà de ce constat, il se dégage des éléments du dossier, ainsi que des explications des autorités communale et étatique, que la raison pour laquelle la partie non-construite de la parcelle litigieuse, d’une contenance non négligeable de 0,9 hectare, a été soumise à un PAP NQ réside dans le fait qu’elle présente une forme particulière, en ce qu’elle se démarque par l’existence d’une partie étroite donnant sur la seule voie publique d’accès, à savoir la rue …, ainsi que par sa très grande profondeur et une largeur qui s’accroît au fur et à mesure de la profondeur du terrain et enfin par le fait qu’elle est prise en étau entre l’autoroute … et les commerces existants dans la zone d’activités dans laquelle elle se trouve.

Au vu de la configuration particulière de la partie de la parcelle en cause, de même qu’en considération du fait que la partie de la parcelle initialement urbanisée et déjà classée sous l’ancien PAG en zone constructible a été soumise à un PAP QE, le choix communal, tel qu’approuvé par le ministre, de soumettre la partie vierge de la parcelle litigieuse, nouvellement classée en zone constructible, à la réalisation d’un PAP NQ n’encourt aucune critique et doit, par ailleurs, être considéré comme s’inscrivant dans un objectif d’intérêt général, à savoir une utilisation rationnelle du sol, ainsi qu’un développement harmonieux et cohérent de la zone d’activités au sens de l’article 2 a) et b) de la loi du 19 juillet 2004. En effet, l’instrument urbanistique qu’est le PAP NQ permet, contrairement au PAP QE - qui définit d’ores et déjà les règles d’intégration des constructions et aménagements en fonction des caractéristiques du tissu bâti existant et dont le bourgmestre doit tenir compte lorsqu’il est saisi d’une autorisation en vue de l’élaboration d’un projet de construction -, une plus grande flexibilité pour développer en profondeur sur la partie litigieuse du terrain un projet d’aménagement qui devra tenir compte des contraintes liées à la particularité du site et notamment assurer l’accès à la route à certaines parties de la parcelle actuellement dépourvues d’un tel accès.

Le constat qui précède n’est pas ébranlé par l’affirmation non autrement sous-tendue de la société demanderesse suivant laquelle le classement d’une partie de sa parcelle en zone soumise à un PAP NQ serait « grandement contraignant », respectivement que les prescriptions urbanistiques applicables à la zone PAP QE et celles applicables à la zone PAP NQ ne seraient pas conciliables en vue d’élaborer un projet harmonieux allant dans le sens d’une utilisation rationnelle du sol.

15 Idem.

Pour ce qui est de l’affirmation de la société demanderesse suivant laquelle le schéma directeur ne prévoirait qu’une seule grande zone destinée à l’artisanat, tandis que la « zone spéciale « … » [SPEC-F] », telle que définie dans le cadre du PAG, permettrait des affectations plus diversifiées, il y a lieu de relever que la partie écrite du schéma directeur précise sous l’intitulé « Typologien und Funktionsmischung » ce qui suit : « Auf der Fläche sollen wirtschaftliche Aktivitäten angesiedelt werden. Dabei geht es vor allem um Betriebe aus den Bereichen Leichtindustrie, Handwerk, Groβhandel und Transport- und Logistikdienstleistung, entsprechend der Definition der Zone SPEC-F in der Partie écrite des PAG. ».

Or, outre le fait qu’il est de jurisprudence constante que le schéma directeur n’est qu’un simple instrument d’orientation dépourvu d’effet juridique direct16, de sorte à ne pas restreindre les affectations admissibles définies pour la zone en cause par le PAG, il se dégage encore clairement de la partie écrite du schéma directeur que les activités pouvant être mises en place dans le futur PAP NQ seront identiques à celles reprises dans la « zone spéciale « … » [SPEC-

F] » du PAG, de sorte que les contestations afférentes de la société demanderesse en ce qu’elles reposent sur la prémisse erronée que, du point de vue des affectations possibles, la soumission d’une partie de sa parcelle à un PAP NQ impliquerait qu’une seule et même parcelle serait soumise à des prescriptions différentes en termes d’affectation, sont à rejeter pour manquer de fondement. A cela s’ajoute que, conformément à l’article 29, paragraphe (2) de la loi du 19 juillet 200417, le fait que le schéma directeur ne prévoit pas expressément différents lots n’empêchera pas le futur PAP NQ d’en prévoir si cela s’avère nécessaire pour améliorer la qualité urbanistique.

Compte tenu de ce qui précède, le moyen tenant à une violation par les autorités communale et étatique des articles 25 et 2 de la loi du 19 juillet 2004 encourt le rejet pour manquer de fondement.

(ii) Quant au moyen tenant à une absence de motivation suffisante « du reclassement projeté » Arguments des parties A l’appui de ce moyen, la société demanderesse critique le fait que ni le conseil communal, ni le ministre de l’Intérieur n’auraient motivé à suffisance les considérations tenant à l’intérêt général qui justifient « le reclassement projeté », tout en contestant, par ailleurs, qu’il puisse être affirmé, tel que le ferait l’autorité ministérielle, que la forme allongée de sa parcelle justifie la soumission d’une partie de celle-ci à un PAP NQ. En effet, selon la société demanderesse, il aurait été tout à fait possible de développer le terrain concerné en profondeur et de manière cohérente tout en le soumettant à un PAP QE. Elle renvoie, à cet égard, aux dispositions de l’article 6.3.1. de la partie écrite du PAP QE qui définit la profondeur maximale des bâtiments dans la « zone spéciale « … » [SPEC-F] » pour soutenir qu’il n’existerait pas de dispositions relatives à la bande de construction ou à la profondeur maximale venant bloquer la réalisation d’un projet sur cette partie de sa parcelle, tout en relevant que l’article 6.2. de la 16 Trib. adm., 15 avril 2020, n° 42071 du rôle, c. par Cour adm., 44457C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Urbanisme, n° 36 et les autres références y citées.

17 « Le schéma directeur peut être adapté ou modifié par le plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » à condition qu’une telle modification ou adaptation s’avère indispensable pour réaliser le plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », respectivement pour en améliorer la qualité urbanistique, ainsi que la qualité d’intégration paysagère. ».partie écrite du PAP QE permettrait dans cette même zone la réalisation de plusieurs constructions sur une même parcelle, de même que des constructions en seconde position.

Les parties défenderesses concluent, quant à elles, au rejet de ce moyen pour ne pas être fondé.

Analyse du tribunal De l’entendement du tribunal, à travers le moyen sous analyse la société demanderesse vise non pas à reprocher aux décisions déférées une absence de motivation d’un point de vue formel, mais à critiquer la justification avancée par les autorités communale et étatique à la base de leurs décisions en ce qu’elle ne permettrait pas de comprendre à suffisance les raisons pour lesquelles la soumission d’une partie de sa parcelle à un PAP NQ serait conforme à l’intérêt général.

Dans la mesure où le tribunal vient de rejeter pour ne pas être fondé le moyen tenant à la violation alléguée des articles 25 et 2 de la loi du 19 juillet 2004 au motif que le choix communal, tel qu’approuvé par le ministre, de soumettre la partie vierge de la parcelle litigieuse, nouvellement classée en zone constructible, à la réalisation d’un PAP NQ doit s’analyser comme s’inscrivant dans un but d’intérêt général, à savoir une utilisation rationnelle du sol, ainsi qu’un développement harmonieux et cohérent de la zone d’activités dans laquelle elle se trouve, le moyen de la société demanderesse visant à contester l’absence de justification suffisante d’un but d’intérêt général à « reclasser » la partie litigieuse de sa parcelle en zone soumise à un PAP NQ est à rejeter pour ne pas être fondé.

4.3. Quant à la violation alléguée de l’article 8 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu de l’étude préparatoire d’un projet d’aménagement général Arguments des parties Après avoir cité les dispositions de l’article 8 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu de l’étude préparatoire d’un projet d’aménagement général, la société demanderesse critique le fait qu’en l’espèce, la partie graphique du schéma directeur serait à tel point lacunaire que les concepts repris audit article 8 ne seraient même pas identifiables. De ce fait, les décisions déférées seraient à annuler.

Les parties défenderesses concluent, quant à elles, au rejet de ce moyen pour ne pas être fondé.

Analyse du tribunal Aux termes de l’article 8 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, prévisé, :

« (1) Le schéma directeur reprend au moins les éléments suivants :

1. l’identification de l’enjeu urbanistique et les lignes directrices majeures ;

2. un concept de développement urbain ;

3. un concept de mobilité et d’infrastructures techniques ;

4. un concept paysager et écologique ;

5. un concept de mise en œuvre.

18 (2) Le schéma directeur couvrant une zone d’aménagement différé comporte au moins un concept de mobilité et d’infrastructures techniques sommaires. ».

Il y a lieu de relever que le schéma directeur se compose d’une partie écrite et d’une partie graphique.

L’article 8 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, précité, n’impose, quant à lui, nulle part que la partie graphique reprenne les éléments y mentionnés, mais uniquement que « le schéma directeur » les reprenne. Or, il se dégage de la partie écrite du schéma directeur que les concepts de développement urbain, de mobilité et d’infrastructures techniques, de même que le concept paysager et écologique, ainsi que le concept de mise en œuvre y sont repris aux chapitres 2, 3, 4 et 5.

Le moyen tenant à la violation alléguée de l’article 8 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 est dès lors à rejeter pour ne pas être fondé.

4.4. Quant à la violation alléguée du principe de confiance légitime Arguments des parties A l’appui de ce moyen, la société demanderesse fait valoir que la commune lui aurait délivré en date du 14 avril 2017 une autorisation pour la démolition d’un immeuble existant et la construction d’un bâtiment commercial laquelle aurait été renouvelée à deux reprises avant d’avoir expiré le 11 juillet 2020. Elle ajoute que les travaux auraient commencé le 9 mars 2020 mais qu’ils se seraient arrêtés le 20 mars 2020 avec le début de l’état de crise sanitaire sans avoir été repris par la suite. Comme la commune aurait été d’accord avec son projet et qu’en raison des nouvelles prescriptions urbanistiques lui imposées, ce projet tomberait à l’eau, la société demanderesse reproche à l’autorité communale un changement d’attitude non justifié et contraire au principe général du droit à la confiance légitime.

Les parties défenderesses concluent, quant à elles, au rejet de ce moyen pour ne pas être fondé.

Analyse du tribunal Le tribunal relève tout d’abord que la société demanderesse n’a pas communiqué les plans faisant partie intégrante de l’autorisation de construire dont elle se prévaut de sorte qu’il lui est impossible de savoir à quel endroit précisément il était prévu de réaliser le projet de construction autorisé. Il n’en reste pas moins qu’il se dégage des explications non autrement énervées de l’autorité communale que le projet autorisé dont se prévaut la société demanderesse concernait la partie de sa parcelle précédemment classée en zone industrielle communale et actuellement classée en « zone spéciale « … » [SPEC-F] » et soumise à un PAP QE, mais non pas la partie de sa parcelle anciennement classée en zone de verdure et donc non constructible.

Or, dans la mesure où les décisions déférées n’ont aucunement modifié la situation urbanistique de la partie de la parcelle ayant constitué l’assiette de l’autorisation de construire mise en avant, et à défaut d’explication circonstanciée de nature à établir le moindre lien causal entre l’abandon par la société demanderesse de son projet de construction sur la partie de sa parcelle précédemment d’ores et déjà classée en zone constructible et le choix communal desoumettre l’autre partie de sa parcelle à un PAP NQ, le moyen tenant à une prétendue violation, par l’autorité communale, du principe de la confiance légitime est à rejeter pour être dénué de fondement.

4.5. Quant aux contestations ayant trait au CUS Arguments des parties A l’appui de ce moyen invoqué, de l’entendement du tribunal, à titre subsidiaire par la société demanderesse pour le cas où le classement d’une partie de sa parcelle en zone soumise à l’élaboration d’un PAP NQ était maintenu, celle-ci affirme être d’avis que, pour ce qui est de la partie de sa parcelle soumise à un PAP NQ, un CUS de 1,8 serait plus cohérent que celui de 1,5 retenu dans le schéma directeur. Elle ajoute qu’en affirmant dans sa décision que le taux de 1,5 serait certes actuellement cohérent mais pourrait éventuellement être augmenté suivant le projet concret qui sera présenté par la suite, le ministre de l’Intérieur serait lui-même en aveu qu’un coefficient de 1,8 serait plus cohérent. Cette indication du ministre ne lui offrirait, par ailleurs, aucune garantie quant à la prévision d’un coefficient plus élevé.

Les parties défenderesses concluent, quant à elles, au rejet de ce moyen pour ne pas être fondé.

Analyse du tribunal Le tribunal se doit de relever qu’outre le fait que la société demanderesse reste en défaut d’expliquer dans quelle mesure la fixation d’un CUS de 1,5 serait contraire à une disposition légale ou réglementaire spécifique, l’article 29, paragraphe (2) de la loi du 19 juillet 2004 prévoit expressément que le schéma directeur qui oriente le PAP NQ « peut être adapté ou modifié par le plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » à condition qu’une telle modification ou adaptation s’avère indispensable pour réaliser le plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », respectivement pour en améliorer la qualité urbanistique, ainsi que la qualité d’intégration paysagère ». Or, dans la mesure où il est constant en cause qu’à l’heure actuelle, il n’existe pas encore de projet de PAP NQ visant la partie de la parcelle litigieuse, l’affirmation suivant laquelle le CUS de 1,5 serait incohérent est non seulement prématurée, mais elle reste également à l’état de pure allégation pour n’être sous-tendue par aucun élément tangible.

Le moyen afférent est dès lors également à rejeter pour ne pas être fondé.

5. Quant à la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure La société demanderesse sollicite la condamnation de l’Etat, ainsi que de l’administration communale à lui payer une indemnité de procédure d’un montant de 3.000 euros en application de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999 aux termes duquel « Lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le juge peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine ». Au vu de l’issue du litige, cette demande encourt toutefois le rejet.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours irrecevable en ce qu’il est dirigé contre la décision du conseil communal de Mondercange du 30 octobre 2020 portant adoption du projet d’aménagement particulier « quartier existant » de la commune de Mondercange ;

reçoit, pour le surplus, le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure formulée par la société demanderesse ;

condamne la société demanderesse aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé par :

Alexandra Castegnaro, vice-président, Annemarie Theis, premier juge, Caroline Weyland, juge, et lu à l’audience publique du 18 décembre 2023 par le vice-président, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 18 décembre 2023 Le greffier du tribunal administratif 21


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 46489
Date de la décision : 18/12/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 13/01/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-12-18;46489 ?

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