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12/12/2023 | FRANCE | N°22NC01450

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 12 décembre 2023, 22NC01450


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les décisions par lesquelles le préfet de Meurthe-et-Moselle a implicitement rejeté ses demandes de délivrance d'un récépissé et d'une autorisation de travail ainsi que l'arrêté du 19 mars 2021 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duqu

el il pourra être reconduit d'office.



Par un jugement n° 2101543 du 14 septembre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les décisions par lesquelles le préfet de Meurthe-et-Moselle a implicitement rejeté ses demandes de délivrance d'un récépissé et d'une autorisation de travail ainsi que l'arrêté du 19 mars 2021 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement n° 2101543 du 14 septembre 2021, le tribunal administratif de Nancy a annulé les décisions portant refus de délivrance d'un récépissé de demande de titre de séjour et d'une autorisation de travail et rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. A....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juin 2022, M. A..., représenté par Me Jeannot, demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 19 mars 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation, et de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler durant la durée de l'instruction de son dossier ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros TTC en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 75-I et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- le refus de séjour est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'une erreur de droit dès lors que sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a été examinée que sous l'angle des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels et non sur le terrain du travail ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces mêmes dispositions ;

- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'absence d'examen sous l'angle " salarié ", le jugement sera annulé pour défaut de motivation, erreur de droit et erreur manifeste d'appréciation ;

- le refus de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

- le préfet s'est cru en situation de compétence liée pour prendre l'obligation de quitter le territoire français et a, en conséquence, méconnu sa compétence tant à l'égard de l'article 6 de la directive du 16 décembre 2008 qu'au regard du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la mesure d'éloignement prise à son encontre a des conséquences manifestement excessives sur sa situation et porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 juillet 2022 et 9 août 2022, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 avril 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Samson-Dye a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant malien né le 20 juin 2001, serait entré en France le 10 août 2017, selon ses déclarations. Il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour auprès du préfet de Meurthe-et-Moselle. En l'absence de réponse de ce dernier, il a, par un courrier du 4 janvier 2021, sollicité à nouveau la préfecture au sujet de sa demande et s'est vu notifier l'arrêté du 19 mars 2021 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignation du pays de destination. Il a saisi le tribunal administratif de Nancy d'une demande tendant à l'annulation, d'une part, des décisions par lesquelles le préfet de Meurthe-et-Moselle a implicitement rejeté ses demandes de délivrance d'un récépissé et d'une autorisation de travail, et d'autre part, de l'arrêté du 19 mars 2021. Par un jugement du 14 septembre 2021, cette juridiction a annulé, à l'article 1er, les refus de délivrance d'un récépissé de demande de titre de séjour et d'une autorisation de travail, tout en rejetant le surplus des conclusions de la demande de M. A..., à l'article 2. M. A... relève appel de ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions.

Sur la régularité du jugement :

2. Contrairement à ce que soutient M. A..., les premiers juges ont écarté le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur de droit en n'examinant pas sa situation sur le terrain du travail au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ils ont, à cet égard, précisé que l'arrêté litigieux rappelait que l'article L. 313-14 du même code permet d'obtenir une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " et indiquait que l'intéressé ne faisait pas état de motifs humanitaires ou exceptionnels et que " la production d'un contrat d'apprentissage n'est, en tout état de cause ni une condition nécessaire ni une condition suffisante à la régularisation au motif du travail ". Ce faisant, le tribunal a suffisamment motivé son jugement. Les moyens tirés de l'omission à répondre à ce moyen et de l'insuffisance de motivation du jugement sur ce point doivent donc être écartés.

3. Par ailleurs, hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Le requérant ne peut donc utilement se prévaloir d'erreurs de droit ou d'appréciation qu'auraient commises les premiers juges pour demander l'annulation du jugement attaqué.

Sur la légalité de l'arrêté litigieux :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. ". En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ".

5. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté litigieux que le préfet a expressément refusé de délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " à M. A... sur le fondement des dispositions citées au point précédent. Le moyen tiré de l'absence d'examen de sa demande de titre de séjour sur ce fondement manque ainsi en fait. Il ne ressort en outre pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen de sa situation individuelle. De même, le préfet n'a pas entaché sa décision d'erreur de droit en rejetant sa demande de régularisation, sous l'angle professionnel, en évoquant l'absence de motifs exceptionnels.

6. Par ailleurs, le requérant fait valoir qu'il est scolarisé, qu'il a fait des progrès dans l'apprentissage du français, qu'il a effectué des stages en qualité de maçon et qu'il souhaite commencer une formation de CAP dans le cadre d'un apprentissage auprès de la société BMK. Toutefois, ces circonstances ne suffisent pas à caractériser des motifs exceptionnels de nature à entacher le refus de régulariser sa situation en lui délivrant un titre portant la mention " salarié " d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions citées au point 4.

7. En second lieu, il ressort des pièces du dossier qu'il y a lieu d'adopter les motifs circonstanciés retenus à bon droit par le tribunal, aux points 11 et 14 du jugement attaqué, pour écarter les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par le refus de titre de séjour, de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par le refus de séjour et la mesure d'éloignement, ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entaché le refus de titre de séjour. Il y a également lieu d'adopter les motifs figurant au point 13 de ce jugement pour écarter le moyen tiré de ce que le préfet se serait cru en situation de compétence liée pour édicter une obligation de quitter le territoire français, sous ses deux branches.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mars 2021. Sa requête ne peut, dès lors, qu'être rejetée, dans toutes ses conclusions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de Meurthe-et-Moselle.

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Samson-Dye, présidente,

- M. Meisse, premier conseiller,

- M. Sibileau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2023.

La présidente-rapporteure,

Signé : A. Samson-DyeL'assesseur le plus ancien,

Signé : E. Meisse

La greffière,

Signé : V. Chevrier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière :

V. Chevrier

2

N° 22NC01450


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC01450
Date de la décision : 12/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme SAMSON-DYE
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON-DYE
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-12;22nc01450 ?
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