La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/02/1983 | MONACO | N°25933

Monaco | Cour supérieure d'arbitrage, 11 février 1983, Personnel c/ Société Monégasque d'assainissement


Abstract

Avantages

Cumul de primes ayant le même objet (non).

Sentence arbitrale

Excès de pouvoir. Griefs insuffisamment précis. Irrecevabilité du pourvoi (oui). Contrariété de motifs. Possibilité d'opposer les motivations de deux chefs distincts de la sentence arbitrale (non).

Résumé

C'est à bon droit que les arbitres, saisis d'un conflit d'ordre juridique, se fondent sur la règle générale selon laquelle les avantages dont l'objet est le même ne se cumulent pas, l'avantage le plus favorable aux salariés devant seul être accordé.
r>Est irrecevable le pourvoi qui invoque l'excès de pouvoir sans préciser suffisamment les griefs formés d...

Abstract

Avantages

Cumul de primes ayant le même objet (non).

Sentence arbitrale

Excès de pouvoir. Griefs insuffisamment précis. Irrecevabilité du pourvoi (oui). Contrariété de motifs. Possibilité d'opposer les motivations de deux chefs distincts de la sentence arbitrale (non).

Résumé

C'est à bon droit que les arbitres, saisis d'un conflit d'ordre juridique, se fondent sur la règle générale selon laquelle les avantages dont l'objet est le même ne se cumulent pas, l'avantage le plus favorable aux salariés devant seul être accordé.

Est irrecevable le pourvoi qui invoque l'excès de pouvoir sans préciser suffisamment les griefs formés de ce chef contre la sentence attaquée.

La contrariété de motifs, équivalent à une absence de motifs, ne peut s'entendre que des motifs justifiant le même chef de décision et non de la motivation de deux chefs de décisions distincts.

Motifs

La Cour supérieure d'arbitrage,

Vu la sentence arbitrale rendue le 30 décembre 1982 par les sieurs Jean Raimbert, Georges Crovetto et André Scaletta, arbitres désignés par l'Arrêté Ministériel n° 82-228 du 27 avril 1982 dans le conflit opposant la Société Monégasque d'Assainissement (S.M.A.) à son personnel, section Usine d'Incinération des Ordures Ménagères (U.I.O.M.) sur le différend ainsi précisé :

1° l'attribution de trois primes, l'une dénommée « témoignage de satisfaction » et les deux autres dites « prime exceptionnelle dégressive » et « gratification exceptionnelle », lesquelles sont versées, sous certaines conditions, aux agents relevant du statut de la S.M.A., mais ne sont plus allouées aux agents de l'U.I.O.M. depuis que ces derniers sont rémunérés, en vertu de la loi n° 739 du 16 mars 1963 concernant le salaire, sur des bases identiques à celles des agents travaillant à l'usine d'incinération des ordures ménagères de Nice, exploitée par une société de droit privé, la Sonitherm ;

2° la détermination de conditions d'avancement et de promotion semblables à celles qui sont appliquées aux autres agents de la S.M.A., eu égard à la circonstance que la carrière des agents de l'U.I.O.M. n'est plus régie par aucune règle du fait que la direction de la Sonitherm se réserve le droit d'accorder avancements et promotions sans critère prédéterminé ;

3° l'instauration, pour les agents de l'U.I.O.M. en service lors de l'ouverture de la nouvelle usine, d'une règle d'intégration dans le système de rémunération pratiqué à la Sonitherm qui tienne compte des avancements et promotions acquis par chacun de ces agents ;

Qui a décidé :

Art. 1er. - La Société Monégasque d'Assainissement n'est pas tenue de verser aux agents de l'U.I.O.M., dans les mêmes conditions qu'aux autres de ses agents la prime dite « témoignage de satisfaction ».

Art. 2. - La Société est tenue de verser aux agents de l'U.I.O.M., dans les mêmes conditions qu'aux autres de ses agents, la prime dite « indemnité exceptionnelle dégressive », lorsque ces agents appartiennent à la catégorie professionnelle des ouvriers, employés, techniciens et agents de maîtrise ne percevant pas, comme c'est le cas notamment des « rondiers », la gratification de fin d'année, équivalente à un quatorzième mois d'appointements calculée sur la période s'étendant du 1er janvier au 31 décembre et attribuée par référence à ce qui est pratiqué à la Sonitherm.

Art. 3. - La Société n'est pas tenue de verser aux agents de l'U.I.O.M., dans les mêmes conditions qu'aux autres de ses agents, la prime dite « gratification exceptionnelle » lorsque ces agents appartiennent à la catégorie professionnelle des ingénieurs, assimilés et cadres et perçoivent la gratification de fin d'année, équivalente à un quatorzième mois d'appointements, calculée sur la période s'étendant du 1er janvier au 31 décembre et attribuée par référence à ce qui est pratiqué à la Sonitherm.

Art. 4. - La Société est tenue de mettre en œuvre pour les agents de l'U.I.O.M. qui appartiennent à la catégorie professionnelle des ouvriers, employés, techniciens et agents de maîtrise, un système d'avancement et de promotion établi selon les dispositions ci-après :

1° Le « rondier » doit percevoir, en fin de carrière après accession à un principalat qui sera constitué par le coefficient hiérarchique immédiatement supérieur à celui afférent à la classification de l'emploi, et pour une même durée totale de service que le « chauffeur poids lourd », une rémunération représentée au moins par l'indice 132 par rapport à un indice arbitraire de début de carrière fixé à 100.

2° Le « chef de quart » doit percevoir, en fin de carrière après accession à un principalat qui sera constitué par les deux coefficients hiérarchiques immédiatement supérieurs à celui afférent à la classification de l'emploi, et pour une même durée totale de service que le « contremaître », une rémunération représentée au moins par l'indice 155 par rapport à un indice arbitraire de début de carrière fixé à 100.

3° L' « électro-mécanicien » doit percevoir, en fin de carrière après accession à un principalat qui sera constitué par les deux coefficients hiérarchiques immédiatement supérieurs à celui afférent à la classification de l'emploi, et pour une même durée totale de service que le « maître-ouvrier », une rémunération représentée au moins par l'indice 155 par rapport à un indice arbitraire de début de carrière fixé à 100.

4° Le « technicien spécialiste » doit percevoir, en fin de carrière après accession, lorsque la classification hiérarchique le permet, à un principalat qui sera constitué par le ou les coefficients hiérarchiques immédiatement supérieurs à celui afférent à la classification de l'emploi, et pour une même durée totale de service que l' « adjoint technique », une rémunération représentée au moins par l'indice 190 par rapport à un indice arbitraire de début de carrière fixé à 100.

Les indices 132, 155 et 190 doivent toutefois être modifiés de concert entre les parties pour tenir compte des incidences résultant des différences de rémunération de début de carrière et de la prime d'ancienneté.

Les parties doivent déterminer de concert entre elles les durées minimales et maximales de service à accomplir pour passer d'un taux à un autre ainsi que les modalités pour être promu d'un coefficient hiérarchique à un autre.

Art. 5. - La Société n'est pas tenue de mettre en œuvre pour les agents de l'U.I.O.M. qui appartiennent à la catégorie professionnelle des ingénieurs, assimilés et cadres, un système d'avancement et de promotion autre que celui résultant de la Convention collective du 9 octobre 1970.

Art. 6. - La Société n'est pas tenue d'intégrer les agents de l'U.I.O.M. dans le nouveau système de rémunération selon une méthode autre que celle consistant à classer ces agents dans des taux de salaire comportant des rémunérations au moins égales ou, à défaut, immédiatement supérieures à celles dont ils bénéficiaient à la date d'intégration.

Vu la requête formant recours contre les articles 1, 3, 5 et 6 de ladite sentence déposée le 10 janvier 1983 par Maître Jacques Sbarrato, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, agissant au nom du personnel de la Société Monégasque d'Assainissement, section Usine d'Incinération des Ordures Ménagères, ladite requête tendant à ce qu'il plaise à la Cour annuler la sentence attaquée, et ce faire :

A) En ce qui concerne les primes dénommées « Témoignage de Satisfaction » et « Gratification Exceptionnelle » pour violation de l'article 8 de la loi n° 473, de l'article 989 du Code civil, dénaturation des conventions, faits et circonstances de la cause, insuffisance et contrariété des motifs équipollente à une absence de motifs, manque de base légale.

B) En ce qui concerne la détermination des conditions d'avancement et de promotion des ingénieurs, cadres et assimilés, pour excès de pouvoir, insuffisance et contrariété de motifs.

C) En ce qui concerne l'instauration d'une règle d'intégration dans le nouveau système de rémunération des agents de l'U.I.O.M. en service, lors de l'ouverture de la nouvelle usine, pour insuffisance de motifs équipollente à l'absence de motifs et violation de l'article 15 de la loi n° 729.

Vu le mémoire en réponse déposé le 26 janvier 1983 par la Société Monégasque d'Assainissement tendant au rejet du recours et au maintien du plein et entier effet de la sentence attaquée.

........................................................

Vu la loi n° 473 du 4 mars 1948, modifiée par les Lois n° 603 du 2 juin 1955 et 816 du 24 janvier 1967 et l'Ordonnance Souveraine n° 3916 du 12 décembre 1967,

Sur le pourvoi formé contre les articles 1 et 3 de la sentence arbitrale,

Sur la première branche

Considérant qu'il est reproché à la sentence attaquée d'avoir violé l'article 8 de la loi n° 473 du 4 mars 1948 en statuant en équité dans un conflit d'ordre juridique.

Mais, considérant que les arbitres qui ont estimé qu'ils étaient saisis d'un conflit d'ordre juridique, qualification qui n'est pas critiquée par le pourvoi, se sont fondés pour rendre leur décision sur la règle générale selon laquelle les avantages dont l'objet est le même ne se cumulent pas, l'avantage le plus favorable aux salariés devant seul être accordé.

Qu'ainsi, en statuant selon une règle de droit dans un conflit dont la nature juridique n'était pas contestée, les arbitres n'ont pas violé l'article 8 de la loi n° 473 du 4 mars 1948,

Que, de ce chef, le pourvoi doit être rejeté,

Sur la deuxième branche

Considérant qu'il est également reproché à la sentence attaquée d'avoir dénaturé le protocole d'accord passé le 20 août 1975 entre la Société Monégasque d'Assainissement et son personnel en décidant que la prime dite « témoignage de satisfaction » rémunérait les heures supplémentaires effectivement accomplies alors que si l'article 2 du protocole prévoit le versement « d'indemnités horaires servies par la société en témoignage de satisfaction à l'occasion de l'accomplissement d'heures supplémentaires » ledit versement vient en complément du paiement des heures supplémentaires sous forme d'une indemnité « globale et forfaitaire » de 21 %.

Mais, considérant qu'il résulte des termes du protocole du 20 août 1975 que la prime dite « témoignage de satisfaction » est attribuée à l'occasion de toutes les heures supplémentaires réellement effectuées, sans qu'il soit tenu compte de la qualité du service rendu et que, dès lors, c'est à juste titre que les arbitres ont considéré qu'elle rémunérait les heures supplémentaires effectivement accomplies,

Qu'ainsi, ils n'ont pas dénaturé la convention visée au pourvoi qui, de ce chef, encore, doit être rejeté.

Sur le pourvoi formé contre l'article 5 de la sentence arbitrale

Sur la première branche

Considérant qu'il est reproché à la sentence attaquée d'être entachée d'excès de pourvoi,

Mais, considérant que les griefs formés de ce chef contre la sentence attaquée sont insuffisamment précisés et qu'il échet, en conséquence, de déclarer le pourvoi irrecevable,

Sur la deuxième branche

Considérant qu'il est encore reproché à la sentence attaquée d'être entachée de contrariété de motifs en ce qu'elle a décidé que la Société Monégasque d'Assainissement n'était pas tenue de mettre en œuvre, pour les agents de l'U.I.O.M. appartenant à la catégorie professionnelle des ingénieurs, assimilés et cadres, un système d'avancement et de promotion autre que celui résultant de la Convention Collective du 9 octobre 1970, alors que dans son article 4 elle a défini les critères d'avancement et de promotion des ouvriers, employés, techniciens et agents de maîtrise.

Mais, considérant que la contrariété de motifs ne peut s'entendre que des motifs justifiant le même chef de décision et que ne peuvent être opposées, ainsi que le fait le pourvoi, les motivations de deux chefs de décision distincts s'appliquant à deux catégories de personnel ne relevant pas de la même convention collective,

Qu'ainsi, le pourvoi doit être rejeté sans même qu'il y ait lieu de contrôler la réalité de la contradiction alléguée ;

Sur le pourvoi formé contre l'article 6 de la sentence arbitrale

Sur le premier moyen

Considérant qu'il est reproché à la sentence attaquée d'avoir violé l'article 15 de la loi n° 729 du 16 mars 1963 aux termes duquel : « S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail au jour de la modification subsistent entre le nouvel entrepreneur et le personnel de l'entreprise »,

Mais, considérant qu'il ne résulte pas des pièces produites que soit intervenue une modification dans la situation juridique de la Société Monégasque d'Assainissement,

Que, dès lors, le moyen qui manque en fait doit être rejeté ;

Sur le second moyen

Considérant qu'il est encore reproché aux arbitres d'avoir insuffisamment motivé leur décision,

Mais, considérant que les arbitres qui, statuant en équité, ont retenu que dans la mesure où les agents de l'Usine d'Incinération des Ordures Ménagères ont été intégrés dans le nouveau système de rémunération, de manière à ce qu'ils soient classés dans des taux de salaire comportant des rémunérations au moins égales, ou, à défaut, immédiatement supérieures à celles dont ils bénéficiaient à la date d'intégration, la méthode ainsi utilisée n'a pu effacer les effets pécuniaires des avancements et promotions acquis à cette date puisque les montants des rémunérations prises en compte pour procéder au nouveau classement résultent nécessairement des effets pécuniaires cumulés de ces avancements et promotions ;

Qu'ils ont encore relevé que si, ainsi que le demandent les agents de l'Usine d'Incinération des Ordures Ménagères, il était procédé à leur intégration dans le nouveau système de rémunération par reconstitution de leur carrière, comme s'ils en avaient toujours fait partie, il serait ainsi fait abstraction du changement radical intervenu dans l'outil de travail,

Qu'ainsi, par une motivation suffisante, ils ont légalement justifié leur décision ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS

Déclare le pourvoi irrecevable en ce que, formé contre l'article 5 de la sentence arbitrale du 30 décembre 1982, il est fondé sur le moyen tiré de l'excès de pouvoir,

Le rejette pour le surplus ;

Composition

MM. R. Vialatte, pres., Y. Merqui, rapp., Mes Sbarrato, Sanita, Champsaur, av.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25933
Date de la décision : 11/02/1983

Analyses

Arbitrage interne ; Contrats de travail


Parties
Demandeurs : Personnel
Défendeurs : Société Monégasque d'assainissement

Références :

Ordonnance Souveraine n° 3916 du 12 décembre 1967
loi n° 473 du 4 mars 1948
article 8 de la loi n° 473 du 4 mars 1948
Arrêté Ministériel n° 82-228 du 27 avril 1982
loi n° 739 du 16 mars 1963
article 15 de la loi n° 729 du 16 mars 1963
article 989 du Code civil
Lois n° 603 du 2 juin 1955


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.superieure.arbitrage;arret;1983-02-11;25933 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award