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29/10/1992 | CANADA | N°[1992]_3_R.C.S._235

Canada | Kelvin Energy Ltd. c. Lee, [1992] 3 R.C.S. 235 (29 octobre 1992)


Kelvin Energy Ltd. c. Lee, [1992] 3 R.C.S. 235

Loewen, Ondaatje, McCutcheon & Co. Ltd. Appelante

c.

Frederick H. Sparling Intimé

et

Kelvin Energy Ltd. Mise en cause

et

Jimmy S. H. Lee, Michael John Smith,

Asiamerica Capital Ltd. et

Asiamerica Equities Ltd. Mis en cause

et

Nalcap Holdings Inc. Mise en cause

Répertorié: Kelvin Energy Ltd. c. Lee

No du greffe: 22131.

1992: 27 mai; 1992: 29 octobre.

Présents: Le juge en chef Lamer et les juges La Forest, L'Heureux‑Dubé, Sopinka, Gont

hier, Cory et Iacobucci.

en appel de la cour d'appel du québec

POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel du Québec, [1990] R.J.Q. 1825, qui a...

Kelvin Energy Ltd. c. Lee, [1992] 3 R.C.S. 235

Loewen, Ondaatje, McCutcheon & Co. Ltd. Appelante

c.

Frederick H. Sparling Intimé

et

Kelvin Energy Ltd. Mise en cause

et

Jimmy S. H. Lee, Michael John Smith,

Asiamerica Capital Ltd. et

Asiamerica Equities Ltd. Mis en cause

et

Nalcap Holdings Inc. Mise en cause

Répertorié: Kelvin Energy Ltd. c. Lee

No du greffe: 22131.

1992: 27 mai; 1992: 29 octobre.

Présents: Le juge en chef Lamer et les juges La Forest, L'Heureux‑Dubé, Sopinka, Gonthier, Cory et Iacobucci.

en appel de la cour d'appel du québec

POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel du Québec, [1990] R.J.Q. 1825, qui a accueilli une requête en rejet d'appel à l'encontre d'un jugement de la Cour supérieure. Pourvoi rejeté.

Jack Greenstein, c.r., pour l'appelante.

Pierre Bourque, c.r., et Eugène Czolij, pour l'intimé.

Michel Robert, c.r., pour la mise en cause Nalcap Holdings Inc.

//Le juge en chef Lamer//

Le jugement suivant a été rendu par

Le juge en chef Lamer -- J'ai pris connaissance des motifs du juge L'Heureux-Dubé et, tout en souscrivant à sa conclusion, je n'adopte pas tout à fait le même raisonnement. J'estime en effet que dans le contexte de la Loi sur les sociétés par actions, L.R.C. (1985), ch. C-44, les règles du Code de procédure civile, L.R.Q., ch. C-25, ne sont pas d'application supplétive, puisque le législateur fédéral a incorporé ces règles dans la Loi sur les sociétés par actions par le biais de l'art. 248 de cette loi.

Je ne remets aucunement en question le principe voulant que les lois de procédure provinciales s'appliquent de manière supplétive, en cas de silence de la loi fédérale, aux matières relevant de la compétence législative du fédéral. Ce principe trouve toutefois application en cas de silence de la loi, ce qui ne correspond pas à la situation qui nous occupe ici. Le législateur fédéral ayant expressément prévu l'application, dans le cadre de la Loi sur les sociétés par actions, des règles de procédure provinciales, c'est en raison de ce renvoi que l'on doit appliquer au Québec les règles prévues au Code de procédure civile et non en raison du caractère supplétif de ces règles.

Il est vrai que cette distinction s'avère, dans le cadre du présent pourvoi, d'un intérêt pratique limité, puisqu'en l'absence du renvoi prévu à l'art. 248 de la Loi, il aurait fallu de toute manière appliquer au Québec les règles prévues au Code de procédure civile, à titre supplétif. La décision de cette Cour est toutefois susceptible d'avoir une portée plus large et il est possible d'imaginer des situations où le fait de nier l'existence d'un renvoi, aurait des conséquences plus importantes.

Ceci étant dit, il ne s'ensuit pas que l'on doive adopter le raisonnement suivi par le juge Nichols, de la Cour d'appel du Québec, [1990] R.J.Q. 1825. Celui-ci a considéré que, par l'art. 248 de la Loi sur les sociétés par actions, le législateur avait incorporé les règles du Code de procédure civile dans sa propre loi "... comme si elles y étaient écrites" (p. 1829). Il a déclaré que dans un tel cas, "... il faut lire la loi fédérale en interprétant ses dispositions les unes par les autres, comme si les règles provinciales en faisaient partie" (p. 1830). Par conséquent, selon le juge Nichols, l'art. 249 de la Loi sur les sociétés par actions, qui prévoit que "[t]oute ordonnance rendue en vertu de la présente loi est susceptible d'appel, devant la cour d'appel", vise tant les décisions rendues en vertu du Code de procédure civile, texte incorporé à la Loi sur les sociétés par actions, que les décisions rendues spécifiquement en vertu de cette loi.

Bien que j'estime, comme le juge Nichols, que l'art. 248 de la Loi sur les sociétés par actions incorpore, dans cette loi, les règles du Code de procédure civile, je ne partage pas l'interprétation proposée par le juge Nichols de l'art. 249 de la Loi sur les sociétés par actions. À mon avis, le juge Nichols adopte une interprétation exagérément littérale de l'expression "de la présente loi" à l'art. 249. Il existe bien une règle d'interprétation voulant que l'on interprète les unes par les autres les diverses dispositions d'une loi. Avec respect, cette règle ne doit toutefois pas être appliquée de façon mécanique, et, s'il est vrai que la loi forme un tout, présumé cohérent, il est vrai également que la loi doit toujours recevoir l'interprétation qui assure l'accomplissement de son objet.

À cet égard, la seule interprétation de l'art. 249 qui me paraisse compatible avec les objectifs de la Loi sur les sociétés par actions est celle qui limite l'appel de plein droit, prévu à cette disposition, aux ordonnances rendues en vertu de pouvoirs spécifiquement conférés par la Loi sur les sociétés par actions, à l'exclusion des jugements interlocutoires rendus en vertu des règles de procédure d'application générale contenues au Code de procédure civile. L'incorporation, dans la Loi sur les sociétés par actions, des règles énoncées au Code de procédure civile, n'enlève pas à celles-ci leur caractère de règles d'application générale et ne rend par conséquent pas les ordonnances rendues en vertu de ces règles sujettes à l'appel de plein droit prévu à l'art. 249 de la Loi sur les sociétés par actions.

En ce qui a trait à la nécessité, afin de favoriser les objectifs sous-jacents à la Loi sur les sociétés par actions, de limiter le droit d'appel aux pouvoirs spécifiquement conférés par cette loi, je souscris à l'analyse du juge L'Heureux-Dubé. J'estime en particulier que le législateur n'a pu vouloir accorder aux parties le droit d'en appeler de toutes les décisions interlocutoires susceptibles d'être rendues en cours d'instance, tout en ayant cherché à consacrer, par ailleurs, un remède particulièrement rapide et efficace au bénéfice de certaines catégories de personnes, dont les actionnaires minoritaires.

Pour ces motifs, je suis d'avis de rejeter le pourvoi avec dépens.

//Le juge L'Heureux-Dubé//

Le jugement des juges La Forest, L'Heureux-Dubé, Sopinka, Gonthier, Cory et Iacobucci a été rendu par

Le juge L'Heureux-Dubé -- Le présent pourvoi porte sur l'interprétation de l'art. 249 de la Loi sur les sociétés par actions, L.R.C. (1985), ch. C-44 ("L.S.A."). Plus précisément, il s'agit de déterminer si, en vertu de cette disposition, un jugement de la Cour supérieure du Québec autorisant un interrogatoire préalable est appelable de plein droit.

Faits

En novembre 1988, Kelvin Energy Ltd. ("Kelvin") a déposé une demande modifiée de redressement pour abus de droit conformément à l'art. 234 L.S.A. (maintenant l'art. 241). Au cours des mois qui ont précédé la demande, Kelvin avait acquis un nombre important d'actions votantes de Nalcap Holdings Inc. ("Nalcap") dans le but de la contrôler. Kelvin avait également fait une offre d'achat visant à la mainmise qui fut contestée par la direction de Nalcap et ses actionnaires majoritaires, et annulée par le tribunal peu de temps avant le dépôt de la demande.

La demande a été entendue le 21 novembre 1988 et a été ajournée jusqu'au 4 janvier 1989. Il était allégué que deux membres du conseil d'administration, Jimmy Lee et Michael John Smith, avaient manqué à leurs obligations fiduciaires envers Nalcap et ses actionnaires en persuadant le conseil d'administration d'acquérir des actions de Paramount Funding Ltd. ("Paramount") de l'appelante à un prix supérieur à celui du marché financier. Kelvin demandait que Lee et Smith soient révoqués du conseil d'administration et qu'ils remboursent à Nacalp les sommes dépensées pour acquérir les actions de Paramount. Le 4 janvier 1989, les parties ont informé le tribunal que des négociations en vue de parvenir à un règlement étaient en cours, et qu'il était possible que la poursuite prenne fin. Une remise a été accordée, et un règlement entre les parties a été confirmé le 11 janvier 1989. Kelvin avait négocié la vente de toutes ses actions de Nacalp et n'avait donc plus aucun intérêt dans l'instance. Aucun document contenant les modalités du règlement n'a été fourni au tribunal.

En sa qualité de Directeur nommé afin de remplir les devoirs et exercer les attributions qui lui sont conférés par la Loi sur les sociétés par actions, Sparling était, dès le début, partie à l'instance en raison de son intérêt continu dans les affaires de Nalcap. Lorsque la possibilité de règlement a été mentionnée pour la première fois, son avocat a rappelé à la cour que le par. 242(2) L.S.A. subordonne à l'approbation du tribunal tout règlement ou abandon d'une demande de redressement pour abus de droit. Exprimant sa crainte que les droits des autres actionnaires de Nacalp puissent être négligés par le règlement intervenu entre les parties, il a obtenu que la demande soit prorogée sine die et que Sparling soit autorisé à interroger MM. Lee et Smith hors cour. L'appelante n'était pas présente lorsque ces représentations ont été faites, et il est admis que l'autorisation de la cour n'a créé aucun précédent ayant pour effet de la lier. La déposition de M. Lee a été prise le 6 juin 1989.

Se fondant sur ce témoignage, Sparling a demandé à la cour la permission de convoquer deux témoins en vue d'un interrogatoire préalable: le président de l'appelante, Robert Atkinson, et un représentant de Paramount, Stephen Sharpe. Le juge Gomery de la Cour supérieure du Québec a accueilli la requête le 4 janvier 1990.

L'appelante a interjeté appel de cette décision et a également déposé une requête pour permission d'appeler de bene esse. Par jugement en date du 9 février 1990, le juge Rothman de la Cour d'appel du Québec a rejeté la requête pour permission d'appeler dans les termes suivants:

Je suis loin d'être convaincu que l'ordonnance émise par monsieur le juge Gomery est une ordonnance appelable. Si elle était appelable, je suis convaincu qu'elle serait appelable de plano et non pas sur permission d'en appeler en vertu de l'article 29 C.p.c.

Cette décision n'a pas été portée en appel.

Saisie d'une requête de Sparling pour rejet de l'appel interjeté de plein droit, la Cour d'appel l'a accueillie et a rejeté l'appel de l'appelante le 12 juillet 1990. C'est de l'appel de ce jugement que nous sommes présentement saisis.

Les jugements

Cour supérieure (Montréal, no 500-05-012429-880, le 4 janvier 1990)

Par jugement en date du 4 janvier 1990, la Cour supérieure a autorisé l'intimé à interroger au préalable MM. Atkinson et Sharpe. Se référant au Code de procédure civile, L.R.Q., ch. C-25 ("C.p.c."), le juge Gomery écrit:

[traduction] La procédure dans les affaires relevant de la Loi est assujettie aux règles habituelles en vigueur dans la province où la demande a été présentée, à moins d'une ordonnance contraire du tribunal (art. 248). Suivant le par. 397(4) du Code de procédure civile, on peut, avec la permission du tribunal, interroger toute personne sur tous les faits se rapportant à la demande.

Après avoir considéré les responsabilités de Sparling en sa qualité de Directeur nommé en vertu de la Loi sur les sociétés par actions et le fait que le règlement n'ait pas encore été soumis à la cour, le juge Gomery a conclu que des informations supplémentaires ne pourraient que contribuer à l'éclairer sur l'ordonnance qu'il serait éventuellement amené à rendre en vertu du par. 242(2) L.S.A.

Cour d'appel, [1990] R.J.Q. 1825

Estimant que le jugement porté en appel était de même nature que ceux auxquels réfèrent les arrêts Doyle c. Sparling, [1985] R.D.J. 645 (C.A.), Kruco Inc. c. Kruger, [1986] R.D.J. 69 (C.A.), et Kruger Inc. c. Kruco Inc., C.A. Montréal, no 500-09-000151-886, le 29 avril 1988, J.E. 88-833, le juge Beauregard a accueilli la requête en rejet d'appel de l'intimé (à la p. 1827):

À mon humble avis, ce jugement est assimilable à un jugement de la Cour supérieure qui, en cours d'instance, autorise une partie à interroger une autre ou un tiers dans le but que, éventuellement, lors de l'audition sur la question principale, le témoignage de cette personne puisse être invoqué. Ce genre de jugement relève d'une pure question de procédure, n'est pas de ceux que la Cour supérieure est appelée à rendre en vertu de pouvoirs qu'elle tire spécialement de la Loi sur les sociétés par actions et, en conséquence, il ne peut faire l'objet d'un appel sans l'autorisation d'un juge de la Cour.

Tout en partageant la conclusion du juge Beauregard, le juge Malouf a insisté sur la compatibilité de celle-ci avec l'objectif des dispositions de la Loi sur les sociétés par actions (à la p. 1828):

[traduction] En adoptant les art. 242 à 248 de la Loi sur les sociétés par actions, le Parlement a décidé d'accorder un recours à une certaine catégorie de personnes, en particulier aux actionnaires minoritaires. Le tribunal se voit conférer de larges pouvoirs lui permettant de remédier à tout acte qui «abuse des droits du requérant ou porte atteinte à ses intérêts». Aux termes de l'art. 248, les demandes «peuvent être présentées par voie sommaire sous forme de requête, d'avis de motion introductive d'instance ou selon les règles du tribunal. . . ». J'insiste beaucoup sur les mots «par voie sommaire».

Quoique l'art. 249 permette d'interjeter appel de toute ordonnance rendue en vertu de la Loi, le Parlement n'a pas pu vouloir que cet article s'applique à des jugements comme celui qu'a rendu la juridiction inférieure en l'espèce. Il me paraît évident que le Parlement a voulu éviter les retards inutiles qui se produiraient si toutes les ordonnances interlocutoires étaient susceptibles d'appel de plein droit.

Dans sa dissidence, le juge Nichols a refusé de suivre la jurisprudence antérieure de la Cour d'appel. Il a soutenu que, par le biais de l'art. 248 L.S.A., le législateur fédéral avait incorporé par renvoi les règles du Code de procédure civile dans la Loi sur les sociétés par actions (aux pp. 1829-30):

En permettant à un tribunal de recourir aux règles de procédure en vigueur dans sa province, le législateur fédéral incorpore à mon sens ces règles dans sa propre loi comme si elles y étaient écrites.

Dans ce cas, il faut lire la loi fédérale en interprétant ses dispositions les unes par les autres, comme si les règles provinciales en faisaient partie.

Ainsi, lorsqu'on trouve dans la loi sous étude une disposition aussi générale que l'article 249 édictant que "(t)oute ordonnance rendue en vertu de la présente loi est susceptible d'appel devant la cour d'appel", une ordonnance rendue en vertu d'une règle de pratique ou de procédure incorporée par référence à la loi devient elle aussi "une ordonnance rendue en vertu de la présente loi".

Le juge Nichols a donc conclu, contrairement aux juges Beauregard et Malouf, que le jugement de la Cour supérieure était appelable de plein droit.

Question en litige

La seule question en litige devant nous consiste à décider si le jugement autorisant l'interrogatoire préalable de MM. Atkinson et Sharpe constitue une "ordonnance" rendue en vertu de la Loi sur les sociétés par actions, au sens où cette expression est utilisée à l'art. 249 L.S.A.

Analyse

Puisque la présente affaire soulève la question de l'applicabilité des règles du Code de procédure civile, j'examinerai, en premier lieu, leur portée générale dans le cadre d'un recours prévu par la Loi sur les sociétés par actions. Cette approche permettra de cerner le choix opéré par le législateur fédéral et de saisir les enjeux ici en cause.

La portée des règles de procédure civile

Le champ d'application des règles du Code de procédure civile est bien résumé par Mes Maurice et Paul Martel:

Le principe de base est le suivant: au Québec, c'est le Code de procédure civile qui prime, sauf disposition expresse de la Loi sur les sociétés par actions y dérogeant. En cas de contradiction entre la loi fédérale et le Code de procédure civile, c'est la première qui doit primer.

(La compagnie au Québec, vol. I, Les aspects juridiques (1990), à la p. 798.21.)

Les dispositions du Code de procédure civile s'appliquent donc pendant l'instance, à titre supplétif, sous réserve de dérogation expresse par le législateur fédéral (Doyle c. Sparling, précité, à la p. 648, et Tsuru c. Montpetit, C.S. Montréal, no 500-05-011706-882, le 29 novembre 1988, J.E. 89-217, à la p. 12). Sans énumérer de manière exhaustive les règles de procédure civile écartées par la Loi sur les sociétés par actions, il suffit de mentionner, par exemple, les art. 55 et 59 relatifs à l'intérêt suffisant (par opposition à l'art. 238 L.S.A.) et les art. 65 et 152 en matière de caution (par opposition au par. 242(3) L.S.A., voir Tsuru c. Montpetit, précité).

Par ailleurs, l'art. 248 L.S.A. mentionne spécifiquement les règles de procédure civile. Cette disposition se lit comme suit:

248. [Demande sommaire] Les demandes autorisées par la présente loi peuvent être présentées par voie sommaire sous forme de requête, d'avis de motion introductive d'instance ou selon les règles du tribunal et sous réserve des ordonnances qu'il estime pertinentes, notamment en matière d'avis aux parties concernées ou de frais. [Je souligne.]

Avec égards, je ne puis partager l'opinion du juge Nichols à l'effet que l'article précité incorpore, par renvoi, les règles du Code de procédure civile dans la Loi sur les sociétés par actions de façon à faire d'ordonnances rendues selon ce code des ordonnances selon cette loi visées par son art. 249.

D'une part en effet, l'art. 248 L.S.A. réfère, avant tout, à la façon de présenter sa supplique devant le tribunal (voir les motifs du juge Cory, maintenant juge de notre Cour, dans Sparling c. Royal Trustco Ltd. (1984), 6 D.L.R. (4th) 682 (C.A. Ont.), aux pp. 691 et 692, confirmé par notre Cour à [1986] 2 R.C.S. 537). Il ne comporte pas de renvoi général explicite. On peut lui comparer l'art. 4 des Règles régissant la faillite, C.R.C. 1978, ch. 368, qui se lit:

4. La procédure de la cour dans les actions ou affaires civiles, y compris la procédure en référé, dans les cas auxquels il n'est pas pourvu par la Loi ou les présentes règles, et dans la mesure où elle est applicable et n'est pas incompatible avec la Loi ou les présentes règles, s'applique à toute procédure prévue par la Loi ou les présentes règles.

D'autre part, l'art. 248 L.S.A. doit se lire en conjonction avec l'art. 249 L.S.A. qui, pour les raisons que j'exposerai plus loin, doit se comprendre comme ne visant que les jugements rendus en vertu de pouvoirs conférés expressément par la Loi sur les sociétés par actions. Ainsi, l'art. 248 vient plutôt confirmer, en termes explicites, le caractère essentiellement supplétif des règles énoncées au Code de procédure civile. Ceci étant en ce qui touche le droit d'appel, la démarche appropriée m'apparaît donc être la suivante: il s'agit de déterminer si, à la lumière des dispositions pertinentes de la Loi sur les sociétés par actions, le jugement de première instance est régi par le droit d'appel qui s'y trouve énoncé. À défaut, les règles de procédure civile s'appliqueront en raison de leur caractère supplétif. Par voie de conséquence, les art. 29 et 511 C.p.c., qui exigent l'autorisation d'un juge de la Cour d'appel dans le cadre d'un jugement interlocutoire, régiront l'appel du jugement en question.

Le jugement de première instance et la Loi sur les sociétés par actions

Les dispositions suivantes de la Loi sur les sociétés par actions, situées dans la partie XX, intitulée "recours, infractions et peines", sont pertinentes:

242. . . .

(2) [Approbation de l'abandon des poursuites] La suspension, l'abandon, le règlement ou le rejet des demandes, actions ou interventions visées à la présente partie pour cause de défaut de procédure utile est subordonné à leur approbation par le tribunal selon les modalités qu'il estime pertinentes; il peut également ordonner à toute partie d'en donner avis aux plaignants s'il conclut que leurs droits peuvent être sérieusement atteints.

249. [Appel] Toute ordonnance rendue en vertu de la présente loi est susceptible d'appel, devant la cour d'appel.

Par ailleurs, les art. 29 et 511 C.p.c. gouvernent l'appel d'un jugement interlocutoire:

29. Est également sujet à appel, conformément à l'article 511, le jugement interlocutoire de la Cour supérieure ou celui de la Cour du Québec mais, s'il s'agit de sa compétence dans les matières relatives à la jeunesse, uniquement en matière d'adoption:

1. lorsqu'il décide en partie du litige;

2. lorsqu'il ordonne que soit faite une chose à laquelle le jugement final ne pourra remédier; ou

3. lorsqu'il a pour effet de retarder inutilement l'instruction du procès.

Toutefois, l'interlocutoire rendu au cours de l'instruction n'est pas sujet à appel immédiat et ne peut être mis en question que sur appel du jugement final, à moins qu'il ne rejette une objection à la preuve fondée sur l'article 308 de ce code ou sur l'article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne (chapitre C-12) ou à moins qu'il ne maintienne une objection à la preuve.

Est réputé interlocutoire le jugement rendu en cours d'instance avant le jugement final.

511. L'appel d'un jugement interlocutoire n'a lieu que sur permission accordée par un juge de la Cour d'appel, lorsqu'il estime qu'il s'agit d'un cas visé à l'article 29 et que les fins de la justice requièrent d'accorder la permission; il doit alors ordonner la continuation ou la suspension des procédures de première instance.

La jurisprudence sur laquelle s'appuie la majorité de la Cour d'appel est à l'effet que l'art. 249 L.S.A. vise uniquement les jugements rendus en vertu de pouvoirs conférés expressément par la Loi sur les sociétés par actions (Doyle c. Sparling, Kruco Inc. c. Kruger, et Kruger Inc. c. Kruco Inc, précités). Puisque les motifs de l'arrêt Doyle constituent le fondement des arrêts subséquents, je me limiterai à ceux-ci.

Dans cette affaire, la Cour d'appel était saisie d'un appel logé à l'encontre du jugement de première instance rejetant cinq moyens préliminaires soulevés par l'appelant. Ce dernier soutenait que l'art. 249 L.S.A. (anciennement l'art. 242) était rédigé en termes assez larges pour englober tout jugement rendu à l'occasion de procédures entamées en vertu de la Loi sur les sociétés par actions. Le juge Montgomery a rejeté cette prétention (à la p. 649):

[traduction] Nul doute que les jugements faisant l'objet de l'appel sont interlocutoires et que, suivant le Code de procédure civile, il ne pourrait en être interjeté appel sans autorisation (art. 511). Il incombe alors à l'appelant de démontrer l'existence d'une autre disposition légale applicable qui lui confère le droit d'interjeter un appel sans autorisation. Je ne puis conclure qu'il a fait cette preuve. La Loi sur les sociétés par actions semble avoir été conçue, en partie, pour permettre à certaines catégories de personnes, notamment aux actionnaires minoritaires, d'agir rapidement en vue d'obtenir une ordonnance protégeant leurs droits. À mon avis, le Parlement n'a pas voulu créer la possibilité de contourner ces droits en accordant à l'égard des jugements interlocutoires un droit d'appel de plus large portée que celui reconnu par la loi provinciale. Il s'agit en l'espèce de jugements interlocutoires fondés sur le Code civil et sur le Code de procédure civile, et non pas d'ordonnances rendues en vertu de la Loi. [Je souligne.]

Je souscris entièrement à cette conclusion. À mon avis, elle procède d'une interprétation qui trouve appui tant dans le texte de la disposition que dans la philosophie inhérente à la Loi sur les sociétés par actions.

1. L'article 249 L.S.A.

D'abord, cette interprétation m'apparaît la seule qui soit compatible avec les termes mêmes de l'art. 249 L.S.A. Ce dernier limite les ordonnances appelables de plein droit à celles qui sont rendues "en vertu de la présente loi". Contrairement à certaines dispositions régissant les appels dans le cadre d'autres lois fédérales, celle-ci ne déroge donc pas aux règles provinciales par le biais de termes larges et explicites. À titre de comparaison, je me réfère à l'art. 193 de la Loi sur la faillite, L.R.C. (1985), ch. B-3. Cette disposition se lit ainsi:

193. Sauf disposition expressément contraire, appel est recevable à la Cour d'appel de toute ordonnance ou décision d'un juge du tribunal dans les cas suivants:

a) le point en litige concerne des droits futurs;

b) l'ordonnance ou la décision influera vraisemblablement sur d'autres causes de nature semblable en matière de faillite;

c) les biens en question dans l'appel dépassent en valeur la somme de cinq cents dollars;

d) la libération est accordée ou refusée, lorsque la totalité des réclamations non acquittées des créanciers dépasse cinq cents dollars;

e) dans tout autre cas, avec la permission d'un juge de la Cour d'appel.

Le juge en chef Bisson, dissident sur un autre point, a différencié les deux dispositions en insistant sur le caractère général de l'article précité: Syndic de Cockfield Brown Inc., [1988] R.J.Q. 1807, aux pp. 1809 et 1810. Contrairement à l'art. 249 L.S.A., l'art. 193 de la Loi sur la faillite ne précise pas la source législative en vertu de laquelle le jugement de première instance doit être rendu.

Toutefois, l'absence de distinction fondée sur la nature interlocutoire ou finale du jugement visé est un dénominateur commun aux deux dispositions: In re Plotnick Brothers Ltd. (1961), 2 C.B.R. (N.S.) 126 (B.R. Qué.). La jurisprudence a ainsi confirmé que la portée de l'art. 249 L.S.A. ne se limite pas à un jugement final rendu en vertu d'un pouvoir conféré expressément par la Loi: McKechnie c. Équipement de pollution Hurum Ltée, [1991] R.D.J. 6 (C.A.), Bellman c. Western Approaches Ltd. (1981), 17 B.L.R. 117 (C.A.C.-B.), et Ferguson c. Imax Systems Corp. (1982), 38 O.R. (2d) 59 (C. div.). Dans ce dernier arrêt, le jugement porté en appel était de nature interlocutoire, et se voulait une ordonnance explicitement prévue par le par. 190(21) L.S.A. (anciennement le par. 184(21)). Ceci le rendait, par là, appelable de plein droit. Je ne puis donc souscrire aux prétentions de l'appelante à l'effet que cette décision s'écarte de la conclusion du juge Montgomery dans l'affaire Doyle. La nature interlocutoire de l'ordonnance demeure, à mes yeux, tout à fait compatible avec les termes de l'art. 249 L.S.A.: le critère qu'il énonce n'est pas le caractère interlocutoire ou final du jugement en question, mais bien la source législative du pouvoir qui en constitue la genèse.

L'affaire McKechnie c. Équipement de pollution Hurum Ltée, précitée, est une illustration de ce principe. Saisi d'une requête pour permission d'appeler d'un jugement prononcé en vertu de l'al. 241(3)a) L.S.A., le juge Brossard expose, dans un premier temps, la distinction précédemment analysée (à la p. 8):

Je n'aurais eu aucune hésitation à accorder la permission d'en appeler, s'il s'était agi d'un jugement dont la nature requiert telle permission.

Malheureusement pour les requérants, tel n'est pas le cas. L'article 249 de la Loi sur les sociétés par actions stipule que toute ordonnance rendue en vertu de cette loi est susceptible d'appel. Notre Cour, à plusieurs reprises dans les récentes années, a interprété cette disposition comme conférant un droit d'appel de plano de tout jugement rendu en vertu de l'autorité expressément conférée par cette loi, par opposition aux jugements prononcés sur des questions de nature procédurale ou en matière de remède interlocutoire relevant des dispositions du Code de procédure civile.

Après avoir rappelé les principes énoncés dans les affaires Doyle c. Sparling, Kruco Inc. c. Kruger, précitées, et l'arrêt de la Cour d'appel dont nous sommes ici saisis, le juge Brossard conclut (à la p. 8):

Dans le présent cas, il m'a paru indiscutable que l'ordonnance dont on désire faire appel en est une prononcée en vertu des pouvoirs que le premier juge tire "spécialement" de l'article 241(3)(a) qui se lit comme suit:

(3) Le tribunal peut, en donnant suite aux demandes visées au présent article, rendre les ordonnances provisoires ou définitives qu'il estime pertinentes pour, notamment:

a) empêcher le comportement contesté;

Ce jugement est donc susceptible d'appel de plein droit en vertu de l'article 249 de la même loi.

La portée de l'art. 249 L.S.A. est donc bien circonscrite. Tout jugement, qu'il soit interlocutoire ou final, sera appelable de plein droit à la condition qu'il ait été rendu en vertu d'un pouvoir conféré expressément par la Loi sur les sociétés par actions. Dans ces conditions, la détermination de la source législative du pouvoir exercé par le juge de première instance devient primordiale. L'avocat de l'appelante a insisté, à cet égard, sur l'art. 21 de la Loi sur le divorce, L.R.C. (1985), ch. 3 (2e suppl.) (autrefois l'art. 17), et l'interprétation voulant que la source législative du pouvoir exercé n'affecte pas le droit d'appel de plano qui s'y trouve énoncé: voir l'opinion du juge Montgomery dans Martel c. Chassé, [1975] C.A. 210, à la p. 211, Droit de la famille -- 203, [1985] C.A. 339, et Droit de la famille -- 572, [1989] R.J.Q. 22 (C.A.). Sans me prononcer sur cette question, la portée de l'art. 21 ne semble pas définitivement arrêtée (voir, par exemple, Peacock c. Peacock, C.A. Ont., le 13 novembre 1969 (reproduit à 11 O.R. (2d) 764)), Gleeson c. Gleeson (1976), 11 O.R. (2d) 757 (C. div.), Wygant c. Wygant (1979), 99 D.L.R. (3d) 154 (C.A. Ont.), et Cecconi c. Cecconi (1977), 15 O.R. (2d) 142 (C.A.), à la p. 144). Au surplus, si un conflit jurisprudentiel venait à exister sur ce point, il relèverait du contexte propre à la Loi sur le divorce. Dans le cadre de la présente affaire, il ne m'apparaît pas nécessaire, ni souhaitable, d'aller au delà de la Loi sur les sociétés par actions.

Lors de sa plaidoirie devant notre Cour, l'avocat de l'appelante a également souligné que l'art. 397 C.p.c. ne prévoit pas d'interrogatoire préalable à la demande d'un mis en cause (ce qu'était Sparling en première instance). Cette disposition se lit comme suit:

397. Le défendeur peut, avant production de la défense et après avis d'un jour franc aux procureurs des autres parties, assigner à comparaître devant le juge ou le protonotaire, pour y être interrogé sur tous les faits se rapportant à la demande ou pour donner communication et laisser prendre copie de tout écrit se rapportant à la demande:

1. le demandeur, son agent, employé ou officier;

2. dans une action en responsabilité, la victime, de même que toute personne impliquée dans la commission du fait dommageable;

3. la personne pour laquelle le demandeur réclame en qualité de tuteur ou de curateur, de même que celle pour laquelle il agit comme prête-nom ou de qui il tient ses droits par cession, subrogation ou autre titre analogue;

4. avec la permission du tribunal et aux conditions qu'il détermine, toute autre personne.

À moins d'une permission du juge, du protonotaire ou, dans le cas visé au paragraphe 4 du premier alinéa, du tribunal, cet interrogatoire doit avoir lieu dans le délai fixé pour la production de la défense. [Je souligne.]

Conjugué à l'absence, au sein du Code de procédure civile, de dispositions relatives à l'approbation d'un règlement hors cour par le tribunal, l'avocat de l'appelante conclut que la source législative du jugement de première instance réside dans le par. 242(2) L.S.A.

Je ne saurais être d'accord. D'abord, la présence du mot "défendeur" à l'art. 397 C.p.c. n'a pas pour effet d'empêcher un mis en cause d'invoquer cette disposition. Affirmer le contraire reviendrait à nier toute portée concrète à l'art. 20 C.p.c., qui se lit ainsi:

20. Si le moyen d'exercer un droit n'a pas été prévu par ce code, on peut y suppléer par toute procédure non incompatible avec les règles qu'il contient ou avec quelque autre disposition de la loi.

D'autre part, quoique l'intimé fut autorisé à interroger MM. Atkinson et Sharpe dans le cadre général d'une demande d'approbation de règlement, ce jugement interlocutoire ne devient pas, de ce fait, une ordonnance rendue en vertu de la Loi sur les sociétés par actions. La relation entre le pouvoir qui est effectivement exercé et la source législative doit, à mon avis, être beaucoup plus étroite pour entraîner l'application de l'art. 249 L.S.A. À titre d'exemple, si le juge de première instance avait approuvé ou refusé le règlement proposé, il se serait agi d'une ordonnance qui, en vertu du par. 242(2) L.S.A., tire sa source d'un pouvoir spécifiquement conféré par la Loi sur les sociétés par actions. En revanche, affirmer qu'un interrogatoire autorisé afin de recueillir des informations au préalable ne se distingue pas, aux fins de l'appel, de l'ordonnance visée par la disposition en question équivaut à confondre la fin et les moyens. Ces derniers demeurent régis, en l'absence de dérogation expresse, par les règles du Code de procédure civile. Dans le cadre de la présente affaire, puisque la Loi sur les sociétés par actions ne précise pas la procédure à suivre pour obtenir l'approbation du tribunal, il s'agit précisément des art. 20 et 397 C.p.c., qui s'appliquent en raison de leur caractère supplétif.

Je conclus donc que cet argument de texte ne résiste pas à l'analyse. Au delà des termes de la disposition, un aperçu de la philosophie inhérente à la Loi sur les sociétés par actions ne vient, au surplus, que renforcer ce constat.

2. La philosophie inhérente à la Loi sur les sociétés par actions

Le recours prévu à l'art. 241 L.S.A., dont l'abandon est à l'origine de la présente affaire, occupe une place particulière au sein de la Loi sur les sociétés par actions. Cette disposition se lit comme suit:

241. (1) [Demande en cas d'abus] Tout plaignant peut demander au tribunal de rendre les ordonnances visées au présent article.

(2) [Motifs] Le tribunal, saisi d'une demande visée au paragraphe (1), peut, par ordonnance, redresser la situation provoquée par la société ou l'une des personnes morales de son groupe qui, à son avis, abuse des droits des détenteurs de valeurs mobilières, créanciers, administrateurs ou dirigeants, ou porte atteinte à leurs intérêts ou n'en tient pas compte:

a) soit en raison de son comportement;

b) soit par la façon dont elle conduit ses affaires tant commerciales qu'internes;

c) soit par la façon dont ses administrateurs exercent ou ont exercé leurs pouvoirs.

(3) [Pouvoirs du tribunal] Le tribunal peut, en donnant suite aux demandes visées au présent article, rendre les ordonnances provisoires ou définitives qu'il estime pertinentes pour, notamment:

a) empêcher le comportement contesté;

b) nommer un séquestre ou un séquestre-gérant;

c) réglementer les affaires internes de la société en modifiant les statuts ou les règlements administratifs ou en établissant ou en modifiant une convention unanime des actionnaires;

d) prescrire l'émission ou l'échange de valeurs mobilières;

e) faire des nominations au conseil d'administration, soit pour remplacer tous les administrateurs en fonctions ou certains d'entre eux, soit pour en augmenter le nombre;

f) enjoindre à la société, sous réserve du paragraphe (6), ou à toute autre personne, d'acheter des valeurs mobilières d'un détenteur;

g) enjoindre à la société, sous réserve du paragraphe (6), ou à toute autre personne, de rembourser aux détenteurs une partie des fonds qu'ils ont versé pour leurs valeurs mobilières;

h) modifier les clauses d'une opération ou d'un contrat auxquels la société est partie ou de les résilier, avec indemnisation de la société ou des autres parties;

i) enjoindre à la société de lui fournir, ainsi qu'à tout intéressé, dans le délai prescrit, ses états financiers en la forme exigée à l'article 155, ou de rendre compte en telle autre forme qu'il peut fixer;

j) indemniser les personnes qui ont subi un préjudice;

k) prescrire la rectification des registres ou autres livres de la société, conformément à l'article 243;

l) prononcer la liquidation et la dissolution de la société;

m) prescrire la tenue d'une enquête conformément à la partie XIX;

n) soumettre en justice toute question litigieuse.

D. H. Peterson résume ainsi le fondement de ce recours:

[traduction] Le recours pour abus des droits est assimilable à la Charte des droits et libertés pour ce qui est du droit des sociétés. Comme il s'agit d'une création légale relativement nouvelle, il n'a pas beaucoup été interprété. Sa large portée et sa souplesse font que toutes les activités d'une société, quelle qu'en soit la nature, peuvent faire l'objet d'un examen judiciaire. La protection qu'il peut offrir à ceux qui ont un intérêt dans une société est impressionnante. Néanmoins, le législateur a prévu le recours pour abus des droits dans le dessein d'établir un équilibre entre les intérêts de ceux qui réclament des droits à la société et la capacité de la direction de gérer efficacement l'entreprise. Il s'agit d'un recours qui ne convient que dans les cas où les activités de la société entraînent une certaine discrimination ou un traitement inéquitable parmi les personnes ayant un intérêt dans la société, une atteinte à un droit découlant de la common law ou de l'equity, ou l'appropriation de biens de la société.

(Shareholder Remedies in Canada (1989), {SS} 18.1, à la p. 18.1.)

Ce remède appelle donc une interprétation qui soit conforme à son objet. Le juge Cory, alors de la Cour d'appel de l'Ontario, a résumé ce principe dans l'arrêt Sparling c. Royal Trustco Ltd., précité, à la p. 693:

[traduction] La L.S.A. cherche à offrir un recours dans le cas qui nous occupe. Une interprétation qui met à exécution ce recours est donc préférable à une interprétation qui cherche à restreindre ou à éliminer la disposition réparatrice de la Loi.

Et, à la p. 694:

[traduction] Lorsqu'une loi prévoit un recours, il ne convient pas d'en restreindre la portée indûment. Au contraire, les tribunaux devraient chercher à fournir les moyens de le mettre à exécution.

(Au même effet, voir Re Ferguson and Imax Systems Corp. (1983), 43 O.R. (2d) 128 (C.A.), à la p. 137, et Re Keho Holdings Ltd. and Noble (1987), 38 D.L.R. (4th) 368 (C.A. Alb.), à la p. 374.)

D'autre part, comme le souligne le juge Malouf dans ses motifs, le fait que les recours prévus par la Loi sur les sociétés par actions puissent être présentés de façon sommaire (art. 248 L.S.A.) est révélateur de l'objectif du législateur. Les modalités procédurales s'inscrivent, par là, dans l'efficacité sous-jacente au remède dont se prévaut l'actionnaire lésé.

Enfin, ces principes sont indissociables du par. 242(2) L.S.A. puisque l'abandon des poursuites constitue, aux fins de cette disposition, la genèse de l'intervention judiciaire. Le rôle assigné au tribunal s'articule autour du même paramètre, qui est la sauvegarde des droits des actionnaires:

[traduction] En décidant s'il y a lieu d'approuver une proposition de règlement fondée sur le par. 235(2) [maintenant le par. 242(2)] de la Loi, le tribunal doit être convaincu que la proposition est juste et raisonnable pour tous les actionnaires. Il doit reconnaître, en examinant ces questions, que les règlements sont de par leur nature même des compromis qui n'ont pas à répondre, et qui le plus souvent ne répondent pas, à chacune des préoccupations de toutes les parties concernées. Des règlements acceptables peuvent se situer n'importe où dans la vaste gamme comprise entre les limites supérieures et inférieures.

Dans des cas comme celui qui nous occupe, il n'appartient pas au tribunal de substituer son jugement à celui des parties qui ont négocié le règlement. Il ne lui incombe pas plus de statuer sur le fond du litige. Je me permets toutefois d'ajouter que le tribunal ne doit pas se contenter d'approuver la proposition sans discuter.

Le tribunal doit examiner la nature des prétentions avancées dans l'action, la nature des défenses opposées à celles‑ci et les avantages obtenus et perdus par les parties à la suite du règlement. [Je souligne.]

(Sparling c. Southam Inc. (1988), 41 B.L.R. 22 (H.C. Ont.), aux pp. 28 et 29.)

L'interprétation voulant qu'un jugement du même genre que celui à l'origine de la présente affaire relève du droit d'appel de plano prévu par l'art. 249 L.S.A. m'apparaît, à tout le moins, incompatible avec ce qui précède.

D'abord, compte tenu du nombre presque illimité de jugements interlocutoires pouvant être rendus au cours d'une instance, ceci irait à l'encontre de l'objectif premier du législateur: consacrer un remède rapide et efficace pour la protection des actionnaires vulnérables aux abus de la majorité. D'autre part, lorsque l'on conjugue le rôle du tribunal en vertu du par. 242(2) L.S.A. à la nécessité corrélative de recueillir des informations au préalable, cela ne pourrait que conduire à l'entrave, sinon la paralysie de la fonction dont se trouve investi le pouvoir judiciaire.

Une interprétation conforme à l'objet de la Loi sur les sociétés par actions exige, au contraire, que l'appel de plano participe à la finalité du recours qui le côtoie en tenant compte, notamment, du déroulement efficace de l'instance. Limiter sa portée au jugement qui découle d'un pouvoir conféré spécifiquement par la Loi sur les sociétés par actions et ce, à l'exclusion de la panoplie de décisions interlocutoires relevant du Code de procédure civile correspond, précisément, à un tel objectif. Cette approche présente, de surcroît, le mérite d'être cohérente avec le droit d'appel sur permission régi par les art. 29 et 511 C.p.c. Comme l'explique le juge LeBel:

Chaque chapitre du Code de procédure civile est de nature à susciter des décisions judiciaires diverses, et, de temps à autre, la volonté d'interjeter appel et d'obtenir une décision d'un deuxième niveau de juridiction.

Le Code de procédure civile n'entend pas que toutes ces décisions interlocutoires soient sujettes à appel. Il ne prévoit celui-ci que dans ces trois cas que décrit l'article 29. Comme on l'a vu, il faut que l'on se trouve devant des décisions qui disposent en partie du litige ou que le jugement final ne peut corriger ou qui entraînent des retards inutiles dans le procès. Le droit d'appel dépend non pas d'une classification abstraite des jugements, mais de leur effet concret sur le déroulement de l'instance. [Je souligne.]

("L'appel des jugements interlocutoires en procédure civile québécoise" (1986), 17 R.G.D. 391, à la p. 399.)

(Voir également D. Ferland, B. Emery et J. Tremblay, Précis de procédure civile du Québec (1992), aux pp. 29 à 33.)

Au surplus, ce facteur est indissociable de la condition, énoncée à l'art. 511 C.p.c., voulant que les fins de la justice requièrent d'accorder la permission d'appeler. Ainsi, la relation entre l'objectif de la Loi sur les sociétés par actions et celui des art. 29 et 511 C.p.c. m'apparaît non seulement compatible, mais étroitement complémentaire.

Au delà de l'objet de la Loi sur les sociétés par actions, l'interprétation exposée ci-avant relève d'une saine politique judiciaire car elle contribue à l'efficacité de l'administration de la justice. Le juge Callaghan, alors juge en chef adjoint de la Haute Cour, résume, comme suit, l'approche que doivent privilégier les tribunaux dans le contexte du par. 242(2) L.S.A.:

[traduction] En abordant cette question, je crois qu'il y a lieu de faire remarquer, au départ, qu'en général les tribunaux préfèrent sans exception les règlements à l'amiable. En d'autres termes, il existe un intérêt public prépondérant à ce que les parties en viennent à un règlement. Il s'agit là d'un principe qui sert généralement les intérêts des parties en ce qu'il leur épargne les frais de l'instruction des questions en litige, tout en réduisant la pression exercée sur un système de tribunaux provinciaux déjà surchargé. [Je souligne.]

(Sparling c. Southam Inc., précité, à la p. 28.)

Compte tenu du lien inhérent entre le droit d'appel et le déroulement efficace de l'instance, j'estime que ce facteur occupe une place tout aussi prépondérante dans le contexte de l'art. 249 L.S.A. et des recours curatifs qui le côtoient.

Conclusion

Pour toutes ces raisons, je suis d'avis de rejeter le pourvoi avec dépens.

Pourvoi rejeté avec dépens.

Procureurs de l'appelante: Mackenzie Gervais, Montréal.

Procureurs de l'intimé: Desjardins Ducharme, Montréal.

Procureurs de la mise en cause Nalcap Holdings Inc.: Langlois Robert, Montréal.


Synthèse
Référence neutre : [1992] 3 R.C.S. 235 ?
Date de la décision : 29/10/1992
Sens de l'arrêt : Le pourvoi est rejeté

Analyses

Appel - Jugement interlocutoire - Loi sur les sociétés par actions - Demande de redressement pour abus de droit présentée devant la Cour supérieure - Règlement hors cour - Interrogatoire préalable autorisé par le tribunal -- Le jugement autorisant l'interrogatoire préalable est‑il sujet à un appel de plein droit en vertu de l'art. 249 de la Loi? - Applicabilité des règles du Code de procédure civile - Loi sur les sociétés par actions, L.R.C. (1985), ch. C‑44, art. 241, 242(2), 248, 249 - Code de procédure civile, L.R.Q., ch. C‑25, art. 29, 511.

Procédure civile - Interrogatoire préalable - Mis en cause autorisé par le tribunal à convoquer des témoins en vue d'un interrogatoire préalable -- Article 397 C.p.c. applicable au mis en cause - Code de procédure civile, L.R.Q., ch. C‑25, art. 20, 397 -- Loi sur les sociétés par actions, L.R.C. (1985), ch. C‑44, art. 241, 242(2), 248.

Après le dépôt en Cour supérieure d'une demande de redressement pour abus de droit, fondée sur l'art. 241 de la Loi sur les sociétés par actions, les parties ont entrepris des négociations qui ont abouti à un règlement. En sa qualité de directeur nommé en vertu de la Loi, l'intimé, assigné comme mis en cause, a indiqué à la cour que le par. 242(2) de la Loi subordonne à l'approbation du tribunal tout règlement ou abandon d'une demande de redressement pour abus de droit et exprimé sa crainte que les droits de certains actionnaires puissent avoir été négligés par le règlement. L'intimé a donc demandé à la cour la permission de convoquer deux témoins en vue d'un interrogatoire préalable et cette requête a été accueillie. L'appelante a interjeté appel de ce jugement. La Cour d'appel, à la majorité, a statué que le jugement de la Cour supérieure ne donnait pas ouverture à un appel de plein droit et a accueilli la requête en rejet de l'appel présentée par l'intimé. Le présent pourvoi vise à déterminer si le jugement autorisant l'interrogatoire préalable est sujet à un appel de plein droit en vertu de l'art. 249 de la Loi. Cet article prévoit que "[t]oute ordonnance rendue en vertu de la présente loi est susceptible d'appel, devant la cour d'appel".

Arrêt: Le pourvoi est rejeté.

Les juges La Forest, L'Heureux‑Dubé, Sopinka, Gonthier, Cory et Iacobucci: Bien que l'art. 248 de la Loi sur les sociétés par actions mentionne spécifiquement les règles de procédure civile provinciale, il ne comporte pas de renvoi général explicite de façon à faire des ordonnances rendues en vertu du Code de procédure civile des ordonnances visées par l'art. 249 de la Loi. L'article 248 vient plutôt confirmer, en termes explicites, le caractère essentiellement supplétif des règles énoncées au Code.

Le jugement de la Cour supérieure autorisant l'interrogatoire préalable n'est pas sujet à un appel de plein droit en vertu de l'art. 249 de la Loi. Un jugement, qu'il soit interlocutoire ou final, ne peut faire l'objet d'un appel de plein droit en vertu de cet article que s'il a été rendu en vertu d'un pouvoir conféré expressément par cette loi. Cette interprétation est la seule qui soit compatible avec le texte même de l'art. 249 qui limite les ordonnances susceptibles d'appel de plein droit à celles qui sont rendues "en vertu de la présente loi". En l'espèce, même si l'intimé a été autorisé à interroger deux témoins dans le cadre général d'une demande d'approbation de règlement visée par le par. 242(2) de la Loi, ce jugement interlocutoire ne devient pas, de ce fait, une ordonnance rendue en vertu de la Loi. La relation entre le pouvoir qui est effectivement exercé et la source législative doit être beaucoup plus étroite pour entraîner l'application de l'art. 249. Un interrogatoire autorisé afin de recueillir des informations au préalable se distingue, aux fins de l'appel, de l'ordonnance visée par le par. 242(2). Il faut en effet éviter de confondre la fin et les moyens. Ces derniers demeurent régis, en l'absence de dérogation expresse, par les règles du Code de procédure civile. Dans le cadre de la présente affaire, puisque la Loi ne précise pas la procédure à suivre pour obtenir l'approbation du tribunal, ce sont les art. 20 et 397 C.p.c. qui s'appliquent en raison de leur caractère supplétif.

Une interprétation voulant que le jugement rendu par la Cour supérieure, ou un jugement du même genre, relève du droit d'appel de plein droit prévu à l'art. 249 de la Loi serait incompatible avec la philosophie inhérente de la Loi. D'abord, vu le nombre presque illimité de jugements interlocutoires pouvant être rendus au cours d'une instance, cette interprétation irait à l'encontre de l'objectif premier du législateur qui vise à consacrer un remède rapide et efficace pour la protection des actionnaires vulnérables aux abus de la majorité. D'autre part, lorsque l'on conjugue le rôle du tribunal en vertu du par. 242(2) de la Loi à la nécessité corrélative de recueillir des informations au préalable, une telle interprétation ne pourrait que conduire à l'entrave ou à la paralysie de la fonction dont se trouve investi le pouvoir judiciaire. Une interprétation conforme à l'objet de la Loi exige, au contraire, que l'appel de plein droit participe à la finalité du recours qui le côtoie en tenant compte, notamment, du déroulement efficace de l'instance. Limiter la portée de l'art. 249 au jugement qui découle d'un pouvoir conféré spécifiquement par la Loi, et ce, à l'exclusion de la panoplie de décisions interlocutoires relevant du Code de procédure civile, correspond précisément à un tel objectif. Cette approche présente, de surcroît, le mérite d'être cohérente avec le droit d'appel sur permission régi par les art. 29 et 511 C.p.c.

Le juge en chef Lamer: L'article 248 de la Loi sur les sociétés par actions incorpore dans cette loi les règles de procédure provinciales et c'est en raison de ce renvoi que l'on doit appliquer au Québec les règles prévues au Code de procédure civile et non en raison du caractère supplétif de ces règles.

La seule interprétation de l'art. 249 qui est compatible avec les objectifs de la Loi est celle qui limite l'appel de plein droit, prévu à cette disposition, aux ordonnances rendues en vertu de pouvoirs spécifiquement conférés par cette loi, à l'exclusion des jugements interlocutoires rendus en vertu des règles de procédure d'application générale contenues dans le Code de procédure civile. L'incorporation dans la Loi des règles énoncées au Code n'enlève pas à celles‑ci leur caractère de règles d'application générale et ne rend donc pas les ordonnances rendues en vertu de ces règles sujettes à l'appel de plein droit prévu à l'art. 249 de la Loi. De plus, limiter le droit d'appel aux pouvoirs spécifiquement conférés par cette loi, favorise les objectifs sous‑jacents à la Loi.


Parties
Demandeurs : Kelvin Energy Ltd.
Défendeurs : Lee

Références :

Jurisprudence
Citée par le juge L'Heureux‑Dubé
Arrêts mentionnés: Doyle c. Sparling, [1985] R.D.J. 645
Kruco Inc. c. Kruger, [1986] R.D.J. 69
Kruger Inc. c. Kruco Inc., J.E. 88‑833
Tsuru c. Montpetit, J.E. 89‑217
Sparling c. Royal Trustco Ltd. (1984), 6 D.L.R. (4th) 682, conf. par [1986] 2 R.C.S. 537
Cockfield Brown Inc. (Syndic de), [1988] R.J.Q. 1807
In re Plotnick Brothers Ltd. (1961), 2 C.B.R. (N.S.) 126
McKechnie c. Équipement de pollution Hurum Ltée, [1991] R.D.J. 6
Bellman c. Western Approaches Ltd. (1981), 17 B.L.R. 117
Ferguson c. Imax Systems Corp. (1982), 38 O.R. (2d) 59 (C. div.), inf. par (1983), 43 O.R. (2d) 128 (C.A.)
Martel c. Chassé, [1975] C.A. 210
Droit de la famille — 203, [1985] C.A. 339
Droit de la famille — 572, [1989] R.J.Q. 22
Peacock c. Peacock (1969), 11 O.R. (2d) 764
Gleeson c. Gleeson (1976), 11 O.R. (2d) 757
Wygant c. Wygant (1979), 99 D.L.R. (3d) 154
Cecconi c. Cecconi (1977), 15 O.R. (2d) 142
Re Keho Holdings Ltd. and Noble (1987), 38 D.L.R. (4th) 368
Sparling c. Southam Inc. (1988), 41 B.L.R. 22.
Lois et règlements cités
Code de procédure civile, L.R.Q., ch. C‑25, art. 20, 29, 55, 59, 65, 152, 397, 511.
Loi sur la faillite, L.R.C. (1985), ch. B‑3, art. 193.
Loi sur le divorce, L.R.C. (1985), ch. 3 (2e suppl.), art. 21.
Loi sur les sociétés par actions, L.R.C. (1985), ch. C‑44, art. 238, 241, 242(2), (3), 248, 249.
Règles régissant la faillite, C.R.C. 1978, ch. 368, art. 4.
Doctrine citée
Ferland, Denis, Benoît Emery et Jocelyne Tremblay. Précis de procédure civile du Québec. Cowansville: Yvon Blais, 1992.
LeBel, Louis. "L'appel des jugements interlocutoires en procédure civile québécoise" (1986), 17 R.G.D. 391.
Martel, Maurice, et Paul Martel. La compagnie au Québec, vol. I, Les aspects juridiques. Montréal: Wilson & Lafleur/Martel Ltée, 1990.
Peterson, Dennis H. Shareholder Remedies in Canada. Toronto: Butterworths, 1989 (loose‑leaf).

Proposition de citation de la décision: Kelvin Energy Ltd. c. Lee, [1992] 3 R.C.S. 235 (29 octobre 1992)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1992-10-29;.1992..3.r.c.s..235 ?
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