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16/08/1990 | CANADA | N°[1990]_2_R.C.S._367

Canada | Institut professionnel de la fonction publique du canada c. Territoires du nord-ouest (Commissaire), [1990] 2 R.C.S. 367 (16 août 1990)


Institut professionnel de la Fonction publique du Canada c. Territoires du Nord‑Ouest (Commissaire), [1990] 2 R.C.S. 367

L'Institut professionnel de la Fonction publique du

Canada Appelant

c.

Le Commissaire des territoires du Nord‑Ouest

et la Northwest Territories

Public Service Association Intimés

et

Le procureur général du Canada et

le procureur général de l'Ontario Intervenants

répertorié: institut professionnel de la fonction publique du canada c. territoires du nord‑ouest (commissaire)

No du greffe:

21230.

1990: 20 février; 1990: 16 août.

Présents: Le juge en chef Dickson* et les juges Wilson, La Forest, L'Heureux‑Dubé, S...

Institut professionnel de la Fonction publique du Canada c. Territoires du Nord‑Ouest (Commissaire), [1990] 2 R.C.S. 367

L'Institut professionnel de la Fonction publique du

Canada Appelant

c.

Le Commissaire des territoires du Nord‑Ouest

et la Northwest Territories

Public Service Association Intimés

et

Le procureur général du Canada et

le procureur général de l'Ontario Intervenants

répertorié: institut professionnel de la fonction publique du canada c. territoires du nord‑ouest (commissaire)

No du greffe: 21230.

1990: 20 février; 1990: 16 août.

Présents: Le juge en chef Dickson* et les juges Wilson, La Forest, L'Heureux‑Dubé, Sopinka, Gonthier et Cory.

en appel de la cour d'appel des territoires du nord‑ouest

POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel des territoires du Nord‑Ouest, [1988] N.W.T.R. 223, [1988] 5 W.W.R. 684, 53 D.L.R. (4th) 530, 41 C.R.R. 230, qui a infirmé une décision du juge Marshall (1987), 43 D.L.R. (4th) 472, qui avait déclaré le par. 42(1) de la Public Service Act (T.N.-O.) inconstitutionnel. Pourvoi rejeté, les juges Wilson, Gonthier et Cory sont dissidents.

Catherine H. MacLean et Dougald E. Brown, pour l'appelant.

Robert A. Kasting et Bernard W. Funston, pour l'intimé le Commissaire des territoires du Nord‑Ouest.

Andrew J. Raven, pour l'intimée la Northwest Territories Public Service Association.

Graham R. Garton, pour l'intervenant le procureur général du Canada.

Robert E. Charney, pour l'intervenant le procureur général de l'Ontario.

//Le juge en chef Dickson//

Version française des motifs rendus par

LE JUGE EN CHEF DICKSON — J'ai eu l'avantage de lire les motifs de jugement qu'ont rédigés mes collègues les juges Sopinka et Cory dans le présent pourvoi. Bien que je sois d'accord avec la façon dont le juge Sopinka statue sur le pourvoi, j'arrive à cette conclusion uniquement en fonction de mon interprétation des motifs de jugement de la majorité de notre Cour dans ce qui est maintenant connu comme la "trilogie" en matière de droit du travail: Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), [1987] 1 R.C.S. 313, AFPC c. Canada, [1987] 1 R.C.S. 424, et SDGMR c. Saskatchewan, [1987] 1 R.C.S. 460. L'appelant n'a pas contesté directement devant notre Cour la justesse des jugements de la majorité dans cette trilogie d'arrêts.

Dans le Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), précité, le juge Le Dain a conclu au nom de trois des six juges de la Cour, à la p. 390:

. . . la garantie constitutionnelle de la liberté d'association que l'on trouve à l'al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés ne comprend pas, dans le cas d'un syndicat, la garantie du droit de négocier collectivement . . .

Un quatrième juge, le juge McIntyre, a explicitement conclu que le droit reconnu à l'al. 2d) ne s'applique qu'aux individus (à la p. 397):

Le groupe ou l'organisation n'est qu'un moyen adopté par des individus pour mieux réaliser leurs droits et aspirations individuels. [. . .] La liberté d'association ne saurait donc conférer des droits indépendants au groupe.

À mon avis, les motifs de jugement de la majorité dans les trois arrêts mentionnés sont concluants quant à la question en litige dans le présent pourvoi. La détermination de la manière de choisir les agents négociateurs constitue la première étape du droit de négocier collectivement. En outre, dans le contexte d'une lutte intersyndicale pour obtenir le statut d'agent négociateur exclusif, j'estime qu'il est impossible de qualifier le droit revendiqué par l'appelant autrement que de droit collectif attaché au syndicat. À l'étape de la constitution en société par l'Assemblée législative, l'accent n'est plus sur le droit d'association des individus. Il est plutôt mis sur le groupe lui‑même qui cherche à obtenir l'appui d'individus pour s'établir comme l'agent négociateur exclusif. Ainsi, suivant les motifs de la majorité dans le Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), précité, le choix législatif de la manière de choisir les agents négociateurs échappe à l'examen constitutionnel pour ce qui est de l'al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés parce qu'il s'agit d'un élément du processus de négociation collective et à cause aussi de la nature individuelle du droit reconnu à l'al. 2d).

Je conclus à regret que je suis incapable de partager l'avis du juge Cory qu'une fois qu'elle a établi un régime de négociation collective dans le secteur public, une législature ne peut pas imposer de restrictions arbitraires au choix de l'association avec laquelle elle entreprendra des négociations collectives. Si, comme le reconnaît le juge Cory, le gouvernement des territoires du Nord‑Ouest n'était pas tenu d'adopter un régime de négociation collective, alors, à mon avis, il s'ensuit logiquement que des restrictions imposées à un droit d'origine purement législative ne font pas intervenir la protection de l'al. 2d) de la Charte. Si l'alinéa 2d) ne garantit pas le droit de négocier collectivement, je suis incapable de comprendre comment il peut garantir un droit à un agent négociateur en particulier. Tirer une autre conclusion aurait pour effet de constitutionnaliser des droits de négocier collectivement, une proposition que notre Cour a rejetée à la majorité dans le Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.).

Pour ces motifs, et non sans beaucoup d'hésitation compte tenu des opinions que j'ai exprimées dans la trilogie d'arrêts en matière de droit du travail sur la portée de l'al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés, je conclus qu'à moins de renverser les motifs de la majorité de notre Cour dans la trilogie, le présent pourvoi doit être rejeté, avec dépens aux intimés. Je partage l'avis du juge Sopinka que les questions constitutionnelles doivent recevoir les réponses suivantes:

1.Le paragraphe 42(1) de la Public Service Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. P‑13 et ses modifications, viole‑t‑il la liberté d'association garantie par l'al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés?

Réponse: Non.

2.Si la réponse à la première question est affirmative, le par. 42(1) de la Public Service Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. P‑13 et ses modifications, peut‑il se justifier en vertu de l'article premier de la Charte canadienne des droits et libertés?

Réponse: Il n'est pas nécessaire de répondre à cette question.

//Le juge Cory//

Version française des motifs des juges Wilson, Gonthier et Cory rendus par

LE JUGE CORY — J'ai eu l'avantage de lire les motifs de jugement de mon collègue le juge Sopinka. Bien que je sois du même avis que lui sur la question de la qualité pour agir, je dois, en toute déférence, être en désaccord avec sa conclusion que l'al. 42(1)b) de la Public Service Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. P‑13 et ses modifications, n'enfreint pas l'al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés.

La Public Service Act

La Public Service Act est une loi générale qui vise à régir tous les aspects de l'emploi dans la fonction publique des territoires du Nord‑Ouest. Elle est assez brève, ne comportant que 50 articles. Néanmoins, ses dispositions ont une large portée. Elles comprennent l'organisation de la fonction publique, la classification des emplois, les nominations et les conditions d'emploi, dont la rémunération, les suspensions, les rétrogradations, les renvois et les vacances. La Loi, à son par. 42(2), dispose aussi que le Commissaire (maintenant désigné dans la Loi par le mot Ministre) peut conclure une convention collective avec une association d'employés.

Même une lecture très rapide de la Loi en révèle un aspect très important. Le Commissaire y est habilité expressément à prendre une grande variété de décisions. Le Commissaire gère et dirige la fonction publique (art. 3), il établit la classification des services et chacun des postes qu'elle comporte (art. 5), il établit les échelles de salaires (art. 7), il a le droit et le pouvoir exclusifs de nommer des personnes à des postes de la fonction publique (par. 15(1)), il peut congédier des employés ou les mettre en disponibilité (art. 26 et 32), et il peut promulguer des règlements d'application de la Loi (art. 40). Le gouvernement a donc, par l'entremise du Commissaire, conservé le moyen de contrôler les conditions d'emploi dans la fonction publique.

Ce contrôle se reflète dans les dispositions de la Loi relatives à la négociation collective. L'alinéa 42(1)a) définit une convention collective comme une entente intervenue entre le Commissaire et une "association d'employés". L'alinéa 42(1)b) définit une association d'employés de la façon suivante:

[TRADUCTION] 42. (1) Aux articles 42 à 46

. . .

b)"association d'employés" signifie une association d'employés de la fonction publique constituée en personne morale par une loi qui l'habilite à négocier collectivement.

Le paragraphe 42(2) précise ensuite que le Commissaire [TRADUCTION] "peut" conclure une convention collective avec une telle association.

Ces dispositions ont comme conséquence que le gouvernement est en mesure de contrôler tous les aspects du processus de négociation collective. Non seulement la Loi donne‑t‑elle au gouvernement le pouvoir discrétionnaire absolu de déterminer quelle association sera constituée en personne morale à titre d'agent négociateur en vertu de l'al. 42(1)b), mais elle fait dépendre la négociation d'une convention collective de la seule volonté du gouvernement. La Loi est l'une des quelques lois qui régissent les relations de travail en vigueur au Canada qui soumet le choix de l'association d'employés de même que le changement d'association par les employés à l'approbation du gouvernement, qui est aussi l'employeur. Cette approbation est laissée à l'entière discrétion du gouvernement employeur.

Ce régime juridique semble tellement favoriser le gouvernement qu'il en devient inéquitable, mais, en l'espèce, nous n'avons pas à juger de l'iniquité apparente des dispositions législatives. La question à trancher est plutôt celle de savoir si la Loi porte atteinte à la liberté d'association garantie à l'al. 2d) de la Charte.

L'alinéa 2d)

L'alinéa 2d) est ainsi rédigé:

2. Chacun a les libertés fondamentales suivantes:

. . .

d) liberté d'association.

Il faut analyser cet alinéa en fonction des trois décisions de notre Cour: Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), [1987] 1 R.C.S. 313 (le Renvoi relatif à l'Alberta), AFPC c. Canada, [1987] 1 R.C.S. 424, et SDGMR c. Saskatchewan, [1987] 1 R.C.S. 460. Le juge MacGuigan, de la Cour d'appel fédérale, a résumé utilement les positions exprimées dans ces jugements dans l'arrêt Syndicat des infirmières de la Nouvelle‑Écosse, Section Devco ("SINE") c. Conseil canadien des relations du travail (1989), 58 D.L.R. (4th) 225, à la p. 232:

Dans ces affaires, trois des six juges ont décidé que la liberté d'association garantie par l'alinéa 2d) de la Charte n'inclut aucune garantie du droit de négocier collectivement ou de faire la grève; deux juges ont émis l'opinion qu'elle incluait les deux garanties; le sixième a décidé qu'elle n'incluait pas le droit de faire la grève, (seul point sur lequel il était nécessaire de statuer dans ces affaires) mais il a laissé entendre qu'il était possible que sous d'autres aspects la négociation collective puisse bénéficier de la protection de la Charte.

Dans deux des arrêts formant la trilogie, soit le Renvoi relatif à l'Alberta et SDGMR, on a examiné si l'al. 2d) garantit un droit constitutionnel de faire la grève. Dans ces deux décisions, le juge McIntyre a statué que l'al. 2d) ne garantit pas le droit de faire la grève. Dans le Renvoi relatif à l'Alberta, il semble aussi vouloir dire que le droit de négocier collectivement n'est pas compris dans la garantie relative à la liberté d'association, bien que cette question n'ait pas été expressément soumise à la Cour. De fait, le juge Le Dain affirme dans les motifs de jugement qu'il a rédigés dans le Renvoi relatif à l'Alberta, à la p. 390:

Je suis d'accord avec le juge McIntyre pour dire que la garantie constitutionnelle de la liberté d'association que l'on trouve à l'al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés ne comprend pas, dans le cas d'un syndicat, la garantie du droit de négocier collectivement et du droit de faire la grève. Par conséquent, je suis d'avis de rejeter le pourvoi et de répondre aux questions constitutionnelles de la manière qu'il propose.

Cependant, dans les motifs qu'il a rédigés dans l'affaire AFPC, le juge McIntyre indique qu'il n'avait pas eu l'intention d'aller aussi loin. Dans l'affaire AFPC, on contestait la constitutionnalité des lois qui limitaient à 6 pour 100 et 5 pour 100 les augmentations de salaires pour deux ans et refusaient le droit de grève et de lockout pendant la même période. Le juge McIntyre, mentionnant ses motifs de jugement dans le Renvoi relatif à l'Alberta, affirme, à la p. 453:

. . . je suis d'avis que l'al. 2d) de la Charte n'inclut pas une garantie constitutionnelle du droit de faire la grève. Toutefois, ma conclusion dans cet arrêt n'écarte pas la possibilité que d'autres aspects de la négociation collective puissent bénéficier de la protection de la Charte en vertu de la garantie de la liberté d'association. [Je souligne.]

Il poursuit en disant que les dispositions législatives en cause ne portaient pas atteinte à l'al. 2d) parce que, même si elles restreignaient le pouvoir de négocier du syndicat, elles permettaient quand même que des négociations entre l'employeur et le syndicat aient lieu relativement aux autres conditions d'emploi.

Dans l'arrêt AFPC, comme dans les autres arrêts de la trilogie, le juge en chef Dickson et le juge Wilson ont exprimé l'avis que l'al. 2d) garantit un droit constitutionnel de négocier collectivement. Par contre, le juge Le Dain, aux motifs duquel les juges Beetz et La Forest ont souscrit, a conclu que l'al. 2d) ne comporte pas ce droit. On peut donc constater que la Cour paraît divisée également sur la question de savoir si l'al. 2d) peut garantir au moins certains aspects du droit de négocier collectivement. La question de savoir si tous les aspects de la négociation collective sont exclus de la protection conférée par l'al. 2d) n'est donc pas encore tranchée.

Cependant, il n'est pas nécessaire, pour résoudre le présent pourvoi, de revenir sur cette question. En l'espèce, les dispositions législatives en cause établissent un régime de négociation collective. Elles empêchent donc de participer à ce processus tous les employés, groupes ou associations d'employés, sauf le ou les groupes constitués en personnes morales en vertu de l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire absolu du gouvernement. À mon avis, ces dispositions visent l'essence même de la liberté d'association.

Nature de la liberté d'association

La liberté d'association est la liberté de se joindre à d'autres personnes dans le but de réaliser des objectifs communs. C'est un droit fondamental dans une société libre et démocratique. Le juge Le Dain affirme, à la p. 391 du Renvoi relatif à l'Alberta:

. . . la liberté de travailler à la constitution d'une association, d'appartenir à une association, de la maintenir et de participer à ses activités licites sans faire l'objet d'une peine ou de représailles ne doit pas être tenue pour acquise.

Le droit d'association a une importance vitale dans notre société industrialisée. Comme C. Wilfred Jenks le fait remarquer dans Human Rights and International Labour Standards (1960), à la p. 49:

[TRADUCTION] Dans une ère d'interdépendance et d'organisation sur grande échelle où l'individu compte pour si peu s'il n'agit pas de concert avec ses semblables, la liberté d'association est devenue la pierre angulaire des libertés civiles et des droits socio‑économiques.

La liberté d'association, comme la liberté d'expression et la liberté de religion, est un droit individuel. Il ne s'agit pas d'un droit qui se rattache à un groupe ou aux objectifs de ce groupe. Comme Clyde W. Summers le souligne dans "Freedom of Association and Compulsory Unionism in Sweden and the United States" (1964), 112 U. Pa. L. Rev. 647, à la p. 647:

[TRADUCTION] Bien qu'elle soit ordinairement revendiquée par l'organisation, la liberté d'association n'est pas seulement un droit collectif conféré à l'organisation pour son avantage. La liberté d'association est un droit individuel dont la personne est investie dans le but de lui permettre d'accroître sa liberté personnelle. Son rôle n'est pas seulement de conférer des pouvoirs à des groupes, mais de favoriser la participation de l'individu au processus démocratique en lui permettant d'agir par l'intermédiaire de ceux‑ci. [Je souligne.]

Partout où des personnes travaillent pour gagner leur vie, le droit d'association a une importance énorme. Le salaire et les conditions de travail auront toujours une importance vitale pour un employé. Il s'ensuit que pour un employé, le droit de choisir le groupe ou l'association qui négociera pour son compte ce salaire et ces conditions de travail a une importance fondamentale. L'association jouera une rôle très important dans à peu près tous les aspects de la vie de l'employé dans son lieu de travail, en faisant fonction de conseiller, de porte‑parole dans les négociations et de rempart contre les actes illicites de l'employeur. Pour que les négociations collectives donnent des résultats, les employés doivent avoir confiance en leurs représentants. Cette confiance n'existera pas si l'employé à titre individuel n'est pas en mesure de choisir l'association.

Conséquences de la loi des territoires du Nord‑Ouest sur le droit d'association

Il faut reconnaître, au départ, que rien n'obligeait le gouvernement des territoires du Nord‑Ouest à adopter un régime législatif de négociation collective. Une association d'employés ne pouvait pas non plus prétendre avoir un droit constitutionnel à l'adoption d'un tel régime. Cependant, dès que le gouvernement des territoires du Nord‑Ouest a entrepris d'adopter un tel régime législatif, ces dispositions législatives devinrent sujettes à un examen de leur constitutionnalité. Il s'ensuit que je ne puis souscrire à l'avis de mon collègue qui affirme que si un gouvernement n'est pas tenu de négocier avec qui que ce soit, il peut alors, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire absolu qu'il possède, choisir avec qui il négociera. Bien que cette idée soit valable dans une économie absolument libre, elle ne peut s'appliquer au Canada où des lois régissent et contrôlent le processus de négociation collective.

L'alinéa 42(1)b) de la Loi permet au gouvernement de se réserver de façon absolue le droit de décider quelles associations seront constituées en personnes morales et deviendront ainsi des "associations d'employés". Seul le gouvernement peut constituer une association d'employés en personne morale. Seules les associations que le gouvernement a constituées en personnes morales dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire peuvent prendre part au processus de négociation collective. Le pouvoir discrétionnaire que le gouvernement possède en vertu de la Loi de créer ces entités comporte forcément celui de refuser de constituer une association en personne morale. Il n'y a ni obstacle qui empêche, ni directive qui détermine l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire absolu. L'alinéa fournit au gouvernement la possibilité de refuser, pour toutes les fins de la négociation collective, l'existence même à l'association choisie par les employés pour négocier en leur nom. Un tel pouvoir discrétionnaire illimité doit, à première vue, enfreindre la liberté d'association d'une personne.

Le droit d'un employé à titre individuel d'adhérer à une association de son choix me paraît avoir une importance fondamentale. Non seulement permet‑il à la personne de mieux participer au processus démocratique en agissant par l'intermédiaire d'un groupe, mais il permet en outre aux personnes d'agir de concert en vue d'obtenir des conditions de travail et des salaires équitables. À tout le moins, la formation ou le changement de l'entité qui doit procéder à des négociations collectives est protégé en vertu de la liberté d'association consacrée par la Charte.

Le droit des employés de changer l'association qui doit procéder à des négociations collectives est aussi important que celui de la former. Il peut être important pour un groupe d'employés d'être représenté par un syndicat national ou international. Un tel organisme peut disposer de conseils spécialisés sur une grande variété de sujets depuis le domaine de l'économie jusqu'aux répercussions de leur travail sur la santé et la sécurité. Dans d'autres circonstances, il peut en être autrement; les employés peuvent avoir des motifs valables de vouloir être représentés par un petit organisme local. Seuls les employés savent ce dont ils ont besoin et ils devraient avoir le droit de choisir l'association qui fera le mieux valoir leurs besoins. L'alinéa 42(1)b) de la Loi les prive de ce choix.

Un simple exemple peut aider à faire voir le caractère pernicieux de la Public Service Act et à illustrer le problème auquel les employés qui cherchent à former une association sont confrontés. Supposons que l'al. 42(1)b) s'applique à toutes les associations d'employés et non seulement à celles qui s'occupent de négociations collectives. Supposons que des employés forment une association, une équipe, dans le but de jouer au hockey ou au base-ball. Le gouvernement pourrait, par l'intermédiaire du Commissaire, décréter que seules les équipes approuvées selon le bon plaisir du gouvernement ont le droit de jouer au hockey ou au base‑ball, ou même de réserver l'utilisation d'une patinoire ou d'un terrain de base‑ball. Le gouvernement aurait quand même la générosité de permettre aux membres de cette équipe de se réunir où ils le voudraient, quand ils le voudraient, et de les laisser discuter à ces réunions de la pluie et du beau temps ou de la qualité des émissions de télévision. Par contre, ils ne pourraient jouer ni au hockey ni au base‑ball. Dans de telles circonstances, le droit des employés de s'associer dans le but légitime de jouer au hockey ou au base‑ball serait nié. Le droit de former une association dans le but de procéder à des négociations collectives n'est‑il pas beaucoup plus important? Pourtant, les dispositions de l'al. 42(1)b) refusent en l'espèce aux employés le droit de choisir, de former ou de changer l'association qu'ils souhaitent voir négocier collectivement pour leur compte et, par conséquent, enfreignent leur droit d'association garanti par la Charte.

Il s'ensuit que je ne puis accepter l'affirmation de mon collègue que "l'al. 42(1)b) n'a aucun effet sur l'existence de l'Institut" et que le syndicat existe pour autant que les personnes peuvent, à titre individuel, se réunir dans une salle paroissiale pour discuter de leurs griefs. L'équipe hypothétique de l'exemple qui précède n'existait pas parce que, même si ses membres pouvaient se réunir, ils ne pouvaient pas jouer au hockey ou au base‑ball. De même, un syndicat n'existe que s'il lui est permis de négocier collectivement. C'est la raison d'être d'un syndicat. Pour exercer son rôle d'agent négociateur, il doit être accrédité conformément aux dispositions applicables du droit du travail. Cependant, en vertu de la loi des territoires du Nord‑Ouest, une telle association ou un tel syndicat n'"existe" qu'à la condition d'être constitué en "association d'employés". La Loi empêche donc effectivement les associations "non constituées" d'exister et, en contrecarrant le choix des employés, elle porte par conséquent atteinte au droit des employés de s'associer. Affirmer que le syndicat existe dans la mesure où les personnes peuvent, à titre individuel, se réunir et discuter de leurs griefs équivaut, en toute déférence, à ignorer la réalité de la situation. Les discussions sur les griefs n'auront pas plus d'effet que de banales récriminations contre le temps qu'il fait.

En Cour d'appel, le juge Kerans a aussi reconnu que l'al. 42(1)b) porte atteinte au droit d'association des employés. Il dit ceci ([1988] N.W.T.R. 223, à la p. 233):

[TRADUCTION] D'autre part, l'exigence que le conseil constitue en personne morale l'agent négociateur proposé pourrait influer sur la liberté d'association. De plus, cette restriction est tenue pour inutile et fantaisiste et comme résultant d'un oubli du législateur, de sorte qu'elle ne saurait être sauvegardée par application de l'article premier [de la Charte]. En conséquence, elle risque d'être déclarée inopérante à moins que l'interprétation déjà mentionnée au début ne permette de la sauvegarder.

Le juge Kerans a donc conclu que l'al. 42(1)b) viole la liberté d'association des employés. Cependant, il a statué qu'il était possible de préserver la constitutionnalité de l'alinéa en ajoutant les mots [TRADUCTION] "ou reconnue" après l'expression [TRADUCTION] "constituée en personne morale". Selon moi, il n'était pas loisible à la Cour d'appel d'ajouter ces mots de manière à changer le sens ordinaire de l'expression [TRADUCTION] "constituée en personne morale" et, par conséquent, à modifier le sens de l'al. 42(1)b). L'addition de ces mots n'aurait pas pour effet de préserver la constitutionnalité de l'alinéa. Le seul objet de la constitution d'une association en personne morale est d'obtenir la reconnaissance en vertu de la Loi. La constitutionnalité de l'alinéa dépend non pas de la reconnaissance, mais de l'atteinte portée au droit de choisir l'association d'employés. Le juge Kerans a eu raison, au départ, de statuer que la Loi viole l'al. 2d) de la Charte.

En résumé, l'al. 42(1)b) limite la formation ou le changement même de l'association d'employés. Dire que l'association existe sans avoir été constituée au sens de la Loi équivaut à dépouiller de tout son sens le droit reconnu par l'al. 2d) de la Charte. Le fait que les personnes qui forment l'association (le syndicat) peuvent quand même se réunir sans empêchement de la part de l'État n'a aucun sens si l'association ne peut pas être reconnue en vertu des dispositions de droit du travail applicables. L'alinéa 42(1)b) restreint tellement la liberté de constituer ou de changer une association qu'il porte atteinte au droit qu'ont les personnes de s'associer en vertu de l'al. 2d) de la Charte. Dès qu'un gouvernement adopte une définition législative d'un groupe, à titre d'entité juridique, toute personne devrait pouvoir essayer de le faire reconnaître comme tel ou de changer le groupe déjà habilité à exercer les droits accordés par ce régime législatif. Toute restriction arbitraire ou absolument discrétionnaire apportée au droit des employés de choisir leur association doit, à première vue, enfreindre la liberté d'association.

L'article premier de la Charte

Il reste à déterminer si l'al. 42(1)b) peut être sauvegardé à titre de disposition dont la justification peut se démontrer en vertu de l'article premier de la Charte. Les principes généraux qui régissent une analyse fondée sur l'article premier ont été énoncés dans un certain nombre d'arrêts de notre Cour, notamment R. c. Big M Drug Mart Ltd., [1985] 1 R.C.S. 295, et R. c. Oakes, [1986] 1 R.C.S. 103. Ces arrêts prescrivent une analyse en deux étapes. D'abord, la cour doit déterminer l'importance de l'objectif qui sous‑tend la mesure législative contestée, puis elle doit déterminer si le moyen employé pour atteindre cet objectif est proportionné au but poursuivi.

L'objectif de la mesure législative

L'alinéa 42(1)b) permet de reconnaître un syndicat comme une "association d'employés" au sens de la Loi. L'alinéa le fait par la "constitution en personne morale" d'une association. Cela se compare à l'accréditation d'un syndicat dans d'autres ressorts.

La procédure d'accréditation est le fondement même de tout régime de négociation collective. George Adams affirme, à la p. 309 de Canadian Labour Law: A Comprehensive Text (1985):

[TRADUCTION] Le processus d'accréditation est au centre de notre régime de négociation collective et il a des conséquences fondamentales sur les relations de travail. [. . .] [L]es textes législatifs modernes relatifs aux négociations collectives ont été édictés en vue d'éliminer les conflits en matière de reconnaissance. Bien que l'employeur puisse reconnaître de son plein gré un syndicat ouvrier à titre d'agent négociateur d'un groupe homogène d'employés ou d'une "unité de négociation", les lois relatives aux négociations collectives établissent une procédure applicable à la détermination administrative de l'unité de négociation appropriée et des représentants autorisés des employés.

En précisant qui sera agent négociateur pour un groupe d'employés, la mesure législative établit un régime dans lequel les négociations collectives peuvent se dérouler. Celles‑ci seraient presque impossibles si une grand nombre d'associations distinctes cherchaient toutes à représenter les mêmes employés. Pour éviter cette situation, la mesure législative détermine la manière dont une association peut obtenir la reconnaissance en vertu de la Loi en étant "constituée en personne morale" ou "accréditée" à titre d'agent négociateur. Après avoir été dûment reconnue, une association peut engager des négociations avec l'employeur.

Il importe de souligner que le caractère exclusif de la représentation collective ne découle pas de la reconnaissance en vertu de la Loi. Il découle plutôt d'un autre article qui confère ce droit au syndicat accrédité ou à l'association d'employés. La question de savoir si le droit à l'exclusivité de négocier doit bénéficier d'une protection constitutionnelle ne se pose donc pas en l'espèce. C'est un aspect tout à fait distinct et indépendant de ce régime législatif. La seule question soulevée par l'espèce est de savoir si une association donnée devrait même avoir la possibilité de participer aux négociations collectives en vertu du régime établi par la Loi.

La Loi a donc pour objet de donner le moyen de choisir l'agent qui négociera collectivement au nom des employés. Le processus de sélection fera forcément en sorte que ce ne seront pas toutes les associations choisies par les employés qui obtiendront le statut d'agent négociateur. Cependant, la nécessité que le processus soit structuré est cruciale et elle a certainement assez d'importance pour justifier la suppression d'un droit garanti par la Constitution.

La proportionnalité

L'analyse de la proportionnalité de la mesure législative porte sur trois aspects, soit: (i) Existe‑t‑il un lien rationnel entre la méthode utilisée dans la mesure législative et l'objectif recherché? (ii) La mesure porte‑t‑elle le moins possible atteinte au droit ou à la liberté en question? Et (iii) les effets préjudiciables de la mesure législative sont‑ils justifiables compte tenu de l'objectif visé?

Pour commencer, il peut être utile de comparer l'al. 42(1)b) avec les dispositions d'autres ressorts. Si l'alinéa 42(1)b) remplissait le même rôle que les autres lois et d'une manière comparable, il y aurait alors un argument solide en faveur de la constitutionnalité de cette disposition législative. Ce n'est cependant pas le cas.

Les articles 25 à 31 du Code canadien du travail, L.R.C. (1985), ch. L‑2, énoncent la procédure d'accréditation. L'article 28 prévoit:

28. Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, le Conseil doit accréditer un syndicat lorsque les conditions suivantes sont remplies:

a) il a été saisi par le syndicat d'une demande d'accréditation;

b) il a défini l'unité de négociation habile à négocier collectivement;

c) il est convaincu qu'à la date du dépôt de la demande, ou à celle qu'il estime indiquée, la majorité des employés de l'unité désiraient que le syndicat les représente à titre d'agent négociateur.

L'article 29 édicte que le Conseil peut ordonner la tenue d'un scrutin de représentation lorsque seulement 35 à 50 pour cent des employés d'une unité de négociation sont membres d'un syndicat, ou encore à tout autre moment; l'art. 31 édicte que le résultat du scrutin indique la volonté de la majorité des employés de l'unité.

On trouve des dispositions semblables à l'art. 7 de la Loi sur les relations de travail, L.R.O. 1980, ch. 228 et modifications. Cet article est ainsi conçu:

7. (1) Sur requête en accréditation, la Commission vérifie le nombre d'employés compris dans l'unité de négociation à la date de la présentation de la requête et le nombre de ceux qui étaient membres du syndicat à la date fixée en vertu de l'alinéa 103(2)j).

(2) Si la Commission est convaincue qu'au moins 45 pour cent et au plus 55 pour cent des employés compris dans une unité de négociation sont membres du syndicat, elle ordonne la tenue d'un scrutin sur le caractère représentatif du syndicat. Si la Commission est convaincue que plus de 55 pour cent de ces employés sont membres du syndicat, le scrutin est facultatif.

(3) Si, à la tenue de ce scrutin, plus de 50 pour cent des bulletins de vote sont en faveur du syndicat et si, sans scrutin, la Commission est convaincue que plus de 55 pour cent des employés compris dans l'unité de négociation sont membres du syndicat, elle l'accrédite comme agent négociateur des employés compris dans l'unité de négociation.

On trouve des dispositions comparables dans la Loi sur les relations de travail, L.R.M. 1987, ch. L10, art. 40, le Labour Code, R.S.B.C. 1979, ch. 212, art. 43, et le Labour Relations Code, S.A. 1988, ch. L‑1.2, art. 37.

George Adams souligne la similitude de ces lois dans son ouvrage Canadian Labour Law. Il dit, à la p. 309:

[TRADUCTION] Il existe une grande similitude dans ces procédures partout au Canada, bien qu'on n'attribue pas partout le même rôle aux cartes de membre et aux votes de représentation comme moyen de déterminer la volonté des employés. Toutes les lois édictent que l'agent négociateur sera choisi "par la majorité des employés d'une unité appropriée pour négocier collectivement". Les commissions des relations de travail se sont vu confier, dans la plupart des cas, la responsabilité de déterminer l'unité de négociation appropriée et la volonté des employés.

Je crois que ces procédures d'accréditation se ressemblent entre elles en raison des trois notions importantes que reflètent toutes les lois en matière de relations de travail. Premièrement, les procédures d'accréditation sont menées par un tiers indépendant, comme une commission provinciale ou fédérale des relations du travail. Ainsi les procédures d'accréditation ne sont pas contrôlées par l'une ou l'autre des parties aux négociations. Deuxièmement, le tiers indépendant tient compte de la volonté des employés de l'unité de négociation en puissance. Si la majorité ou au moins un nombre important des employés sont membres du syndicat qui demande l'accréditation, ou s'ils souhaitent que le syndicat soit leur agent négociateur, alors la commission doit accréditer le syndicat comme agent négociateur indépendant. Enfin, sauf au par. 37(2) de la Labour Relations Act, 1977, S.N. 1977, ch. 64, le processus d'accréditation est obligatoire dès la réalisation des conditions prescrites. La reconnaissance légale du syndicat n'est donc pas laissée à la discrétion de l'une ou l'autre des parties potentielles à la négociation, ni même à celle de la commission qui constitue le tiers indépendant.

Les lois des autres ressorts représentent un compromis très raisonnable entre les droits individuels des employés et la nécessité d'avoir un processus structuré de négociation collective. Ces lois énoncent une procédure en vertu de laquelle, si des personnes forment une association qui satisfait aux critères énumérés, cette association sera reconnue comme leur agent négociateur. Dans chaque cas, tous les employés à titre individuel auront eu une occasion raisonnable de choisir l'agent négociateur qu'ils veulent avoir conformément à un processus équitable par lequel ils peuvent essayer d'obtenir la reconnaissance de l'agent négociateur de leur choix.

Les procédures de révocation de l'accréditation énoncées dans ces lois reflètent également l'équité du processus et l'importance du choix de chaque personne. La révocation de l'accréditation permet aux employés, à titre individuel, d'écarter l'agent négociateur actuel et de le remplacer par un de leur choix. Ainsi, les par. 38(1) et 39(1) du Code canadien du travail édictent ceci:

38. (1) Tout employé prétendant représenter la majorité des employés d'une unité de négociation peut, sous réserve du paragraphe (5), demander au Conseil de révoquer par ordonnance l'accréditation du syndicat à titre d'agent négociateur de l'unité.

39. (1) Si, à l'issue de l'enquête qu'il estime indiquée — tenue sous forme d'un scrutin de représentation ou sous une autre forme —, il est convaincu que la majorité des employés de l'unité de négociation visée par la demande ne désirent plus être représentés par leur agent négociateur, le Conseil doit rendre une ordonnance par laquelle:

a) dans le cas de la demande prévue au paragraphe 38(1), il révoque l'accréditation du syndicat à titre d'agent négociateur de l'unité;

b) dans le cas de la demande prévue au paragraphe 38(3), il déclare que l'agent négociateur n'a pas qualité pour représenter les employés de l'unité.

Les lois des relations de travail de tous les autres ressorts du Canada comportent des dispositions analogues sur la révocation de l'accréditation.

En résumé, on peut constater que la plupart des lois relatives aux négociations collectives des autres ressorts du Canada établissent un processus équitable et raisonnable par lequel les employés peuvent, à titre individuel, essayer de former des associations pour les représenter, et essayer de changer les associations qu'ils ne jugent pas appropriées ou efficaces. Les lois semblent établir un équilibre très raisonnable entre les droits des personnes à titre individuel, ceux du syndicat et ceux de l'employeur. C'est un équilibre qu'il faut se garder de rompre.

Ce bref examen des textes législatifs comparables indique clairement que la Public Service Act ne réalise pas cet équilibre raisonnable. Elle n'établit pas de processus qui permette de déterminer la volonté des employés. La constitution de l'association d'employés en personne morale ne peut se réaliser que par l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire absolu du gouvernement. Il est significatif que ce pouvoir discrétionnaire ne soit pas exercé par un tiers indépendant, mais par le gouvernement lui‑même, une partie hautement intéressée dans les négociations collectives qui doivent avoir lieu par la suite. La Loi est manifestement très différente des lois relatives aux relations de travail de tous les autres ressorts.

Afin de créer un processus structuré de négociation collective pour les employés des territoires du Nord‑Ouest, il n'est pas nécessaire de donner au gouvernement un contrôle absolu sur la désignation de l'agent négociateur des employés. Cette négation du droit des employés de choisir leur propre agent négociateur de la manière prévue dans les autres ressorts ne saurait être justifiée comme une limite raisonnable au sens de l'article premier. Elle est disproportionnée à l'objectif recherché et restreint la liberté d'association des employés beaucoup plus qu'il n'est raisonnablement nécessaire de le faire.

L'alinéa 42(1)b) de la Public Service Act ne saurait donc être justifié en vertu de l'article premier de la Charte et il doit être déclaré inconstitutionnel.

En définitive, je suis d'avis d'accueillir le pourvoi et d'annuler l'al. 42(1)b) de la Public Service Act.

Je répondrais ainsi aux questions constitutionnelles:

1.Le paragraphe 42(1) de la Public Service Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. P‑13 et ses modifications, viole‑t‑il la liberté d'association garantie par l'al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés?

Réponse: Oui, dans la mesure où l'al. 42(1)b) est concerné.

2.Si la réponse à la première question est affirmative, le par. 42(1) de la Public Service Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. P‑13 et ses modifications, peut‑il se justifier en vertu de l'article premier de la Charte canadienne des droits et libertés?

Réponse: Non, dans la mesure où l'al. 42(1)b) est concerné.

//Le juge La Forest//

Version française des motifs rendus par

LE JUGE LA FOREST — J'ai eu l'avantage de lire les motifs de jugement de mes collègues les juges Sopinka et Cory. En toute déférence, je suis généralement d'accord avec le juge Sopinka et je suis d'avis de statuer sur le pourvoi et de répondre aux questions constitutionnelles de la manière qu'il propose. Toutefois, je considère qu'il n'est pas nécessaire de dire quoi que ce soit au sujet de la question de savoir si le droit d'association doit comprendre la liberté pour les gens de se regrouper afin de poursuivre les objectifs qu'ils peuvent légitimement poursuivre à titre individuel.

//Le juge L'Heureux-Dubé//

Les motifs suivants ont été rendus par

LE JUGE L'HEUREUX‑DUBÉ — J'ai pris connaissance de l'opinion de mon collègue le juge Sopinka et, bien que je sois d'accord tant avec ses motifs qu'avec la conclusion qu'il propose, je désire ajouter quelques brefs commentaires. Pour plus de commodité je reproduis l'al. 42(1)b) de la Public Service Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. P‑13 et ses modifications:

[TRADUCTION] 42. (1) Aux articles 42 à 46

. . .

b)"association d'employés" signifie une association d'employés de la fonction publique constituée en personne morale par une loi qu'il l'habilite à négocier collectivement.

Cet alinéa fait l'objet d'une attaque constitutionnelle pour le motif parce qu'il viole la liberté d'association garantie par l'al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés.

La mesure de protection visée par l'al. 2d) a récemment fait l'objet d'un débat devant notre Cour. Dans l'arrêt R. c. Skinner, [1990] 1 R.C.S. 1235, j'ai souscrit à l'opinion du juge Wilson qui, dissidente mais non sur ce point, a exposé la portée exacte de la liberté d'association. À la page 1249, elle écrit:

Deuxièmement, pour décider si une activité donnée est protégée par l'al. 2d) de la Charte, nous devons centrer l'analyse sur la question de savoir si une personne cherche à s'associer à une autre, et non sur la nature des activités ou des objectifs qu'elles désirent poursuivre en commun. Selon la majorité dans cet arrêt [Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), [1987] 1 R.C.S. 313], les activités que les individus désirent exercer en commun ne sont pas elles‑mêmes protégées par l'al. 2d). Seul le fait de se joindre à d'autres est protégé. À cet égard, les observations du juge McIntyre sont compatibles avec la conception que notre Cour a adoptée à l'égard d'autres libertés prévues à l'art. 2 de la Charte. [Je souligne.]

Elle affirme clairement que les buts, objectifs ou activités qu'une association peut désirer poursuivre ne sont pas pertinents aux fins de la Charte.

À mon avis, ces énoncés sont ici déterminants. La disposition législative contestée en l'espèce ne porte pas atteinte à la liberté d'association de l'appelant. Bien qu'un des objectifs premiers des associations d'employés soit d'obtenir le statut d'agent négociateur et de négocier collectivement, l'obtention de ce statut, son maintien et l'activité subséquente de l'association ne sont aucunement protégés en vertu de l'al. 2d). J'estime que cette conclusion est conforme au raisonnement de la majorité dans la trilogie des arrêts relatifs au "droit de grève" (Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), précité, SDGMR c. Saskatchewan, [1987] 1 R.C.S. 460, et AFPC c. Canada, [1987] 1 R.C.S. 424). Dans le Renvoi relatif à l'Alberta, le juge Le Dain a explicitement rejeté la l'interprétation large de la liberté proposée par la minorité. À la page 390, il dit:

Je suis d'accord avec le juge McIntyre pour dire que la garantie constitutionnelle de la liberté d'association que l'on trouve à l'al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés ne comprend pas, dans le cas d'un syndicat, la garantie du droit de négocier collectivement et du droit de faire la grève. Par conséquent, je suis d'avis de rejeter le pourvoi . . .

Je m'estime liée par les jugements de la majorité dans la trilogie.

Sur un plan plus pragmatique, une conclusion suivant laquelle l'al. 2d) s'applique en l'espèce comporte des conséquences sérieuses. À la page 000, mon collège le juge Cory donne des exemples de ce qui constitue, à son avis, une violation de la liberté d'association. En toute déférence, ces exemples ainsi que la conclusion qu'il propose dans la présente affaire ne sont pas, à mon avis, en accord avec les conclusions de la majorité dans la trilogie et l'interprétation large de la liberté qu'il envisage vient en contradiction marquée avec ces conclusions. Les objectifs d'une association sont toujours, ou au moins généralement, au c{oe}ur de son existence. Suivant une interprétation stricte de ses motifs, les exigences de constitution en personne morale et d'accréditation seraient toujours suspectes. Suivant une interprétation plus large, tout objectif d'une association dont la réalisation est fondamentale à son existence serait protégé. À mon sens, l'al. 2d) n'a jamais été conçu pour protéger cette vaste gamme d'activités. Bien que leur poursuite puisse être légitime, les objectifs de certaines associations peuvent être soit sexistes soit racistes ou encore de quelque autre manière méprisables. Je considère qu'il est difficile d'affirmer que la liberté visée à l'al. 2d) a été conçue pour englober ces objectifs. Les conséquences pratiques d'une telle conception militent fortement contre son adoption. Dans le Renvoi relatif à l'Alberta, le juge Le Dain rejette même une exception en ce qui concerne les relations de travail. Aux pages 390 et 391, il expose le contexte approprié à l'interprétation de la liberté:

En examinant le sens qu'il faut donner à l'expression liberté d'association que l'on trouve à l'al. 2d) de la Charte, il est essentiel de garder à l'esprit que cette notion doit viser toute une gamme d'associations ou d'organisations de nature politique, religieuse, sociale ou économique, ayant des objectifs très variés, de même que les activités qui permettent de poursuivre ces objectifs. C'est dans cette perspective plus large et non simplement en fonction des prétendues exigences d'un syndicat, si importantes soient‑elles, que l'on doit examiner l'incidence de l'extension d'une garantie constitutionnelle, qui se présente sous la forme du concept de la liberté d'association, au droit d'exercer une certaine activité pour le motif qu'elle est essentielle si l'on veut qu'une association ait une existence significative.

L'adoption de ce raisonnement n'a cependant pas pour effet d'empêcher les syndicats d'atteindre leurs objectifs. Même suivant cette analyse, une vaste gamme d'activités syndicales est protégée. En outre, comme Paul Cavalluzo le souligne dans son article "Freedom of Association — Its Effect Upon Collective Bargaining and Trade Unions" (1988), 13:2 Queen's L.J. 267, les syndicats ont accès au processus politique. À la page 272, il fait remarquer:

[TRADUCTION] Du point de vue syndical, la "trilogie relative à la négociation collective" peut se révéler avantageuse pour un certain nombre de raisons. Premièrement ces arrêts réaffirment que les syndicats devraient consacrer leur temps, leurs énergies et leurs ressources dans l'arène législative pour l'avancement de leurs intérêts. . . .

Le second résultat positif du point de vue syndicat est que la trilogie indique que les droits à la négociation collective sont des droits d'origine législative et non des droits constitutionnels protégés par l'al. 2d) de la Charte. Ainsi, le contenu des règles de droit en matière de négociation collective relève de la législature et non des tribunaux.

Bien que l'al. 42(1)b) de la Loi puisse réduire la capacité d'une association d'obtenir la reconnaissance et, par conséquent, de négocier au nom d'employés, il n'entrave pas l'activité reconnue et protégée par la Charte, l'activité collective d'une personne avec une autre. Mon collègue le juge Cory affirme, à la p. 000, que "[s]euls les employés savent ce dont ils ont besoin et ils devraient avoir le droit de choisir l'association qui fera le mieux valoir leurs besoins." Ils ont ce droit. Le texte de loi ne représente peut‑être pas le meilleur équilibre des intérêts en jeu, mais, comme il ne touche aucune activité protégée par la Charte, le choix du législateur à cet égard doit demeurer intact.

Je suis donc d'avis de répondre aux questions constitutionnelles de la façon proposée par le juge Sopinka.

//Le juge Sopinka//

Version française des motifs rendus par

LE JUGE SOPINKA -- Le présent pourvoi soulève la question de savoir si l'al. 42(1)b) de la Public Service Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. P‑13, est incompatible avec l'al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés. L'appelant soutient qu'en exigeant qu'une association d'employés soit constituée en personne morale par une loi qui l'habilite à négocier collectivement, l'alinéa contesté viole la liberté d'association. Pour répondre à cette question, il faut notamment déterminer la portée de la décision de notre Cour dans le Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), [1987] 1 R.C.S. 313 ("le Renvoi relatif à l'Alberta"). Dans ce renvoi, on a statué notamment que l'al. 2d) ne protège pas le droit de faire la grève. L'appelant en l'espèce soutient cependant que l'al. 2d) s'étend à d'autres aspects de la négociation collective.

Les faits

L'appelant, l'Institut professionnel de la Fonction publique du Canada ("l'Institut"), est une société sans but lucratif constituée en vertu de la loi fédérale et il est l'agent de négociation accrédité de différents groupes d'employés professionnels du gouvernement fédéral. Avant le 1er septembre 1986, l'Institut était l'agent négociateur de 32 infirmières et infirmiers employés du gouvernement fédéral dans la zone de Baffin des territoires du Nord‑Ouest. Le 1er septembre 1986, les programmes de soins médicaux dans la zone de Baffin, qui relevaient du gouvernement fédéral, sont devenus la responsabilité du gouvernement des territoires du Nord‑Ouest. Les infirmières et infirmiers ont été avisés que leur emploi au gouvernement fédéral prendrait fin le 29 août 1986 et qu'ils pourraient choisir de devenir employés du gouvernement des territoires du Nord‑Ouest à compter du 1er septembre 1986. Le changement du gouvernement fédéral à celui des Territoires comme employeur des infirmières et infirmiers a eu pour conséquence que ceux‑ci ont cessé d'appartenir à l'unité de négociation dont l'Institut était l'agent négociateur accrédité et sont devenus admissibles à devenir membres de l'intimée la Northwest Territories Public Service Association ("la NWTPSA"), l'association d'employés constituée en personne morale en vue de négocier collectivement pour tous les employés des Territoires, non exclus par la Northwest Territories Public Service Association Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. N‑2, conformément à l'al. 42(1)b) de la Public Service Act.

L'Institut a demandé la constitution en personne morale au sens de l'al. 42(1)b) afin de représenter ses anciens membres, mais le gouvernement des territoires du Nord‑Ouest a refusé d'adopter la loi nécessaire pour ce faire. Dans une lettre adressée au président de l'Institut, le leader du gouvernement des territoires du Nord‑Ouest a mentionné qu'à son avis [TRADUCTION] "les associations accréditées en vertu des dispositions législatives actuelles satisfont" aux besoins des employés professionnels de la fonction publique des Territoires. Une tentative antérieure de l'Institut d'amener le gouvernement des Territoires à lui accorder la qualité d'agent négociateur avait échoué pour le motif qu'on n'avait pas fait la preuve que les employés accordaient leur appui à l'Institut. Il n'y a dans le dossier aucune preuve qui établisse qu'un nombre important, ou l'un ou l'autre, des 32 infirmières et infirmiers visés veut être représenté par l'Institut pour les fins de la négociation collective avec le gouvernement des Territoires. La convention collective qui lie ce dernier à ses employés est en cours.

Les dispositions législatives

L'alinéa 2d) de la Charte est ainsi conçu:

2. Chacun a les libertés fondamentales suivantes:

. . .

d) liberté d'association.

Les dispositions applicables des art. 42 et 43 de la Public Service Act (ci‑après "la Loi") sont ainsi rédigées:

[TRADUCTION] 42. (1) Aux articles 42 à 46

. . .

b) "association d'employés" signifie une association d'employés de la fonction publique constituée en personne morale par une loi qui l'habilite à négocier collectivement.

(2) Le Commissaire peut conclure une convention collective avec une association d'employés.

. . .

(6) Une convention collective intervenue entre le Commissaire et une association d'employés lie le Commissaire, l'association d'employés et les membres de cette association.

43. (1) Une association d'employés, agissant pour le compte de ses membres, ou le Commissaire peut exiger, par avis écrit, que l'autre partie commence à négocier collectivement dans le but de conclure, renouveler ou réviser une convention collective.

(2) Après l'envoi de l'avis exigeant de négocier collectivement, l'association d'employés et les agents qui représentent le Commissaire doivent sans délai, mais, dans tous les cas, dans les soixante jours suivant la communication de l'avis ou dans tout autre délai dont les parties peuvent convenir, se réunir et commencer à négocier collectivement de bonne foi.

Les procédures devant les tribunaux d'instance inférieure

Le 12 juin 1986, l'Institut a présenté une demande de jugement déclaratoire statuant que le par. 42(1) de la Loi et l'art. 3 de la Northwest Territories Public Service Association Act sont incompatibles avec l'al. 2d) de la Charte et, par conséquent, inopérants. La NWTPSA a obtenu qualité pour agir à titre d'intimée et a contesté, par voie de requête préliminaire, la qualité pour agir de l'Institut, mais sa requête a été rejetée. Le rejet de cette requête n'a pas été porté en appel.

Le juge Marshall de la Cour suprême des territoires du Nord‑Ouest a entendu la requête de l'Institut en première instance (43 D.L.R. (4th) 472) et il a exprimé l'avis, à la p. 474, que les dispositions contestées ont pour effet [TRADUCTION] ". . . d'exiger du syndicat, l'Institut en l'espèce, qu'il obtienne sa constitution en personne morale, ou, selon l'expression utilisée par le requérant, une "charte légale", à titre de condition préalable à l'obtention du droit de négocier collectivement". Pour répondre à l'argument selon lequel la décision de notre Cour dans le Renvoi relatif à l'Alberta s'appliquait, le juge Marshall a établit la distinction suivante entre ce renvoi et l'espèce, à la p. 476:

[TRADUCTION] La Cour suprême a examiné si une activité particulière d'une association, dans la poursuite de ses objectifs, est protégée par la Constitution ou si elle est simplement régie par le législateur. Ici, par contre, le litige ne porte pas sur une activité de l'association, mais sur la reconnaissance de son existence ou, pour utiliser l'expression même de la loi contestée, "sa constitution en personne morale".

Le juge Marshall a donc conclu que le par. 42(1) de la Loi viole l'al. 2d) de la Charte. Il a aussi conclu, à la p. 478, que ce paragraphe n'est pas une limite raisonnable au sens de l'article premier de la Charte puisqu'il

[TRADUCTION] . . . n'existe aucune preuve qu'il serait impossible de réaliser l'objectif du gouvernement d'arriver à des négociations collectives méthodiques par représentation au moyen d'un système d'accréditation indépendante fondée sur des critères objectifs, comme les autres ressorts en ont établi.

Le Commissaire des territoires du Nord‑Ouest a interjeté appel à la Cour d'appel des territoires du Nord‑Ouest. Le juge Kerans, s'exprimant au nom de la cour ([1988] N.W.T.R. 223), a d'abord statué que les mots de l'al. 42(1)b) signifient la création d'un syndicat, et non seulement sa reconnaissance. Il dit, à la p. 228, que [TRADUCTION] ". . . "reconnaître" n'est pas un sens que l'expression "constituer en personne morale" peut raisonnablement avoir. Il ne m'appartient pas de changer le sens des mots." Le juge Kerans s'est ensuite demandé s'il serait nécessaire d'interpréter la Loi dans ce sens, si cette interprétation nous amènerait à conclure à son inconstitutionnalité. Il énumère quatre conditions qui, à son avis, doivent être remplies pour que la cour puisse combler une lacune de la loi: (1) le problème surgit uniquement à cause d'un oubli du législateur, (2) la modification est celle que le législateur aurait apportée s'il avait abordé la question, (3) la modification proposée ne doit pas préjudicier aux droits conférés par la loi, et (4) il y aurait préjudice aux droits créés par la loi si la modification n'était pas apportée. Le juge Kerans a conclu que ces conditions étaient remplies en l'espèce et que si l'al. 42(1)b) devait par ailleurs être déclaré invalide, il l'interpréterait comme s'il contenait le mot "reconnue".

Le juge Kerans a poursuivi en analysant la disposition contestée de deux façons différentes: d'abord, l'absence de procédure d'accréditation et de révocation de l'accréditation dans l'alinéa enfreint‑il l'al. 2d) de la Charte? Et puis, l'exigence d'une constitution législative en personne morale (selon l'interprétation du juge Kerans) viole‑t‑elle l'al. 2d)?

Après avoir examiné la décision de notre Cour dans le Renvoi relatif à l'Alberta, le juge Kerans a conclu, à la p. 231, que le droit à l'accréditation revendiqué par l'Institut est [TRADUCTION] ". . . un autre exemple d'une activité particulière destinée à réaliser l'objet des négociations collectives, qui est une simple création de la loi". Le juge Kerans compare l'accréditation d'un syndicat à la délivrance d'un permis et il conclut que [TRADUCTION] ". . . une demande de permis n'est pas une activité d'organisation, c'est plutôt la poursuite d'un objectif commun." En d'autres termes, la capacité d'être accrédité de plein droit ne touche pas le caractère constitutif de l'association.

À propos des arguments invoqués par l'Institut au sujet de la constitution en personne morale, le juge Kerans a statué que l'alinéa contesté, selon l'interprétation qu'il donnait à son texte, autorisait le gouvernement à accorder ou à refuser l'existence juridique à un syndicat. Le juge Kerans dit, à la p. 233:

[TRADUCTION] Cependant, bien que la recherche de l'accréditation ne soit pas elle‑même une activité protégée, si le texte de loi exige que celui qui la demande s'organise d'une certaine manière, le texte de loi se mêle alors de l'activité d'organisation et la Charte s'applique. C'est le cas en l'espèce. [En italique dans l'original.]

Donc, la Cour d'appel a conclu que l'al. 42(1)b), tel qu'il est conçu, [TRADUCTION] "pourrait influer sur la liberté d'association". Le juge Kerans a encore statué que, si tel était le cas, la restriction imposée à l'al. 2d) de la Charte ne pourrait pas être sauvegardée en vertu de l'article premier parce que [TRADUCTION] "cette restriction est tenue pour inutile et fantaisiste et comme résultant d'un oubli du législateur". Cependant, en se servant de la méthode d'interprétation qu'il avait déjà mentionnée dans ses motifs de jugement, le juge Kerans a préservé la validité de l'al. 42(1)b), à la p. 233, en l'interprétant comme s'il comportait les mots [TRADUCTION] "ou reconnue" après les mots [TRADUCTION] "constituée en personne morale". En conséquence, il a accueilli l'appel.

Les questions en litige

Le Juge en chef a formulé les questions constitutionnelles suivantes le 3 août 1989:

1.Le paragraphe 42(1) de la Public Service Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. P‑13 et ses modifications, viole‑t‑il la liberté d'association garantie par l'al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés?

2.Si la réponse à la première question est affirmative, le par. 42(1) de la Public Service Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. P‑13 et ses modifications, peut‑il se justifier en vertu de l'article premier de la Charte canadienne des droits et libertés?

Les procureurs généraux du Canada et de l'Ontario sont intervenus à l'appui de la constitutionnalité du par. 42(1).

De plus, l'intimée la NWTPSA a contesté la qualité pour agir de l'Institut dans ces procédures.

La qualité pour agir

L'avocat de la NWTPSA a soutenu en cour d'appel et devant notre Cour que l'Institut ne devrait pas être déclaré habile à contester la constitutionnalité du par. 42(1) de la Loi. Le juge Kerans fait remarquer, à la p. 226 de ses motifs, que la décision de rejeter la requête préliminaire de l'intimée la NWTPSA, dans laquelle elle contestait la qualité pour agir de l'Institut, n'a jamais été portée en appel. Au cours des procédures devant notre Cour, la NWTPSA n'a pas formé de pourvoi incident pour soulever carrément la question.

Quand la qualité pour agir d'une des parties est contestée, les cours de justice conservent le pouvoir discrétionnaire de trancher les questions de fond qui ont fait l'objet de plaidoiries complètes. Dans l'arrêt Smith v. Attorney General of Ontario, [1924] R.C.S. 331, le juge Duff (plus tard juge en chef) affirme, au nom de la majorité, à la p. 338:

[TRADUCTION] . . . la question [de la qualité pour agir de l'appelant] en est une qui peut donner matière à discussion; et, puisque le fond de l'appel a été complètement débattu, nous sommes peu enclins à rendre contre l'appelant un jugement uniquement fondé sur un point de procédure assez discutable; par conséquent, je crois qu'il convient de dire que, à notre avis, l'action de l'appelant doit également être rejetée quant au fond.

Plus récemment, dans l'arrêt Jamieson v. Attorney‑General of British Columbia (1971), 21 D.L.R. (3d) 313 (C.S.C.‑B.), le juge Aikins résumait, à la p. 323, le principe en une formule que j'adopterais en toute déférence:

[TRADUCTION] . . . lorsqu'une affaire a été complètement débattue au fond, même s'il semble, d'après l'ensemble des plaidoiries, que le demandeur n'a pas qualité pour agir, si la question en cause est d'importance pour le public, la cour a le pouvoir discrétionnaire de rendre jugement sur le fond.

Dans les circonstances de l'espèce, vu notamment l'omission de la NWTPSA d'interjeter appel du rejet de sa requête préliminaire en cour d'appel et d'inscrire un pourvoi incident devant notre Cour, il ne sera pas nécessaire d'examiner les arguments relatifs à la qualité pour agir. Même si j'avais été enclin à faire droit à ces arguments, il se serait agi d'une affaire où il y a lieu d'exercer le pouvoir discrétionnaire de trancher les questions sur le fond. L'affaire soulève manifestement une question d'importance pour le public (sinon l'autorisation de pourvoi aurait été refusée). De plus, le Commissaire intimé a reconnu que l'appelant avait qualité pour agir et les questions en litige ont été l'objet d'un débat complet de la part des parties, y compris les procureurs généraux intervenants, en réponse aux questions constitutionnelles formulées par le Juge en chef.

L'espèce diffère beaucoup, sous un aspect important, de l'arrêt Borowski c. Canada (Procureur général), [1989] 1 R.C.S. 342, dans lequel l'appelant a été déclaré habile à contester la constitutionnalité d'une disposition législative précise. La justification de la qualité pour agir de M. Borowski a été écartée après qu'il eut été déclaré habile à agir, mais avant l'audition de son pourvoi, en raison d'un arrêt de notre Cour qui avait annulé pour d'autres motifs la disposition législative en cause: R. c. Morgentaler, [1988] 1 R.C.S. 30. Bien que le pourvoi de M. Borowski ait été complètement débattu au fond, le motif pour lequel il a finalement été statué qu'il n'avait pas qualité pour agir rendait inopportun de nous prononcer sur le fond: la disposition législative même qu'il voulait contester n'existait plus et une décision judiciaire dans ces circonstances aurait été l'équivalent d'un renvoi privé. Ces considérations ne s'appliquent pas en l'espèce et, pour les raisons susmentionnées, je préfère ne pas exprimer d'avis sur la qualité pour agir de l'Institut pour ce qui est de contester la constitutionnalité du par. 42(1) de la Loi.

Le Renvoi relatif à l'Alberta

Avant d'examiner les détails de la présente affaire, il est nécessaire d'analyser la décision de notre Cour dans le Renvoi relatif à l'Alberta, le premier de trois arrêts rendus en avril 1987 au sujet de la liberté d'association garantie par l'al. 2d) de la Charte: voir également AFPC c. Canada, [1987] 1 R.C.S. 424, et SDGMR c. Saskatchewan, [1987] 1 R.C.S. 460. La question soulevée par les motifs de jugement dans le Renvoi relatif à l'Alberta est de savoir si, et dans quelle mesure, la négociation collective est, sous certains aspects, protégée en vertu de l'al. 2d). Pour répondre à cette question, qui est d'importance cruciale pour trancher le présent pourvoi, il faut lire avec soin les motifs de jugement dans le Renvoi relatif à l'Alberta, (c'est‑à‑dire ceux du juge en chef Dickson, dissident, qui s'exprime en son propre nom et en celui du juge Wilson, ceux du juge Le Dain qui s'exprime en son propre nom et en celui des juge Beetz et La Forest, et ceux du juge McIntyre qui s'exprime en son nom personnel).

Après avoir examiné les différents motifs de jugement dans le Renvoi relatif à l'Alberta, j'arrive à la conclusion qu'il se dégage quatre propositions différentes quant à l'étendue de la liberté d'association garantie par l'al. 2d): premièrement, l'al. 2d) protège la liberté de constituer une association, de la maintenir et d'y appartenir; deuxièmement, l'al. 2d) ne protège pas une activité pour le seul motif que cette activité est un objet fondamental ou essentiel d'une association; troisièmement, l'al. 2d) protège l'exercice collectif des droits et libertés individuels consacrés par la Constitution; et quatrièmement, l'al. 2d) protège l'exercice collectif des droits légitimes des individus.

Le première proposition, c'est‑à‑dire celle selon laquelle l'al. 2d) protège la liberté de constituer une association, de la maintenir et d'y appartenir, a été acceptée à l'unanimité dans le Renvoi relatif à l'Alberta: voir les motifs du juge en chef Dickson, à la p. 363, ceux du juge Le Dain, à la p. 391, et ceux du juge McIntyre à la p. 407. Toute restriction apportée par le gouvernement au droit de constituer des associations ou à celui d'y appartenir se heurterait à cet aspect de l'al. 2d), qu'on peut considérer comme la conception la plus restrictive de la liberté d'association.

Au sujet de la deuxième proposition, le juge Le Dain qualifie de de "générale" l'idée que l'al. 2d) ait été conçu pour protéger une activité parce que cette activité est essentielle à l'existence de l'association. Le juge Le Dain rejette, à la p. 391, la prémisse qui sous‑tend cette idée, ". . . selon laquelle, sans cette protection constitutionnelle supplémentaire, la liberté d'association garantie serait vide de sens." Le juge McIntyre refuse pareillement d'adopter cette conception de l'al. 2d) parce qu'elle est contraire à la nature individuelle de la liberté d'association. Il dit, à la p. 404:

L'accepter reviendrait à attribuer un statut constitutionnel indépendant aux fins, objectifs et activités de l'association et, par conséquent, conférer des droits constitutionnels plus grands aux membres de l'association qu'à ceux qui n'en sont pas membres.

La troisième proposition, selon laquelle l'al. 2d) protège l'exercice collectif des droits et libertés individuels consacrés par la Constitution, s'appuie sur le passage suivant des motifs du juge Le Dain, à la p. 391: "La liberté d'association est particulièrement importante pour l'exercice d'autres libertés fondamentales comme la liberté d'expression et la liberté de conscience et de religion." Il est révélateur que les libertés énumérées par le juge Le Dain dans le passage cité soient les libertés protégées par la Charte (aux al. 2b) et 2a) respectivement) qui sont le plus susceptibles d'être exercées collectivement. Le passage des motifs du juge McIntyre qui porte sur cette deuxième proposition se trouve à la p. 407:

À mon avis, il est également clair que [. . .] la liberté d'association doit garantir l'exercice collectif de droits constitutionnels. Les droits individuels garantis par la Constitution ne sauraient perdre cette protection lorsqu'ils sont exercés collectivement.

La quatrième proposition, selon laquelle l'al. 2d) protège l'exercice collectif des droits légitimes des personnes, prises individuellement, est probablement la plus controversée des quatre, puisqu'elle n'a pas été mentionnée expressément par la moitié des juges de la Cour qui se sont exprimés par l'entremise du juge Le Dain. Cependant, le juge en chef Dickson (qui est dissident et aux motifs duquel souscrit le juge Wilson) conclut, aux pp. 366 et 367, que l'al. 2d) doit protéger une activité exercée collectivement si cette activité est permise lorsqu'elle est exercée par un seul individu. Le juge McIntyre a aussi adopté ce point de vue, aux pp. 408 et 409 en soulignant que le législateur garde le contrôle sur la gamme des activités protégées par la Charte en déterminant quelles activités les personnes, prises individuellement, peuvent légalement exercer. À mon avis, la quatrième proposition découle de la première. Pour que la liberté de constituer une association, de la maintenir et d'y appartenir ait un sens, il faut qu'elle englobe la liberté pour les gens de se regrouper afin de poursuivre les objectifs qu'ils peuvent légitimement poursuivre à titre individuel. Une restriction apportée à l'exercice collectif d'une activité que la loi permet aux personnes, prises individuellement, d'exercer constitue essentiellement une attaque contre la capacité des personnes à titre individuel de constituer une association à cette fin. Comme le juge en chef Dickson le souligne dans le Renvoi relatif à l'Alberta, à la p. 367, cette attaque vise l'"aspect collectif" de l'activité et non l'activité elle‑même.

À mon avis, il découle des propositions susmentionnées au sujet de l'al. 2d) de la Charte que la négociation collective n'est pas une activité qui est, sans plus, protégée par la garantie de la liberté d'association. Les restrictions apportées à l'activité de négocier collectivement ne touchent pas normalement la capacité des personnes à titre individuel de constituer des syndicats ou d'y adhérer. Bien que la négociation collective puisse être l'objet essentiel de la constitution des syndicats, il n'est plus possible de soutenir que cela constitue une condition suffisante pour que l'al. 2d) s'applique. Enfin, la négociation des conditions de travail n'est pas en soi une liberté individuelle garantie par la Constitution pas plus qu'une garantie juridique individuelle dans des circonstances où un régime de négociation collective a été institué: voir le juge McIntyre dans le Renvoi relatif à l'Alberta, aux pp. 411 et 412. Sauf pour les motifs énoncés dans le Renvoi relatif à l'Alberta, la conclusion que la négociation collective ne relève pas de l'al. 2d) concorde avec les conclusions de la trilogie d'arrêts relatifs à l'al. 2d). Dans ces arrêts, notre Cour a confirmé la validité non seulement de restrictions au droit de grève, mais aussi de l'imposition de l'arbitrage obligatoire sans négociation et de l'imposition de conditions de travail sans négociation. En conséquence, il est difficile de concevoir un principe qui assujettirait d'autres aspects des rapports de négociation collective à l'al. 2d) sans renverser la trilogie.

Pour ce qui est du fond de l'espèce, je trouve utile d'analyser les arguments de l'appelant en fonction des deux aspects évoqués par le juge Kerans en cour d'appel: d'abord, l'absence à l'al. 42(1)b) d'un processus d'accréditation des syndicats et puis la condition posée par l'al. 42(1)b) qu'un syndicat soit "constitué en personne morale" pour les fins de la négociation collective.

La recherche de l'accréditation

En vertu des art. 42 et 43 de la Loi, les seuls syndicats qui ont le droit d'obliger le Commissaire à négocier collectivement sont les "associations d'employés" approuvées par une loi de la législature des Territoires. Cela diffère des autres lois des relations de travail au Canada, qui établissent des conditions précises pour l'accréditation d'un syndicat à titre d'agent négociateur exclusif de ses membres et pour la révocation possible de l'accréditation déjà accordée à un syndicat: voir, par exemple, la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P‑35, la Loi sur les relations de travail, L.R.O. 1980, ch. 228, The Trade Union Act, R.S.S. 1978, ch. T‑17.

L'appelant soutient que l'absence, dans les dispositions législatives, d'un ensemble de conditions objectives pour obtenir l'accréditation d'un syndicat viole l'al. 2d) de la Charte. Il soutient que, sauf pour ce qui est des conséquences de la constitution en personne morale en vertu de la Loi, le monopole accordé en vertu de la Loi à la NWTPSA porte atteinte aux droits collectifs des membres de l'unité de négociation qui veulent être représentés par un autre syndicat. Puisque la loi empêche un syndicat rival qui n'a pas été approuvé par la loi de négocier pour ses membres, les objectifs et les fins de ce syndicat sont contrecarrés. L'appelant soutient dans son mémoire que [TRADUCTION] "La définition même d'un syndicat comporte l'objet auquel [. . .] la loi contestée porte atteinte".

Comme le démontre clairement l'examen que j'ai déjà fait du Renvoi relatif à l'Alberta, c'est précisément ce genre de prétention qui a été rejeté par la majorité des juges de notre Cour. Il n'est tout simplement plus possible pour une association (que ce soit un syndicat ou une autre type d'association) de soutenir que l'empêchement de réaliser ses objectifs créé par une disposition législative constitue une violation de l'al. 2d), si la restriction ne vise pas la constitution ou l'existence de l'association, ni ne leur porte atteinte, à moins que l'activité de l'association ne soit un autre droit protégé par la Charte ou une activité qu'une personne, prise individuellement, peut exercer légitimement. Si on fait abstraction pour l'instant de la question de la constitution en personne morale, il est clair que le monopole créé par l'al. 42(1)b) n'a aucun effet sur l'existence de l'Institut, ni sur la capacité pour une personne d'y adhérer, et il est aussi manifeste que, par suite du Renvoi relatif à l'Alberta, l'activité pour laquelle on demande la protection constitutionnelle (la négociation collective des conditions de travail) ne satisfait à aucun des critères établis pour qu'une activité soit protégée.

Enfin, les arguments de l'appelant au sujet de l'omission du texte législatif de prévoir l'accréditation de plein droit se heurte au fait que, puisque l'activité de la négociation n'est pas elle‑même protégée par la Constitution, le choix du négociateur en vertu de la loi ne l'est pas non plus. Les dispositions contestées équivalent à rien de plus qu'une forme de régime de relations de travail prescrite par la loi et fondée sur la reconnaissance volontaire. Il est admis que c'est une forme bien reconnue de relations ouvrières. La différence pertinente tient à ce que, en vertu de la Loi, le ou les syndicats reconnus peuvent forcer le Commissaire à négocier collectivement de bonne foi en vue de conclure une convention exécutoire, ce qu'aucun groupe d'employés ne peut faire en common law. Puisqu'un gouvernement n'a aucune obligation de négocier en vertu de la common law et puisqu'il peut aussi suspendre une obligation légale de négocier, comme le gouvernement fédéral l'a fait dans l'affaire AFPC, il serait illogique de statuer ici qu'un gouvernement crée des droits collectifs quand il accorde à des employés le droit de négocier, mais se réserve le pouvoir de choisir le mode de représentation des employés; c'est‑à‑dire si un gouvernement n'est pas tenu de négocier avec qui que ce soit, il ne peut y avoir d'obstacle constitutionnel à ce qu'il choisisse de négocier avec quelqu'un en particulier.

Tout ce qui précède repose sur l'hypothèse que l'al. 42(1)b) de la Loi ne porte pas atteinte à la liberté de constituer une association, de la maintenir ou d'y appartenir. Il faut maintenant examiner cette hypothèse en fonction des prétentions de l'appelant que l'exigence de constitution en personne morale posée à l'al. 42(1)b) constitue précisément une telle violation de l'al. 2d).

L'exigence de constitution en personne morale posée à l'al. 42(1)b)

Pour en faciliter la consultation, je reproduis le texte de l'al. 42(1)b):

. . . "association d'employés" signifie une association d'employés de la fonction publique constituée en personne morale par une loi qui l'habilite à négocier collectivement.

L'appelant soutient que l'al. 42(1)b) a pour effet de soumettre un syndicat de la fonction publique à une exigence de constitution législative sans laquelle un tel syndicat n'existe pas. S'il en est ainsi, l'alinéa contesté empiète manifestement sur la liberté des individus de constituer une association et d'y appartenir, ce que notre Cour a unanimement déclaré contraire à l'al. 2d) dans le Renvoi relatif à l'Alberta: voir plus haut. En cour d'appel, cet argument a gagné la faveur du juge Kerans. À la page 232, le juge Kerans a accepté l'argument de l'Institut que l'al. 42(1)b):

[TRADUCTION] . . . exige que le conseil des territoires, plutôt que les employés eux‑mêmes, soit l'arbitre suprême de la création d'une [association d'employés constituée en personne morale en vertu de la Loi] et tranche des questions délicates comme l'étendue de ses objets, les conditions d'adhésion, les règles de fonctionnement interne et, ce qui est peut‑être le plus important, celle de savoir si l'association devra être une entité juridique. [En italique dans l'original.]

Comme conséquence de cette interprétation de l'al. 42(1)b), le juge Kerans a estimé nécessaire d'interpréter l'alinéa comme s'il comportait les mots "ou reconnue" pour en préserver la constitutionnalité. L'appelant soutient que le recours à cette technique d'interprétation large ne constitue pas un exercice acceptable de la compétence judiciaire en matière constitutionnelle. Le Commissaire intimé n'invoque nullement cet aspect de la décision du juge Kerans et soutient que l'alinéa, dans sa formulation, n'a pas d'effet sur l'existence ou la création d'une association d'employés constituée en personne morale conformément à ses termes. À mon avis, il est possible de statuer sur le présent pourvoi sans résoudre la difficile question de savoir s'il faut interpréter une loi en y ajoutant des mots pour la rendre conforme à la Charte.

La question centrale dans cette partie du pourvoi est de savoir si les mots "constituée en personne morale" à l'al. 42(1)b) signifient la création d'un syndicat de la fonction publique. L'appelant soutient avec force que l'existence même d'un syndicat de fonctionnaires dans les territoires du Nord‑Ouest dépend de l'autorisation législative que représente la constitution en personne morale prévue à l'al. 42(1)b). Le Commissaire intimé repousse cette prétention et soutient que rien dans la disposition contestée ne touche l'existence de l'association, son maintien ou l'appartenance à celle‑ci.

À l'analyse du texte de la disposition contestée, je partage l'avis de l'intimé. Je remarque que l'al. 42(1)b) n'interdit pas la constitution d'autres syndicats, ni l'appartenance à ceux‑ci, et il n'empêche aucun de ces syndicats de demander la constitution en personne morale en vertu de la Loi. De plus, l'alinéa contesté ne détermine pas les conditions préalables ni les conséquences de la constitution en personne morale. Contrairement à l'avis exprimé par le juge Kerans, l'alinéa n'exige pas que l'association d'employés constituée en personne morale en vertu de la Loi soit formée d'une manière particulière ou qu'elle soumette l'étendue de ses objets, les conditions d'adhésion ou les règles de fonctionnement interne au contrôle du législateur. Il me semble que le gouvernement des Territoires peut adopter une loi faisant de l'Institut ou de tout autre syndicat préexistant une association d'employés pour les fins de la Loi sans en modifier la structure de quelque manière que ce soit. Vue dans ce contexte, l'exigence de constitution en personne morale énoncée à l'al. 42(1)b) est le moyen par lequel le gouvernement des Territoires a choisi de reconnaître le ou les syndicats avec lesquels il négociera collectivement et auxquels il accordera le pouvoir d'obliger le gouvernement à négocier de bonne foi en vue de conclure une convention liant les parties. Comme je l'ai déjà dit, si rien dans la Constitution n'empêche un gouvernement de retirer complètement le droit de négocier collectivement, alors il semblerait anormal qu'un gouvernement qui cherche à accorder à ses employés la possibilité d'avoir recours à la négociation collective se heurte à des obstacles constitutionnels.

Je ne veux pas qu'on croie que j'affirme que, lorsqu'un gouvernement confère un avantage, il a le droit de l'assortir de toutes les conditions qu'il lui plaît d'imposer. Ces conditions doivent elles‑mêmes satisfaire aux exigences de la Constitution. Il semble évident, par exemple, qu'un gouvernement ne pourrait accorder des droits de négocier collectivement à des conditions qui enfreindraient les droits à l'égalité garantis au par. 15(1) de la Charte. De même, l'attribution de droits de négocier collectivement doit respecter les droits collectifs des personnes touchées, mais, en raison de la trilogie d'arrêts, ceci se limite à permettre aux associations rivales d'exister et de lutter pour leur reconnaissance. Comme je l'ai déjà dit, les dispositions législatives contestées dans le présent pourvoi ne touchent ni l'Institut, ni aucun autre syndicat de manière à enfreindre l'al. 2d) de la Charte; en conséquence, les arguments de l'Institut à cet égard doivent être rejetés.

Dispositif

Je suis d'avis de rejeter le pourvoi avec dépens en faveur des intimés et de répondre comme ceci aux questions constitutionnelles:

1.Le paragraphe 42(1) de la Public Service Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. P‑13 et ses modifications, viole‑t‑il la liberté d'association garantie par l'al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés?

Réponse: Non.

2.Si la réponse à la première question est affirmative, le par. 42(1) de la Public Service Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. P‑13 et ses modifications, peut‑il se justifier en vertu de l'article premier de la Charte canadienne des droits et libertés?

Réponse: Il n'est pas nécessaire de répondre à cette question.

Pourvoi rejeté, les juges WILSON, GONTHIER et CORY sont dissidents.

Procureurs de l'appelant: Nelligan/Power, Ottawa.

Procureur de l'intimé le Commissaire des territoires du Nord‑Ouest: Le ministère de la Justice, Yellowknife.

Procureurs de l'intimée la Northwest Territories Public Service Association: Soloway, Wright, Ottawa.

Procureur de l'intervenant le procureur général du Canada: John C. Tait, Ottawa.

Procureur de l'intervenant le procureur général de l'Ontario: Le ministère du Procureur général, Toronto.

* Juge en chef à la date de l'audition.


Synthèse
Référence neutre : [1990] 2 R.C.S. 367 ?
Date de la décision : 16/08/1990
Sens de l'arrêt : Le pourvoi est rejeté. l'alinéa 42(1)b) de la public service act ne porte pas atteinte à l'al. 2d) de la charte

Analyses

Droit constitutionnel - Charte des droits - Liberté d'association - Négociation collective - Loi des territoires du Nord‑Ouest exigeant qu'une association d'employés soit constituée en personne morale par une loi afin de négocier collectivement - La mesure législative des Territoires viole‑t‑elle la liberté d'association garantie par l'al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés? - Dans l'affirmative, cette restriction à la liberté d'association est‑elle justifiable en vertu de l'article premier de la Charte? - Public Service Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. P‑13, art. 42(1)b).

L'Institut appelant était l'agent négociateur d'un certain nombre d'infirmières et infirmiers employés du gouvernement fédéral dans les territoires du Nord‑Ouest jusqu'à ce que ceux‑ci deviennent des employés du gouvernement des Territoires. À cause du changement d'employeur, les infirmières et infirmiers ont cessé d'appartenir à l'unité de négociation dont l'Institut était l'agent négociateur accrédité et sont devenus admissibles à devenir membres de l'Association intimée, qui avait été constituée en personne morale en vue de négocier collectivement pour tous les employés des Territoires qui ne sont pas exclus. L'Institut a demandé la constitution en personne morale requise par l'al. 42(1)b) de la Public Service Act afin de représenter ses anciens membres. En vertu de cet alinéa, une association d'employés doit être constituée en personne morale par une loi qui l'habilite à négocier collectivement au nom de ses membres. Le gouvernement des Territoires a refusé d'adopter la loi nécessaire pour ce faire. L'Institut a présenté à la Cour suprême des Territoires une demande de jugement déclaratoire statuant que le par. 42(1) de la Loi est incompatible avec la liberté d'association garantie à l'al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés. Le juge de première instance a conclu que le par. 42(1) de la Loi viole l'al. 2d) de la Charte et qu'il n'est pas une limite raisonnable au sens de l'article premier. La Cour d'appel a accueilli l'appel interjeté par le Commissaire intimé.

Arrêt (les juges Wilson, Gonthier et Cory sont dissidents): Le pourvoi est rejeté. L'alinéa 42(1)b) de la Public Service Act ne porte pas atteinte à l'al. 2d) de la Charte.

Le juge Sopinka: L'absence, à l'al. 42(1)b), d'un ensemble de conditions objectives pour obtenir l'accréditation d'un syndicat ne viole pas la liberté d'association. Bien que le monopole créé par la mesure législative empêche un syndicat rival de négocier pour ses membres, cet empêchement pour une association de réaliser ses objectifs créé par une disposition législative ne constitue pas une violation de l'al. 2d) si la restriction ne vise pas la constitution ou l'existence de l'association, ni ne leur porte atteinte, à moins que l'activité de l'association ne soit un autre droit protégé par la Charte ou une activité qu'une personne, prise individuellement, peut exercer légitimement. Le monopole créé par la loi n'a aucun effet sur l'existence de l'Institut, ni sur la capacité pour une personne d'y adhérer. De plus, la négociation collective des conditions de travail n'est pas protégée par la Constitution. Puisque l'activité de la négociation n'est pas elle‑même protégée par la Constitution, le choix du négociateur en vertu de la loi ne l'est pas non plus. Puisqu'un gouvernement n'a aucune obligation de négocier en vertu de la common law et puisqu'il peut aussi suspendre une obligation légale de négocier, il ne peut y avoir d'obstacle constitutionnel à ce qu'il choisisse de négocier avec un représentant particulier des employés.

De plus, l'exigence de constitution en personne morale imposée au syndicat par l'al. 42(1)b) pour qu'il puisse négocier collectivement ne viole pas l'al. 2d) de la Charte. L'alinéa n'interdit pas la constitution d'autres syndicats, ni l'appartenance à ceux‑ci, et il n'empêche aucun de ces syndicats de demander la constitution en personne morale en vertu de la Loi. L'alinéa n'exige pas non plus que l'association d'employés constituée en personne morale en vertu de la Loi soit formée d'une manière particulière ou qu'elle soumette l'étendue de ses objets, les conditions d'adhésion ou les règles de fonctionnement interne au contrôle du législateur. L'exigence de constitution en personne morale énoncée à l'al. 42(1)b) est le moyen par lequel le gouvernement des Territoires a choisi de reconnaître le ou les syndicats avec lesquels il négociera collectivement. L'attribution de droits de négocier collectivement doit respecter les droits collectifs des personnes touchées, mais ceci se limite à permettre aux associations rivales d'exister et de lutter pour leur reconnaissance.

Le juge L'Heureux-Dubé: Il y a accord avec les motifs et la conclusion du juge Sopinka, sous réserve de brefs commentaires. La disposition législative contestée en l'espèce ne porte pas atteinte à la liberté d'association de l'appelant. Les buts, objectifs et activités d'une association ne sont pas pertinents aux fins de la Charte. Bien qu'un des objectifs premiers des associations d'employés soit d'obtenir le statut d'agent négociateur et de négocier collectivement, l'obtention de ce statut, son maintien et l'activité subséquente de l'association ne sont aucunement protégés en vertu de l'al. 2d). Considérer que l'al. 2d) englobe tout objectif d'une association dont la réalisation est fondamentale à son existence a des conséquences sérieuses qui militent fortement contre l'adoption d'une telle interprétation, étant donné que la notion de la liberté d'association doit viser toute une gamme d'associations politiques, religieuses, sociales ou économiques ayant des objectifs très variés. De plus, l'adoption du raisonnement de la majorité dans la trilogie, qui est décisive en l'espèce, n'a pas pour effet d'empêcher les syndicats d'atteindre leurs objectifs, étant donné qu'une vaste gamme d'activités syndicales demeure protégée et que les syndicats ont accès au processus politique.

Le juge La Forest: Il y a accord général avec les motifs de jugement du juge Sopinka mais il n'est pas nécessaire de dire quoi que ce soit au sujet de la question de savoir si le droit d'association doit comprendre la liberté pour les gens de se regrouper afin de poursuivre les objectifs qu'ils peuvent légitimement poursuivre à titre individuel.

Le juge en chef Dickson: La garantie constitutionnelle de la liberté d'association que l'on trouve à l'al. 2d) de la Charte ne comprend pas la garantie du droit de négocier collectivement et le droit reconnu à l'al. 2d) ne s'applique qu'aux individus. La détermination de la manière de choisir les agents négociateurs constitue la première étape du droit de négocier collectivement. En outre, dans le contexte d'une lutte intersyndicale pour obtenir le statut d'agent négociateur exclusif, le droit revendiqué par l'appelant doit être qualifié de droit collectif attaché au syndicat. Le choix législatif de la manière de choisir les agents négociateurs échappe donc à l'examen constitutionnel pour ce qui est de l'al. 2d) de la Charte parce qu'il s'agit d'un élément du processus de négociation collective et à cause aussi de la nature individuelle du droit reconnu à l'al. 2d). Enfin, puisque le gouvernement des territoires du Nord-Ouest n'était pas tenu d'adopter un régime de négociation collective, les restrictions imposées à un droit d'origine purement législative ne font pas intervenir la protection de l'al. 2d) de la Charte. Si l'alinéa 2d) ne garantit pas le droit de négocier collectivement, il ne peut garantir un droit à un agent négociateur en particulier.

Les juges Wilson, Gonthier et Cory (dissidents): En restreignant la liberté des employés de constituer ou de changer leur association, l'al. 42(1)b) de la Public Service Act porte atteinte au droit qu'ont les personnes de s'associer en vertu de l'al. 2d) de la Charte. L'alinéa 42(1)b) permet au gouvernement de se réserver de façon absolue le droit de décider quelles associations seront constituées en personnes morales et deviendront ainsi des "associations d'employés". Seules les associations que le gouvernement a constituées en personnes morales dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire peuvent prendre part au processus de négociation collective. Il n'y a ni obstacle qui empêche, ni directive qui détermine l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire absolu. L'alinéa fournit au gouvernement la possibilité de refuser, pour toutes les fins de la négociation collective, l'existence même à l'association choisie par les employés pour négocier en leur nom. Un tel pouvoir discrétionnaire illimité enfreint à première vue la liberté d'association d'un personne. Le fait que les personnes qui forment l'association peuvent quand même se réunir sans empêchement de la part de l'État n'a aucun sens si l'association ne peut pas être reconnue en vertu des dispositions de droit du travail applicables. Dès qu'un gouvernement adopte une définition législative d'un groupe, à titre d'entité juridique, toute personne devrait pouvoir essayer de le faire reconnaître comme tel ou de changer le groupe déjà habilité à exercer les droits accordés par ce régime législatif. Le droit des employés d'adhérer à une association de leur choix et celui de changer l'association qui doit procéder à des négociations collectives ont une importance fondamentale et l'al. 42(1)b) contrecarre ces droits.

L'alinéa 42(1)b) de la Public Service Act n'est pas justifiable en vertu de l'article premier de la Charte. La Loi a pour objet de donner le moyen de choisir l'agent qui négociera collectivement au nom des employés. Même si la nécessité que le processus soit structuré a assez d'importance pour justifier la suppression d'un droit garanti par la Constitution, la mesure législative est disproportionnée à l'objectif recherché et restreint la liberté d'association des employés beaucoup plus qu'il n'est raisonnablement nécessaire de le faire. Contrairement à la plupart des lois relatives aux négociations collectives des autres ressorts du Canada, la mesure législative n'établit pas un équilibre raisonnable entre les droits des personnes à titre individuel, ceux du syndicat et ceux de l'employeur. Elle n'établit pas de processus qui permette de déterminer le choix d'un agent négociateur par les employés et la constitution de l'association d'employés en personne morale ne peut se réaliser que par l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire absolu du gouvernement qui est lui‑même une partie intéressée dans les négociations collectives qui doivent avoir lieu par la suite. Afin de créer un processus structuré de négociation collective, il n'est pas nécessaire de donner au gouvernement un contrôle absolu sur la désignation de l'agent négociateur des employés. Cette négation du droit des employés de choisir leur propre agent négociateur de la manière prévue dans les autres ressorts ne saurait être justifiée comme une limite raisonnable au sens de l'article premier de la Charte.


Parties
Demandeurs : Institut professionnel de la fonction publique du canada
Défendeurs : Territoires du nord-ouest (Commissaire)

Références :

Jurisprudence
Citée par le juge Sopinka
Arrêt examiné: Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), [1987] 1 R.C.S. 313
arrêts mentionnés: Smith v. Attorney General of Ontario, [1924] R.C.S. 331
Jamieson v. Attorney‑General of British Columbia (1971), 21 D.L.R. (3d) 313
Borowski c. Canada (Procureur général), [1989] 1 R.C.S. 342
R. c. Morgentaler, [1988] 1 R.C.S. 30
AFPC c. Canada, [1987] 1 R.C.S. 424
SDGMR c. Saskatchewan, [1987] 1 R.C.S. 460.
Citée par le juge L'Heureux‑Dubé
Arrêts appliqués: Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), [1987] 1 R.C.S. 313
AFPC c. Canada, [1987] 1 R.C.S. 424
SDGMR c. Saskatchewan, [1987] 1 R.C.S. 460
arrêt mentionné: R. c. Skinner, [1990] 1 R.C.S. 1235.
Citée par le juge en chef Dickson
Arrêts appliqués: Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), [1987] 1 R.C.S. 313
AFPC c. Canada, [1987] 1 R.C.S. 424
SDGMR c. Saskatchewan, [1987] 1 R.C.S. 460.
Citée par le juge Cory (dissident)
Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), [1987] 1 R.C.S. 313
AFCP c. Canada, [1987] 1 R.C.S. 424
SDGMR c. Saskatchewan, [1987] 1 R.C.S. 460
Syndicat des infirmières de la Nouvelle‑Écosse, Section Devco ("SINE") c. Conseil canadien des relations du travail (1989), 58 D.L.R. (4th) 225
R. c. Big M Drug Mart Ltd., [1985] 1 R.C.S. 295
R. c. Oakes, [1986] 1 R.C.S. 103.
Lois et règlements cités
Charte canadienne des droits et libertés, art. 1, 2d), 15(1).
Code canadien du travail, L.R.C. (1985), ch. L‑2, art. 28, 29, 31, 38(1), 39(1).
Labour Code, R.S.B.C. 1979, ch. 212, art. 43.
Labour Relations Act, 1977, S.N. 1977, ch. 64, art. 37(2).
Labour Relations Code, S.A. 1988, ch. L‑1.2, art. 37.
Loi sur les relations de travail, L.R.M. 1987, ch. L10, art. 40.
Loi sur les relations de travail, L.R.O. 1980, ch. 228, art. 7.
Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P‑35.
Northwest Territories Public Service Association Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. N‑2, art. 3.
Public Service Act, R.S.N.W.T. 1974, ch. P‑13, art. 3, 5, 7, 15(1), 26, 32, 40, 42, 43.
Trade Union Act, R.S.S. 1978, ch. T‑17.
Doctrine citée
Adams, George W. Canadian Labour Law: A Comprehensive Text. Aurora, Ont.: Canada Law Book, 1985.
Cavalluzzo, Paul J. J. "Freedom of Association — Its Effect Upon Collective Bargaining and Trade Unions" (1988), 13:2 Queen's L.J. 267.
Jenks, C. Wilfred. Human Rights and International Labour Standards. London: Stevens & Sons, 1960.
Summers, Clyde W. "Freedom of Association and Compulsory Unionism in Sweden and the United States" (1964), 112 U. Pa. L. Rev. 647.

Proposition de citation de la décision: Institut professionnel de la fonction publique du canada c. Territoires du nord-ouest (Commissaire), [1990] 2 R.C.S. 367 (16 août 1990)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1990-08-16;.1990..2.r.c.s..367 ?
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