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07/07/2015 | MONACO | N°13817

Monaco | Cour d'appel, 7 juillet 2015, J-H. CR. c/ F. RI.


Motifs

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 7 JUILLET 2015

En la cause de :

- Monsieur j-h. CR., né le 5 mai 1960 à Nice, (Alpes-Maritimes), de nationalité française, expert-comptable, domicilié de droit X à Monaco, et demeurant actuellement X à Monaco ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANT,

d'une part,

contre :

1 - Madame f. RI., née le 9 avril 1958 à Nîmes (Gard), de nationalité française, sans profession,

demeurant et domiciliée X à Monaco ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près l...

Motifs

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 7 JUILLET 2015

En la cause de :

- Monsieur j-h. CR., né le 5 mai 1960 à Nice, (Alpes-Maritimes), de nationalité française, expert-comptable, domicilié de droit X à Monaco, et demeurant actuellement X à Monaco ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANT,

d'une part,

contre :

1 - Madame f. RI., née le 9 avril 1958 à Nîmes (Gard), de nationalité française, sans profession, demeurant et domiciliée X à Monaco ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

INTIMÉE,

2 - Monsieur f. TA., expert-comptable, demeurant en cette qualité X à Gattières, (06610) La Gaude ;

INTIMÉ, DÉFAILLANT,

d'autre part,

LA COUR,

Vu l'Ordonnance rendue par le Juge chargé du contrôle de l'expertise, le 11 décembre 2014 (R.1928) ;

Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, en date du 9 janvier 2015 (enrôlé sous le numéro 2015/000089) ;

Vu les conclusions déposées les 24 mars et 2 juin 2015 par Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, au nom de f. RI. ;

Vu les conclusions déposées le 5 mai 2015 par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de j-h. CR. ;

À l'audience du 16 juin 2015, Ouï les conseils des parties en leurs plaidoiries ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La Cour statue sur l'appel relevé par Monsieur j-h. CR. à l'encontre de l'Ordonnance du Juge chargé du contrôle de l'expertise du 11 décembre 2014.

Considérant les faits suivants

Le 16 octobre 2013, Monsieur j-h. CR. a déposé une requête en divorce à l'encontre de Madame f. RI.

Par ordonnance en date du 3 décembre 2013, le juge conciliateur a, notamment, condamné Monsieur CR. à payer à Madame RI. la somme de 1.500 euros à titre de pension alimentaire, ordonné une mesure d'expertise comptable, désigné à cet effet, Monsieur F. T., expert près la Cour d'appel d'Aix en Provence, avec, notamment, pour mission de consulter tous documents utiles, se faire remettre tous relevés de compte bancaire, personnel ou professionnel des époux, ainsi que tout document comptable permettant de dresser un inventaire estimatif du patrimoine de chacun des époux, et chargé Madame p. HO. du contrôle de cette expertise.

Madame RI. a relevé appel de cette ordonnance en vue de la voir réformer uniquement en ses dispositions relatives au montant de la pension alimentaire à laquelle a été condamné Monsieur CR.

Monsieur CR. a relevé appel incident, sollicitant la réformation partielle de l'ordonnance en ce qu'elle a ordonné une mesure d'expertise comptable.

Par arrêt en date du 29 septembre 2014, la Cour d'appel a confirmé l'ordonnance querellée en toutes ses dispositions appelées.

Par courrier en date du 7 juillet 2014, l'expert judiciaire a saisi le Juge chargé du contrôle de l'expertise d'une difficulté liée à la non-communication de certaines pièces.

Après avoir convoqué et réuni les parties et l'expert, le Juge chargé du contrôle de l'expertise a rendu, le 9 octobre 2014, une ordonnance constatant que la mesure d'expertise s'étendait aux revenus de chaque époux et prescrivant la production, par les parties, de tout justificatif de leurs intérêts dans toutes sociétés ainsi que des bilans des sociétés dans lesquelles les époux avaient des intérêts.

Par dire en date du 11 novembre 2014, Monsieur CR. a fait parvenir à l'expert une attestation du résultat net, le fonds social pour les trois derniers exercices, ainsi que le pourcentage d'actions détenu par lui.

Par courrier en date du 24 novembre 2014, l'expert judiciaire a saisi le Juge chargé du contrôle de l'expertise d'une nouvelle difficulté liée à l'absence de communication, par Monsieur CR., des bilans de la SAM D.C.A. pour les exercices 2011, 2012 et 2013, du grand livre détaillé pour l'année 2013, de la copie du registre des actionnaires de la SAM D.C.A. et de la répartition actuelle du capital de la SAM D.C.A.

Le Juge chargé du contrôle de l'expertise a convoqué les parties et l'expert à l'audience du 3 décembre 2014.

Madame RI. n'a pas comparu.

Entendu, Monsieur CR. a fait valoir que le Juge chargé du contrôle de l'expertise n'était pas compétent pour prononcer une astreinte en l'absence de tout texte lui conférant ce pouvoir et que, pour des raisons liées au secret professionnel, il ne pouvait pas produire le grand livre de la SAM D.C.A. et proposait de communiquer les bilans et les comptes de résultat simplifiés pour les exercices 2011, 2012 et 2013.

Monsieur CR. a produit ces pièces en cours de délibéré, ainsi qu'une note.

Madame RI. déposait également une note en délibéré.

Par ordonnance en date du 11 décembre 2014, le Juge chargé du contrôle de l'expertise a statué ainsi qu'il suit :

« Vu l'insuffisante communication des pièces réclamées par l'expert,

* ordonne la communication par M. j-h. CR. des pièces ci-après, sous astreinte provisoire de 200 euros par jour de retard, passé le délai de huit jours à compter de la notification de la présente décision par le Greffe, et ce pendant un délai de deux mois après lequel il y sera à nouveau fait droit :

* les bilans détaillés de la SAM D.C.A relatifs aux années 2011, 2012 et 2013,

* le grand livre détaillé 2013 de la même société,

* la répartition actuelle du capital de la même société ».

Pour statuer ainsi, le Juge chargé par le Tribunal du contrôle de l'expertise retenait qu'il lui appartenait de trancher les difficultés d'exécution, et qu'il pouvait, au titre de la délégation, prononcer une astreinte, à l'inverse du Juge des référés, qui n'était pas délégué par le Tribunal et ne pouvait assortir sa décision d'une astreinte que parce qu'un texte l'avait expressément prévu.

Par exploit d'appel et assignation délivré le 9 janvier 2015, Monsieur j-h. CR. a relevé appel de cette décision.

Aux termes de cet exploit et des conclusions qu'il a déposées le 5 mai 2015, il demande à la Cour de :

« - recevoir Monsieur CR. en son appel et l'y déclarer bien fondé, par conséquent

* annuler l'ordonnance du 11 décembre 2014,

Subsidiairement

* réformer l'ordonnance du 11 décembre 2014,

* dire n'y avoir lieu d'ordonner à Monsieur j-h. CR. la communication des bilans détaillés de la SAM DCA relatifs aux années 2011, 2012 et 2013 et du grand livre détaillé 2013 de la SAM DCA,

* condamner tout contestant aux entiers dépens d'appel distraits au profit de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, sous sa due affirmation ».

Aux termes de ses conclusions du 5 mai 2015, Monsieur j-h. CR. demande en outre, au visa de l'article 6 § 1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, de déclarer recevable l'appel réformation et de débouter Madame RI. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

L'appelant conclut à l'annulation de l'ordonnance pour excès de pouvoir au motif que le Juge chargé du contrôle des expertises n'a pas le pouvoir d'ordonner des astreintes, encore moins d'office, qu'il n'existe, en droit monégasque, aucun texte général sur l'astreinte, que le Tribunal, dans la plénitude de ses pouvoirs, peut prononcer une astreinte, sur un fondement purement prétorien, de même que le Juge des référés en application de l'article 421 du Code de procédure civile et s'il est saisi d'une demande en ce sens, que l'article 307 de ce code sur lequel se fonde la décision ne prévoit pas le prononcé d'une astreinte, pas plus que l'article 356 et que le juge unique délégué par le Tribunal ne peut, en l'absence de tout texte prévoyant le contraire, qu'être pourvu de pouvoirs minimaux.

Sollicitant subsidiairement la réformation de l'ordonnance entreprise, Monsieur CR. conclut à la recevabilité de son appel de ce chef, exposant qu'au regard de l'article 6 § 1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, il ne peut être privé de tout recours et fait observer que l'appel d'une ordonnance statuant sur une difficulté en matière d'expertise différé en même temps que l'appel au fond, ne présenterait plus d'intérêt.

Sur le fond, l'appelant souligne que l'expert dispose de tous les éléments nécessaires pour déposer son rapport, que divers documents ont d'ores et déjà été mis à la disposition de l'expert, notamment les comptes annuels de DCA sur trois ans.

Aux termes des conclusions qu'elle a déposées le 24 mars 2015 et le 2 juin 2015, Madame f. RI. demande à la Cour de :

« - débouter Monsieur CR. de son appel nullité,

* déclarer irrecevable la demande de réformation de l'ordonnance du 11 décembre 2014,

* à titre subsidiaire, confirmer l'ordonnance du 11 décembre 2014 en toutes ses dispositions,

* condamner Monsieur CR. aux entiers dépens de première instance et d'appel distraits au profit de Maître Thomas GIACCARDI, sous sa due affirmation de droit ».

Madame RI. fait valoir, sur l'appel nullité, que l'ordonnance querellée n'est pas contraire à la loi.

Elle observe que les articles 307 et 356 du Code de procédure civile délèguent expressément au Juge en charge du contrôle de l'expertise l'ensemble des pouvoirs du juge du fond pour trancher les difficultés d'exécution d'une mesure d'expertise, au lieu et place du Tribunal. Ainsi, sur le fondement de ces dispositions, le Juge chargé du contrôle de l'expertise statue, à juge unique, sur délégation du Tribunal et peut, en vertu de cette délégation, assortir son ordonnance d'une mesure d'astreinte, les pouvoirs du Juge chargé du contrôle de l'expertise étant les mêmes que ceux du Tribunal qui l'a commis.

Elle souligne qu'à l'inverse du Juge des référés dont les pouvoirs sont définis par les articles 414 et 421 du Code de procédure civile, le Tribunal de première instance assortit régulièrement ses décisions d'une astreinte, laquelle, à défaut d'être prévue par la législation, constitue une mesure purement jurisprudentielle, relevant du pouvoir discrétionnaire du juge.

Elle considère que l'astreinte, régulièrement ordonnée par les juridictions monégasques en vue d'assurer une bonne administration de la justice, est destinée à vaincre la résistance de la partie qui refuse de déférer à une injonction et qu'en l'espèce, le Juge chargé du contrôle de l'expertise a, à bon droit, estimé devoir prendre une mesure de contrainte à l'égard de Monsieur CR. qui s'obstine à ne pas déférer aux demandes de l'expert.

Elle estime que le Juge chargé du contrôle des expertises tient de l'article 307 alinéa 3 du Code de procédure civile le pouvoir de se saisir d'office et d'ordonner toute mesure qui considère utiles à l'exécution de la mesure d'instruction dont il a le contrôle.

Elle soulève l'irrecevabilité de la demande subsidiaire de réformation sur le fondement des dispositions édictées par l'article 423 alinéa 1 et 301 du Code de procédure civile, considérant que l'ordonnance querellée, qui a uniquement ordonné la production de pièces sous astreinte, n'a pas tranché le fond, en sorte que l'appel de cette décision ne pourrait être interjeté qu'en même temps que le jugement sur le fond.

Subsidiairement, elle conclut à la confirmation de l'ordonnance entreprise, au motif que Monsieur CR. fait obstacle au bon déroulement de la mesure d'expertise.

Intimé devant la Cour, bien que non partie en première instance, Monsieur T. n'a pas comparu.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.

SUR CE,

Attendu que l'appel ne peut être dirigé que contre ceux qui ont été parties en première instance ;

Qu'au cas d'espèce, Monsieur F. T., expert judiciaire, n'avait pas la qualité de partie en première instance ;

Que dès lors, l'appel dirigé contre lui doit être déclaré irrecevable ;

1 - Attendu que j-h. CR. forme, à titre principal, un appel nullité contre l'ordonnance rendue le 11 décembre 2014 par le Juge chargé du contrôle de l'expertise, dont la recevabilité n'est pas contestée ;

Qu'il fait grief au premier juge d'avoir, en assortissant d'office sa décision d'une astreinte de 200 euros par jour de retard, usé de prérogatives que la loi ne lui confère pas ;

Attendu que l'astreinte est une mesure destinée à assurer l'exécution d'une décision de justice et vise à contraindre le débiteur à l'exécution volontaire de l'obligation mise à sa charge ;

Attendu qu'en droit monégasque, il n'existe aucune disposition légale donnant le pouvoir, aux juges du fond, d'assortir leur décision d'une astreinte ;

Que, par ailleurs, une disposition spéciale existe, contenue à l'article 421 du Code de procédure civile, permettant au Juge des référés, sur demande des parties, d'ordonner une astreinte et de la liquider à titre provisoire ;

Qu'il n'est cependant pas contesté qu'au terme d'une construction prétorienne, les juges du fond disposent du pouvoir de prononcer une astreinte ;

Attendu que les pouvoirs du Juge chargé du contrôle de l'expertise sont définis par les articles 356 et 307 du Code de procédure civile ;

Attendu qu'aux termes de l'article 356 du Code de procédure civile, le Juge chargé du contrôle de l'expertise peut modifier la mission de l'expert ainsi que le délai imparti pour le dépôt du rapport. Il peut, après avoir provoqué ses explications, remplacer l'expert si celui-ci se récuse, ou à la demande des parties, ou d'office ;

Attendu qu'aux termes de l'article 307 du Code de procédure civile, les difficultés auxquelles se heurte l'exécution d'une mesure d'instruction sont réglées par le Tribunal ou par le juge qui y procède ou par celui qui est chargé du contrôle de son exécution ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article 304 du Code de procédure civile, les mesures d'instruction sont exécutées par le Tribunal qui les a ordonnées, sauf lorsqu'il a commis un juge à cet effet ;

Qu'il n'est pas contesté qu'en l'espèce, la mesure d'expertise a été ordonnée par ordonnance du Juge conciliateur, confirmée par un arrêt de cette Cour en date du 29 septembre 2014, qui a, en outre, commis le Juge chargé du contrôle de l'expertise pour veiller à l'exécution de la mesure ;

Qu'il doit, dès lors, être considéré que pour les besoins de l'exécution de la mesure et dans le cadre de la délégation ordonnée par le juge du fond, le Juge chargé du contrôle de l'expertise bénéficie d'une plénitude de compétence, lui permettant, notamment, d'assortir sa décision d'une astreinte, sauf à priver de toute substance la mission qui lui a été assignée par le juge du fond, à rallonger durablement les procédures et à encourager les justiciables à ne pas exécuter les décisions de justice, la Cour observant à ce propos qu'en l'espèce :

* l'ordonnance entreprise est intervenue un an après la décision ayant instauré la mesure d'expertise,

* l'expert judiciaire avait déjà saisi le Juge chargé du contrôle de l'expertise, dès avant l'instance ayant abouti à l'ordonnance querellée ;

Que c'est ainsi que doit être compris l'article 307 du Code de procédure civile susvisé, qui impartit à ce magistrat, lorsqu'il est désigné comme en l'espèce, la mission de trancher les difficultés d'exécution de la mesure d'instruction ;

Attendu, en conséquence, que le pouvoir de prononcer une astreinte, conféré par la jurisprudence au juge du fond, doit être reconnu au juge délégué par lui ;

Mais attendu que le juge ne peut se prononcer que sur ce dont il a été saisi ;

Qu'au cas d'espèce, Monsieur CR. n'est pas démenti lorsqu'il affirme que le Juge chargé du contrôle de l'expertise a, d'office, assorti sa décision d'une astreinte, Madame RI. ne l'ayant pas sollicitée ;

Qu'en effet, Madame RI., n'était ni présente, ni représentée lors de l'audience du 3 décembre 2014 devant le Juge chargé du contrôle de l'expertise et ne conteste pas ne pas avoir formulé de demande d'astreinte dans la note en délibéré qu'elle a fait parvenir à ce magistrat le 10 décembre 2014 ;

Attendu qu'il apparaît que le magistrat a méconnu les termes du litige tels que fixés par les demandes des parties et, qu'il y a lieu, en conséquence, d'annuler les dispositions de l'ordonnance entreprise relatives à l'astreinte ;

2 - Attendu, par ailleurs, qu'il est demandé à la Cour de déclarer irrecevable, sur le fondement des articles 301 et 423 alinéa 1 du Code de procédure civile, l'appel réformation formé à titre subsidiaire par Monsieur j-h. CR. ;

Attendu qu'aux termes de l'article 423 alinéa 1 du Code de procédure civile, les jugements qui tranchent dans leur dispositif une partie du principal et ordonnent une mesure d'instruction ou des mesures provisoires peuvent être immédiatement frappés d'appel comme les jugements qui tranchent tout le principal. Les autres jugements ne peuvent être frappés d'appel en même temps que le jugement au fond ;

Qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que l'ordonnance entreprise ne tranche pas une partie du principal et n'ordonne pas une mesure d'instruction ;

Attendu, par ailleurs, qu'aux termes de l'article 301 du Code de procédure civile, les décisions concernant les mesures d'instruction ne peuvent être frappées d'appel qu'en même temps que le jugement sur le fond, sous réserve de l'article 347 du même code qui ne concerne que la décision qui ordonne l'expertise ;

Attendu qu'en l'espèce, il n'est pas davantage contesté que la décision attaquée, ayant ordonné à une partie, dans le cadre de l'expertise comptable en cours et à la requête de l'expert, de produire divers documents comptables dans le cadre de l'expertise judiciaire, concerne une mesure d'instruction ;

Qu'en outre, l'article 307 du Code de procédure civile, qui définit notamment les pouvoirs du Juge chargé du contrôle de l'expertise statuant sur une difficulté d'exécution d'une mesure d'instruction, renvoie à l'article 301 précité ;

Qu'il s'ensuit, qu'en application des textes précités, l'ordonnance entreprise n'est pas susceptible d'un appel immédiat, le moyen tiré d'une violation de l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme étant inopérant, la Cour relevant que Monsieur CR. n'est pas privé de recours, celui-ci étant seulement différé ;

Attendu, en conséquence, que doit être déclarée irrecevable la demande subsidiaire de j-h. CR. tendant à voir réformer l'ordonnance querellée ;

Attendu qu'en l'état des développements qui précèdent, tenant l'ordonnance du 11 décembre 2014 en ses dispositions non annulées, eu égard à la nécessité d'exécuter de bonne foi les décisions de justice et de concourir à la manifestation de la vérité, la Cour rappelle que la non-exécution de cette décision aura lieu aux risques et péril du débiteur de l'obligation de produire les pièces, ce dont la juridiction du fond sera fondée à tirer toutes conséquences ;

3 - Attendu que la compensation des dépens de première instance et d'appel sera ordonnée.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LA COUR DAPPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

Dit irrecevable l'appel dirigé contre Monsieur F. T.,

Reçoit l'appel nullité formé à titre principal par Monsieur j-h. CR. contre l'ordonnance rendue le 11 décembre 2014 par le Juge chargé du contrôle de l'expertise,

Annule l'ordonnance entreprise, mais uniquement en ses dispositions relatives à l'astreinte,

Déclare irrecevable, en application des articles 301, 307 et 423 du Code de procédure civile, l'appel réformation formé à titre subsidiaire par Monsieur j-h. CR. contre l'ordonnance rendue le 11 décembre 2014 par le Juge chargé du contrôle de l'expertise,

Ordonne la compensation des dépens de première instance et d'appel.

Composition

Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Conseiller, faisant fonction de Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Sylvaine ARFINENGO, Conseiller, Monsieur Eric SENNA, Conseiller, assistés de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles,

Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,

Lecture est donnée à l'audience publique du 7 JUILLET 2015, par Madame Sylvaine ARFINENGO, Conseiller, faisant fonction de Président, assistée de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, en présence de Monsieur Michaël BONNET, Premier Substitut du Procureur Général.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 13817
Date de la décision : 07/07/2015

Analyses

L'astreinte est une mesure destinée à assurer l'exécution d'une décision de justice et vise à contraindre le débiteur à l'exécution volontaire de l'obligation mise à sa charge.En droit monégasque, s'il n'existe aucune disposition légale donnant le pouvoir aux juges du fond, d'assortir leur décision d'une astreinte, il n'est pas contesté qu'aux termes d'une construction prétorienne, les juges du fond disposent du pouvoir de prononcer une astreinte.Aux termes de l'article 307 du Code de procédure civile, les difficultés auxquelles se heurte l'exécution d'une mesure d'instruction sont réglées par le tribunal ou par le juge qui y procède ou par celui qui est chargé du contrôle de son exécution.Aux termes de l'article 304 de ce même code, les mesures d'instruction sont exécutées par le tribunal qui les a ordonnées, sauf lorsqu'il a commis un juge à cet effet.En l'espèce, la mesure d'expertise a été ordonnée par ordonnance du juge conciliateur confirmée par arrêt de la Cour d'appel qui a, en outre, commis le juge chargé du contrôle de l'expertise pour veiller à l'exécution de cette mesure.Il doit, dès lors être considéré que pour les besoins de l'exécution de la mesure d'instruction et dans le cadre de la délégation ordonnée par le juge du fond, le juge chargé du contrôle de l'expertise bénéficie d'une plénitude de compétence, lui permettant notamment, d'assortir sa décision d'une astreinte, sauf à priver de toute subsistance la mission qui lui a été assignée par le juge du fond.Toutefois, le juge ne peut se prononcer que sur ce dont il a été saisi.Or, en l'espèce, il est constant que le juge chargé du contrôle de l'expertise a, d'office, assorti sa décision d'une astreinte laquelle n'a pas été sollicitée par la demanderesse.Il s'ensuit que ce magistrat a méconnu les termes du litige tels que fixés par les parties en sorte qu'il y a lieu en conséquence, d'annuler les dispositions de l'ordonnance entreprise relatives au prononcé de l'astreinte.

Procédure civile.

AstreinteMesure de contrainte accessoire d'une décision judiciaire - Prononcé d'office (non) - Demande d'une partie (oui).


Parties
Demandeurs : J-H. CR.
Défendeurs : F. RI.

Références :

article 307 du Code de procédure civile
articles 301 et 423 alinéa 1 du Code de procédure civile
articles 301, 307 et 423 du Code de procédure civile
articles 414 et 421 du Code de procédure civile
articles 307 et 356 du Code de procédure civile
article 421 du Code de procédure civile
article 304 du Code de procédure civile
article 423 alinéa 1 du Code de procédure civile
article 356 du Code de procédure civile
article 423 alinéa 1 et 301 du Code de procédure civile
article 301 du Code de procédure civile
articles 356 et 307 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;2015-07-07;13817 ?

Source

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