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11/06/2015 | MONACO | N°13328

Monaco | Cour de révision, 11 juin 2015, M. j-f. RO. c/ le Ministère public


Motifs

Pourvoi N° 2015-25

Hors Session pénal

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 11 JUIN 2015

En la cause de :

- M. j-f. RO., né le 27 mai 1962 à MONACO, d'André et de Laurence GA., de nationalité monégasque, X, demeurant X à MONACO ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco ;

DEMANDEUR EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- Le MINISTÈRE PUBLIC,

DÉFENDEUR EN RÉVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors sess

ion et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 489 du Code de procédure pénale ;

VU :

- l'arrêt rendu par la Cour d'appel, stat...

Motifs

Pourvoi N° 2015-25

Hors Session pénal

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 11 JUIN 2015

En la cause de :

- M. j-f. RO., né le 27 mai 1962 à MONACO, d'André et de Laurence GA., de nationalité monégasque, X, demeurant X à MONACO ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco ;

DEMANDEUR EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- Le MINISTÈRE PUBLIC,

DÉFENDEUR EN RÉVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 489 du Code de procédure pénale ;

VU :

- l'arrêt rendu par la Cour d'appel, statuant en matière correctionnelle, le 2 février 2015 ;

- la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 6 février 2015, par Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur, au nom de M. j-f. RO. ;

- le récépissé délivré par la Caisse des Dépôts et Consignations sous le n° 45425, en date du 5 février 2015, attestant du dépôt par Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur, au nom du demandeur, de la somme destinée à assurer le paiement de l'amende éventuelle prévue par la loi ;

- la requête déposée le 20 février 2015 au greffe général, par Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur, au nom de M. j-f. RO., signifiée le même jour ;

- les conclusions du Ministère Public en date du 4 mars 2015, communiquées au requérant le 6 mars 2015 ;

- le mémoire en réponse aux conclusions du Ministère public déposé le 20 mars 2015 au greffe général, par Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur, au nom de M. j-f. RO., signifié le même jour ;

- le certificat de clôture établi le 3 avril 2015, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 28 mai 2015, sur le rapport de Monsieur Roger BEAUVOIS, Premier Président,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à l'occasion d'une campagne électorale précédant le scrutin du 10 février 2013 pour la désignation des membres du Conseil national, M. j-f. RO., alors président de cette assemblée, a, avec la participation d'un collaborateur, fait procéder par la société Opinion Way qui a elle-même sous-traité certaines opérations à une autre société, à un sondage d'opinion auprès de la population monégasque, intitulé « la situation politique à six mois des élections au Conseil National de Monaco » ; qu'à la suite de plaintes émanant d'électeurs monégasques la commission de contrôle des informations nominatives a saisi le Procureur général qui, estimant que l'organisation et la réalisation du sondage étaient de nature à caractériser des infractions à la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 relative à la protection des informations nominatives, a fait procéder à une enquête ; qu'il est ainsi apparu que ce sondage avait été commandé et payé par un intermédiaire agissant sur la demande de la personne associée à M. j-f. RO. et avec des fonds fournis par celle-ci; que l'information ouverte au vu de ces premières investigations a été clôturée par une ordonnance de non-lieu ; que sur appel du Ministère public la Chambre du conseil a renvoyé M. j-f. RO. devant le Tribunal correctionnel qui, par jugement du 8 juillet 2014, l'a condamné à une peine de 2.500 euros d'amende pour infraction ou complicité d'infraction à la loi du 23 décembre 1993 ; que, par arrêt du 2 février 2015, la Cour d'appel, statuant sur appel de M. j-f. RO., a confirmé sa condamnation du chef de mise en œuvre d'informations nominatives sans avoir effectué les formalités préalables prévues par la loi et a infirmé le jugement en retenant la culpabilité du prévenu sur les autres chefs en qualité d'auteur principal et en assortissant du sursis la peine d'amende prononcée en première instance ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches

Attendu que M. j-f. RO. fait grief à l'arrêt de statuer ainsi, en violation des articles 1er, 12, 14, 21, 22 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 modifiée, relative à la protection des informations nominatives, 4, 4-1, 4-2 et 4-3 du Code pénal, du principe d'interprétation stricte de la loi pénale et du principe de légalité des délits et des peines, prévus par l'article 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors, selon le moyen, de première part, « que le principe de légalité des délits et des peines exclut que la qualité d'auteur d'une infraction puisse être déterminée en fonction de » suggestions « du groupe de travail dit de l'article 29 de la directive 95/46/CE, lequel a un » caractère consultatif et indépendant « et ne délivre que des avis ou recommandations ; que la Cour d'appel a violé l'ensemble des textes précités en retenant la responsabilité pénale de M. j-f. RO. des chefs de ces infractions », alors, de deuxième part, « que la qualité de responsable du traitement, au regard de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993, s'entend exclusivement de la personne qui assure la direction matérielle et intellectuelle du traitement ; qu'en désignant M. j-f. RO. comme responsable d'un traitement qu'il n'a ni connu, ni exécuté, la seule qualité de commanditaire d'un sondage étant insuffisante pour le qualifier de responsable d'un traitement, la Cour d'appel a violé les textes visés » ; alors, enfin, « que faute de constater concrètement que par une pétition de principe, l'élément intentionnel des infractions, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs » ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant rappelé que les conseils de M. j-f. RO. qui soutenaient devant elle que seul l'institut de sondage pouvait être désigné comme responsable du traitement, avaient, à l'appui de leurs prétentions, versé aux débats l'avis du groupe 29, dont ils admettaient la transposition en droit monégasque, la Cour d'appel qui s'est référée à cet avis pour en donner sa propre analyse, a retenu la responsabilité de M. j-f. RO. par application de la loi selon l'interprétation qu'elle en a adoptée à bon droit ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant constaté, au vu des éléments de fait qui lui étaient soumis, que M. j-f. RO. avait défini la finalité et les moyens de traitement automatisé d'informations nominatives, qu'il avait décidé de la nature et de la catégorie des données à collecter, déterminé à quoi servirait le traitement et choisi de l'utiliser et qu'en raison des fonctions qu'il occupait il avait parfaitement connaissance des dispositions légales applicables en la cause, la Cour d'appel a exactement retenu qu'il était responsable du traitement et a caractérisé l'élément intentionnel des infractions sans encourir les griefs du moyen ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de statuer comme il l'a fait, en violation des articles 1er et 6 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993, modifiée, relative à la protection des informations nominatives, 4-1, 4-2 et 4-3 du Code pénal, du principe d'interprétation stricte de la loi pénale et du principe de la légalité des délits et des peines, prévus par l'article 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors, selon le moyen, d'une part, « que ne constitue pas traitement automatisé, au regard des articles 1 et 6 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993, la seule transmission fût-ce par voie informatique d'un fichier déjà existant sans aucune opération l'ayant affecté ; que l'obtention d'un fichier ne constitue pas une collecte au regard de ce texte ; qu'en qualifiant de traitement la seule circonstance de l'obtention licite et de la transmission de deux fichiers informatiques, sans y apporter la moindre modification, la Cour d'appel a violé les textes susvisés » et alors d'autre part « qu'en constatant que le seul acte de traitement éventuel, correspondant au croisement de deux fichiers, n'a pu être imputé à quiconque et en condamnant néanmoins M. j-f. RO. de ce chef, la Cour d'appel a violé le principe de la présomption d'innocence et le principe du caractère personnel de la responsabilité pénale » ;

Mais attendu qu'ayant exactement relevé que le traitement s'entend, au sens de la loi, de la collecte d'informations nominatives ainsi que de leur communication par transmission, diffusion ou toute autre forme de mise à disposition et que le traitement était suffisamment caractérisé par l'une quelconque de ces opérations, la Cour d'appel qui, ayant reconnu à juste titre que M. j-f. RO. était responsable du traitement, a constaté que la collecte d'informations nominatives était avérée en l'espèce et que le fichier provenant de la fusion entre l'annuaire téléphonique et la liste électorale avait été transmis par voie informatique à la société de sondage, a légalement justifié sa décision sans violer les dispositions et principes visés au moyen ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen, pris en ses trois branches

Attendu que M. j-f. RO. reproche à l'arrêt de statuer comme il l'a fait violant ainsi les articles 14 et 21-6° de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 modifiée, relative à la protection des informations nominatives, 4-1, 4-2 et 4-3 du Code pénal et le principe d'interprétation stricte de la loi pénale prévu par l'article 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors, selon le moyen, de première part, « que l'obligation d'avertissement contenue à l'article 14 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 ne vise que la personne qui recueille directement les dites informations ; qu'en déclarant coupable M. j-f. RO., dont il est acquis qu'il n'a pu recueillir directement une information, la Cour d'appel a violé ce texte ; » alors, de deuxième part, « que le texte d'incrimination ne vise que la personne ayant recueilli des informations nominatives, et n'impose pas, à peine de sanction pénale, au commanditaire d'un sondage de » s'assurer « que son prestataire est » en mesure de satisfaire aux obligations légales « ; que la Cour d'appel a violé l'article 14 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 » ; alors, de troisième part, « que ne constitue pas une » information nominative «, les opinions de nature politique recueillies par un institut de sondage auprès de personnes dont on efface immédiatement l'identité en affectant la personne sondée d'un seul numéro et en anonymisant ainsi les informations recueillies ; que la Cour d'appel a violé le texte susvisé » ;

Mais attendu qu'ayant relevé par un motif non argué de dénaturation que l'application de l'article 14 de la loi du 23 décembre 1993 au responsable du traitement n'était pas discutée et exactement retenu que ce texte met à la charge de ce responsable une obligation d'information individuelle des personnes concernées par le traitement et, lorsqu'il a recours à un prestataire, le devoir de s'assurer que ce dernier est en mesure de satisfaire aux obligations légales, la Cour d'appel, qui a constaté que les informations recueillies contenaient des données nominatives sans que les personnes interrogées aient eu connaissance des informations prescrites à l'article 14, d'autant que ni le prestataire ni son sous-traitant n'avaient été mis en mesure par M. j-f. RO. de s'acquitter de l'obligation d'avertir les personnes concernées de l'identité du responsable du traitement, a déclaré à bon droit celui-ci coupable de l'infraction prévue à l'article 14 de la loi ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen, pris en ses trois branches

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de statuer comme il l'a fait, en violation des articles 11 et 22 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 modifiée, relative à la protection des informations nominatives, 4-1, 4-2 et 4-3 du Code pénal ainsi que du principe d'interprétation stricte de la loi pénale prévu par l'article 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors, selon le moyen, de première part, « que ne constitue pas la collecte d'informations nominatives sensibles au sens de l'article 12 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993, le fait de collecter, en vue d'un sondage politique, l'opinion politique d'une personne et d'en anonymiser immédiatement le résultat, avant de transmettre au commanditaire du sondage l'information anonyme et non nominative, qu'en déclarant M. j-f. RO. coupable de cette infraction, la Cour d'appel a violé ce texte » ; alors, de deuxième part, « qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'information collectée dans un fichier nominatif a été le fait du sous-traitant et transmis anonymement à l'institut de sondage ; qu'en imputant la responsabilité à M. j-f. RO., qui n'a pas été l'auteur de cette collecte, et à qui n'a été remis qu'un résultat anonymisé, la Cour d'appel a violé l'article 12 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 » ; alors, enfin, « que M. j-f. RO. n'ayant ni collecté, ni fait collecter des informations nominatives à caractère sensible, la Cour d'appel, qui l'a déclaré coupable de l'infraction visée à l'article 12 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993, a violé ce texte » ;

Mais attendu qu'ayant constaté que lors du sondage incriminé les personnes ont été interrogées sur leurs intentions de vote aux prochaines élections au Conseil national et invitées à exprimer leur choix entre trois listes de candidats, que la société sous-traitante avait conservé un fichier permettant d'identifier nominativement les réponses des sondés, que ce fichier, dont il n'est pas mentionné dans l'arrêt qu'il avait été préalablement anonymisé, avait été transmis au prestataire à la demande de celui-ci et qu'il n'était pas justifié du consentement écrit et exprès des personnes interrogées, la Cour d'appel a déclaré à bon droit M. j-f. RO., en sa qualité de coresponsable du traitement, coupable de l'infraction prévue à l'article 12, lequel vise ceux qui mettent en œuvre des traitements faisant apparaître directement ou indirectement des opinions ou des appartenances politiques ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le cinquième moyen, pris en ses trois branches

Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt de statuer ainsi qu'il l'a fait, en violation des articles 22-2° de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993, modifiée, relative à la protection des informations nominatives, 4-1, 4-2 et 4-3 du Code pénal ainsi que du principe d'interprétation stricte de la loi pénale prévu par l'article 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors, selon le moyen, de première part, « qu'en vertu du principe non bis in idem, ne peut constituer le recours à un procédé déloyal, au regard de l'article 22-2 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993, la circonstance réprimée de façon autonome de la violation des articles 6 et 14 de la loi n° 1165 du 23 décembre 1993 ; qu'en retenant la culpabilité de M. j-f. RO. au regard de ces deux infractions la Cour d'appel a violé le principe visé » ; alors, de deuxième part, « que ne constitue ni » une dissimulation d'identité «, ni un procédé déloyal, ou illicite, le fait de faire commander un sondage électoral par une tierce personne ; qu'en déclarant M. j-f. RO. coupable de l'infraction visée à l'article 22-2 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993, la Cour d'appel a violé ce texte » ; alors, enfin, « qu'en toute hypothèse, ne peut être considéré comme déloyal au vu de l'article 22-2 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993, le moyen dont il ne serait pas expressément constaté qu'il a influé sur le recueil d'informations, et sur la réponse de la personne intéressée ; qu'en retenant cette qualification, la Cour d'appel a violé le texte susvisé » ;

Mais attendu, d'une part, qu'en appliquant les qualifications de mise en œuvre d'un traitement d'informations nominatives sans avoir effectué les formalités préalables, de recueil de ces informations sans avertir les personnes concernées de l'identité du responsable du traitement et de collecte d'informations en employant un moyen déloyal, qui ne présentent entre elles aucune incompatibilité et qui sont susceptibles d'être appliquées concurremment, l'arrêt attaqué n'encourt pas le grief allégué dans le moyen ;

Attendu, d'autre part, que la Cour d'appel qui a constaté que M. j-f. RO. avait sciemment dissimulé son identité, dont elle a pu déduire que cette dissimulation constituait un procédé déloyal et qui a relevé que l'article 22-2 de la loi du 23 décembre 1993 réprimait ceux qui collectent ou font collecter des informations nominatives en employant un tel procédé, a exactement fait application de ce texte qui ne pose aucune condition quant aux conséquences de l'utilisation du moyen incriminé ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur l'amende prévue à l'article 502 du Code de procédure pénale

Attendu que la condamnation systématique à une amende de la partie qui succombe dans son pourvoi sanctionnant de fait, même indirectement, l'exercice du pourvoi en révision ne s'accorde pas avec les exigences de l'article 35, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu toutefois qu'eu égard aux circonstances de la cause énoncées ci-dessus il y a lieu de prononcer une condamnation au paiement d'une amende ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi ;

Condamne M. j-f. RO. à l'amende et aux dépens.

Composition

Ainsi délibéré et jugé le onze juin deux mille quinze, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Messieurs Roger BEAUVOIS, Premier-Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, rapporteur, François-Xavier LUCAS, Guy JOLY et François CACHELOT, Conseillers.

Et Monsieur Roger BEAUVOIS, Premier-Président, a signé avec Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, le Premier Président

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 13328
Date de la décision : 11/06/2015

Analyses

M. j-f. RO. fait grief à l'arrêt de statuer en violation des articles 1er, 12, 14, 21, 22 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 modifiée, relative à la protection des informations nominatives, 4, 4-1, 4-2 et 4-3 du Code pénal, du principe d'interprétation stricte de la loi pénale et du principe de légalité des délits et des peines, prévus par l'article 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors « que le principe de légalité des délits et des peines exclut que la qualité d'auteur d'une infraction puisse être déterminée en fonction de » suggestions « du groupe de travail dit de l'article 29 de la directive 95/46/CE, lequel a un » caractère consultatif et indépendant « et ne délivre que des avis ou recommandations ; que la Cour d'appel a violé l'ensemble des textes précités en retenant la responsabilité pénale de M. j-f. RO. des chefs de ces infractions », alors, de deuxième part, « que la qualité de responsable du traitement, au regard de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993, s'entend exclusivement de la personne qui assure la direction matérielle et intellectuelle du traitement ; qu'en désignant M. j-f. RO. comme responsable d'un traitement qu'il n'a ni connu, ni exécuté, la seule qualité de commanditaire d'un sondage étant insuffisante pour le qualifier de responsable d'un traitement, la Cour d'appel a violé les textes visés » ; alors, enfin, « que faute de constater concrètement que par une pétition de principe, l'élément intentionnel des infractions, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs » ;Mais ayant rappelé que les conseils de M. j-f. RO. qui soutenaient devant elle que seul l'institut de sondage pouvait être désigné comme responsable du traitement, avaient, à l'appui de leurs prétentions, versé aux débats l'avis du groupe 29, dont ils admettaient la transposition en droit monégasque, la Cour d'appel qui s'est référée à cet avis pour en donner sa propre analyse, a retenu la responsabilité de M. j-f. RO. par application de la loi selon l'interprétation qu'elle en a adoptée à bon droit ;Ayant constaté, au vu des éléments de fait qui lui étaient soumis, que M. j-f. RO. avait défini la finalité et les moyens de traitement automatisé d'informations nominatives, qu'il avait décidé de la nature et de la catégorie des données à collecter, déterminé à quoi servirait le traitement et choisi de l'utiliser et qu'en raison des fonctions qu'il occupait il avait parfaitement connaissance des dispositions légales applicables en la cause, la Cour d'appel a exactement retenu qu'il était responsable du traitement et a caractérisé l'élément intentionnel des infractions sans encourir les griefs du moyen. Ayant exactement relevé que le traitement s'entend, au sens de la loi, de la collecte d'informations nominatives ainsi que de leur communication par transmission, diffusion ou toute autre forme de mise à disposition et que le traitement était suffisamment caractérisé par l'une quelconque de ces opérations, la Cour d'appel qui, ayant reconnu à juste titre que M. j-f. RO. était responsable du traitement, a constaté que la collecte d'informations nominatives était avérée en l'espèce et que le fichier provenant de la fusion entre l'annuaire téléphonique et la liste électorale avait été transmis par voie informatique à la société de sondage, a légalement justifié sa décision.Ayant relevé par un motif non argué de dénaturation que l'application de l'article 14 de la loi du 23 décembre 1993 au responsable du traitement n'était pas discutée et exactement retenu que ce texte met à la charge de ce responsable une obligation d'information individuelle des personnes concernées par le traitement et, lorsqu'il a recours à un prestataire, le devoir de s'assurer que ce dernier est en mesure de satisfaire aux obligations légales, la Cour d'appel, qui a constaté que les informations recueillies contenaient des données nominatives sans que les personnes interrogées aient eu connaissance des informations prescrites à l'article 14, d'autant que ni le prestataire ni son sous-traitant n'avaient été mis en mesure par M. j-f. RO. de s'acquitter de l'obligation d'avertir les personnes concernées de l'identité du responsable du traitement, a déclaré à bon droit celui-ci coupable de l'infraction prévue à l'article 14 de la loi.Ayant constaté que lors du sondage incriminé les personnes ont été interrogées sur leurs intentions de vote aux prochaines élections au Conseil national et invitées à exprimer leur choix entre trois listes de candidats, que la société sous-traitante avait conservé un fichier permettant d'identifier nominativement les réponses des sondés, que ce fichier, dont il n'est pas mentionné dans l'arrêt qu'il avait été préalablement anonymisé, avait été transmis au prestataire à la demande de celui-ci et qu'il n'était pas justifié du consentement écrit et exprès des personnes interrogées, la Cour d'appel a déclaré à bon droit M. j-f. RO., en sa qualité de coresponsable du traitement, coupable de l'infraction prévue à l'article 12, lequel vise ceux qui mettent en œuvre des traitements faisant apparaître directement ou indirectement des opinions ou des appartenances politiques.En appliquant les qualifications de mise en œuvre d'un traitement d'informations nominatives sans avoir effectué les formalités préalables, de recueil de ces informations sans avertir les personnes concernées de l'identité du responsable du traitement et de collecte d'informations en employant un moyen déloyal, qui ne présentent entre elles aucune incompatibilité et qui sont susceptibles d'être appliquées concurremment, l'arrêt attaqué n'encourt pas le grief allégué dans le moyen. La Cour d'appel qui a constaté que M. j-f. RO. avait sciemment dissimulé son identité, dont elle a pu déduire que cette dissimulation constituait un procédé déloyal et qui a relevé que l'article 22-2 de la loi du 23 décembre 1993 réprimait ceux qui collectent ou font collecter des informations nominatives en employant un tel procédé, a exactement fait application de ce texte qui ne pose aucune condition quant aux conséquences de l'utilisation du moyen incriminé.

Pénal - Général  - Responsabilité pénale  - Nouvelles technologies de l'information et de la communication.

Sondage - Protection des données nominatives - Collecte - Direction matérielle et intellectuelle du traitement - Responsabilité pénale - Article de la loi du 23 décembre 1993 - Éléments constitutifs de l'infraction.


Parties
Demandeurs : M. j-f. RO.
Défendeurs : le Ministère public

Références :

Code pénal
article 14 de la loi du 23 décembre 1993
Article 22-2 de la loi du 23 décembre 1993
articles 1er et 6 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993
article 14 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993
articles 1 et 6 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993
article 489 du Code de procédure pénale
article 22-2 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993
article 502 du Code de procédure pénale
articles 11 et 22 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993
article 12 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993
articles 6 et 14 de la loi n° 1165 du 23 décembre 1993
loi du 23 décembre 1993
articles 14 et 21-6° de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993
loi n° 1.165 du 23 décembre 1993
articles 1er, 12, 14, 21, 22 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993
articles 22-2° de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2015-06-11;13328 ?

Source

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