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15/03/2024 | SéNéGAL | N°J/106/RG/24

Sénégal | Sénégal, Cour suprême, 15 mars 2024, J/106/RG/24


REPUBLIQUE DU SENEGAL AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS COUR SUPREME
LE CONSEILLER DE LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE DESIGNE EN QUALITE DE JUGE DES REPÈRES
SUR LES PROCEDURES DE RECOURS EN REFERES
ADMINISTRATIFS AUX FINS DE SUSPENSION
A L'AUDIENCE PUBLIQUE SPECIALE DU QUINZE MARS DEUX MILLE VINGT-QUATRE

ENTRE :

-Mamadou Diop : Secrétaire général de AI1d
Jef/PADS, villa n°67 à Nord Foire Azur, agissant en sa qualité d*électeur et citoyen, titulaire de la CIN n°1618 1999 00234, lequel a pour conseils la SCP Kane et Fall, avocats à la Cour sis à Dakar ; >
-Mouhamed Ben O.Syn Diop: Président du parti PASS-PASS/ la conviction citoyenne, vill...

REPUBLIQUE DU SENEGAL AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS COUR SUPREME
LE CONSEILLER DE LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE DESIGNE EN QUALITE DE JUGE DES REPÈRES
SUR LES PROCEDURES DE RECOURS EN REFERES
ADMINISTRATIFS AUX FINS DE SUSPENSION
A L'AUDIENCE PUBLIQUE SPECIALE DU QUINZE MARS DEUX MILLE VINGT-QUATRE

ENTRE :

-Mamadou Diop : Secrétaire général de AI1d
Jef/PADS, villa n°67 à Nord Foire Azur, agissant en sa qualité d*électeur et citoyen, titulaire de la CIN n°1618 1999 00234, lequel a pour conseils la SCP Kane et Fall, avocats à la Cour sis à Dakar ;

-Mouhamed Ben O.Syn Diop: Président du parti PASS-PASS/ la conviction citoyenne, villa n°329 aux Hlm Gibraltar 2 à Dakar, agissant en sa qualité d'électeur et citoyen, titulaire de la CIN n°1751 1975
03601, lequel a pour conseils la SCP Kane et Fall, avocats à la Cour sis à Dakar ;

-Cheikh Tidiane Gadio : Président du parti MPCL/LUY JOT JOTNA, villa n°9, parcelle n°4 aux Almadies, agissant en sa qualité d'électeur et citoyen, titulaire de la CIN n°1251 1956 02303, lequel a pour conseils la SCP Kane et Fall, avocats à la Cour sis à Dakar ;

-Mamadou Lamine Thiam : Député à l'Assemblée nationale et inscrit Sur les listes électorales sous le n°l00326454;

-Karim Meissa Wade : candidat de la coalition Karim 2024 et inscrit sur les listes électorales sous le n°l23205l54;

-Saliou Dieng: Député à l'Assemblée nationale et inscrit sur les listes électorales sous le n°l05426525;

-Magatte Sy : électeur inscrit sur les listes électorales sous le n°l003l2l75;

-Mayoro Faye: candidat de la coalition Karim 2024 et inscrit Sur les listes
électorales sous le n°l01947847 ;

Ayant pour conseils :
Maitre Demba Ciré Bathily, avocat à la Cour, avenue Fahd Ben Abdel Aziz x autoroute, immeuble EMG ;
Maitre Mohamed Seydou Diagne : avocat à la Cour, au 5 place de
l'indépendance à Dakar ;

DEMANDEURS,
D 'une part,

-L'État du Sénégal pris en la personne de Monsieur l'Agent judiciaire de l'État, en ses bureaux Sis au Ministère de l'Economie et des Finances, building Peytavin, Avenue de la République X Avenue Carde à Dakar faisant élection de domicile en l'étude de Maiite Amadou Yéri Ba, avocat à la Cour;

DEFENDEUR :
D'autre part,

Nous, Jean Aloïse Ndiaye, Conseiller délégué, désigné en qualité de juge des référés ;

Vu la requête reçue le 11 mars 2024 au greffe central de la Cour suprême par laquelle Lamine Thiam, Karim Meïssa Wade, Saliou Dieng et Magatte Sy, tous élisant domicile en l'étude de Maître Demba Ciré Bathily et Maître Mohamed Seydou Diagne, Avocats à la Cour, ont saisi le juge des référés de céans pour obtenir la Suspension de l'exécution du décret n° 2024-690 du 06 mars 2024 abrogeant le décret n° 2023-339 du 16 février 2023 et fixant la date de la prochaine élection présidentielle, du décret n° 2024-691 du 06 mars 2024
portant convocation du corps électoral et du décret n° 2024-704 du 07 mars 2024 fixant la période de la campagne électorale pour l'élection présidentielle du 24 mars 2024 ;

Vu la requête reçue la même date au greffe central par laquelle Mamadou DIOP, Mouhamed Ben O Syn Diop et Cheikh Tidiane Gadio, tous agissant en leurs noms personnels, sollicitent la suspension de l'exécution du décret n° 2024-690 du 06 mars 2024 abrogeant le décret n° 2023-339 du 16 février 2023 et fixant la date de la prochaine élection présidentielle ;

Vu la Constitution ;

Vu la loi organique n°2017-09 du 17 janvier 2017 sur la Cour suprême,
modifiée par la loi organique n° 2022-16 du 23 mai 2022 ;

Vu le Code électoral ;

Vu nos ordonnances n° 4/2024 du 12 mars 2024 et n° 5/2024 du 13 mars 2024 autorisant les requérants à assigner les parties à l'audience de référé administratif du vendredi 15 mars 2024 à 9h 30 mn ;

Vu les exploits du 12 et 13 mars 2024 de Maître Weyndé Dieng et de Maître Richard Diatta, huissiers de justice à Dakar, portant signification des requêtes à l'Etat du Sénégal ;

Vu les actes attaqués ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Ouï Monsieur Amadou Mbaye Guissé, Avocat général, en ses conclusions tendant à Pincompétence, à l'irrecevabilité ou au rejet des requêtes ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Considérant que les deux requêtes présentent un lien de connexité certain ;

Que pour une bonne administration de la justice, il y a lieu d'ordonner la jonction des procédures ;

Considérant que par décret n° 2024-690 du 06 mars 2024, le Président de la République a abrogé le décret n° 2023-339 du 16 février 2023 et a fixé la date du prochain scrutin pour l'élection du Président de la République au 24 mars 2024 sur l'étendue du territoire national et à l'étranger pour le vote des sénégalais de l'extérieur ;

Que par décret n° 2024-691 du 6 mars 2024, il a convoqué les électeurs
sénégalais établis sur le territoire national et ceux résidant à l'étranger, le dimanche 24 mars 2024 pour l'élection présidentielle ;

Qu'enfin, par décret n° 2024-704 du 07 mars 2024, il a fixé la période de la campagne électorale du samedi 09 mars 2024 à zéro heure au vendredi 22 mars 2024 à minuit ;

Considérant que Lamine Thiam, Karim Meissa Wade, Saliou Dieng et Magatte Sy, en leurs qualités d'é1ecteurs inscrits sur les listes électorales, en invoquant l'urgence caractérisée par des violations flagrantes de leurs droits par lesdits actes, ont introduit une requête aux fins de suspension, après avoir déposé un recours en annulation articulé en deux moyens ;

Que Mamadou DIOP, Mouhamed Ben O Syn DIOP et Cheikh Tidiane GADIO qui s'estiment également lésés par le décret n° 2024-690 du 06 mars 2024 susvisé, pour défendre les intérêts de leurs militants et concitoyens, ont également formé une requête aux fins de suspension après avoir introduit un recours en annulation contre cet acte en soulevant un moyen tiré de la violation de la loi ;

Exposé des moyens de Lamine THIAM, Karim Meïssa WADE, Saliou
DIENG et Magatte SY ;

Le premier moyen est tiré de la violation de l'article LO 137 de la loi n° 2021- 35 du 12 juillet 2021 portant Code électoral, en ce que le décret n° 2024-691 du 06 mars 2024 a convoqué le corps électoral pour un scrutin du 24 mars 2024, soit 15 jours avant le premier tour du scrutin, alors que le texte visé au moyen impose un délai minimum de 80 jours avant l'élection ;

Le second moyen est tiré de la violation de l'article LO 129 de la loi n° 2021-35 du 12 juillet 2021 portant Code électoral, en ce que le décret n° 2024-704 du 07 mars 2024 a fixé la période de la campagne électorale pour l'élection présidentielle du 24 mars 2024 à 15 jours avant le premier tour, alors que la loi électorale impose un délai de 21 jours ;

Exposé du moyen Mamadou DIOP, Mouhamed Ben O Syn DIOP et Cheikh Tidiane GADIO :

Le moyen est tiré de la violation de la loi, notamment de l'article 4 de la
Constitution, de l'article 21 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, de l'article 25 (A) du Pacte international relatif aux civils et politiques, de l'article 13 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, mais aussi des articles 120 à 128 du Code électoral, en ce que le décret attaqué restreint de manière non légale le droit des citoyens de participer indirectement par l'intermédiaire de représentants librement choisis à la direction des affaires publiques, réduit également le délai de convocation du collège électoral qui est de 80 jours au moins avant la date du scrutin, réduit la durée de la campagne électorale qui doit être ouverte 21 jours avant le premier tour et, enfin, viole les délais de convocation du corps électoral ainsi que le temps de la campagne, le tout, constituant une restriction injustifiée au droit d'exprimer librement et consciencieusement leur volonté en matière de choix du Président de la République ;

Considérant que les requérants soutiennent qu'il y a un doute sérieux quant à la légalité des décrets attaqués qui, d'une part, entraînent un préjudice certains pour eux, pour les citoyens et les électeurs, d'où l'urgence de suspendre leur exécution et, d'autre part, préjudicient de manière suffisamment grave et immédiate, à la fois à la situation des requérants, à un intérêt public ainsi qu'aux intérêts qu'ils entendent défendre ;

Considérant que selon les dispositions de l'article 84 de loi organique n° 2017- 09 du 17 janvier 2017 sur la Cour suprême, " Quand une décision administrative fait l'objet d'une requête en annulation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. Lorsque la suspension est prononcée, il est statué sur la requête en annulation de la décision dans les meilleurs délais " ;

Considérant, toutefois, qu'aux termes de 'article 90 de la loi organique sur la Cour suprême susvisée, " lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la Cour suprême, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu d'appliquer les deux premiers alinéas de l'article 89
de la présente loi organique " ;

Considérant qu'en l'espèce, on ne saurait occulter la compétence dévolue en matière électorale au Conseil constitutionnel dont les décisions ne sont susceptibles d'aucun recours et s'imposent, à la fois, aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et judiciaires, y compris à notre haute juridiction, conformément à l'article 90 de la Constitution ;

Qu'à cet égard, dans le cadre de la préparation devant mener à l'élection du Président de la République, le Conseil constitutionnel a déjà rendu une décisions n° 01/E/2024 du 12 janvier 2024, arrêtant la liste des candidats à l'élection présidentielle, une décision n° 02/E/2024 du 20 janvier 2024 arrêtant la liste définitive des candidats à l'élection présidentielle du 25 février 2024, une décision n° 01/C/2024 du 15 février 2024 sur le recours de Mouhamed Ayib Salim Daffé, Samba Dang et 38 autres députés, Babacar Mbaye et 16 autres députés, les candidats à l'élection présidentielle El Hadj Malick Gakou, Cheikh Tidiane Dièye, Habib Sy, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, El hadj Mamadou Diao, Thierno Alassane Sall et Daouda Ndiaye, la décision n° 60/E/2024 du 5
mars 2024 sur la demande d'avis du Président de la République et, enfin, une décision n° 05/E/2024 du 06 mars 2024, sur saisine des candidats à l'élection présidentielle El hadji Mamadou Diao, Boubacar Camara, Thierno Alassane Sall, Habib Sy, Sérigne Mboup, Déthié Fall, Malick Gakou, Khalifa Ababacar Sall, Aly Ngouye Ndiaye, Mamadou Lamine Diallo, Anta Babacar Ngom, Cheikh Tidiane Dièye, Bassirou Diomaye Faye et Aliou Mamadou Dia ;

Que le Président de la République, en prenant les décrets attaqués, dont les rapports de présentation font expressément référence à ces décisions, n'a fait que tirer les conséquences de ces dernières qui s'imposent également à lui, en sa qualité de garant du bon fonctionnement des Institutions de la République ;

Considérant que ledit Conseil a déjà rappelé, dans sa décision n° 01/C/2024 du 15 février 2024, "que s'il est vrai que la Cour suprême est juge de l'excès de pouvoir des autorités exécutives, le Conseil constitutionnel, juge de la régularité des élections nationales, dispose d'une plénitude de juridiction en matière électorale, sur le fondement de l'article 92 de la Constitution ; que cette plénitude de juridiction lui confère compétence pour connaitre de la contestation des actes administratifs participant directement à la régularité d'une élection
nationale, lorsque ces actes sont propres à ce scrutin " ;

Considérant qu'il s'infère de cette décision, qu'il appartient au Conseil
constitutionnel, en vertu de ses missions de contrôle de la régularité des
élections nationales et, y compris, en faisant usage de son large pouvoir de régulation en la matière, de statuer sur les contestations portées contre les actes administratifs préparatoires à l'élection du Président de la République, ayant pour objet de préciser leur déroulement et de fixer leur organisation ;

Que ces actes, par leur nature, constituent une manifestation de la fonction gouvernementale dans son expression purement politique et échappent au contrôle du juge de l'excès de pouvoir dont l'intervention risquerait de compromettre gravement l'efficacité du contrôle des opérations électorales, perturberait le déroulement général du processus électoral et porterait atteinte au fonctionnement normal des pouvoirs publics ;

Considérant qu'en l'espèce, les décrets dont les requérants demandent la suspension de leur exécution fixent la date du prochain scrutin pour l'élection du Président de la République, portent convocation des électeurs et déterminent la période de la campagne électorale ;

Que le Conseil constitutionnel disposant de la plénitude de compétence pour contrôler la régularité des décrets ayant cet objet, leur légalité ne saurait être contestée en annulation devant le juge de l'excès de pouvoir ;
Considérant, dès lors, que ces actes n'étant pas susceptibles de recours pour excès de pouvoir, cette irrecevabilité affecte tant les demandes d'annulation que les demandes tendant à la suspension de leur exécution ; Qu'il s'ensuit que les requêtes encourent l'irrecevabilité ;

Par ces motifs

Déclarons irrecevables les requêtes aux fins de suspensions d'une part, de Lamine Thiam, Karim Meïssa Wade, Saliou Dieng et Magatte Sy et, d'autre part, de Mamadou DIOP, Mouhamed Ben O Syn DIOP et Cheikh Tidiane GADIO, contre :

-le décret n° 2024-690 du 06 mars 2024 du Président de la République abrogeant le décret n° 2023-339 du 16 février 2023 et fixant la date du prochain scrutin pour l'élection du président de la République au 24 mars 2024 sur l'étendue du territoire national et à l'étranger pour le vote des sénégalais de l'extérieur ;

-le décret n° 2024-691 du 06 mars 2024 du Président de la République
convoquant les électeurs sénégalais établis sur le territoire national et ceux résidant à l'étranger, le dimanche 24 mars 2024 pour l'élection présidentielle ;

- le décret n° 2024-704 du 07 mars 2024 du Président de la République fixant la période de la campagne électorale qui débute le samedi 09 mars à zéro heure pour se terminer le vendredi 22 mars 2024 à minuit ;

Ainsi fait, jugé et prononcé par le Conseiller de la chambre
administrative, désignée en qualité de juge des référés, en son audience publique spéciale des référés, tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents :

Jean Aloise Ndiaye, Président,
Amadou Mbaye Guissé, Avocat général ;
Matar Saloum Camara, Greffier ;

En foi de quoi, la présente ordonnance a été signée par le président, et le greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : J/106/RG/24
Date de la décision : 15/03/2024
Type d'affaire : Référé administratif

Origine de la décision
Date de l'import : 18/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;sn;cour.supreme;arret;2024-03-15;j.106.rg.24 ?
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