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31/05/1990 | CANADA | N°[1990]_1_R.C.S._1257

Canada | R. c. Ladouceur, [1990] 1 R.C.S. 1257 (31 mai 1990)


R. c. Ladouceur, [1990] 1 R.C.S. 1257

Gerald Jay Ladouceur Appelant

c.

Sa Majesté la Reine Intimée

et

Le procureur général du Canada,

le procureur général de la Nouvelle‑Écosse,

le procureur général du Nouveau‑Brunswick et

le procureur général du Manitoba Intervenants

répertorié: r. c. ladouceur

No du greffe: 20408.

1989: 6 novembre; 1990: 31 mai.

Présents: Le juge en chef Dickson et les juges Lamer, Wilson, La Forest, L'Heureux‑Dubé, Sopinka, Gonthier, Cory et McLachlin.

en appel de

la cour d'appel de l'ontario

Droit constitutionnel -- Charte des droits -- Vérifications de routine effectuées au hasard sur les routes -- Vérif...

R. c. Ladouceur, [1990] 1 R.C.S. 1257

Gerald Jay Ladouceur Appelant

c.

Sa Majesté la Reine Intimée

et

Le procureur général du Canada,

le procureur général de la Nouvelle‑Écosse,

le procureur général du Nouveau‑Brunswick et

le procureur général du Manitoba Intervenants

répertorié: r. c. ladouceur

No du greffe: 20408.

1989: 6 novembre; 1990: 31 mai.

Présents: Le juge en chef Dickson et les juges Lamer, Wilson, La Forest, L'Heureux‑Dubé, Sopinka, Gonthier, Cory et McLachlin.

en appel de la cour d'appel de l'ontario

Droit constitutionnel -- Charte des droits -- Vérifications de routine effectuées au hasard sur les routes -- Vérifications autorisées par la loi — Conducteur interpellé sans motif apparent -- Conducteur déclaré coupable d'avoir conduit pendant que son permis était suspendu -- Les vérifications de routine effectuées au hasard sur les routes violent‑elles les art. 7, 8 et 9 de la Charte? -- Dans l'affirmative, ces vérifications sont‑elles sauvegardées par l'article premier? -- Charte canadienne des droits et libertés, art. 1, 7, 8, 9 -- Code de la route, L.R.O. 1980, ch. 198, art. 189a(1).

L'appelant a été interpellé alors qu'il conduisait sa voiture à l'occasion d'une interpellation au hasard effectuée par des policiers afin de vérifier si ses documents étaient en règle et s'il possédait un permis de conduire valide. Les agents ne soupçonnaient pas que l'appelant agissait de façon illégale. L'appelant a admis qu'il savait que son permis de conduire était suspendu quand on lui a demandé de produire ce permis ainsi que le certificat d'immatriculation du véhicule et une preuve d'assurance. Un juge de paix l'a déclaré coupable d'avoir conduit pendant que son permis était suspendu, contrairement à l'art. 35 du Code de la route, et la Cour provinciale (Division criminelle) de même que la Cour d'appel de l'Ontario ont confirmé cette déclaration de culpabilité. Les questions constitutionnelles formulées par notre Cour sont ainsi conçues: (1) Le paragraphe 189a(1) du Code de la route est‑il incompatible avec les art. 7, 8 et 9 de la Charte canadienne des droits et libertés dans la mesure où il autorise l'interception au hasard d'un véhicule à moteur et de son conducteur par un agent de police qui n'a aucun motif raisonnable de croire qu'une infraction a été commise, lorsque cette interception ne fait pas partie d'un programme structuré? Et (2) dans l'affirmative, le par. 189a(1) est‑il justifiable en vertu de l'article premier de la Charte?

Arrêt: Le pourvoi est rejeté.

Les juges Lamer, L'Heureux‑Dubé, Gonthier, Cory et McLachlin: L'appelant a été détenu au sens de l'art. 9 de la Charte. Les agents de police ont restreint sa liberté d'action au moyen d'une sommation ou d'un ordre et les conséquences juridiques de la détention étaient sérieuses. La détention était arbitraire du fait que la décision d'interpeller était laissée à l'entière discrétion des agents de police.

Les articles 7 et 8 de la Charte n'ont pas été violés en l'espèce. Il n'y a pas eu de "saisie" au sens de l'art. 8. Il n'est pas nécessaire de décider si ces interpellations au hasard portent atteinte à l'art. 7 puisqu'il a été déterminé que les interpellations au hasard pour une vérification de routine violent l'art. 9 de la Charte.

Le paragraphe 189a(1) du Code de la route est sauvegardé par l'article premier de la Charte. Le pouvoir d'un agent de police d'intercepter des véhicules automobiles au hasard découle du par. 189a(1) du Code de la route et il est donc prescrit par une règle de droit. Ce pouvoir a également été justifié par notre Cour comme étant prescrit par la common law.

Les statistiques relatives au carnage qui se produit sur les routes révèlent l'existence d'une préoccupation urgente et réelle à laquelle le gouvernement a eu raison de répondre au moyen de la mesure législative en cause et des interpellations au hasard. Un aspect plus précis de cette préoccupation se rapporte à des facteurs qui peuvent permettre de réduire la probabilité d'accidents: le bon état mécanique du véhicule, la possession d'un permis de conduire valide et d'une preuve d'assurance appropriée ainsi que la sobriété du conducteur. Ces facteurs sont directement applicables à la question des interpellations au hasard.

Le moyen choisi est proportionnel à ces préoccupations urgentes ou il convient à celles‑ci. L'interpellation au hasard a un lien rationnel avec la sécurité sur les routes et est conçue avec soin pour la réaliser; elle porte le moins possible atteinte aux droits du conducteur. Elle ne porte pas atteinte assez gravement aux droits individuels pour que la restriction de ces droits l'emporte sur l'objectif de la loi. L'interception des véhicules est à vrai dire la seule façon de vérifier le permis de conduire et l'assurance d'un conducteur, l'état mécanique du véhicule ou la sobriété d'un conducteur.

La dissuasion constitue un aspect important de la vérification de routine. La suspension du permis de conduire pour des infractions en matière de circulation est importante parce qu'elle permet aux tribunaux d'imposer des peines d'emprisonnement moins longues à l'avantage du contrevenant, tout en permettant d'assurer la protection de la société. Cependant, pour que les suspensions de permis constituent une peine efficace, elles doivent être exécutoires. Il doit exister un véritable élément de risque de détection des conducteurs sans permis pour que la suspension d'un permis puisse être un remède efficace. Les interpellations au hasard constituent le seul moyen dissuasif efficace.

Reconnaître la validité de la vérification de routine au hasard, c'est se rendre à la réalité. Cette forme de dissuasion est la seule réponse plausible aux difficultés générales de mettre sur pied de tels programmes en raison des contraintes budgétaires et d'un manque de personnel et à l'impossibilité d'établir un programme structuré efficace dans les régions rurales en particulier.

La vérification de routine au hasard ne porte pas atteinte gravement au droit garanti par l'art. 9 au point de l'emporter sur l'objectif législatif. Il y a déjà des mécanismes en place pour empêcher les abus de la part des fonctionnaires chargés d'appliquer la loi. Les policiers ne peuvent interpeller des personnes que pour des motifs fondés sur la loi -- en l'espèce des motifs relatifs à la conduite d'une automobile comme la vérification du permis de conduire, des assurances et de la sobriété du conducteur et de l'état mécanique du véhicule. Lorsque l'interpellation est effectuée, les seules questions qui peuvent être justifiées sont celles qui se rapportent aux infractions en matière de circulation. Toute autre procédure plus inquisitoire ne pourrait être engagée que sur le fondement de motifs raisonnables et probables. Lorsqu'une interpellation est jugée illégale, les éléments de preuve ainsi obtenus pourraient bien être écartés en vertu du par. 24(2) de la Charte.

Des pouvoirs similaires touchant l'interception de véhicules automobiles ont été conférés par la loi aux agents de police dans d'autres sociétés libres et démocratiques.

Le juge en chef Dickson et les juges Wilson, La Forest et Sopinka: Le droit absolu des agents de police d'intercepter des véhicules à moteur sans aucun motif ne saurait être justifié en vertu de l'article premier de la Charte. Cependant, il n'y a pas lieu en l'espèce d'écarter les éléments de preuve en vertu du par. 24(2) de la Charte.

L'interpellation au hasard a constitué une détention arbitraire. Les efforts déployés par le ministère public en vue de satisfaire au fardeau de preuve qui lui incombe en vertu de l'article premier doivent être analysés en fonction des violations de l'art. 9 qui, jusqu'à ce jour, ont été reconnues comme justifiées parce qu'elles satisfont à l'objectif de débarrasser les routes des conducteurs dangereux. Les agents de police ont le droit d'interpeller des automobilistes à des points de contrôle établis en vertu du programme R.I.D.E. dans le but de leur faire subir un alcootest permettant de déterminer s'ils sont sobres et de vérifier les permis de conduire, les assurances et l'état mécanique des voitures. Il est donc possible de recourir au programme structuré de contrôles routiers ponctuels pour déceler les conducteurs sans permis. La présente affaire peut être considérée comme la goutte qui fait déborder le vase. Si elle est approuvée, un agent de police pourra intercepter n'importe quel véhicule, n'importe où, n'importe quand, sans avoir de motif de le faire. Pour les automobilistes, il en découlera une négation totale de la liberté de ne pas être soumis à une détention arbitraire garantie par l'art. 9 de la Charte.

Le ministère public n'a pas démontré que ce pouvoir absolu est un ajout nécessaire aux nombreuses méthodes d'application des lois déjà disponibles. La vérification au hasard, à un endroit fixe et choisi d'avance, entrave la liberté beaucoup moins que le droit illimité qu'on revendique. Cette méthode est plus à même de servir les fins de l'application de la loi, elle est moins envahissante et moins susceptible de donner lieu à des abus que le pouvoir absolu qu'on cherche à justifier. Par contre, l'interception au hasard d'un véhicule au cours d'une patrouille permettrait à un agent de police d'intercepter n'importe quel véhicule, n'importe quand, n'importe où. La décision pourrait reposer sur un caprice. Un pouvoir absolu risque d'être beaucoup plus envahissant et de donner lieu à une atteinte plus grande au droit à la vie privée.

Jurisprudence

Citée par le juge Cory

Arrêts examinés: Dedman c. La Reine, [1985] 2 R.C.S. 2; Hufsky c. La Reine, [1988] 1 R.C.S. 621; arrêts mentionnés: R. c. Oakes, [1986] 1 R.C.S. 103; R. v. Waterfield, [1963] 3 All E.R. 659; R. c. Therens, [1985] 1 R.C.S. 613; R. c. Thomsen, [1988] 1 R.C.S. 640; R. c. Edwards Books and Art Ltd., [1986] 2 R.C.S. 713; Delaware v. Prouse, 440 U.S. 648 (1979).

Citée par le juge Sopinka

Arrêt examiné: R. c. Hufsky, [1988] 1 R.C.S. 621; arrêts mentionnés: Dedman c. La Reine, [1985] 2 R.C.S. 2; Delaware v. Prouse, 440 U.S. 648 (1979); R. c. Oakes, [1986] 1 R.C.S. 103.

Lois et règlements cités

Charte canadienne des droits et libertés, art. 1, 7, 8, 9, 24(1), (2).

Code de la route, L.R.O. 1980, ch. 198, art. 18(1), 19(1), 35, 189a(1).

Loi constitutionnelle de 1982, art. 52(1).

Loi sur l'assurance‑automobile obligatoire, L.R.O. 1980, ch. 83, art. 3(1).

Loi sur la chasse et la pêche, L.R.O. 1980, ch. 182, art. 14.

Loi sur les infractions provinciales, L.R.O. 1980, ch. 400.

Loi sur les motoneiges, L.R.O. 1980, ch. 301, art. 15a.

Motor Car Act, 1958 (Victoria), art. 22, 29, 40.

Motor Traffic Acts, 1909‑1957 (Nouvelle‑Galles du Sud), art. 5(1).

Road Traffic Act, 1961 (Australie‑Méridionale), no 50, art. 42.

Road Traffic Act, 1972 (R.‑U.), ch. 20, art. 159.

Road Traffic Act, 1974‑1982 (Australie‑Occidentale), art. 53.

Traffic Act, 1949‑1988 (Queensland), art. 35, 39.

Traffic Ordinances, 1949‑59 (Territoire du Nord), art. 46, 48, 55.

Transport Act, 1962 (Nouvelle‑Zélande), no 135, art. 66.

Doctrine citée

Ontario. Royal Commission on Civil Rights. Royal Commission Inquiry into Civil Rights. Report No. 1, vol. 2. Toronto: Queen's Printer, 1968.

Segal, Murray D. "R. v. Hufsky: Random Spot Check Programmes" (1989), 1 J.M.V.L. 34.

POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel de l'Ontario (1987), 59 O.R. (2d) 688, 35 C.C.C. (3d) 240, 41 D.L.R. (4th) 682, 20 O.A.C. 1, 57 C.R. (3d) 45, qui a rejeté l'appel interjeté contre une décision du juge Bordeleau de la Cour provinciale (Division criminelle) qui avait rejeté l'appel d'une déclaration de culpabilité prononcée par le juge de paix Scott. Pourvoi rejeté.

Morris Manning, c.r., pour l'appelant.

S. Casey Hill et R. H. MacDonald, pour l'intimée.

Graham Garton, c.r., pour l'intervenant le procureur général du Canada.

Rheinhold Endres, pour l'intervenant le procureur général de la Nouvelle‑Écosse.

Bruce Judah, pour l'intervenant le procureur général du Nouveau‑Brunswick.

Donna J. Miller, pour l'intervenant le procureur général du Manitoba.

//Le juge Sopinka//

Version française des motifs du juge en chef Dickson et des juges Wilson, La Forest et Sopinka rendus par

LE JUGE SOPINKA — L'appelant conteste sa déclaration de culpabilité relativement à l'accusation d'avoir conduit pendant que son permis était suspendu, pour le motif que le par. 189a(1) du Code de la route, L.R.O. 1980, ch. 198, en vertu duquel les agents de police l'ont interpellé et ont découvert l'infraction, viole les art. 7, 8 et 9 de la Charte canadienne des droits et libertés. Bien que je sois d'accord avec mon collègue le juge Cory qu'il y a lieu de rejeter le pourvoi et que le par. 189a(1) autorise une détention arbitraire contraire à l'art. 9 de la Charte, je ne crois pas que le droit absolu des agents de police d'intercepter des véhicules à moteur sans aucun motif puisse se justifier en vertu de l'article premier de la Charte. Je suis cependant d'avis de rejeter le pourvoi pour le motif qu'en l'espèce il n'y a pas lieu d'écarter les éléments de preuve en vertu du par. 24(2) de la Charte.

L'accusation découle des faits suivants. Deux agents de police étaient de faction quand l'appelant a dépassé leur véhicule. Ils ont décidé d'interpeller l'appelant par simple routine. Cependant, bien qu'ils invoquent le par. 189a(1) du Code de la route comme source de leur pouvoir d'agir, les agents reconnaissent qu'il n'y avait pas de motif de soupçonner l'appelant ni aucun autre motif d'intercepter son véhicule. Quand les agents ont demandé à l'appelant de produire son permis de conduire, ils ont découvert que son permis était suspendu parce qu'il n'avait pas payé des contraventions de stationnement.

La Cour d'appel a statué que le par. 189a(1) du Code de la route n'autorise pas ce genre de vérification au hasard. Le juge Tarnopolsky a conclu, au nom de la majorité, qu'il s'agissait d'une détention arbitraire de l'appelant et que, dans la mesure où elle était autorisée par le par. 189a(1), elle ne constituait pas une limite raisonnable au sens de l'article premier de la Charte. La cour a cependant confirmé la validité du par. 189a(1), en lui donnant une interprétation atténuée selon laquelle le paragraphe ne s'appliquerait que lorsqu'il existe un motif précis d'intercepter un véhicule à moteur. La cour a de plus statué qu'il y avait cependant lieu d'utiliser la preuve en application du par. 24(2) parce que les policiers avaient agi de bonne foi et n'avaient pas l'avantage de connaître l'interprétation que la cour a donnée au par. 189a(1).

Je partage l'avis de mon collègue que, compte tenu de l'arrêt de notre Cour R. c. Hufsky, [1988] 1 R.C.S. 621, il ne peut y avoir de doute que l'interpellation au hasard en l'espèce constituait une détention arbitraire. Dans l'affaire Hufsky, le conducteur avait a été interpellé par un agent de police de faction à un point fixe de contrôle, ce qui constitue une situation moins arbitraire que celle où un agent de police intercepte au hasard un véhicule à partir d'une voiture en patrouille.

Dans l'arrêt Hufsky, précité, notre Cour a statué que la détention était justifiée en vertu de l'article premier à cause des statistiques qu'on lui avait soumises sur la conduite de véhicules sans permis et le nombre d'accidents. Le juge Le Dain a conclu que ces statistiques étayaient la conclusion que les conducteurs sans permis sont à l'origine d'un pourcentage sensiblement plus élevé d'accidents que les conducteurs titulaires d'un permis. En conséquence, les mesures exceptionnelles d'application des lois étaient justifiées afin d'écarter ce danger. En l'espèce, la Cour d'appel a invité le ministère public à soumettre un nouveau dossier pour justifier cet empiétement supplémentaire sur les droits de ne pas être soumis à une détention arbitraire. Le ministère public a soumis une grande quantité de [TRADUCTION] "données statistiques, de graphiques et de lois comparables". La Cour d'appel a analysé ces données et les juges formant la majorité ont conclu, à la p. 259, que:

[TRADUCTION] . . . la documentation soumise ne démontre pas l'existence d'une proportionnalité entre les mesures adoptées, c.‑à‑d. le pouvoir d'interpeller les automobilistes au hasard afin de vérifier s'ils ont un permis valide et l'objectif certes régulier du gouvernement de favoriser la sécurité sur les routes. Les seules statistiques relatives aux conducteurs qui n'ont pas de permis et au taux plus élevé d'accidents révèlent une corrélation entre le nombre de véhicules non assurés et le taux plus élevé de lésions corporelles, mais une corrélation inverse en matière de dommages matériels.

Les motifs de la minorité ne traitent pas des statistiques, sauf d'une manière générale.

Le juge Tarnopolsky, qui a rédigé les motifs de la majorité, énumère les trois conditions qu'une limite doit remplir pour satisfaire à l'article premier, elle doit (1) être raisonnable, (2) être prescrite par une règle de droit, et, (3) sa justification doit pouvoir se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique. Il a conclu que la disposition législative ne répondait pas aux première et troisième conditions et qu'il ne lui était pas nécessaire d'aborder la deuxième condition.

Pour déterminer si le ministère public a satisfait au fardeau de prouver qu'une violation de l'art. 9 est justifiée, la présente affaire doit être analysée en fonction des violations de l'art. 9 qui, jusqu'à ce jour, ont été reconnues comme justifiées parce qu'elles satisfont à l'objectif certes important du gouvernement de débarrasser les routes des conducteurs dangereux. À cet égard, les agents de police ont le droit d'interpeller des automobilistes à des points de contrôle établis en vertu du programme R.I.D.E. dans le but de leur faire subir un alcootest permettant de déterminer s'ils sont sobres et de vérifier les permis de conduire, les assurances et l'état mécanique des voitures. Voir les arrêts Dedman c. La Reine, [1985] 2 R.C.S. 2, et Hufsky, précité. Il est donc possible de recourir au programme structuré de contrôles routiers ponctuels pour déceler les conducteurs sans permis. La présente affaire peut être considérée comme la goutte qui fait déborder le vase. Si nous l'approuvons, nous reconnaissons qu'un agent de police peut intercepter n'importe quel véhicule, n'importe où, n'importe quand, sans avoir de motif de le faire. Pour les automobilistes, il en découle une négation totale de la liberté de ne pas être soumis à une détention arbitraire garantie par l'art. 9 de la Charte. C'est là une situation qu'on ne tolérerait pas pour les piétons qui circulent dans la rue et sur les trottoirs. C'est sous cet angle qu'il faut considérer les efforts déployés par le ministère public pour s'acquitter du fardeau que lui impose l'article premier.

Bien qu'il existe beaucoup de statistiques, il n'y a pas de preuve que pendant la période visée les agents de police exerçaient effectivement le pouvoir d'effectuer des interpellations au hasard au cours de patrouilles. Par exemple, le pourcentage d'accidents impliquant des conducteurs sans permis a‑t-il été atteint en dépit du fait que les agents utilisaient cette méthode d'application de la loi? Si c'est le cas, ce n'est vraisemblablement que depuis qu'on a édicté le par. 189a(1) en 1981. Quels étaient les pourcentages avant l'utilisation de cette méthode? Combien d'automobilistes parfaitement respectueux des lois ont été interpellés pour chacun de ceux qui contrevenaient à la loi d'un façon quelconque? Par contre, si les policiers n'ont pas utilisé cette méthode et si le présent cas représente un incident isolé, qu'est‑ce qui prouve que les agents de police considèrent ce pouvoir comme essentiel à l'application efficace des lois? Chose étonnante, le dossier ne comporte aucune mention des méthodes policières à cet égard. Comme le signale le juge Tarnopolsky, aux États‑Unis où le problème est également aigu, même un programme structuré de contrôles routiers a été jugé abusif. Dans l'arrêt Delaware v. Prouse, 440 U.S. 648 (1979), le juge White dit, aux pp. 659 et 660:

[TRADUCTION] Il faut se rappeler que la principale méthode d'application des lois de la circulation et de la sécurité automobile consiste à agir dès qu'on observe une infraction. On procède tous les jours à d'innombrables interceptions de véhicules pour des infractions à la circulation; à cette occasion, on vérifie les permis de conduire et les certificats d'immatriculation, et les conducteurs qui n'en possèdent pas sont alors repérés. De plus, les conducteurs qui n'ont pas de permis de conduire sont vraisemblablement les plus dangereux, ce qui pourrait bien se manifester. À défaut de données empiriques démontrant le contraire, il faut présumer qu'il est plus probable qu'un conducteur sans permis sera découvert chez ceux qui enfreignent les lois de la circulation qu'en choisissant des conducteurs au hasard parmi toute la population des conducteurs. S'il en était autrement, la délivrance de permis de conduire serait une méthode peu efficace de promouvoir la sécurité routière. Il semble conforme au bon sens que le pourcentage des conducteurs qui n'ont pas de permis de conduire par rapport à l'ensemble des conducteurs est très faible et que le nombre de conducteurs titulaires d'un permis qui seront interpellés pour découvrir un seul conducteur sans permis sera certes considérable. L'amélioration de la sécurité routière qui découle de l'interpellation discrétionnaire de conducteurs choisis au hasard parmi toute la population des conducteurs est donc mince, dans la meilleure des hypothèses [. . .] Pour ce qui est de déceler les conducteurs sans permis ou de les dissuader de conduire, le contrôle routier ponctuel ne paraît pas donner de résultats suffisants pour constituer une méthode raisonnable d'application des lois en vertu du Quatrième amendement.

Ici, le programme structuré de contrôles routiers ponctuels vient s'ajouter aux méthodes dont disposent les forces policières pour assurer le respect de la loi. À mon avis, il est donc crucial que le ministère public persuade la Cour que ce pouvoir absolu est un ajout nécessaire aux nombreuses méthodes d'application des lois déjà disponibles. À mon avis, l'arrêt Hufsky, précité, ne permet pas cette extension des pouvoirs de la police. Cet arrêt est compatible avec l'avis qu'en justifiant les programmes structurés de contrôles routiers ponctuels, on a atteint les limites extrêmes de l'article premier. La vérification au hasard, à un endroit fixe et choisi d'avance, entrave la liberté beaucoup moins que le droit illimité qu'on revendique. Le choix du site du point de contrôle est fait par un officier supérieur ou par plusieurs agents. Quoique la décision de choisir l'automobile qui sera interceptée soit prise par un agent en particulier, d'autres agents peuvent observer sa conduite. Puisque l'agent dispose de peu de temps pour observer le véhicule, sa décision relève véritablement du hasard ou elle dépend de facteurs objectifs. Il en résulte que cette méthode est plus à même de servir les fins de l'application de la loi, elle est moins envahissante et moins susceptible de donner lieu à des abus que le pouvoir absolu qu'on cherche à justifier. L'arrêt Hufsky, précité, dit clairement que la limite prescrite par une règle de droit dont la justification peut se démontrer dans cette affaire est le programme structuré de contrôles routiers ponctuels. Les motifs de jugement concluent, à la p. 637:

Pour les motifs qui précèdent, je suis d'avis que l'arrêt au hasard du véhicule de l'appelant, afin de procéder à un contrôle routier ponctuel, constituait une atteinte justifiée au droit à la protection contre la détention arbitraire garanti par l'art. 9 de la Charte, aussi suis‑je d'avis de répondre par l'affirmative à la troisième question constitutionnelle.

Par contre, l'interception au hasard d'un véhicule au cours d'une patrouille permettrait à un agent de police d'intercepter n'importe quel véhicule, n'importe quand, n'importe où. La décision pourrait reposer sur un caprice. Chacun des agents de police aura des motifs différents. Certains auront tendance à arrêter les conducteurs plus jeunes, d'autres les voitures plus vieilles, et ainsi de suite. Comme le souligne le juge Tarnopolsky, des considérations raciales peuvent aussi entrer en ligne de compte. Mon collègue dit que, dans ces circonstances, il serait possible de prouver l'existence d'une violation de la Charte. Cependant, s'il n'est pas nécessaire de fournir quelque motif que ce soit, ni même d'en avoir, comment pourra‑t‑on savoir? L'agent n'a qu'à dire: "J'ai intercepté votre véhicule parce que j'ai le droit de le faire sans aucun motif. Je suis à la recherche de conducteurs sans permis." S'il est certain qu'il y aura des cas où, de l'aveu de tous, il se produira des violations de la Charte qui ne sont pas justifiables, pouvons‑nous les ignorer et approuver une pratique, même si dans l'application générale de cette pratique les violations de la Charte sont justifiables? De plus, un pouvoir absolu risque d'être beaucoup plus envahissant et de donner lieu à une atteinte plus grande au droit à la vie privée. Tout citoyen parfaitement respectueux des lois qui circule tard la nuit sur une route de campagne déserte doit s'attendre à être rejoint, parfois par derrière, par une voiture de police, sirène hurlante et feux clignotants, et il doit s'arrêter immédiatement pour justifier son droit d'être sur la route. Combien de conducteurs innocents faudra‑t‑il interpeller pour attraper un conducteur sans permis? Nous n'avons pas de données là‑dessus, mais les statistiques indiquent qu'en 1984, en Ontario, un conducteur sur 37 était sous le coup d'une suspension de permis. La proportion de conducteurs titulaires d'un permis par rapport aux conducteurs qui conduisent alors que leur permis est suspendu sera de 37 contre une fraction de 1. Il est donc probable qu'il faudra interpeller plus de 37 automobilistes innocents pour attraper un seul contrevenant.

Je suis tout à fait de l'avis du juge Tarnopolsky que le ministère public n'a pas satisfait aux première et troisième conditions de l'article premier déjà mentionnées et dont parle l'arrêt R. c. Oakes, [1986] 1 R.C.S. 103. Je considère particulièrement juste l'énoncé suivant du juge en chef Dickson, à la p. 139:

Premièrement, les mesures adoptées doivent être soigneusement conçues pour atteindre l'objectif en question. Elles ne doivent être ni arbitraires, ni inéquitables, ni fondées sur des considérations irrationnelles.

Compte tenu de ce qui précède, il n'est pas nécessaire d'examiner la deuxième condition, c.‑à‑d., déterminer si le par. 189a(1) est une limite prescrite par une règle de droit.

Je souscris donc à l'avis du juge Tarnopolsky, aux pp. 263 et 264, selon lequel il faut interpréter le par. 189a(1) comme ne visant

[TRADUCTION] qu'un programme structuré d'interpellations comme le programme R.I.D.E., des contrôles routiers où tous les véhicules doivent stopper ou une interpellation pour un motif précis.

Je suis également d'avis, pour les motifs donnés par le juge Tarnopolsky, qu'il n'y a pas lieu d'exclure, en vertu du par. 24(2) de la Charte, la preuve que l'appelant a conduit alors que son permis était suspendu et, en conséquence, je suis d'avis de rejeter le pourvoi.

//Le juge Cory//

Version française du jugement des juges Lamer, L'Heureux-Dubé, Gonthier, Cory et McLachlin rendu par

LE JUGE CORY -- Le présent pourvoi soulève la question de savoir si ce qu'on appelle les interpellations au hasard des automobilistes par la police pour effectuer des "vérifications de routine" portent atteinte aux art. 7, 8 et 9 de la Charte canadienne des droits et libertés et, dans l'affirmative, si elles peuvent être justifiées en vertu de l'article premier de la Charte.

Les faits

Le 27 avril 1982, à 19 h 20, seulement dix jours après l'adoption de la Charte, l'appelant Gerald Ladouceur a été interpellé par deux policiers alors qu'il conduisait sa voiture sur le boulevard Saint‑Laurent à Ottawa. Les deux policiers, l'agent Brian Bell et l'agent Michael Hudson, assuraient la surveillance d'une maison du secteur. Au moment où ils allaient partir, ils ont aperçu l'appelant au volant de sa voiture. Les agents ont suivi l'automobile de l'appelant sur la rue Donald et lui ont fait signe de s'arrêter au coin du boulevard Saint‑Laurent et de la rue Queen Mary en face d'un dépanneur.

Les agents ne soupçonnaient pas que l'appelant agissait de façon illégale ou qu'il avait quelque chose à voir avec la maison sous surveillance. L'agent Bell a déposé que l'unique motif de l'interpellation était de vérifier si ses documents étaient en règle et s'il possédait un permis de conduire valide. Il a dit que ce soir‑là ils avaient intercepté plusieurs autres véhicules dans le secteur. En contre‑interrogatoire, quand on lui a demandé si les interpellations avaient été effectuées "au hasard", il a répondu: [TRADUCTION] "C'est à peu près ça, oui."

Pendant que l'agent Hudson attendait dans la voiture de police, l'agent Bell a demandé à l'appelant de lui remettre son permis de conduire, le certificat d'immatriculation du véhicule et une preuve d'assurance. Il a alors demandé à l'appelant de l'accompagner à la voiture de police et celui‑ci a obtempéré à cette demande. Dans la voiture, l'appelant a admis aux policiers qu'il savait que son permis de conduire était suspendu. Il a reçu une sommation aux termes de la Loi sur les infractions provinciales, L.R.O. 1980, ch. 400, l'accusant de conduite pendant la suspension de son permis, contrairement à l'art. 35 du Code de la route, L.R.O. 1980, ch. 198.

L'agent Bell a déposé que l'interception du véhicule a duré environ quatorze minutes (de 19 h 21 à 19 h 35). L'agent Hudson a dit que l'appelant a passé environ quatre à cinq minutes dans la voiture de police. L'appelant n'a jamais été mis en état d'arrestation, aucune menace d'arrestation n'a été faite et l'appelant paraissait comprendre qu'il n'était pas en état d'arrestation. L'agent Bell a témoigné que si l'appelant avait tenté de s'en aller, il l'aurait arrêté alors que l'agent Hudson a dit que si l'appelant avait tenté de quitter les lieux, il l'aurait laissé faire. Rien ne laisse croire qu'il y a eu une conduite incorrecte ou coercitive de la part de la police.

Les tribunaux d'instance inférieure

Cour provinciale

L'appelant a subi son procès le 15 novembre 1982 devant le juge de paix Scott. Déclaré coupable de conduite pendant que son permis était suspendu, contrairement à l'art. 35 du Code de la route, il a été condamné à payer une amende de 2 000 $. Le juge Scott a conclu que, compte tenu de l'art. 19 du Code de la route, les agents de police ont le pouvoir d'intercepter au hasard des automobiles sans soupçonner l'existence d'actes illégaux pour demander au conducteur de présenter son permis de conduire et des pièces d'identité. Il a conclu que l'appelant n'avait pas été détenu et que la déclaration qu'il avait faite aux agents de police avait été obtenue régulièrement. Il est ressorti, au cours des procédures de détermination de la peine, que l'appelant avait été déclaré coupable en novembre 1981, en janvier 1982 et en avril 1982 de conduite pendant que son permis était suspendu.

Cour provinciale (Division criminelle)

Dans son appel devant le juge Bordeleau de la Cour provinciale, l'appelant a soutenu que l'art. 189a du Code de la route était inconstitutionnel parce qu'il violait les art. 7, 8 et 9 de la Charte. Dans un bref jugement rendu le 13 juin 1983, le juge Bordeleau a conclu qu'il n'était pas nécessaire de déterminer s'il y avait eu violation des art. 7, 8 ou 9 parce l'article premier de la Charte s'appliquerait de toute façon.

Cour d'appel

Cet appel a d'abord été entendu en juin 1985 par la Cour d'appel de l'Ontario, mais il a été reporté jusqu'en juin 1986 pour que l'intimé puisse présenter de nouveaux éléments de preuve à l'appui de ses arguments fondés sur l'article premier. La cour a rendu son arrêt rejetant l'appel le 8 avril 1987. [Maintenant publié à 35 C.C.C. (3d) 240.]

Le juge Tarnopolsky, s'exprimant au nom de la cour à la majorité, a conclu que le pouvoir d'un agent de police d'interpeller des automobilistes au hasard constitue une détention arbitraire et qu'il viole donc l'art. 9 de la Charte. En outre, il a statué que le par. 189a(1) du Code de la route ne satisfaisait pas aux exigences de proportionnalité énoncées par notre Cour dans l'arrêt R. c. Oakes, [1986] 1 R.C.S. 103, et que, par conséquent, il ne pouvait pas être justifié en vertu de l'article premier de la Charte. Toutefois, le juge Tarnopolsky a refusé d'annuler le par. 189a(1) comme "inopérant" aux termes du par. 52(1) de la Loi constitutionnelle de 1982. Il a plutôt donné une interprétation atténuée à la disposition, selon laquelle elle [TRADUCTION] "ne vise qu'un programme structuré d'interpellations comme le programme R.I.D.E., des contrôles routiers où tous les véhicules doivent stopper ou une interpellation pour un motif précis". Finalement, il a conclu que même si l'interpellation au hasard qui a eu lieu en l'espèce contrevenait à la Charte, la déclaration de l'appelant à l'agent de police dans laquelle il admettait savoir que son permis était suspendu ne devrait pas être exclue en application du par. 24(2) de la Charte.

Le juge Brooke, dissident en partie, a conclu que même si l'interpellation au hasard constituait une détention arbitraire, elle pouvait être justifiée en vertu de l'article premier de la Charte. À son avis, les questions soulevées dans cette affaire étaient régies par l'arrêt Dedman c. La Reine, [1985] 2 R.C.S. 2, même si les faits étaient survenus avant l'adoption de la Charte.

Questions en litige

Les questions constitutionnelles ont été formulées de la manière suivante par le Juge en chef dans son ordonnance du 24 janvier 1989:

1.Le paragraphe 189a(1) du Code de la route, L.R.O. 1980, ch. 198, modifié par l'art. 2 de la Loi de 1981 modifiant le Code de la route (no 3), L.O. 1981, ch. 72, est‑il incompatible avec les art. 7, 8 et 9 de la Charte canadienne des droits et libertés dans la mesure où il autorise l'interception au hasard d'un véhicule à moteur et de son conducteur par un agent de police qui n'a aucun motif raisonnable ni aucun autre motif précis de croire qu'une infraction a été commise, lorsque cette interception ne fait pas partie d'une procédure structurée comme le programme R.I.D.E.?

2.Si la réponse à la première question est affirmative, le par. 189a(1) du Code de la route est‑il justifiable en vertu de l'article premier de la Charte?

Dispositions législatives et constitutionnelles

Code de la route, L.R.O. 1980, ch. 198

18 (1) Nul ne doit conduire un véhicule automobile sur une voie publique à moins que ce véhicule automobile n'appartienne à une catégorie de véhicules automobiles pour laquelle la personne est titulaire d'un permis de conduire délivré par le ministre.

19 (1) Le conducteur d'un véhicule automobile porte sur lui en tout temps son permis de conduire lorsqu'il a la responsabilité du véhicule. Il le présente pour inspection légitime, à la demande d'un constable ou d'un agent chargé de faire appliquer les dispositions de la présente loi.

189a (1) Un agent de police, dans l'exercice légitime de ses fonctions, peut exiger du conducteur d'un véhicule automobile qu'il s'arrête. Si tel est le cas, à la suite d'une demande ou de signaux, le conducteur obéit immédiatement à la demande de l'agent identifiable à première vue comme tel.

Loi sur l'assurance‑automobile obligatoire, L.R.O. 1980, ch. 83

3 (1) L'utilisateur d'un véhicule automobile sur une route doit détenir en tout temps:

a)une carte d'assurance du véhicule;

b)une carte d'assurance attestant qu'il est assuré en vertu d'un contrat d'assurance‑automobile.

Il est tenu de remettre cette carte à la demande d'un agent de police qui désire l'examiner.

Charte canadienne des droits et libertés

1. La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique.

7. Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale.

8. Chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives.

9. Chacun a droit à la protection contre la détention ou l'emprisonnement arbitraires.

24. (1) Toute personne, victime de violation ou de négation des droits ou libertés qui lui sont garantis par la présente charte, peut s'adresser à un tribunal compétent pour obtenir la réparation que le tribunal estime convenable et juste eu égard aux circonstances.

(2) Lorsque, dans une instance visée au paragraphe (1), le tribunal a conclu que des éléments de preuve ont été obtenus dans des conditions qui portent atteinte aux droits ou libertés garantis par la présente charte, ces éléments de preuve sont écartés s'il est établi, eu égard aux circonstances, que leur utilisation est susceptible de déconsidérer l'administration de la justice.

Loi constitutionnelle de 1982

52. (1) La Constitution du Canada est la loi suprême du Canada; elle rend inopérantes les dispositions incompatibles de toute autre règle de droit.

Arrêts antérieurs de notre Cour portant sur la validité des interpellations au hasard

Dans l'arrêt Dedman c. La Reine, précité, et Hufsky c. La Reine, [1988] 1 R.C.S. 621, la Cour a examiné l'importance et les conséquences des interpellations au hasard d'automobilistes par la police.

Dans l'affaire Dedman, l'interpellation au hasard a été effectuée dans le cadre de la campagne R.I.D.E en Ontario, un programme en vertu duquel la police établit des points de contrôle sur le bord de la route et interpelle au hasard des automobilistes pour vérifier s'ils sont sobres. Il a été reconnu que les agents de police qui effectuaient ces interpellations demandaient de voir les permis de conduire des automobilistes dans le but d'engager une conversation avec eux. En réalité, c'était pour déterminer s'il y avait des motifs de soupçonner raisonnablement que le conducteur avait consommé de l'alcool.

L'interpellation au hasard dont il est question dans l'affaire Dedman a été effectuée en 1980, une année avant l'adoption du par. 189a(1) du Code de la route et deux ans avant l'entrée en vigueur de la Charte. Dans leurs opinions respectives, les juges formant la majorité et ceux formant la minorité ont conclu que l'agent de police n'avait pas le pouvoir légal d'effectuer une interpellation au hasard. Toutefois, le juge Le Dain, qui a rédigé l'opinion de la majorité, a conclu que le pouvoir de common law en matière d'interpellations au hasard effectuées dans le cadre du programme R.I.D.E. pouvait s'appuyer sur les devoirs généraux des agents de police compte tenu du critère énoncé dans l'arrêt R. v. Waterfield, [1963] 3 All E.R. 659. Le juge Le Dain souligne, aux pp. 34 et 35:

Pour appliquer le critère de l'arrêt Waterfield à l'arrêt au hasard d'automobilistes pour les fins visées par le programme R.I.D.E., il est utile de parler du droit de circuler en voiture sur la voie publique en tant que "faculté". . . Pour évaluer l'entrave à ce droit causée par l'arrêt de véhicules au hasard, il faut se rappeler cependant que ce droit n'est pas une liberté fondamentale comme le droit ordinaire de circuler dont jouit une personne, mais une activité qui nécessite un permis, c'est‑à‑dire assujettie à une réglementation et à un contrôle en vue de la protection de la vie des personnes et de la propriété.

L'arrêt Hufsky, précité, portait également sur la validité d'un programme structuré d'interpellations au hasard qui étaient effectuées cette fois dans le cadre d'un programme de "contrôles routiers ponctuels" qui ne faisait pas partie du programme R.I.D.E. Ces interpellations étaient soit-disant autorisées par le par. 189a(1) du Code de la route. Le paragraphe a été contesté pour le motif qu'il contrevenait aux dispositions de la Charte. Contrairement aux interpellations au hasard effectuées dans le cadre du programme R.I.D.E. dont il est question dans l'affaire Dedman, l'interpellation au hasard effectuée dans le cadre du contrôle routier ponctuel en cause dans l'affaire Hufsky visait davantage que les conducteurs en état d'ébriété. Comme en l'espèce, l'interpellation visait plutôt plusieurs objectifs — vérifier la sobriété, les permis de conduire, les assurances et l'état mécanique des véhicules. La seule directive qui régissait les interpellations au hasard dans l'affaire Hufsky, précité, était qu'il devait y avoir au moins une voiture de police identifiée parmi les véhicules utilisés pour effectuer les contrôles routiers ponctuels.

Hufsky a été interpellé au hasard par un agent de police dans la communauté urbaine de Toronto. L'agent a demandé à voir le permis de conduire de l'appelant et une preuve d'assurance et a vérifié s'ils étaient valides. En parlant avec Hufsky, l'agent a décelé une odeur d'alcool exhalée par l'appelant et a constaté une légère difficulté de prononciation. L'agent a demandé à Hufsky de le suivre jusqu'à sa voiture de police afin de subir un alcootest. Mais quand l'agent lui a demandé de fournir un échantillon d'haleine, Hufsky a refusé d'obtempérer. L'agent a alors avisé Hufsky qu'il serait accusé de refus de fournir un échantillon d'haleine et l'a informé de son droit d'avoir recours sans délai à l'assistance d'un avocat.

Le juge Le Dain, rédigeant l'opinion unanime de la Cour, a statué que les interpellations au hasard effectuées dans le cadre du programme de contrôles routiers ponctuels et autorisés par le par. 189a(1) du Code de la route ne contrevenaient pas à la Charte. Il a conclu que même si l'interpellation au hasard constituait une détention arbitraire contrairement à l'art. 9 de la Charte, elle était justifiée en vertu de l'article premier. Il a également conclu que l'interpellation au hasard ne constituait pas une fouille, une perquisition ou une saisie abusive au sens de l'art. 8 de la Charte. En statuant que les interpellations au hasard, tout en violant l'art. 9, étaient justifiées en vertu de l'article premier, il a dit, aux pp. 636 et 637:

Vu l'importance de la sécurité routière et du rôle qu'est appelé à jouer à ce sujet le pouvoir d'arrêter au hasard afin d'accroître tant la détection que la perception du risque de détection des infractions à la circulation automobile, dont plusieurs sont indétectables par la simple observation de la façon de conduire, je suis d'avis que la restriction que le par. 189a(1) du Code de la route impose au droit à la protection contre la détention arbitraire garanti par l'art. 9 de la Charte est raisonnable et que sa justification peut se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique. De par sa nature et son degré, l'intrusion que représente l'arrêt au hasard effectué afin de procéder à un contrôle routier ponctuel en l'espèce, en ayant à l'esprit que la conduite d'un véhicule automobile est une activité autorisée et assujettie à une réglementation et à un contrôle pour des motifs de sécurité, est proportionnelle à la fin recherchée.

Il y a peu de différence entre l'interpellation au hasard visée en l'espèce et l'interpellation au hasard dont notre Cour a traité dans l'arrêt Hufsky. Dans les deux cas, l'interpellation a été effectuée pour vérifier les permis de conduire, les assurances, l'état mécanique et, bien que cela n'ait jamais été dit explicitement au procès de l'appelant, la sobriété du conducteur. Dans les deux cas, les actes des policiers étaient autorisés principalement par le par. 189a(1) du Code de la route qui leur accordait un pouvoir discrétionnaire absolu d'interpeller des automobilistes à la condition que ce soit dans l'exercice légitime de leurs fonctions. Finalement, l'intimé, le procureur général de l'Ontario, s'est fondé exactement sur la même preuve extrinsèque dans chaque cas pour justifier les interpellations au hasard.

On pourrait chercher à établir une distinction d'avec l'arrêt Hufsky en faisant valoir qu'il s'appliquait à un programme structuré de contrôles routiers ponctuels tandis que la présente affaire porte sur la constitutionnalité d'interpellations effectuées complètement au hasard par les policiers dans le cadre d'une vérification de routine qui ne faisait pas partie d'un programme structuré. Il se pourrait bien que parce qu'elles ne font pas partie d'un programme structuré, ces interpellations doivent être traitées comme étant plus douteuses du point de vue constitutionnel que celles effectuées dans le cadre d'un programme structuré. Néanmoins, dans la mesure où l'agent de police qui interpelle agit conformément à une loi, les interpellations au hasard peuvent, à mon avis, être justifiées conformément à la Charte.

Une interpellation au hasard pour une vérification de routine viole‑t‑elle les art. 7, 8 et 9 de la Charte?

Dans l'arrêt Hufsky, précité, le juge Le Dain a statué que l'interpellation au hasard d'un automobiliste pour les fins du contrôle routier ponctuel violait l'art. 9 de la Charte. Il a conclu que l'automobiliste interpellé à un point de contrôle était détenu selon le sens donné à ce terme dans les arrêts R. c. Therens, [1985] 1 R.C.S. 613, et R. c. Thomsen, [1988] 1 R.C.S. 640. Il affirme, à la p. 632:

En arrêtant des véhicules au hasard pour les fins du contrôle routier ponctuel, l'agent de police a restreint la liberté d'action de l'appelant au moyen d'une sommation ou d'un ordre qui pourrait entraîner des conséquences sérieuses sur le plan juridique, et il y avait une responsabilité pénale en cas de refus d'obtempérer à la sommation ou à l'ordre.

Le juge Le Dain a également établi que la détention était arbitraire étant donné "qu'il n'y avait aucun critère de sélection des conducteurs à qui on demanderait de s'arrêter et de se soumettre au contrôle routier ponctuel". Il dit, à la p. 633:

La sélection était laissée à l'entière discrétion de l'agent de police. Un pouvoir discrétionnaire est arbitraire s'il n'y a pas de critère, exprès ou tacite, qui en régit l'exercice.

Les conclusions auxquelles on est arrivé dans l'arrêt Hufsky, précité, répondent à la question de la détention arbitraire soulevée en l'espèce. Bien que les policiers aient exprimé des opinions divergentes quant à savoir si l'appelant aurait été arrêté s'il avait tenté de s'enfuir, il est évident qu'il était détenu. Les agents de police avaient restreint la liberté d'action de l'appelant au moyen d'une sommation ou d'un ordre. De plus, bien que la détention n'ait visé que des infractions en matière de circulation plutôt que des violations du Code criminel, les peines maximales de 2 000 $ d'amende ou de six mois d'emprisonnement démontrent que les conséquences juridiques de la détention étaient sérieuses. La détention était arbitraire, étant donné que la décision d'effectuer l'interpellation relevait du pouvoir discrétionnaire absolu des agents de police. Par conséquent il n'y a aucun doute que l'interpellation au hasard pour une vérification de routine constituait une détention arbitraire contrairement à l'art. 9 de la Charte.

La contestation de l'appelant fondée sur l'art. 8 est également régie par l'arrêt Hufsky. Le juge Le Dain y affirme, à la p. 638:

À mon avis, la demande de l'agent de police, faite conformément aux dispositions législatives précitées, que l'appelant lui remette son permis de conduire et sa carte d'assurance pour examen, ne constituait pas une fouille au sens de l'art. 8, parce qu'elle ne constituait pas une atteinte à une expectative raisonnable en matière de vie privée. Cf. Hunter c. Southam Inc., [1984] 2 R.C.S. 145. Il n'y a pas d'atteinte de ce genre lorsqu'une personne est requise de produire une licence ou un permis, ou une autre preuve documentaire d'un statut ou du respect de quelque exigence légale constituant une condition licite de l'exercice d'un droit ou d'un privilège.

L'article 8 pourrait s'appliquer dans des circonstances où la police, en effectuant une interpellation au hasard, trouve dans la voiture de la marijuana ou un objet volé. Mais en l'espèce, la police a seulement demandé à l'appelant son permis de conduire et sa preuve d'assurance. L'appelant a rapidement admis que son permis était suspendu et que pour cette raison il n'était pas en mesure de présenter ces documents. On ne peut donc soutenir qu'il y a eu une "saisie" au sens de l'art. 8. L'acte accompli par la police en l'espèce ne peut être considéré comme une violation de l'art. 8 de la Charte.

Étant donné qu'il a été déterminé que les interpellations au hasard pour une vérification de routine violent l'art. 9 de la Charte, il n'est pas nécessaire de décider si ces interpellations au hasard portent atteinte à l'art. 7.

La violation de l'art. 9 peut‑elle être justifiée en vertu de l'article premier de la Charte?

Bien qu'une vérification de routine aux termes du par. 189a(1) du Code de la route constitue une violation de la protection contre la détention arbitraire que garantit l'art. 9, il reste à déterminer si la disposition peut être sauvegardée par l'article premier de la Charte. Voici le texte de l'article premier:

1. La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique.

Cet article exige que les tribunaux tentent d'arriver à un équilibre convenable entre les droits fondamentaux des particuliers et les restrictions légales qui peuvent être imposées à ces droits au profit de l'ensemble de la société.

Le pouvoir d'un agent de police d'intercepter des véhicules automobiles au hasard découle du par. 189a(1) du Code de la route et est donc prescrit par une règle de droit. Voir Hufsky, précité, à la p. 634. Ce pouvoir a également été justifié par notre Cour dans l'arrêt Dedman, précité, comme étant prescrit par la common law.

Le n{oe}ud de la question est de savoir si la vérification de routine effectuée véritablement au hasard "est une atteinte raisonnable dont la justification peut se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique". C'est à ce stade‑ci que le processus délicat d'évaluation doit être entrepris. Le critère qui doit être utilisé pour déterminer si la loi en question peut être justifiée a été énoncé par le juge en chef Dickson dans l'arrêt R. c. Oakes, précité, et de nouveau dans l'arrêt R. c. Edwards Books and Art Ltd., [1986] 2 R.C.S. 713, aux pp. 768 et 769, de la manière suivante:

Pour établir qu'une restriction est raisonnable et que sa justification peut se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique, il faut satisfaire à deux exigences. En premier lieu, l'objectif législatif que la restriction vise à promouvoir doit être suffisamment important pour justifier la suppression d'un droit garanti par la Constitution. Il doit se rapporter à des "préoccupations urgentes et réelles". En second lieu, les moyens choisis pour atteindre ces objectifs doivent être proportionnels ou appropriés à ces fins. La proportionnalité requise, à son tour, comporte normalement trois aspects: les mesures restrictives doivent être soigneusement conçues pour atteindre l'objectif en question, ou avoir un lien rationnel avec cet objectif; elles doivent être de nature à porter le moins possible atteinte au droit en question et leurs effets ne doivent pas empiéter sur les droits individuels ou collectifs au point que l'objectif législatif, si important soit‑il, soit néanmoins supplanté par l'atteinte aux droits. La Cour a affirmé que la nature du critère de proportionnalité pourrait varier en fonction des circonstances. Tant dans son élaboration de la norme de preuve que dans sa description des critères qui comprennent l'exigence de proportionnalité, la Cour a pris soin d'éviter de fixer des normes strictes et rigides.

Pour avoir gain de cause l'intimée doit démontrer, selon la "prépondérance des probabilités", que le par. 189a(1) respecte le critère de proportionnalité énoncé plus haut.

On ne peut sérieusement douter que la mesure législative en question répond à une préoccupation urgente et réelle. Les statistiques projettent une image déprimante des décès et des blessures qui résultent de la conduite de véhicules automobiles sur les rues et les routes du pays. Les éléments de preuve déposés démontrent de façon frappante à quel point la préoccupation est urgente et réelle.

Il en ressort que, de 1980 à 1984, le nombre d'accidents rapportés en Ontario est passé d'environ 182 000 à près de 200 000. Ces accidents ont entraîné le décès de plus de 1 000 personnes et ont causé des blessures à plus de 90 000 autres au cours de chacune de ces années. En 1984 seulement, on évalue le montant des dommages causés aux biens à près de 500 millions de dollars (Ontario Motor Vehicle Accident Facts: 1980, 1982, 1982, 1983 et 1984). Ces extraits soulignent les risques de décès, de blessures et de dommages matériels qui sont associés à la conduite des automobiles. Il est normal que le gouvernement prenne des mesures pour empêcher ou du moins réduire ce carnage sur nos routes. Des lois et des règlements adéquats sont nécessaires pour régir le privilège de la conduite automobile sur les voies publiques.

La preuve révèle également une préoccupation urgente et réelle plus spécifique en ce qui concerne des aspects particuliers et précis de la conduite automobile. Ces statistiques se rapportent à des secteurs où la probabilité d'accidents peut être réduite. Elles sont par conséquent directement applicables à la question des interpellations au hasard. Le bon état mécanique du véhicule, la possession d'un permis de conduire valide et d'une preuve d'assurance appropriée ainsi que la sobriété du conducteur constituent les trois principaux sujets de préoccupation particuliers. Chacun des trois vise une part importante du nombre total d'accidents. Ces facteurs, qui constituent des conditions préalables à la conduite prudente d'un véhicule automobile, peuvent être facilement identifiés et, s'ils peuvent être contrôlés, il y aura alors réduction du nombre d'accidents causant des décès et des blessures. Il s'agit donc d'un but très légitime à atteindre par voie législative de manière à contrôler et à éliminer ces facteurs dangereux et à réduire ainsi le nombre effroyable des victimes d'accidents de la route.

La catégorie du bon état mécanique comprend notamment le bon fonctionnement des phares, des freins et des ceintures de sécurité. Les statistiques concernant le port de la ceinture de sécurité constituent un exemple intéressant. La preuve révèle que les conducteurs et les passagers ont de bien meilleures chances d'éviter d'être blessés dans un accident d'auto lorsqu'ils portent une ceinture de sécurité. En 1984, la probabilité de ne pas être blessés était de presque 20 pour 100 supérieure pour les conducteurs qui portaient une ceinture de sécurité. En outre, la gravité des blessures était sensiblement moindre chez ceux qui avaient été blessés (Ontario Motor Vehicle Accident Facts: 1984).

De plus, il convient d'accorder beaucoup d'importance à la preuve statistique qui démontre une corrélation indéniable entre la conduite sans permis et un accroissement du risque d'accidents graves de la route. Par exemple, en 1984, 330 000 accidents d'auto ont été rapportés en Ontario, dont 1 500 ont entraîné des pertes de vie. De ce total de 330 000, plus de 6 000 (environ 2 pour 100) impliquaient des conducteurs sans permis. Toutefois, dans ce que je considère comme étant un chiffre vraiment stupéfiant, des 1 500 accidents mortels, plus de 100 (soit environ 7 pour 100) impliquaient des conducteurs sans permis. En d'autres termes, dans le cas des accidents impliquant des conducteurs avec permis, le risque de décès était de 214 contre 1, alors que pour les conducteurs sans permis le même risque était de 59 contre 1. Le même genre de comparaison en ce qui a trait aux véhicules assurés et à ceux non assurés impliqués dans des accidents mortels a donné des résultats qui étaient presque aussi marqués. Conduire sans assurance appropriée fait passer les risques d'implication dans des accidents mortels de 212 contre 1 à 83 contre 1 (Ontario Motor Vehicle Accident Facts: 1984). Les statistiques relatives aux années 1982 et 1983 indiquent une situation comparable.

L'interception et la vérification des véhicules constituent le seul moyen de vérifier le bon fonctionnement des freins et des ceintures de sécurité. Il est encore plus important de déterminer si un conducteur possède un permis et des assurances. Encore une fois, cela ne peut se faire qu'en interceptant des véhicules. Les statistiques démontrent que le conducteur sans permis constitue une menace sur la route. En outre, un tel conducteur démontre un mépris de la loi et de l'irresponsabilité ainsi qu'une tendance marquée à être impliqué dans des accidents graves. Tous ceux qui circulent sur les routes ont intérêt à ce que les conducteurs sans permis soient arrêtés et chassés de la route. De même, la société dans son ensemble a intérêt à réduire les frais des services médicaux, d'hospitalisation et de réadaptation qui doivent être assurés aux victimes d'accidents ainsi que le préjudice émotionnel causé à leur famille. Il est certain que le remède préventif que prévoit le par. 189a(1) et qui consiste à obliger les conducteurs à s'arrêter est préférable à la tragédie terminale incurable que représentent la victime d'un accident mortel et la victime handicapée de façon permanente. Il vaut certainement mieux permettre les interpellations au hasard et empêcher qu'un accident ne survienne que refuser le droit d'interpeller et confirmer de façon répétée les tristes statistiques à la morgue et à l'hôpital. Les motifs des juges formant la majorité de la Cour suprême des États‑Unis dans l'affaire Delaware v. Prouse, 440 U.S. 648 (1979), qui ont conclu à l'inconstitutionnalité des interpellations au hasard, ont été précisément rejetés dans l'arrêt Hufsky. Toutefois, la position à l'égard de cette question a été bien exposée par le juge Rehnquist (maintenant Juge en chef) dans ses motifs de dissidence, à la p. 666:

[TRADUCTION] L'intérêt premier de l'État [. . .] vise la sécurité routière et non l'arrestation d'automobilistes sans permis dans le seul but d'arrêter des automobilistes sans permis. Le but véritable de l'application des règlements en matière de sécurité des véhicules automobiles est de chasser de la route le conducteur sans permis avant qu'il ne démontre les raisons pour lesquelles il ne possède pas de permis. La Cour [suprême des États‑Unis à la majorité] préférerait apparemment que l'État vérifie le permis et le certificat d'immatriculation du véhicule pendant que le tas de ferraille est remorqué.

La réduction du nombre de conducteurs en état d'ébriété constitue un autre volet de l'objectif légitime de la loi concernant la sécurité sur les routes. Les études sur ce sujet ont reçu beaucoup de publicité au cours des dernières années. Encore une fois, une preuve écrasante confirme le rapport entre les accidents graves et la conduite sous l'influence de l'alcool ou d'autres drogues. En 1984, le pourcentage du nombre d'accidents dus à la consommation d'alcool ou de drogue est passé de 8 pour 100 de tous les accidents à 10 pour 100 des accidents causant des blessures et même encore plus à 31 pour 100 des accidents mortels (Ontario Motor Vehicle Accident Facts: 1984). Cette corrélation est devenue la justification de vastes campagnes qui visent à éduquer les gens au sujet de l'alcool au volant et comportent des programmes structurés d'interpellations au hasard comme le programme R.I.D.E. dans les centres plus importants, qui ont pour objet de réduire la conduite en état d'ébriété.

Voici les propos convaincants que le juge Le Dain a tenus dans l'arrêt Hufsky, précité, à la p. 636, après avoir examiné la même preuve qui a été présentée pour justifier les interpellations au hasard effectuées dans le cadre d'un programme de contrôles routiers ponctuels:

[Elle] renforce l'impression de gravité du problème des accidents de la route, en termes de décès, de blessures et de dommages matériels, et appuie l'importance primordiale d'une application efficace des lois et règlements de la circulation automobile, en vue d'assurer la sécurité routière. Les graphiques ou tableaux préparés par l'intimée à partir des données statistiques figurant dans les rapports gouvernementaux soulignent les points suivants: l'importance relative de la suspension du permis et de la répression de la conduite automobile avec permis suspendu; la proportion relativement plus élevée des conducteurs sans permis et sans assurance, par rapport à la proportion des conducteurs titulaires d'un permis et assurés, impliqués dans des accidents de la route ayant causé un décès ou des blessures; et l'importance relative des infractions à la circulation automobile, dont la conduite sans permis, ou avec permis suspendu, ou sans assurance . . .

À mon avis ces observations s'appliquent également aux vérifications de routine effectuées au hasard dont il est question en l'espèce. Je suis convaincu que le texte législatif contesté (le par. 189a(1) du Code de la route) et les interpellations au hasard effectuées en application de ses dispositions sont destinées à répondre à tout ce qu'il y a de plus urgent et réel comme préoccupation. Il convient maintenant d'examiner si les moyens choisis sont proportionnels à ces préoccupations urgentes ou s'ils conviennent à celles‑ci.

Le moyen choisi est le contrôle routier ponctuel, qui ne fait pas partie d'un programme structuré comme le programme R.I.D.E., et non une interpellation pour un motif précis. Il est maintenant bien établi que ces dernières façons d'interpeller les conducteurs peuvent être justifiées aux termes de l'article premier. (Voir Dedman, précité, Hufsky, précité, et l'arrêt de la Cour d'appel en l'espèce, en particulier l'opinion du juge Tarnopolsky.)

À mon avis, l'interpellation au hasard a un lien rationnel avec la sécurité sur les routes et est conçue avec soin pour la réaliser. Ces interpellations portent le moins possible atteinte aux droits du conducteur. De plus, les interpellations ne portent pas atteinte assez gravement aux droits individuels pour que la restriction de ces droits l'emporte sur l'objectif de la loi.

Tout d'abord, on a remarqué que l'interception des véhicules a non seulement un lien rationnel avec la sécurité routière, mais encore qu'il s'agit de la seule façon de vérifier le permis de conduire et l'assurance d'un conducteur, l'état mécanique d'un véhicule ou la sobriété d'un conducteur. Il convient de rappeler que lorsque des peines sont imposées pour des infractions en matière de circulation, la suspension du permis de conduire joue souvent un rôle important. De plus, la société est protégée par la suspension du droit de conduire d'un conducteur et les tribunaux peuvent ainsi, selon l'espèce, imposer des peines d'emprisonnement moins longues à l'avantage du contrevenant. Pour que les suspensions de permis constituent une peine efficace, elles doivent être exécutoires. Permettre de conduire à ceux dont le permis est suspendu crée à la fois un danger pour la société et encourage le non‑respect de la loi en en facilitant la violation. Il doit exister un véritable élément de risque de détection des conducteurs sans permis pour que la suspension d'un permis puisse être un remède efficace. Les interpellations au hasard constituent le seul moyen dissuasif efficace.

La dissuasion constitue donc un aspect important de la vérification de routine. Comme le juge Rehnquist l'a dit dans l'arrêt Delaware v. Prouse, à la p. 666, [TRADUCTION] "un conducteur sans permis qui n'est pas dissuadé [simplement] par la perspective d'être impliqué dans une infraction en matière de circulation ou un autre incident qui l'obligerait à présenter un permis serait dissuadé par la possibilité d'être soumis à un contrôle routier ponctuel". En d'autres termes, un conducteur pourrait être prêt à courir la chance de conduire sans permis lorsque les facteurs susceptibles d'entraîner son arrestation relèvent plus ou moins de son contrôle, alors qu'une vérification de routine au hasard ne relève pas de son contrôle et pourrait dissuader le conducteur sans permis de prendre le volant.

La preuve révèle qu'en 1984 un conducteur sur 37 en Ontario était sous le coup d'une suspension de permis (Ontario Motor Vehicle Accident Facts: 1984). Pour dissuader un aussi grand nombre de conducteurs dont le permis a été suspendu dans la province de conduire illégalement, il faut plus qu'une simple interpellation ponctuelle structurée ou une interpellation pour un motif précis. Les endroits prévus pour les arrêts du programme R.I.D.E sont souvent bien connus ou visibles de loin, ce qui permet au contrevenant d'échapper à l'interpellation structurée. Sans vérification ponctuelle de routine, les conducteurs en état d'ébriété pourraient facilement éviter les conséquences de leur inconduite dangereuse. Un commentateur a décrit la vérification de routine comme [TRADUCTION] "la principale technique active de maintien de l'ordre en ce qui concerne les conducteurs en état d'ébriété": Segal, "R. v. Hufsky: Random Spot Check Programmes" (1989), 1 J.M.V.L. 34, à la p. 44.

Reconnaître la validité de la vérification de routine au hasard, c'est se rendre à la réalité. Dans les régions rurales, il sera impossible de mettre sur pied un programme structuré efficace. Pourtant, les infractions en matière de circulation dans ces régions entraînent des conséquences tout aussi tragiques que dans les plus grands centres urbains. Même les services de police municipaux importants auront, en raison de contraintes financières et d'un manque de personnel, de la difficulté à mettre sur pied un programme structuré qui sera véritablement dissuasif.

Il ressort facilement de ce qui précède qu'il existe un lien rationnel entre la vérification de routine et l'objectif de la disposition habilitante du Code de la route.

La question suivante est de savoir si la vérification de routine porte le moins possible atteinte au droit que confère l'art. 9. La conduite de façon incompétente crée un risque grave pour tous ceux qui circulent sur les routes. Cette situation a été reconnue au Canada par la loi qui assortit l'obtention d'un permis de conduire de la condition que le requérant démontre une compétence minimale. Seuls les titulaires d'un permis peuvent exercer le droit de conduire. Même ce droit est réglementé par les dispositions des lois provinciales sur la circulation et par le Code criminel. Si le droit de conduire ne peut être exercé que par les titulaires de permis, il doit alors y avoir une méthode qui permette à la société de veiller à ce que cette exigence soit respectée par tous les conducteurs. Cette même exigence se retrouve dans un grand nombre de lois qui visent à réglementer d'autres activités et d'autres produits qui suscitent des craintes pour la sécurité d'autrui. Voir par exemple, d'autres lois de la province de l'Ontario comme la Loi sur la chasse et la pêche, L.R.O. 1980, ch. 182, art. 14, et la Loi sur les motoneiges, L.R.O. 1980, ch. 301, art. 15a, en vertu desquelles il est permis d'effectuer des interpellations au hasard sans motif précis. C'est également le cas des lois qui régissent la protection de l'environnement, les produits de la ferme, les véhicules tout terrain et les éventuels contrevenants aux taxes sur le tabac et les carburants. Les activités autorisées doivent être exercées exclusivement par les titulaires de permis qui ont démontré leur compétence et leur volonté de se conformer aux directives et aux exigences justes et raisonnables qui régissent tous les titulaires de permis. Il serait inutile d'exiger des permis pour ceux qui exercent des activités qui peuvent être dangereuses et qui exigent un degré de compétence prouvé s'il n'y avait aucun moyen de s'assurer qu'un conducteur détient un permis valide.

Le juge Le Dain a conclu dans l'arrêt Hufsky, précité, aux pp. 636 et 637 que "De par sa nature et son degré, l'intrusion que représente l'arrêt au hasard effectué afin de procéder à un contrôle routier ponctuel en l'espèce [. . .] est proportionnelle à la fin recherchée." Cette remarque s'applique également à la vérification de routine effectuée en l'espèce. Ces interpellations sont et doivent être relativement brèves et n'exigent la présentation que de quelques documents. L'inconvénient causé au conducteur est minime. Le système de données du Centre d'information de la police canadienne (C.I.P.C.) auquel ont accès les agents de police à partir de leur voiture assure la rapidité et la fiabilité du processus. Le conducteur est généralement interrogé dans sa voiture ou au pire, lorsqu'il a commis une infraction, dans la voiture de police. Il est rarement nécessaire d'amener le conducteur au poste de police. Habituellement, il n'est pas nécessaire non plus d'effectuer une fouille poussée du conducteur ou du véhicule. S'il y avait fouille poussée, elle pourrait probablement faire l'objet de contestation comme portant atteinte à l'art. 8 de la Charte. La vérification de routine porte le moins possible atteinte à la garantie de l'art. 9 contre la détention arbitraire.

Finalement, il faut démontrer que la vérification de routine ne porte pas atteinte gravement au droit garanti par l'art. 9 au point de l'emporter sur l'objectif législatif. Ce qui nous préoccupe à ce stade‑ci, c'est la perception du risque d'abus de ce pouvoir par les fonctionnaires chargés d'appliquer la loi. À mon avis, ces craintes ne sont pas fondées. Il y a déjà des mécanismes en place pour empêcher les abus. Les policiers ne peuvent interpeller des personnes que pour des motifs fondés sur la loi, en l'espèce des motifs relatifs à la conduite d'une automobile comme la vérification du permis de conduire, des assurances et de la sobriété du conducteur ainsi que de l'état mécanique du véhicule. Lorsque l'interpellation est effectuée, les seules questions qui peuvent être justifiées sont celles qui se rapportent aux infractions en matière de circulation. Toute autre procédure plus inquisitoire ne pourrait être engagée que sur le fondement de motifs raisonnables et probables. Lorsqu'une interpellation est jugée illégale, les éléments de preuve ainsi obtenus pourraient bien être écartés en vertu du par. 24(2) de la Charte.

Il y a également une preuve abondante de pouvoirs similaires conférés par la loi aux agents de police dans d'autres sociétés libres et démocratiques touchant l'interception de véhicules automobiles. Voir, par exemple, les dispositions en vigueur au Royaume‑Uni, dans les divers États de l'Australie et de la Nouvelle‑Zélande, qui viennent appuyer davantage l'hypothèse selon laquelle la loi en question n'a pas une portée trop générale: Road Traffic Act, 1972 (R.‑U.), ch. 20, art. 159; Transport Act, 1962 (Nouvelle‑Zélande), no 135, art. 66; Road Traffic Act, 1961 (Australie‑Méridionale), no 50, art. 42; Traffic Ordinances, 1949‑59 (Territoire du Nord), art. 46, 48 et 55; Road Traffic Act, 1974‑1982 (Australie‑Occidentale), art. 53; Motor Traffic Acts, 1909‑1957 (Nouvelle‑Galles du Sud), par. 5(1); Motor Car Act, 1958 (Victoria), art. 22, 29 et 40; et Traffic Act, 1949‑1988 (Queensland), art. 35 et 39.

En définitive, j'ai conclu que les vérifications de routine constituent une atteinte justifiable aux droits conférés par l'art. 9. Il est intéressant de noter que le juge en chef McRuer, à titre de président de la Royal Commission Inquiry into Civil Rights de 1968, est arrivé à la même conclusion il y a 21 ans. Aux pp. 730 et 731 du second volume du premier rapport, il écrit:

[TRADUCTION] Il se pourrait bien que la police doive avoir des pouvoirs plus étendus pour exercer un contrôle et enquêter sur l'utilisation des véhicules automobiles sur les routes. Un véhicule automobile est une machine dangereuse qui, si elle n'est pas utilisée avec prudence, peut être mortelle. Il s'agit d'un moyen de locomotion pratique pour la perpétration de crimes de tous genres. Ceux qui conduisent des véhicules automobiles sur la route n'ont aucun droit civil de le faire. Ils ne peuvent le faire que s'ils sont titulaires d'un permis à cette fin. Cette exigence ne constitue pas une atteinte aux droits civils. Il n'y a aucune raison pour laquelle un conducteur d'un véhicule automobile sur la route ne puisse être tenu de démontrer à l'agent d'un organisme chargé d'appliquer la loi qu'il possède un permis à cette fin. Si la police a le pouvoir d'interroger le conducteur d'un véhicule automobile pour vérifier son droit de le conduire, le certificat d'immatriculation du véhicule et le nom et l'adresse du propriétaire et du conducteur, tous les pouvoirs d'arrestation draconiens dont nous avons discuté paraîtraient peu ou pas nécessaires.

Bien que le concept de ce qui peut constituer une violation des droits civils puisse être quelque peu différent de nos jours, la qualification par le juge en chef McRuer de la nature de la conduite et la nécessité de la contrôler sont aussi valides aujourd'hui qu'elles l'étaient à ce moment‑là. Afin d'assurer un contrôle approprié, la société doit être en mesure d'exiger que des interpellations au hasard soient effectuées sans motif précis et en dehors de tout programme formel.

Conclusion

Bien que la vérification de routine soit une détention arbitraire contrairement à l'art. 9 de la Charte, l'atteinte est raisonnable et peut être justifiée dans le cadre d'une société libre et démocratique. Par conséquent, le par. 189a(1) du Code de la route constitue une disposition législative valide et constitutionnelle. Il n'est pas nécessaire de donner à l'article une interprétation atténuée comme l'a fait le juge Tarnopolsky de la Cour d'appel ni d'en restreindre la portée d'aucune façon. Vu cette conclusion, il n'est pas nécessaire de traiter des arguments fondés sur le par. 24(2).

Voici les réponses aux questions constitutionnelles:

1.Le paragraphe 189a(1) du Code de la route, L.R.O. 1980, ch. 198, modifié par l'art. 2 de la Loi de 1981 modifiant le Code de la route (no 3), L.O. 1981, ch. 72, est‑il incompatible avec les art. 7, 8 et 9 de la Charte canadienne des droits et libertés dans la mesure où il autorise l'interception au hasard d'un véhicule à moteur et de son conducteur par un agent de police qui n'a aucun motif raisonnable ni aucun autre motif précis de croire qu'une infraction a été commise, lorsque cette interception ne fait pas partie d'une procédure structurée comme le programme R.I.D.E.?

Réponse:Le paragraphe 189a(1) du Code de la route, L.R.O. 1980, ch. 198, modifié par l'art. 2 de la Loi de 1981 modifiant le Code de la route (no 3), L.O. 1981, ch. 72, n'est pas incompatible avec les art. 7 ou 8 de la Charte canadienne des droits et libertés, mais est incompatible avec l'art. 9.

2.Si la réponse à la première question est affirmative, le par. 189a(1) du Code de la route est‑il justifiable en vertu de l'article premier de la Charte?

Réponse:Le paragraphe 189a(1) du Code de la route est justifiable en vertu de l'article premier de la Charte.

Par conséquent, le pourvoi est rejeté.

Pourvoi rejeté.

Procureur de l'appelant: Morris Manning, Toronto.

Procureur de l'intimée: Le procureur général de l'Ontario, Toronto.

Procureur de l'intervenant le procureur général du Canada: John C. Tait, Ottawa.

Procureur de l'intervenant le procureur général de la Nouvelle‑Écosse: Le ministère du procureur général de la Nouvelle‑Écosse, Halifax.

Procureur de l'intervenant le procureur général du Nouveau‑Brunswick: Le procureur général du Nouveau‑Brunswick, Fredericton.

Procureur de l'intervenant le procureur général du Manitoba: Le procureur général du Manitoba, Winnipeg.


Synthèse
Référence neutre : [1990] 1 R.C.S. 1257 ?
Date de la décision : 31/05/1990

Parties
Demandeurs : Sa Majesté la Reine
Défendeurs : Ladouceur
Proposition de citation de la décision: R. c. Ladouceur, [1990] 1 R.C.S. 1257 (31 mai 1990)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1990-05-31;.1990..1.r.c.s..1257 ?
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