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08/12/2023 | FRANCE | N°22MA02757

France | France, Cour administrative d'appel, 7ème chambre, 08 décembre 2023, 22MA02757


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 5 décembre 2019 portant inscription au tableau d'avancement pour l'année 2020 du personnel sous-officier de gendarmerie du cadre général de la région de gendarmerie de Corse et la décision du 10 juin 2020 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours administratif préalable formé devant la commission de recours des militaires tendant à l'annulatio

n de la décision du 5 décembre 2019.



Par un jugement n° 2000801 du 22 septembr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 5 décembre 2019 portant inscription au tableau d'avancement pour l'année 2020 du personnel sous-officier de gendarmerie du cadre général de la région de gendarmerie de Corse et la décision du 10 juin 2020 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours administratif préalable formé devant la commission de recours des militaires tendant à l'annulation de la décision du 5 décembre 2019.

Par un jugement n° 2000801 du 22 septembre 2022, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2022, Mme B..., représentée par Me Maumont, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bastia du 22 septembre 2022 ;

2°) d'annuler la décision du 10 juin 2020 du ministre de l'intérieur ;

3°) d'enjoindre à l'administration de procéder à son inscription au grade de major au tableau d'avancement de 2020 et de le rétablir dans l'ensemble de ses droits, notamment en reconstituant sa carrière sans délai et sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 7 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il n'est pas démontré que la commission d'avancement a procédé à une analyse régulière du mérite des candidats ; ses propositions sont en outre erronées ou n'ont pas été suivies ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur de droit, le taux d'avancement étant fixé à 10,91 % et donc six agents auraient dû être inscrits sur le tableau ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur de droit dès lors que le rejet de sa candidature ne pouvait être fondé sur le motif tiré de ce qu'elle aurait été restrictive dans ses préférences de mobilité dans le cadre de son avancement, un tel critère entrainant en outre une inégalité injustifiée entre les candidats ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et d'erreur de fait.

Par ordonnance du 3 mai 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 9 juin 2023.

Un mémoire présenté par le ministre de l'intérieur et des Outre-mer a été enregistré le 8 novembre 2023, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le décret n° 2008-952 du 12 septembre 2008 ;

- l'arrêté du 4 août 2010 fixant pour la gendarmerie nationale la composition et l'organisation de la commission prévue à l'article L. 4136-3 du code de la défense ;

- l'arrêté du 24 juillet 2018 fixant les taux de promotion dans les corps militaires de la gendarmerie nationale pour les années 2019 et 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Chenal-Peter,

- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,

- et les observations de Me Maumont, représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., sous-officier de la gendarmerie nationale au grade d'adjudant-chef, a formé devant la commission des recours des militaires un recours administratif préalable obligatoire contre la décision du 5 décembre 2019 portant inscription au tableau d'avancement pour l'année 2020 du personnel sous-officier de gendarmerie du cadre général de la région de gendarmerie de Corse. Par une décision du 10 juin 2020, le ministre de l'intérieur a rejeté son recours. Par un jugement du 22 septembre 2022, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 5 décembre 2019 et 10 juin 2020. Mme B... relève appel de ce jugement, en tant qu'il a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 10 juin 2020 du ministre de l'intérieur.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, l'article L. 4136-3 du code de la défense dispose que : " Nul ne peut être promu au choix à un grade autre que ceux d'officiers généraux s'il n'est inscrit sur un tableau d'avancement établi, au moins une fois par an, par corps. Une commission dont les membres, d'un grade supérieur à celui des intéressés, sont désignés par le ministre de la défense, présente à ce dernier tous les éléments d'appréciation nécessaires, notamment l'ordre de préférence et les notations données aux candidats par leurs supérieurs hiérarchiques. Pour les militaires de la gendarmerie nationale, le ministre compétent est le ministre de l'intérieur. Sous réserve des nécessités du service, les promotions ont lieu dans l'ordre du tableau d'avancement. Si le tableau n'a pas été épuisé, les militaires qui y figurent sont reportés en tête du tableau suivant. Les statuts particuliers précisent les conditions d'application du présent article. ". Et aux termes de l'article 26 du décret du 12 septembre 2008 portant statut particulier du corps des sous-officiers de gendarmerie : " Les membres de la commission prévue à l'article L. 4136-3 du code de la défense et, le cas échéant, leurs suppléants sont désignés, pour chaque branche ou spécialité, par arrêté du ministre de l'intérieur. Cette commission est présidée par un officier général ou un officier supérieur. Outre le président, elle comprend de droit deux officiers supérieurs. / La commission présente au ministre ses propositions d'inscription aux tableaux d'avancement. / Elle procède, au préalable, à un examen approfondi de la valeur professionnelle des militaires susceptibles d'être promus compte tenu, notamment, de l'ordre de préférence, des notations et des propositions des supérieurs hiérarchiques et de l'appréciation portée sur leur manière de servir. / L'appréciation de la valeur professionnelle peut également prendre en compte les difficultés des emplois occupés et les responsabilités particulières qui s'y attachent ainsi que, le cas échéant, les actions de formation continue suivies ou dispensées par le militaire ".

3. D'une part, il ressort du procès-verbal de la réunion de la commission d'avancement chargée des propositions d'inscription aux tableaux d'avancement 2020 de la région de gendarmerie de Corse branche " gendarmerie départementale " que la commission a procédé à l'examen de l'ensemble des dossiers des candidats à l'avancement réunissant les conditions statutaires pour être promus au grade supérieur, la sélection des sous-officiers susceptibles d'être inscrits sur le tableau d'avancement ayant été effectuée par comparaison des mérites des candidats. En effet, la commission a analysé plusieurs critères pertinents comme l'emploi occupé, l'affectation, le titre détenu, le rang retenu par l'autorité de fusionnement et le total de la notation obtenu sur cinq ans. La commission a ensuite formulé des propositions d'avancement. Par suite, le moyen tiré de ce que la commission d'avancement n'a pas procédé à la comparaison des mérites des candidats doit être écarté.

4. D'autre part, Mme B... n'apporte en appel pas plus qu'en première instance aucun élément de nature à établir que les éléments transmis par la commission d'avancement étaient erronés. Et contrairement à ce qu'elle persiste à soutenir, il ressort bien des pièces du dossier que les propositions de la commission ont été suivies.

5. En deuxième lieu, Mme B... soutient que l'administration, en rejetant sa candidature au motif qu'elle n'avait pas été assez mobile, a irrégulièrement ajouté un critère aux conditions statutaires. Toutefois, en se fondant sur la circonstance que l'intéressée aurait été restrictive dans ses préférences de mobilité, le ministre ne s'est pas fondé sur un critère autre que celui de sa valeur professionnelle et n'a ainsi ni commis d'erreur de droit ni porté atteinte au principe d'égalité entre les candidats.

6. En troisième lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier ni de l'examen de la décision du 10 juin 2020, qui fait précisément état de la situation individuelle de Mme B..., que l'administration n'aurait pas tenu compte de l'ensemble des éléments de son dossier, et notamment des circonstances qu'elle dispensait régulièrement des formations et qu'elle assumait les responsabilités liées à ses fonctions et notamment le remplacement du commandant de la communauté de brigades de Penta-di-Casinca.

7. En quatrième lieu, le moyen invoqué par Mme B... et tiré de ce que la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article 2 de l'arrêté du 24 juillet 2018 fixant un taux de promotion de 10,91 %, qui avait été précédemment soumis aux juges de première instance, doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Bastia, au point 13 de son jugement, la requérante ne faisant état devant la Cour d'aucun élément distinct de ceux qui avaient été présentés en première instance.

8. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 4136-1 du code de la défense : " (...) L'avancement de grade a lieu soit au choix, soit au choix et à l'ancienneté, soit à l'ancienneté. Sauf action d'éclat ou services exceptionnels, les promotions ont lieu de façon continue de grade à grade et nul ne peut être promu à un grade s'il ne compte dans le grade inférieur un minimum de durée de service, fixé par voie réglementaire ". Aux termes de l'article L. 4136-3 de ce code : " Nul ne peut être promu au choix à un grade autre que ceux d'officiers généraux s'il n'est inscrit sur un tableau d'avancement établi, au moins une fois par an, par corps. / Une commission dont les membres, d'un grade supérieur à celui des intéressés, sont désignés par le ministre de la défense, présente à ce dernier tous les éléments d'appréciation nécessaires, notamment l'ordre de préférence et les notations données aux candidats par leurs supérieurs hiérarchiques. / Pour les militaires de la gendarmerie nationale, le ministre compétent est le ministre de l'intérieur. / Sous réserve des nécessités du service, les promotions ont lieu dans l'ordre du tableau d'avancement. / Si le tableau n'a pas été épuisé, les militaires qui y figurent sont reportés en tête du tableau suivant ". Aux termes de l'article 23 du décret du 12 septembre 2008 portant statut particulier du corps des sous-officiers de gendarmerie : " Les promotions au grade supérieur ont lieu exclusivement au choix ". Aux termes de l'article 24 de ce décret : " (...) IV. - Peuvent être promus au grade de major les adjudants-chefs comptant au moins deux ans d'ancienneté à ce grade ". Lorsqu'il est saisi d'un recours tendant à l'annulation d'un arrêté portant inscription à un tableau d'avancement, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, qui ne saurait se borner, dans le cadre de son contrôle restreint, à apprécier la valeur professionnelle d'un candidat écarté, d'analyser les mérites comparés de cet agent et de ceux des autres agents candidats à ce même grade.

9. La requérante fait valoir qu'elle commande la brigade de proximité de Penta-di-Casinca, qu'elle a reçu de nombreuses lettres de félicitations et qu'elle a obtenu des notations élogieuses faisant état de son aptitude au commandement. Toutefois, si elle compare ses propres mérites avec ceux de deux sous-officiers inscrits au tableau d'avancement, il ressort des pièces du dossier que ces derniers ont connu trois affectations différentes au cours des dix dernières années, au sein de différentes unités, et que ces affectations leur ont permis de démontrer leur aptitude au commandement et leur capacité d'adaptation, alors que Mme B... est restée affectée au sein de la même unité depuis l'année 2009. Le ministre de l'intérieur fait également état de ce qu'un autre des sous-officiers inscrit au tableau d'avancement a été amené à faire l'objet de multiples mutations fonctionnelles et géographiques et que ses aptitudes au commandement ont été reconnues. Enfin, alors que cinq candidats ont été promus sur un total de 57 candidats à l'avancement dans la région de gendarmerie de la Corse, il ne ressort pas des pièces du dossier, malgré les appréciations élogieuses dont l'intéressée a fait l'objet de la part de sa hiérarchie et malgré son ancienneté de grade et des notations supérieures à certains candidats, que Mme B... aurait des mérites supérieurs aux autres candidats retenus au grade de major. Ainsi, la requérante n'est pas fondée à soutenir que, après examen des mérites comparés de l'ensemble des candidats, le ministre de l'intérieur a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 10 juin 2020.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

11. Le présent arrêt, qui rejette l'ensemble des conclusions à fin d'annulation présentées par Mme B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par conséquent, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent également être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

12. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de Mme B... tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2023, où siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Vincent, présidente assesseure,

- Mme Marchessaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 décembre 2023.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA02757
Date de la décision : 08/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-06-02-01-01 Fonctionnaires et agents publics. - Notation et avancement. - Avancement. - Avancement de grade. - Tableaux d'avancement.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: Mme Anne-Laure CHENAL-PETER
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : MDMH - MAUMONT MOUMNI AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-08;22ma02757 ?
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