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17/03/2011 | FRANCE | N°2010-103

France | France, Conseil constitutionnel, 17 mars 2011, 2010-103


Le Conseil constitutionnel a été saisi le 17 décembre 2010 par le Conseil d'État (décision n° 341014 du 17 décembre 2010), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par la société SERAS II, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions du 1 de l'article 1729 du code général des impôts en tant qu'elles instituent une majoration de 40 % si la mauvaise foi du contribuable est établie.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution ;


Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur ...

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 17 décembre 2010 par le Conseil d'État (décision n° 341014 du 17 décembre 2010), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par la société SERAS II, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions du 1 de l'article 1729 du code général des impôts en tant qu'elles instituent une majoration de 40 % si la mauvaise foi du contribuable est établie.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code général des impôts ;

Vu la loi n° 87-502 du 8 juillet 1987 modifiant les procédures fiscales et douanières ;

Vu l'ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005 relative à des mesures de simplification en matière fiscale et à l'harmonisation et l'aménagement du régime des pénalités, notamment son article 13 entré en vigueur le 1er janvier 2006 ;

Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Vu les observations produites pour la société requérante par Me Jean-Alain Blanc, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 7 janvier 2011 ;

Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 10 janvier 2011 ;

Vu les pièces produites et jointes au dossier ;

Me Jérôme Rousseau, avocat au barreau de Paris, pour la société requérante et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 8 février 2011 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur avant le 1er janvier 2006 : « Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou 80 % s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales » ;

2. Considérant que, selon la société requérante, cet article en tant qu'il prévoit une majoration du montant des droits de 40 % en cas de mauvaise foi du contribuable porte atteinte aux principes de nécessité, de proportionnalité et d'individualisation des peines, qui découlent de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;

3. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte, dans le 1 de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur avant le 1er janvier 2006, sur les mots : « de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie » ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Déclaration de 1789 : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée » ; que le principe d'individualisation des peines qui découle de cet article implique que la majoration des droits, lorsqu'elle constitue une sanction ayant le caractère d'une punition, ne puisse être appliquée que si l'administration, sous le contrôle du juge, l'a expressément prononcée en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce ; qu'il ne saurait toutefois interdire au législateur de fixer des règles assurant une répression effective des infractions ;

5. Considérant qu'en instituant, dans le recouvrement de l'impôt, une majoration fixe de 40 % du montant des droits en cas de mauvaise foi du contribuable, l'article 1729 du code général des impôts vise, pour assurer l'égalité devant les charges publiques, à améliorer la prévention et à renforcer la répression des insuffisances volontaires de déclaration de base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt ; que le même article prévoit une majoration de 80 % si le contribuable s'est rendu coupable de manœuvres frauduleuses ou d'abus de droit ;

6. Considérant que la disposition contestée institue une sanction financière dont la nature est directement liée à celle de l'infraction ; que la loi a elle-même assuré la modulation des peines en fonction de la gravité des comportements réprimés ; que le juge décide, dans chaque cas, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, soit de maintenir ou d'appliquer la majoration effectivement encourue au taux prévu par la loi, soit de ne laisser à la charge du contribuable que des intérêts de retard s'il estime que l'administration n'établit pas que ce dernier se serait rendu coupable de manœuvres frauduleuses ni qu'il aurait agi de mauvaise foi ; qu'il peut ainsi proportionner les pénalités selon la gravité des agissements commis par le contribuable ; que le taux de 40 % n'est pas manifestement disproportionné ;

7. Considérant, dès lors, que le grief tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la Déclaration de 1789 doit être rejeté ; que la disposition contestée n'est contraire à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit,

DÉCIDE :

Article 1er.− Dans le 1 de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2006, les mots : « de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie » sont conformes à la Constitution.

Article 2.− La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 17 mars 2011, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Pierre STEINMETZ.

Rendu public le 17 mars 2011.


Synthèse
Numéro de décision : 2010-103
Date de la décision : 17/03/2011
Société SERAS II [Majoration fiscale de 40 % pour mauvaise foi]
Sens de l'arrêt : Conformité
Type d'affaire : Question prioritaire de constitutionnalité

Références :

QPC du 17 mars 2011 sur le site internet du Conseil constitutionnel
QPC du 17 mars 2011 sur le site internet Légifrance

Texte attaqué : Disposition législative (type)


Publications
Proposition de citation : Cons. Const., décision n°2010-103 QPC du 17 mars 2011
Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CC:2011:2010.103.QPC
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