La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/12/2023 | FRANCE | N°22NC02861

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 29 décembre 2023, 22NC02861


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin a retiré son attestation de demandeur d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2204942 du 15 septembre 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.



Procédure devant la co

ur :



Par une requête enregistrée le 16 novembre 2022, M. A..., représenté par Me Burkatzki, demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin a retiré son attestation de demandeur d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2204942 du 15 septembre 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 novembre 2022, M. A..., représenté par Me Burkatzki, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 septembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2022 ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- il n'est pas établi que la minute du jugement attaqué est régulièrement signée en application de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le jugement est insuffisamment motivé en ce que les éléments présentés au soutien du moyen tiré du défaut d'examen n'ont pas été repris par le premier juge ;

- le jugement est entaché d'erreur de fait en ce qu'il n'a pas pris en compte l'entièreté de sa situation personnelle et d'une erreur de droit puisqu'il a sollicité une demande d'admission exceptionnelle au séjour préalablement à l'édiction de l'obligation de quitter le territoire français ;

- l'arrêté est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle en ce qu'il ne mentionne pas sa première entrée sur le territoire français en 2014 et sa demande d'admission exceptionnelle ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France ;

- il est entaché d'une erreur de droit en ce que la préfète du Bas-Rhin n'a pas examiné se demande d'admission exceptionnelle au séjour avant de l'obliger à quitter le territoire français ; il remplit les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

La requête a été transmise à la préfète du Bas-Rhin qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 octobre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Mosser a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité kosovienne, est né le 8 avril 2002 à Gjilan (Kosovo) et est entré irrégulièrement sur le territoire français le 12 février 2021 accompagné de sa mère et de sa sœur. Il a sollicité l'asile le 26 février 2021 et l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides a rejeté sa demande le 5 avril 2022. Par un arrêté du 13 juillet 2022, la préfète du Bas-Rhin a retiré son attestation de demandeur d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 15 septembre 2022 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été signé par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifié à M. A... ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement.

3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le magistrat désigné, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par M. A..., a répondu, avec une motivation suffisante, au moyen tiré du défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait, pour ce motif, entaché d'irrégularité.

4. En troisième et dernier lieu, si M. A... soutient que le premier juge a entaché son jugement d'erreurs de fait et de droit, des telles erreurs, à les supposer établies, sont seulement susceptibles de remettre en cause, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, les motifs retenus par le magistrat désigné pour rejeter sa demande d'annulation. Par suite, les erreurs alléguées qui se rapportent au bien-fondé du jugement attaqué sont, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité de ce même jugement.

Sur la légalité de l'arrêté en litige :

5. En premier lieu, pour motiver son arrêté, la préfète du Bas-Rhin n'était pas tenue de mentionner tous les éléments de fait relatifs à la situation de M. A... et notamment sa première entrée en France en 2014 et la demande d'admission exceptionnelle au séjour qu'il a introduite le 1er juillet 2022. Ainsi, il ne résulte ni de la motivation de l'arrêté en litige, ni d'aucune autre pièce du dossier, que la préfète, n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation avant de prendre la décision contestée. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen sérieux de la situation personnelle de l'intéressé doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., est entré sur le territoire français en février 2021 accompagné de sa sœur et de sa mère. Si la décision obligeant sa mère à quitter le territoire français a été annulée par un jugement du 30 juin 2021, le requérant n'établit ni que celle-ci, ni que sa sœur aurait obtenu depuis lors un droit au séjour. L'intéressé, célibataire et sans enfant, ne démontre pas avoir développé d'autres attaches personnelles sur le territoire français alors qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu toute son enfance et une partie de son adolescence. S'il invoque son activité salariée récente à la date de l'arrêté en litige et sa maîtrise de la langue française, M. A... ne justifie cependant pas d'une insertion particulière dans la société française. Enfin, s'il se prévaut d'un premier séjour en France entre l'âge de 12 et 16 ans pendant lequel il aurait été scolarisé, il est constant qu'il est reparti au Kosovo en septembre 2018 à la suite de l'exécution d'une mesure d'éloignement. Ainsi, compte tenu de la durée et des conditions de séjour de M. A... en France, la préfète du Bas-Rhin n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du même code : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ".

9. Le titre de séjour délivré pour des motifs exceptionnels ne constitue pas un titre de séjour de plein droit. Par suite, M. A... ne peut utilement soutenir que la préfète du Bas-Rhin était tenue d'examiner sa demande d'admission exceptionnelle avant d'édicter sa décision l'obligeant à quitter le territoire français. En tout état de cause, les éléments relatifs à sa situation familiale et personnelle mentionnés au point 7 ne constituent ni des considérations humanitaires, ni des motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit au regard des dispositions précitées doit être écarté.

10. En quatrième et dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, la préfète du Bas-Rhin n'a pas entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A....

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et des Outre-mer et à Me Burkatzki.

Une copie du présent arrêt sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 21 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président,

Mme Bourguet-Chassagnon, première conseillère,

Mme Mosser, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2023.

La rapporteure,

Signé : C. MosserLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

N° 22NC02861


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC02861
Date de la décision : 29/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Cyrielle MOSSER
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : BERARD JEMOLI SANTELLI BURKATZKI BIZZARRI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-29;22nc02861 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award