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07/03/1991 | FRANCE | N°89BX00452

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 07 mars 1991, 89BX00452


Vu la décision en date du 2 janvier 1989 enregistrée au greffe de la cour le 19 janvier 1989, par laquelle le président de la 5ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée pour le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE LIMOGES dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Limoges du 21 avril 1988 ;
Vu, enregistrés au secrétariat de la Section du contentieux du Conseil d'Etat le 21 juin 1988 et le 18 octobre 1988, la requête et l

e mémoire ampliatif présentés pour le CENTRE HOSPITALIER REGIONA...

Vu la décision en date du 2 janvier 1989 enregistrée au greffe de la cour le 19 janvier 1989, par laquelle le président de la 5ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée pour le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE LIMOGES dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Limoges du 21 avril 1988 ;
Vu, enregistrés au secrétariat de la Section du contentieux du Conseil d'Etat le 21 juin 1988 et le 18 octobre 1988, la requête et le mémoire ampliatif présentés pour le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE LIMOGES dont le siège est ... par Me Z..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, tendant à ce que la Cour :
1°) annule le jugement du 21 avril 1988 par lequel le tribunal administratif de Limoges a mis hors de cause le bureau SOCOTEC, le bureau d'études SLETTI et l'entreprise Cottin-Jonneaux et a limité la condamnation de l'architecte au paiement des sommes de 1.170.914,10 F et 30.000 F à la suite des désordres affectant le dallage de l'hôpital ;
2°) déclare solidairement responsables l'architecte, le bureau d'études SLETTI, le bureau SOCOTEC, l'entreprise Cottin-Jonneaux et les condamne à verser les sommes de 1.584.689,02 F et 200.000 F majorées des intérêts de retard eux-mêmes capitalisés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 1991 :
- le rapport de M. ZAPATA, conseiller ;
- les observations de Me X..., pour le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE LIMOGES ; - les observations de Me LABEYRIE, avocat de la Société SLETTI ; - les observations de Me ASTIMA, avocat de la Société SOCOTEC ; - les observations de Me MEZARD, avocat de la société Cottin-Jonneaux ;
- et les conclusions de M. CATUS, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE LIMOGES qui conteste le jugement rendu par le tribunal administratif de Limoges le 21 avril 1988, demande la condamnation solidaire de l'architecte le Maresquier, du bureau SOCOTEC, du bureau d'études techniques SLETTI et de l'entreprise Cottin-Jonneaux, à raison des désordres qui ont affecté le dallage du sol du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE LIMOGES ;
Sur le principe de la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal administratif, que le sol en pierre qui constitue le dallage du hall d'accès et de l'entrée des services administratifs du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE LIMOGES est très détérioré au niveau des zones de passage et présente de nombreuses et importantes excavations ; que, contrairement à ce que soutiennent l'entreprise Cottin-Jonneaux et le bureau d'études SLETTI, ces désordres rendent ces locaux impropres à leur destination alors même qu'ils n'affectent que certaines zones, et par conséquent ne relèvent pas du régime de garantie applicable aux menus ouvrages mais sont au contraire de nature à engager la responsabilité décennale des constructeurs vis à vis du maître d'ouvrage ; que dès lors, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Limoges a admis que le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE était fondé à rechercher la responsabilité des constructeurs en invoquant la garantie qu'impliquent les principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;
Sur les conclusions du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE tendant à la condamnation solidaire du bureau SOCOTEC, du bureau d'études techniques SLETTI, de l'architecte et de l'entreprise Cottin-Jonneaux :
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre la société SOCOTEC :
Considérant, que la société SOCOTEC est intervenue dans l'opération de travaux publics litigieuse, dans le cadre d'une convention de contrôle technique conclue avec les seules entreprises adjudicataires du marché et qu'elle n'avait aucun lien contractuel avec le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE LIMOGES ; que par suite les conclusions du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE en tant qu'elles mettent en cause la société SOCOTEC sont manifestement insusceptibles de se rattacher à un litige relevant de la compétence du juge administratif et doivent être rejetées ;
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre le bureau d'études techniques SLETTI :

Considérant qu'il ressort des termes mêmes de l'avenant du 22 novembre 1965 au contrat d'architecte conclu le 19 septembre 1961 entre l'architecte et le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE LIMOGES, que, d'une part, l'agrément donné par le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE à la désignation du bureau d'études techniques SLETTI lui permettant de fournir différentes prestations sous l'autorité et le contrôle de l'architecte, d'autre part, l'acceptation par le bureau d'études techniques SLETTI des missions qui lui ont été confiées par l'architecte, n'ont pas eu pour effet de créer des liens contractuels entre le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE et ledit bureau d'études ; que par suite, en l'absence de liens de droit entre le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE LIMOGES et le bureau d'études techniques SLETTI, les conclusions dirigées contre ce dernier sont portées devant une juridiction incompétente pour en connaître et doivent, de ce fait, être écartées ;
En ce qui concerne les conclusions dirigées solidairement contre l'architecte et l'entreprise Cottin-Jonneaux :
Considérant, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert, que les désordres dont le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE demande réparation sont imputables à l'insuffisance de dureté et de résistance à l'usure des pierres de travertin utilisées pour réaliser le revêtement et le dallage des bâtiments et annexes ;
Considérant que les dommages qui en sont résultés sont imputables d'une part, à l'architecte qui, chargé d'une mission complète de conception et de réalisation des bâtiments, a commis une erreur dans le choix des pierres de dallage, d'autre part, à l'entreprise Cottin-Jonneaux qui, chargée de la pose de ces pierres dont elle ne pouvait ignorer qu'elles n'étaient pas conformes à l'usage auquel elles étaient destinées, s'est abstenue d'attirer l'attention du maître d'ouvrage sur cette anomalie ; qu'en conséquence, les désordres affectant le dallage sont imputables à l'architecte le Maresquier et à l'entreprise Cottin-Jonneaux qui doivent être déclarés solidairement responsables ; qu'il suit de là que le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Limoges a écarté la responsabilité de l'entreprise Cottin-Jonneaux ;
Sur la réparation :
Considérant, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Limoges que, les travaux nécessaires à la réfection et à la réparation des désordres affectant le dallage de l'entrée principale, du service d'accueil, du couloir principal du bureau de l'assistante sociale, de la bibliothèque administrative, des locaux de consultation externe, de la trésorerie, du local sécurité, de l'entrée des services administratifs et des urgences, doivent être évalués à 1.140.914,10 F TTC ; que si le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE demande que lui soit versé la somme de 200.000 F, il n'en justifie pas ; qu'en fixant à 30.000 F le montant de l'indemnité pour troubles divers supportés par le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE, les premiers juges ne se sont pas livrés à une inexacte appréciation de ce préjudice ;
Sur les intérêts :

Considérant que le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE LIMOGES a droit aux intérêts légaux à compter du 20 décembre 1984 date à laquelle ils ont été demandés ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée au 18 octobre 1988 ; qu'à cette date il était dû au moins un an d'intérêts ; que par suite, il y a lieu de faire droit aux conclusions du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE sur ce point ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que les frais de l'expertise ordonnée en référé et taxés à 37.160,17 F doivent être mis à la charge solidaire de l'architecte Nicolas Y... et de l'entreprise Cottin-Jonneaux ;
Sur l'application de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions de l'entreprise Cottin-Jonneaux tendant à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE au versement de la somme de 10.000 F sur le fondement de l'article R. 222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : L'architecte Nicolas Y... et l'entreprise Cottin-Jonneaux sont déclarés solidairement responsables des désordres affectant le dallage du sol du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE LIMOGES.
Article 2 : L'architecte Nicolas Y... et l'entreprise Cottin-Jonneaux sont condamnés solidairement à verser la somme de 1.170.914,10 F TTC dont 30.000 F de dommages intérêts, au CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE LIMOGES ; ladite somme portera intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 1984 ; les intérêts seront capitalisés au 18 octobre 1988 pour porter eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Les frais d'expertise sont mis solidairement à la charge de l'architecte Nicolas Y... et de l'entreprise Cottin-Jonneaux.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Limoges du 21 avril 1988 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : Le surplus des conclusions du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE LIMOGES est rejeté.
Article 6 : Les conclusions de l'entreprise Cottin-Jonneaux tendant à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE à lui verser la somme de 10.000 F sur le fondement de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 89BX00452
Date de la décision : 07/03/1991
Type d'affaire : Administrative

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DECENNALE - DESORDRES DE NATURE A ENGAGER LA RESPONSABILITE DECENNALE DES CONSTRUCTEURS.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - REPARATION - CONDAMNATION SOLIDAIRE.


Références :

Code civil 1792, 2270
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R222


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: ZAPATA
Rapporteur public ?: CATUS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1991-03-07;89bx00452 ?
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