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31/12/1993 | FRANCE | N°90BX00730;91BX00016

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2e chambre, 31 décembre 1993, 90BX00730 et 91BX00016


I - Vu, sous le n° 90BX00730, la requête enregistrée le 17 décembre 1990 au greffe de la cour, présentée pour la COMMUNE DE LA ROCHELLE, représentée par son maire dûment habilité par délibération de son conseil municipal en date du 17 décembre 1990 ; la COMMUNE DE LA ROCHELLE demande à la cour :
1°) l'annulation du jugement du 17 octobre 1990 du tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il rejette l'appel en garantie formé par la commune contre M. X..., architecte, à l'occasion du litige relatif à la construction de la maison de la culture ;
2°) la condamnation d

e M. X... à la garantir de toutes les condamnations prononcées contre el...

I - Vu, sous le n° 90BX00730, la requête enregistrée le 17 décembre 1990 au greffe de la cour, présentée pour la COMMUNE DE LA ROCHELLE, représentée par son maire dûment habilité par délibération de son conseil municipal en date du 17 décembre 1990 ; la COMMUNE DE LA ROCHELLE demande à la cour :
1°) l'annulation du jugement du 17 octobre 1990 du tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il rejette l'appel en garantie formé par la commune contre M. X..., architecte, à l'occasion du litige relatif à la construction de la maison de la culture ;
2°) la condamnation de M. X... à la garantir de toutes les condamnations prononcées contre elle et au bénéfice de la société anonyme "CITRA-FRANCE" ;
3°) la condamnation de M. X... au paiement d'une somme de 100.000 F au titre de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

II - Vu, sous le n° 91BX00016, la requête, enregistrée le 10 janvier 1991, présentée pour la société anonyme "CITRA-FRANCE", dont le siège social est ... à Cergy-Pontoise (Val d'Oise) ;
La société anonyme CITRA-FRANCE demande à la cour de réformer le jugement susvisé du tribunal administratif de Poitiers en date du 17 octobre 1990 condamnant la COMMUNE DE LA ROCHELLE à l'indemniser des retards et pertes enregistrés à l'occasion des travaux de construction de la maison de la culture :
1°) en ordonnant la capitalisation des intérêts à la date du 21 mars 1990 ;
2°) en condamnant la COMMUNE DE LA ROCHELLE au paiement d'une somme complémentaire de 801.570 F au titre de la majoration de 2 % des intérêts sur la somme de 435.636 F représentant les intérêts moratoires afférents aux travaux supplémentaires ;
3°) en condamnant la COMMUNE DE LA ROCHELLE au paiement d'une somme de 100.000 F au titre de dommage-intérêts ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 décembre 1993 :
- le rapport de M. BRENIER, conseiller ;
- les observations de Me BERNARD, avocat de la COMMUNE DE LA ROCHELLE ;
- les observations de Me VILLARD, avocat de la société anonyme "CITRA-FRANCE" ;
- et les conclusions de M. LABORDE, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de la COMMUNE DE LA ROCHELLE et de la société anonyme "CITRA-FRANCE" sont relatives au même marché de travaux publics ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la recevabilité de la requête de la société anonyme "CITRA-FRANCE" :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jugement du 17 octobre 1990 du tribunal administratif de Poitiers a été notifié à la société requérante le 13 novembre 1990 ; qu'ainsi la requête d'appel, enregistrée le 10 janvier 1991, n'est, contrairement à ce que soutient la commune, pas tardive ;
Sur la fin de non-recevoir opposée à l'appel incident de la COMMUNE DE LA ROCHELLE :
Considérant que ni la circonstance que la COMMUNE DE LA ROCHELLE a exécuté le jugement attaqué ni celle qu'elle ait limité son appel principal, enregistré sous le n° 90BX00730, aux dispositions dudit jugement rejetant l'appel en garantie formé par ses soins ne sauraient être regardées comme un acquiescement à ce jugement ; que, dès lors, la fin de non-recevoir opposée à l'appel incident doit être rejetée ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que si le jugement attaqué a fait droit aux demandes de la société CITRA FRANCE tendant à la capitalisation des intérêts échus les 15 octobre 1987 et 12 janvier 1989, il n'a pas statué sur la demande de capitalisation présentée par cette société dans un mémoire enregistré le 23 mars 1990 ; que l'instruction, qui avait été close le 20 mars 1989 par une ordonnance du 6 mars 1989 du président du tribunal administratif, doit être regardée comme rouverte par la communication par le tribunal, postérieurement à cette date, de mémoires aux parties avec demande de production d'observations ; que, dès lors, la société CITRA-FRANCE est fondée à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions susanalysées et doit être annulé sur ce point ;
Considérant qu'il y a lieu de se prononcer directement sur ladite demande par voie d'évocation et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur le surplus des conclusions de la requête de la société CITRA-FRANCE et sur les conclusions de la requête de la COMMUNE DE LA ROCHELLE ;
Sur la responsabilité :

Considérant que le marché conclu le 16 janvier 1979 entre la COMMUNE DE LA ROCHELLE et la Société CITRA FRANCE, dans le cadre des travaux de construction d'une maison de la culture, confie à cette société le lot gros oeuvre ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise ordonnée par les premiers juges, que si le délai contractuel d'exécution des travaux a été dépassé, ce retard a eu pour origine les difficultés rencontrées par le titulaire du lot fondations du fait de l'erreur commise sur la nature du sol ; que la désorganisation du chantier qui en est résultée est imputable à la faute commise par le maître d'ouvrage dans l'exercice de son pouvoir de contrôle et de direction du marché, celui-ci ayant fait réaliser, avant passation du marché litigieux, une étude sur la nature du sol qui s'est révélée gravement insuffisante ; que si ce retard a eu également pour causes les modifications apportées et la multiplicité des plans fournis, la COMMUNE DE LA ROCHELLE est responsable à l'égard de la société CITRA-FRANCE, en l'absence de stipulation contractuelle mettant à la charge de cette dernière la coordination des travaux, de l'intégralité du préjudice qu'elle a subi du fait de ce retard, même si celui-ci serait pour partie imputable à des fautes de l'architecte ;
Sur la réparation :
En ce qui concerne les montants des sommes dues à la société CITRA-FRANCE :
Considérant, d'une part, que si 98 jours de retard ont été retenus par deux avenants au marché, il résulte de l'instruction que le retard indemnisable est en réalité de 215 jours ; qu'ainsi c'est à bon droit que le tribunal administratif a reconnu à la société CITRA-FRANCE droit à réclamer à la commune la réparation du préjudice causé par l'allongement, dans la limite de 117 jours, de la durée de ses travaux ; que le tribunal n'a pas fait une inexacte appréciation de ce chef de préjudice en le fixant à la somme de 724.252 F toutes taxes comprises ;
Considérant, d'autre part, que le tribunal administratif n'a pas fait une inexacte appréciation du préjudice subi du fait de la perte de production, distinct de celui né de l'existence de travaux supplémentaires, en le fixant à la somme de 848.333 F toutes taxes comprises ;
En ce qui concerne les conclusions de la société CITRA-FRANCE tendant à la condamnation de la COMMUNE DE LA ROCHELLE à lui verser une indemnité de 100.000 F à titre de dommages-intérêts :
Considérant que ces prétentions ne sont assorties d'aucune justification ; qu'ainsi elle ne peuvent être accueillies ;
Sur les conclusions en garantie formées par la COMMUNE DE LA ROCHELLE contre M. X..., architecte :

Considérant que la COMMUNE DE LA ROCHELLE a prononcé le 30 janvier 1982 la réception définitive de l'ouvrage que constitue la maison de la culture sans formuler aucune réserve ; que l'appel en garantie formé pour la commune contre M. X... devant le tribunal administratif tendait à remettre en cause la responsabilité que ce dernier pouvait encourir envers elle en raison de manquements aux obligations contractuelles nées du marché qui les liait et avait ainsi pour seul fondement juridique la faute commise par celui-ci dans l'accomplissement de ses obligations contractuelles ; que la réception définitive prononcée sans réserve a eu pour effet de mettre fin aux rapports contractuels liant la commune à l'architecte, sans qu'y puisse faire obstacle la circonstance que M. X... n'ait pas sollicité l'établissement du procès-verbal d'achèvement de la mission prévue par les clauses du marché ; qu'ainsi, les conclusions d'appel en garantie formées par la commune ne pouvaient qu'être rejetées ; que cette dernière n'est par suite pas fondée à se plaindre de ce que les premiers juges ont rejeté ladite demande ;
Sur la majoration des intérêts :
Considérant qu'aux termes de l'article 181 du code des marchés publics dans sa rédaction alors applicable : "le défaut de mandatement de tout ou partie des intérêts moratoires lors du mandatement du principal entraîne une majoration de 2 % du montant de ces intérêts par mois de retard" ; qu'il n'est pas contesté que lors du mandatement, le 21 mai 1983, de la somme de 718.045,02 F, montant des travaux supplémentaires d'accord parties, les intérêts moratoires n'ont pas été mandatés ; qu'ainsi la société CITRA-FRANCE est fondée à soutenir qu'elle a droit à la majoration susvisée à compter du 21 mai 1983 ; que le jugement du tribunal administratif doit être réformé sur ce point ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 23 mars 1990 ; qu'à cette date il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à la demande formulée par la société CITRA-FRANCE ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que M. X..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à la COMMUNE DE LA ROCHELLE les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens ;
Considérant, d'autre part, qu'en application des mêmes dispositions, il y a lieu de condamner la COMMUNE DE LA ROCHELLE à payer à M. X... la somme de 5.000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les conclusions de la requête n° 90BX00730 de la COMMUNE DE LA ROCHELLE sont rejetées.
Article 2 : Les intérêts que la COMMUNE DE LA ROCHELLE a été condamnée à verser à la société CITRA-FRANCE sur la somme de sept cent dix huit mille quarante cinq francs deux centimes (718.045,02 F) sont majorés de 2 % à compter du 21 mai 1983.
Article 3 : Les intérêts échus le 23 mars 1990 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 4 : Le jugement en date du 17 octobre 1990 du tribunal administratif de Poitiers est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : La COMMUNE DE LA ROCHELLE est condamnée à verser à M. X... la somme de cinq mille francs (5.000 F) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête n° 90BX00016 de la société CITRA-FRANCE et l'appel incident de la COMMUNE DE LA ROCHELLE sont rejetés.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 90BX00730;91BX00016
Date de la décision : 31/12/1993
Sens de l'arrêt : Rejet réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-04-01-05,RJ1,RJ2 PROCEDURE - INSTRUCTION - POUVOIRS GENERAUX D'INSTRUCTION DU JUGE - CLOTURE DE L'INSTRUCTION -Réouverture de l'instruction - Existence - Communication de mémoires avec demande de production d'observations (1) (2).

54-04-01-05 L'instruction, qui avait été close par une ordonnance du président du tribunal administratif, doit être regardée comme rouverte du fait de la communication par le tribunal, postérieurement à cette clôture, de mémoires aux parties avec demande de production d'observations.


Références :

Code civil 1154
Code des marchés publics 181
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1

1.

Rappr. CE, 1991-05-22, Consorts Guillou, p. 199. 2. Comp. CAA de Lyon, Plénière, 1992-07-09, Ministre de l'éducation nationale et des sports c/ Rocagel, T. p. 1221


Composition du Tribunal
Président : M. Beyssac
Rapporteur ?: M. Brenier
Rapporteur public ?: M. Laborde

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1993-12-31;90bx00730 ?
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