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28/11/2023 | FRANCE | N°23LY00925

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 28 novembre 2023, 23LY00925


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 25 juillet 2022 par lequel le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français avec un délai de départ de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de six mois.



Par un jugement n° 2205991 du 18 octobre 2022 la magistrate désignée du tribunal administratif a rejeté sa requête. <

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Procédure devant la cour



Par une requête enregistrée le 10 mars 2023, M. A... B....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 25 juillet 2022 par lequel le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français avec un délai de départ de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de six mois.

Par un jugement n° 2205991 du 18 octobre 2022 la magistrate désignée du tribunal administratif a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 10 mars 2023, M. A... B..., représenté par Me Sene, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 octobre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 juillet 2022 par lequel le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de départ de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de six mois ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa demande d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français a été prise à la suite d'une procédure irrégulière en l'absence de saisine du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination et la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de six mois seront annulées en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

La requête a été communiquée à la préfète du Rhône qui n'a pas présenté d'observations.

Par une décision du 8 février 2023 rectifiée, M. A... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Burnichon, première conseillère.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., né le 5 mai 1980 à Mpraeso (Ghana), de nationalité ghanéenne, déclare être entré irrégulièrement sur le territoire français le 23 janvier 2018, avec son épouse de nationalité nigériane, et leurs deux enfants mineurs, un troisième enfant étant né en France le 21 avril 2019. Suite au rejet définitif de sa demande d'asile par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 27 mai 2020, le préfet du Rhône, par un arrêté du 25 juillet 2022, l'a obligé à quitter le territoire français, lui a donné un délai de départ de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de six mois. M. B... relève appel du jugement du 18 octobre 2022 par lequel la magistrate désignée du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français a été prise à la suite d'une procédure irrégulière en l'absence de saisine du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), doit, en l'absence d'éléments nouveaux en appel, être écarté par les motifs retenus par la magistrate désignée et qu'il y a lieu pour la cour d'adopter.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... n'est entré sur le territoire français qu'en 2018, à l'âge de trente-huit ans. Il n'apporte aucune justification sur une éventuelle insertion sociale ou professionnelle permettant d'établir qu'il y aurait développé le centre de ses intérêts. S'il se prévaut de la présence sur le territoire français de son épouse, d'une nationalité différente de la sienne, il en est séparé, et elle est au surplus également en situation irrégulière et M. B... relève lui-même qu'elle a aussi fait l'objet d'une mesure d'éloignement. Il n'apporte par ailleurs aucun élément tendant à démontrer l'impossibilité de reconstituer sa vie privée et familiale dans son pays d'origine, ou celui de son épouse, avec leurs trois enfants mineurs. Dans ces conditions, il ne démontre pas que l'obligation de quitter le territoire français qui lui a été opposée méconnaît les stipulations précitées ni, en l'absence d'autres éléments, qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. / (...) ". Si M. B... entend se prévaloir de son état de santé, et notamment d'un stress post-traumatique pris en charge sur le territoire français et qui a nécessité plusieurs hospitalisations en 2018 et 2019, les certificats médicaux et ordonnances d'un médecin-psychiatre, d'ailleurs uniquement produits en première instance, se bornent à relever qu'il souffre d'un syndrome anxio-dépressif, pour lequel il suit un traitement médicamenteux, sans mentionner les conséquences sur son état de santé d'un défaut de soins ou encore l'absence de disponibilité de ce traitement et de sa prise en charge dans son pays d'origine. Il suit de là que M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français en litige méconnaît les dispositions précitées.

6. En dernier lieu, M. B... ne peut utilement invoquer la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la mesure d'éloignement, laquelle n'a pas pour effet, ni pour objet, de fixer le pays vers lequel il sera le cas échéant reconduit.

Sur la décision fixant le pays de destination et la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de six mois :

7. En l'absence d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette dernière décision à l'encontre de la décision fixant le pays de destination et de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de six mois.

8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et ses conclusions présentées au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées, par voie de conséquence.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Camille Vinet, présidente assesseure,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2023.

La rapporteure,

C. BurnichonLa présidente,

M. C...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N°23LY00925 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00925
Date de la décision : 28/11/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : SENE MAMADOU

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-11-28;23ly00925 ?
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