La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/12/2023 | FRANCE | N°22NT02676

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 22 décembre 2023, 22NT02676


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du

4 avril 2019 par lequel le maire de la Chapelle-sur-Erdre s'est opposé à la déclaration préalable n° DP 4403519Z6054 qu'il a déposée le 21 février 2019 en vue de la création d'une piscine enterrée sur un terrain situé 4, impasse de la Haute Poterie à la Chapelle-sur-Erdre.



Par un jugement n° 1905872 du 14 juin 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté

sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du

4 avril 2019 par lequel le maire de la Chapelle-sur-Erdre s'est opposé à la déclaration préalable n° DP 4403519Z6054 qu'il a déposée le 21 février 2019 en vue de la création d'une piscine enterrée sur un terrain situé 4, impasse de la Haute Poterie à la Chapelle-sur-Erdre.

Par un jugement n° 1905872 du 14 juin 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 août 2022 et 20 février 2023, M. A..., représenté par Me Leraisnable, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 14 juin 2022 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 avril 2019 du maire de la Chapelle-sur-Erdre ;

3°) d'enjoindre au maire de la commune de la Chapelle-sur-Erdre, à titre principal, de lui délivrer une décision de non-opposition à déclaration préalable dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande ;

4°) de mettre à la charge de la commune de la Chapelle-sur-Erdre la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

- il n'est pas établi que la minute du jugement a été signée conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- les premiers juges ont omis de se prononcer sur le moyen tiré de ce que le maire a méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant lié par l'avis de l'architecte des Bâtiments de France et par la décision du 1er avril 2019 du préfet ; ils n'ont pas motivé sur ce point leur jugement ;

- le préfet de la Loire-Atlantique a méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant lié par l'avis de l'architecte des bâtiments de France ; le maire s'est cru lié par la décision du préfet du 1er avril 2019 ;

- l'avis émis par l'architecte des bâtiments de France, sur lequel s'est fondé le préfet, est illégal en ce qu'il n'a pas procédé à un examen du projet mais s'est contenté d'exposer une position de principe interdisant tout aménagement ;

- en l'absence de perception du projet depuis l'autre rive et de toute artificialisation de la parcelle, le projet de construction ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 341-10 du code de l'environnement et ne porte pas atteinte au site classé de la Vallée de l'Erdre ; le préfet a commis une erreur d'appréciation ;

- le maire aurait dû délivrer l'autorisation sollicitée, au besoin en l'assortissant des prescriptions nécessaires ;

- plusieurs terrains voisins du terrain d'assiette du projet sont équipés d'une piscine ;

- le projet de construction ne méconnaît pas les dispositions de l'article UBc 11-1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de la Chapelle-sur-Erdre.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 3 octobre 2022 et 16 mars 2023, la commune de la Chapelle-sur-Erdre, représentée par la société d'avocats Cornet Vincent Segurel, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de l'environnement ;

- le décret du 7 avril 1998 portant classement parmi les sites du département de la

Loire-Atlantique de la vallée de l'Erdre sur le territoire des communes de Nantes, Carquefou, la Chapelle-sur-Erdre et Sucé-sur-Erdre ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Montes-Derouet,

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,

- et les observations de Me Le Pallabre, pour M. A..., et de Me Léon, pour la commune de la Chapelle-sur-Erdre.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A... est propriétaire, à la Chapelle-sur-Erdre, d'un terrain, d'une superficie de 2 635 m², sur lequel est bâtie une maison d'habitation, compris dans le périmètre du site classé de la vallée de l'Erdre. Il a déposé, le 21 février 2019, une déclaration préalable de travaux en vue de la construction sur ce terrain d'une piscine enterrée d'une superficie de

25,60 m². Après avoir recueilli l'avis de l'architecte des bâtiments de France, le préfet de la

Loire-Atlantique a refusé, le 1er avril 2019, d'autoriser le projet. Par un arrêté du 4 avril 2019, le maire de la Chapelle-sur-Erdre s'est opposé à la déclaration préalable de travaux. M. A... relève appel du jugement du 14 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 avril 2019 du maire de la Chapelle-sur-Erdre.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

3. Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué a été signée par le président-rapporteur, l'assesseure la plus ancienne dans l'ordre du tableau et la greffière d'audience, conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'expédition du jugement du tribunal administratif de Nantes notifiée à M. A... ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité du jugement attaqué. Par suite, ce jugement n'est pas entaché d'irrégularité sur ce point.

4. En second lieu, après avoir jugé légal le refus du préfet de donner son accord au projet en litige, les premiers juges ont précisé que le maire était tenu de s'opposer à la déclaration préalable. Ce faisant, ils ont implicitement mais nécessairement examiné le moyen tiré de ce que le maire a méconnu l'étendue de sa compétence. Par suite, les premiers juges ont répondu au moyen soulevé devant eux et ont suffisamment motivé leur jugement sur ce point.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. Aux termes de l'article L. 341-10 du code de l'environnement : " Les monuments naturels ou les sites classés ne peuvent ni être détruits ni être modifiés dans leur état ou leur aspect sauf autorisation spéciale. (...) ". Aux termes de l'article R. 425-17 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est situé dans un site classé ou en instance de classement, la décision prise sur la demande de permis ou sur la déclaration préalable ne peut intervenir qu'avec l'accord exprès prévu par les articles L. 341-7 et L. 341-10 du code de l'environnement : a) Cet accord est donné par le préfet ou, le cas échéant, le directeur de l'établissement public du parc national dans les conditions prévues par l'article R. 341-10 du code de l'environnement, après avis de l'architecte des Bâtiments de France, lorsque le projet fait l'objet d'une déclaration préalable (...) ". Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'un projet ayant fait l'objet d'une déclaration préalable est situé dans un site classé, la décision de non-opposition à cette déclaration ne peut légalement intervenir que sous réserve de l'accord exprès du préfet, après avis de l'architecte des Bâtiments de France.

6. Aux termes de l'article R. 421-11 du code de l'urbanisme : " II.- En outre, dans les sites classés ou en instance de classement, dans les sites classés ou en instance de classement, dans les sites patrimoniaux remarquables et dans les abords des monuments historiques, doivent être précédés d'une déclaration préalable : / (...) d) Les piscines dont le bassin a une superficie inférieure ou égale à cent mètres carrés et qui ne sont pas couvertes ou dont la couverture, fixe ou mobile, a une hauteur au-dessus du sol inférieure à un mètre quatre-vingts ;/ (... ) ".

7. En premier lieu, si, lorsque la délivrance d'une autorisation administrative est subordonnée à l'accord préalable d'une autre autorité, le refus d'un tel accord, qui s'impose à l'autorité compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, ne constitue pas une décision susceptible de recours, des moyens tirés de sa régularité et de son bien-fondé peuvent, quel que soit le sens de la décision prise par l'autorité compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, être invoqués devant le juge saisi de cette décision.

8. Il est constant que le terrain d'assiette du projet de piscine est situé au sein du site classé de la vallée de l'Erdre. Il ressort des pièces du dossier qu'avant de se prononcer sur le projet de M. A..., le préfet de la Loire-Atlantique a consulté l'architecte des bâtiments de France,qui a émis un avis défavorable au projet au motif que l'aménagement projeté sera " particulièrement visible de la rive opposée de l'Erdre où se trouve le parc de la Chantrerie " et est de nature " à amplifier l'urbanisation et l'artificialisation " de la parcelle. Contrairement à ce que soutient le requérant, cet avis ne révèle pas l'expression d'une " position de principe " visant à " sanctuariser " le site, alors en outre qu'il ressort des pièces du dossier que l'architecte des bâtiments de France a précisé qu'il ne s'opposait pas à la réalisation d'une piscine sur le terrain du requérant, mais à son implantation face à l'Erdre la rendant parfaitement visible depuis le parc de la Chantrerie surplombant, sur la rive opposée, la rivière.

9. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de présentation établi lors de la procédure de classement de la vallée de l'Erdre, que ce site, d'une superficie d'environ 1 260 hectares, a été classé par le décret du 7 avril 1998, " jusqu'à la ligne de crête ", en vue de protéger " les parties de versants visibles de l'Erdre et du versant opposé " et de mettre fin à la multiplication des constructions et à l'artificialisation du secteur pouvant aboutir à une rupture avec l'harmonie paysagère de la vallée. Le terrain d'assiette du projet est compris dans la partie de ce site classé correspondant, pour l'essentiel, aux zones naturelles qui s'étendent depuis le pont de la Beaujoire au pont de Sucé-sur-Erdre, en raison de son caractère pittoresque au regard des paysages de la Loire-Atlantique. Le projet objet de la déclaration préalable déposée par M. A... consiste en la création d'une piscine enterrée, non couverte, d'une superficie de 25,60 m², sur un terrain situé au bord de l'Erdre, face à la rivière et au parc de la Chantrerie, situé sur la rive opposée. Il ressort également des pièces du dossier que le caractère dénudé du terrain d'assiette, qui descend en pente douce jusqu'au cours d'eau, a pour effet de rendre directement visible le projet de construction, sinon depuis la rivière, du moins depuis la rive opposée, laquelle domine le cours d'eau de par sa situation en surplomb. Par ailleurs, alors même qu'elle serait creusée, sur une emprise inférieure, en lieu et place d'une terrasse préexistante au classement du site, la piscine projetée est de nature à participer à une artificialisation des sols, dont le profil en pente douce vers le cours d'eau serait en outre remodelé avec l'aménagement d'un plat. Il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu de la configuration des lieux, des prescriptions auraient été de nature à remédier aux impacts du projet. Enfin, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée, la circonstance que des terrains voisins seraient équipés de piscine. Il s'ensuit que le projet en litige est de nature, compte tenu de sa situation de visibilité et de ses caractéristiques, à porter atteinte au site classé de la vallée de l'Erdre.

10. Il résulte des points 8 et 9 que l'avis de l'architecte des bâtiments de France n'est pas entaché d'illégalité et que le préfet de la Loire-Atlantique, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il se serait cru lié par l'avis défavorable de l'architecte des bâtiments de France et aurait ainsi méconnu l'étendue de sa compétence, n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 341-10 du code de l'environnement, en refusant de donner au projet en cause l'accord exigé par les dispositions de l'article R. 425-17 du code de l'urbanisme. Dans ces conditions, le maire était tenu de s'opposer à la déclaration préalable de travaux déposée par M. A....

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article 11-1 du règlement de la zone UBc du plan local d'urbanisme de la Chapelle-sur-Erdre, dans sa rédaction applicable à la décision contestée : " Ainsi qu'il est prévu à l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, la situation des constructions, leur architecture, leurs dimensions, leur aspect extérieur doivent être adaptés au " caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains, ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ".

12. Ainsi qu'il a été dit, le maire de La Chapelle-sur-Erdre était tenu, en l'absence de d'accord du préfet de la Loire-Atlantique, qui s'est légalement opposé au projet, de s'opposer à la déclaration préalable de travaux déposée par M. A.... Par suite, le moyen tiré de ce que le projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article UBc 11-1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de la Chapelle-sur-Erdre doit être écarté comme inopérant.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge la commune de la Chapelle-sur-Erdre, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A... la somme de 1 500 euros à verser à la commune de la

Chapelle-sur-Erdre au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera à la commune de la Chapelle-sur-Erdre la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de la Chapelle-sur-Erdre.

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de chambre,

- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,

- M. Dias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 décembre 2023.

La rapporteure,

I. Montes Derouet

La présidente,

C. Buffet

Le greffier,

R. Mageau

La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT02676


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT02676
Date de la décision : 22/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. BUFFET
Rapporteur ?: Mme Isabelle MONTES-DEROUET
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : SELARL CORNET VINCENT SEGUREL

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-22;22nt02676 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award