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28/11/2023 | FRANCE | N°22DA01144

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 28 novembre 2023, 22DA01144


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiée (SAS) Grenke Location a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la commune d'Heilly à lui verser la somme de 720 euros à raison des loyers dus en application du contrat de location de longue durée d'un système de téléphonie signé par cette dernière le 6 mars 2015, assortie des intérêts au taux légal majorés de cinq points et de leur capitalisation à compter du 1er janvier 2019, ainsi que la somme de 3 000 euros à raiso

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Grenke Location a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la commune d'Heilly à lui verser la somme de 720 euros à raison des loyers dus en application du contrat de location de longue durée d'un système de téléphonie signé par cette dernière le 6 mars 2015, assortie des intérêts au taux légal majorés de cinq points et de leur capitalisation à compter du 1er janvier 2019, ainsi que la somme de 3 000 euros à raison de l'indemnité contractuelle de résiliation prévue à ce contrat, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation à compter de la date du jugement à intervenir ou, à titre subsidiaire à raison du préjudice matériel qu'elle estime avoir subi du fait de la résiliation du contrat du 6 mars 2015, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation à compter de la date du jugement, de condamner la commune d'Heilly à lui restituer à ses frais et risques le matériel loué en application du contrat signé le 6 mars 2015, et de mettre à la charge de la commune d'Heilly la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2000825 du 6 avril 2022, le tribunal administratif d'Amiens, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la SAS Grenke Location tendant à la restitution du matériel loué en application du contrat du 6 mars 2015, a condamné la commune d'Heilly à lui verser une somme de 510,97 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts au taux légal majorés de cinq points et de leur capitalisation à compter du 1er janvier 2019, et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er juin 2022 et le 24 novembre 2022, la SAS Grenke Location, représentée par Me Thiery, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses conclusions tendant à la condamnation de la commune d'Heilly au paiement des loyers dus en exécution du contrat signé le 6 mars 2015 et a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

2°) de porter à 720 euros la somme de 510,97 euros que le tribunal a condamné la commune d'Heilly à lui payer à raison des loyers dus en application du contrat signé le 6 mars 2015, ou, subsidiairement, de porter cette somme à 512 euros et de mettre à la charge de la commune la somme de 208 euros " en indemnisation de la brusque rupture des relations contractuelles ", et d'assortir la somme mise à la charge de la commune d'Heilly des intérêts au taux légal majorés de cinq points à compter du 1er janvier 2019 et de leur capitalisation ;

3°) de condamner la commune d'Heilly à lui verser la somme de 3 000 euros à raison de l'indemnité contractuelle de résiliation ou, à titre subsidiaire, à raison du préjudice matériel qu'elle estime avoir subi du fait de la résiliation du contrat signé le 6 mars 2015, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date du jugement contesté et de leur capitalisation ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Heilly une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la résiliation anticipée, par la commune d'Heilly, du contrat de location de matériel de téléphonie signé le 6 mars 2015 n'est justifiée ni par des fautes qui lui seraient imputables, ni par un motif d'intérêt général ;

- elle est en droit de prétendre au paiement des loyers impayés durant l'exécution du contrat pour un montant de 720 euros toutes taxes comprises ;

- elle est en droit de prétendre au versement de l'indemnité contractuelle de résiliation, pour un montant de 3 000 euros ;

- à titre subsidiaire, elle est en droit de prétendre, pour le même montant, à l'indemnisation de ses préjudices, résultant, d'une part, de la perte des bénéfices escomptés pour la période contractuelle restant à courir et, d'autre part, de l'impossibilité dans laquelle elle s'est trouvée de financer au moyen des loyers perçus l'intégralité de l'amortissement des matériels acquis en vue de leur location.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 novembre 2022, la commune d'Heilly, représentée par Me Jean-Marc Quennehen, conclut au rejet de la requête et demande, en outre, à la cour :

1°) par la voie de l'appel incident, de réformer le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 6 avril 2022 en tant qu'il l'a condamnée à verser à la SAS Grenke Location une somme de 510, 97 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts au taux légal majorés de cinq points et de leur capitalisation à compter du 1er janvier 2019 ;

2°) de mettre à la charge de la SAS Grenke Location une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que ;

- l'application du contrat signé le 6 mars 2015 doit être écartée, dès lors que celui-ci n'est pas valide en raison des conditions dans lesquelles elle a donné son consentement ;

- les moyens soulevés par la SAS Grenke Location ne sont pas fondés ;

- la clause de résiliation unilatérale prévue au contrat est illicite en ce qu'elle ne prévoit pas que le contractant de la personne publique doit mettre celle-ci à même de demander la poursuite de l'exécution de ce contrat pour un motif d'intérêt général ;

- les intérêts échus sur la somme due au titre des loyers impayés ne peuvent courir qu'à compter de la date de la réclamation préalable ;

- la capitalisation de ces intérêts ne peut être accordée qu'à compter de la date à laquelle une année d'intérêts était due ;

- les stipulations de l'article 11 du contrat litigieux prévoyant qu'en cas de résiliation du contrat, elle était tenue de payer une indemnité égale au montant des loyers qu'elle aurait dû verser à la SAS Grenke location jusqu'à la fin du contrat, majoré d'une pénalité égale à 10 % de ces loyers, est inapplicable en raison de caractère manifestement disproportionné de cette indemnité.

Par une ordonnance du 25 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 9 janvier 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la commande publique ;

- le code de la consommation ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dominique Bureau, première conseillère,

- et les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La commune d'Heilly a signé avec la société Grenke location, le 6 mars 2015, un contrat de location de longue durée sans option d'achat, par lequel cette société s'engageait à acheter, auprès du fournisseur désigné par la commune, du matériel de téléphonie pour le donner ensuite en location à cette dernière pour une durée de soixante-trois mois, moyennant un loyer trimestriel de 600 euros. La SAS Grenke location a cessé le paiement des loyers échus à compter du mois de janvier 2019, puis, par un courrier du 28 février 2019, reçu par la SAS Grenke location le 4 mars 2019, a résilié le contrat du 6 mars 2015, au motif " qu'il n'y avait plus de prestation assurée ni de contrepartie aux paiements effectués ", et a invité la SAS Grenke location à venir reprendre le matériel téléphonique loué. Le 19 juillet 2019, la société Grenke location a adressé à la commune d'Heilly un courrier, reçu le 25 juillet 2019, par lequel elle indiquait procéder à la résiliation du contrat et demandait le paiement des loyers impayés ainsi que le versement de l'indemnité de résiliation prévue par le contrat, et lui demandait la restitution des matériels. Le silence conservé par la commune d'Heilly sur la demande de la SAS Grenke location tendant au versement des sommes réclamées a fait naître une décision implicite de rejet. La SAS Grenke location a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la commune d'Heilly à lui verser la somme de 720 euros à raison des loyers dus en application du contrat, ainsi que la somme de 3 000 euros au titre de l'indemnité de résiliation prévue par celui-ci ou, à titre subsidiaire, en réparation des préjudices subis du fait de la résiliation anticipée du contrat. La SAS Grenke location relève appel du jugement du 6 avril 2022 du tribunal administratif d'Amiens, en tant que le tribunal a limité à 510,97 euros la somme mise à la charge de la commune d'Heilly. Cette dernière, par la voie de l'appel incident, demande à la cour de réformer ce jugement en tant qu'il a partiellement fait droit aux demandes de la SAS Grenke location.

Sur la validité du contrat :

2. Lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat. Toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel.

3. En premier lieu, la commune d'Heilly soutient qu'elle a été victime de manœuvres dolosives de la part de la SAS Grenke location dès lors, d'une part, qu'après avoir fait l'objet d'un démarchage de la part de celle-ci, elle a, le jour même de la livraison du matériel, signé le contrat établi sur le formulaire type qui lui a été présenté sans avoir bénéficié du temps nécessaire pour en examiner les clauses ni été mise à même d'exercer le droit de rétractation prévu par les dispositions de l'article L. 121-21 du code de la consommation dans sa rédaction alors en vigueur et, d'autre part, que la baisse des coûts et la simplification de gestion attendus ne se sont pas réalisés. Toutefois, à supposer même établies les manœuvres alléguées, il ne résulte pas de l'instruction qu'en leur absence, la commune d'Heilly se serait abstenue de signer le contrat litigieux ou n'aurait accepté de signer celui-ci que dans des conditions substantiellement différentes. Le moyen tiré d'un vice du consentement donné par la commune d'Heilly doit donc être écarté.

4. En second lieu, aucun texte ou principe applicables au contrat litigieux, qui relève des règles applicables en matière de commande publique, et notamment pas les dispositions de l'article L. 121-21 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur à la date de la conclusion du contrat, n'imposait que la commune d'Heilly dispose d'une période de réflexion avant de signer celui-ci, ou d'un droit de rétractation. Par suite, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que le contrat est nul dès lors qu'il a été signé à la suite d'un démarchage de la société et sans prévoir de possibilité de rétractation.

5. Il résulte de ce qui a été dit aux deux points précédents que la commune d'Heilly n'est pas fondée à soutenir que l'application du contrat du 6 mars 2015 doit être écartée, dans son intégralité, en raison de vices d'une particulière gravité affectant les conditions dans lesquelles elle a donné son consentement.

Sur les loyers impayés :

6. Le premier alinéa du point 1 de l'article 4 du contrat signé entre la commune d'Heilly et la SAS Grenke location stipule : " La période initiale de location prend effet le 1er jour du trimestre civil ou du mois suivant la délivrance des Produits. Si la délivrance précède le début de la période initiale de location, le loyer à payer dans l'intervalle sera égal par jour à 1/30ème du loyer mensuel convenu ".

7. Il est constant que la commune d'Heilly a cessé le paiement des loyers trimestriels, fixés par le contrat à 600 euros, à compter des loyers échus le 1er janvier 2019. Toutefois, si la SAS Grenke location soutient que ce contrat prévoit une facturation trimestrielle en début de période, de sorte qu'elle est en droit de prétendre au paiement intégral de la somme de 600 euros hors taxe, soit 720 euros toutes taxes comprises, les clauses du contrat ne stipulent pas que tout trimestre ou mois commencé est dû dans son intégralité. Dès lors, la décision de la commune d'Heilly de résilier le contrat ayant été notifiée à la SAS Grenke le 4 mars 2019, celle-ci est seulement en droit de prétendre au versement des loyers correspondant à la rémunération des prestations réalisées du 1er janvier 2019 au 4 mars 2019, durant deux mois et quatre jours, soit deux tiers et quatre quatre-vingt dixièmes de ce loyer. La SAS Grenke location est, par suite, fondée à demander, à ce titre, la condamnation de la commune d'Heilly à lui verser la somme de 426,67 euros hors taxe, soit 512 euros toutes taxes comprises.

8. Cette somme doit être assortie des intérêts au taux légal majoré de cinq points, en application du point 3 de l'article 4 et de l'article 17 du contrat litigieux, à compter du 1er janvier 2019, date d'exigibilité du loyer. La SAS Grenke location a demandé la capitalisation de ces intérêts, pour la première fois, le 12 mars 2020, date d'enregistrement de sa demande au greffe du tribunal administratif d'Amiens, à laquelle plus d'une année d'intérêts était due. Il y a lieu, par suite, d'ordonner la capitalisation des intérêts à compter de cette date, ainsi qu'à toute échéance annuelle à compter de cette date.

Sur l'indemnisation des préjudices subis par la SAS Grenke location :

9. La résiliation du contrat résulte de la décision de la commune d'Heilly, notifiée le 4 mars 2019 à la SAS Grenke location, et non du courrier du 19 juillet 2019, par lequel cette dernière a ultérieurement demandé à la commune le versement d'indemnités en indiquant également procéder à la résiliation de ce contrat. La commune d'Heilly ne saurait, par suite, utilement se prévaloir de ce que la clause du contrat prévoyant la possibilité d'une résiliation unilatérale par le prestataire était illicite, faute de prévoir une notification préalable lui permettant de faire valoir tout motif d'intérêt général de nature à justifier la poursuite des relations contractuelles. Si, par ailleurs, la commune fait valoir qu'elle a rencontré des difficultés concernant le réseau de téléphonie, celles-ci sont étrangères à l'objet du contrat conclu avec la SAS Grenke location et ne sont, par suite, pas de nature à justifier que celle-ci soit privée, en tout ou partie, de son droit à indemnisation en raison d'une faute commise dans l'exécution des prestations contractuelles. En revanche, il résulte de l'instruction que la commune d'Heilly a préféré faire un meilleur usage des deniers publics en recourant aux services plus avantageux d'un autre fournisseur. La résiliation par la commune du contrat signé le 6 mars 2015 doit, par suite, être regardée comme justifiée par un motif d'intérêt général.

En ce qui concerne l'indemnité contractuelle :

10. En vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs, la personne publique cocontractante peut toujours, pour un motif d'intérêt général, résilier unilatéralement un tel contrat, sous réserve des droits à indemnité de son cocontractant. Si l'étendue et les modalités de cette indemnisation peuvent être déterminées par les stipulations contractuelles, l'interdiction faite aux personnes publiques de consentir des libéralités fait toutefois obstacle à ce que ces stipulations prévoient une indemnité de résiliation qui serait, au détriment de la personne publique, manifestement disproportionnée au montant du préjudice subi par le cocontractant du fait de cette résiliation.

11. Selon les stipulations de l'article 11 du contrat litigieux, en cas de résiliation du contrat, la commune d'Heilly était tenue de payer une indemnité égale au montant des loyers qu'elle aurait dû verser à la SAS Grenke location jusqu'à la fin de celui-ci, majoré d'une pénalité égale à 10 % de ces loyers, et ce, sans qu'y fasse obstacle une éventuelle restitution du matériel loué. A ce titre, la SAS Grenke location demande la condamnation de la commune d'Heilly à lui verser la somme de 3 000 euros toutes taxes comprises. Toutefois, si la SAS Grenke location fait valoir qu'en raison de l'obsolescence rapide du matériel concerné, elle ne pouvait plus le proposer à la location à de nouveaux clients, elle n'assortit ses affirmations d'aucune précision, alors que, par ailleurs, la commune lui avait proposé de récupérer ce matériel dès la décision de résiliation, notifiée le 4 mars 2019, à laquelle la SAS Grenke location n'a réagi que quatre mois plus tard, le 19 juillet 2019. En outre, il résulte des indications données par la SAS Grenke location elle-même qu'à l'issue des contrats de location conclus avec ses clients, elle procède à la revente des matériels loués sur un site spécialisé, sans fournir ni précisions ni justifications sur le prix qu'elle était susceptible d'en retirer. Dans ces conditions, les montants prévus par l'article 11 du contrat litigieux en cas de résiliation par la commune sont, dans les circonstances de l'espèce, manifestement disproportionnés par rapport au montant du préjudice résultant, pour la société appelante, des dépenses qu'elle a exposées et du gain dont elle a été privée. Dès lors, l'application de ces stipulations doit être écartée.

En ce qui concerne l'indemnisation du préjudice effectivement subi par la SAS Grenke location :

12. En premier lieu, la SAS Grenke location est en droit de prétendre à l'indemnisation du préjudice résultant de la perte du bénéfice net qu'elle comptait retirer de la poursuite des relations contractuelles jusqu'à leur terme. A ce titre, elle fait valoir que le bénéfice escompté s'élevait à la somme de 139,91 euros hors taxe par trimestre, cette part bénéficiaire n'étant pas contestée par la commune d'Heilly. Elle demande, dans ces conditions, l'indemnisation de la perte du bénéfice hors taxe résultant de l'absence de perception des cinq loyers trimestriels qui restaient à échoir du 1er avril 2019 jusqu'au 1er avril 2020 inclus, si l'exécution du contrat s'était poursuivie jusqu'au terme initialement prévu, soit 699,55 euros.

13. Toutefois, à la suite de la réception, le 4 mars 2019, du courrier par lequel la commune d'Heilly a résilié le contrat, la SAS Grenke location n'a entrepris aucune démarche pour obtenir la restitution des matériels concernés avant l'envoi du courrier reçu par la commune le 25 juillet 2019. Ainsi, alors même qu'en vertu du point 3 de l'article 13 de ce contrat, il appartenait au locataire de procéder à ses frais et risques à la restitution du matériel, le préjudice subi par la société appelante entre le 5 mars 2019 et le 25 juillet 2019 est imputable à sa propre inertie. Elle est, par suite, seulement en droit de prétendre à l'indemnisation du préjudice résultant de l'absence de perception des loyers correspondant à la période de trois trimestres, deux mois et quatre jours allant du 26 juillet 2019 au 30 juin 2020, soit trois fois le montant du bénéfice trimestriel non réalisé augmenté de soixante-quatre quatre-vingt dixièmes de celui-ci, pour un montant total de 517,67 euros.

14. En second lieu, ainsi qu'il a été dit au point 11, la SAS Grenke location ne justifie pas s'être trouvée dans l'impossibilité de louer ou de revendre les matériels objets du contrat lorsqu'elle en a obtenu la restitution, le 3 mars 2020 et, ainsi, de procéder à leur amortissement. Elle n'est, par suite, pas en droit de prétendre à ce titre à une indemnisation supplémentaire.

15. La somme de 517,67 euros déterminée au point 13 doit porter intérêts au taux légal à compter du 25 juillet 2019, date de réception par la commune de la réclamation préalable de la SAS Grenke location. Celle-ci ayant, en outre, demandé le 12 mars 2020 la capitalisation de ces intérêts, il y a lieu de faire droit à sa demande à compter du 25 juillet 2020, date à laquelle une année d'intérêts étaient due, ainsi qu'à toute échéance annuelle à compter de cette dernière date.

Sur les frais d'instance :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les frais, non compris dans les dépens, exposés par la commune d'Heilly dans la présente instance, soient mis à la charge de la SAS Grenke location, qui n'est pas la partie perdante pour l'essentiel dans la présente instance. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la commune d'Heilly, sur ce fondement, les frais non compris dans les dépens exposés en appel par la SAS Grenke location.

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 510,97 euros toutes taxes comprises, que, par son jugement n° 2000825 du 6 avril 2022, le tribunal administratif d'Amiens a condamné la commune d'Heilly à verser à la SAS Grenke location au titre des loyers impayés dus en exécution du contrat de location de matériel de téléphonie signé le 6 mars 2015, est portée à 512 euros toutes taxes comprises. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 1er janvier 2019 et de leur capitalisation à compter du 12 mars 2020, ainsi qu'à toute échéance annuelle à compter de cette date.

Article 2 : La commune d'Heilly versera à la SAS Grenke location une somme de 517,67 euros au titre de l'indemnité due à cette société du fait de la résiliation anticipée du contrat du 6 mars 2015. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 juillet 2019 et de leur capitalisation à compter du 25 juillet 2020, ainsi qu'à toute échéance annuelle à compter de cette date.

Article 3 : Le jugement n° 2000825 du 6 avril 2022 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Grenke location et à la commune d'Heilly.

Délibéré après l'audience publique du 7 novembre 2023 à laquelle siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,

- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,

- Mme Dominique Bureau, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2023.

La rapporteure,

Signé : D. Bureau

La présidente de chambre,

Signé : M.-P. Viard

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au préfet de la Somme ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière

N. Roméro

2

N°22DA01144


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01144
Date de la décision : 28/11/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Viard
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : THIERY

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-11-28;22da01144 ?
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