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18/10/1994 | FRANCE | N°93BX00517;93BX00609

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3e chambre, 18 octobre 1994, 93BX00517 et 93BX00609


Vu 1°) la requête enregistrée le 6 mai 1993 au greffe de la cour sous le n° 93BX00517, présentée pour Melle Christine X... demeurant ... (Aude) ;
Melle X... demande à la cour :
1°) de réformer le jugement en date du 26 mars 1993 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à lui verser une indemnité de 100.000 F, qu'elle estime insuffisante, en réparation du préjudice résultant de l'arrêté illégal par lequel le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale l'a autorisée à créer une officine de pharmacie selon la procédure d

érogatoire ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4.213.468 F ;...

Vu 1°) la requête enregistrée le 6 mai 1993 au greffe de la cour sous le n° 93BX00517, présentée pour Melle Christine X... demeurant ... (Aude) ;
Melle X... demande à la cour :
1°) de réformer le jugement en date du 26 mars 1993 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à lui verser une indemnité de 100.000 F, qu'elle estime insuffisante, en réparation du préjudice résultant de l'arrêté illégal par lequel le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale l'a autorisée à créer une officine de pharmacie selon la procédure dérogatoire ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4.213.468 F ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 50.000 F en application de l'article 1er du décret du 2 septembre 1988 ;
Vu 2°) le recours, enregistré le 1er juin 1993, sous le n°93BX00609, présenté par le MINISTRE DELEGUE A LA SANTE ;
le MINISTRE DELEGUE A LA SANTE demande à la cour de réformer le jugement susvisé en date du 26 mars 1993 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à verser à Melle X... la somme de 100.000 F qu'il estime excessive ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 septembre 1994 :
- le rapport de Mme PERROT, conseiller ;
- les observations de Maître Y..., S.C.P. Vial-Marty, avocat de Melle X... ;
- et les conclusions de M. BOUSQUET, commissaire du gouvernement ;

Sur la jonction :
Considérant que, par un jugement en date du 26 mars 1993, le tribunal administratif de Montpellier a déclaré l'Etat responsable du préjudice subi par Melle X... à raison de l'illégalité de l'arrêté en date du 7 mars 1986 par lequel le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale lui avait accordé à titre dérogatoire l'autorisation d'ouvrir une officine de pharmacie à Lézignan les Corbières (Aude) et l'a condamné à verser à celle-ci la somme de 100.000 F au titre du préjudice moral ; que par la requête enregistrée au greffe de la cour sous le n° 93BX00517, Melle X... fait appel de ce jugement et demande que l'indemnité qui lui a été attribuée soit portée à 4.213.468 F ; que, dans son recours enregistré sous le n° 93BX00609, le MINISTRE DELEGUE A LA SANTE demande que l'indemnité que l'Etat a été condamné à verser à Melle X... soit ramenée à 5.000 F ; que ces deux requêtes présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu, en conséquence, de les joindre afin qu'il soit statué par un seul arrêt ;
Sur le fond :
Considérant, en premier lieu, qu'en raison de l'illégalité de l'ouverture de l'officine qu'elle a exploitée du 4 août 1986 au 26 avril 1991, Melle X... ne peut se prévaloir d'aucun droit à cette exploitation et aux revenus pouvant en résulter ; qu'elle ne peut, dès lors, prétendre à être indemnisée ni du manque à gagner subi depuis la fermeture de cette officine évalué par elle à 2.060.000 F ni de la perte de revenus qu'aurait entraînée pour elle l'impossibilité de procéder à la vente de produits pharmaceutiques entre le 10 septembre 1986 et le 11 mai 1987 ;
Considérant, en deuxième lieu, que, si Melle X... fait état des frais qu'elle a dû acquitter lors de la fermeture de l'officine pour des montants respectifs de 205.000 F en ce qui concerne les frais d'exploitation et de 41.000 F en ce qui concerne le coût du licenciement de ses salariés et des pertes qu'elle a subies à hauteur de 31.000 F en ce qui concerne les dossiers de tiers-payants non remboursés et de 90.000 F en ce qui concerne le stock de produits de parapharmacie qu'elle n'aurait pu rétrocéder, de telles dépenses constituent des charges de l'exercice clos en 1991 et ne peuvent, eu égard à la circonstance que le bilan comptable produit par l'intéressée fait apparaître un bénéfice brut de 139.682 F, être regardées comme constituant un préjudice indemnisable ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que Melle X... peut prétendre à la réparation du préjudice correspondant, d'une part, aux loyers restant à courir du contrat de crédit-bail conclu par elle en 1988 pour la location de matériel informatique et s'élevant à 48.750 F, d'autre part, à la charge des emprunts contractés par elle pour financer son installation s'élevant à 690.000 F et, enfin, à la part non amortie des investissements auxquels elle a procédé figurant pour 295.741 F au bilan de l'exercice clos en 1991 ; que toutefois ce préjudice doit être évalué sous réserve de la déduction de la valeur vénale des immobilisations de nature à être cédées et en particulier de l'immeuble abritant l'officine et évalué selon les dires de Melle X... à 600.000 F en 1992, de la compensation entre le capital restant à rembourser et la part correspondante des immobilisations restant à amortir, et des revenus nets tirés de l'exploitation de l'officine par l'intéressée au cours de la période litigieuse et qui s'élèvent à 1.023.071 F ; qu'eu égard aux montants de ces déductions, le préjudice susanalysé ne peut être indemnisé ;
Considérant enfin, que les circonstances qui ont précédé la fermeture par Melle X... de son officine, en particulier le retrait de l'autorisation d'exploiter le 18 août 1986, puis l'annulation de ce retrait par un jugement en date du 30 mars 1987 et enfin l'annulation de ce jugement et la confirmation du retrait par la décision du Conseil d'Etat en date du 28 janvier 1991, circonstances qui sont directement liées à la faute qu'a commise le ministre en prenant l'arrêté illégal du 7 mars 1986, ont pu causer à l'intéressée un préjudice moral important dont le tribunal administratif a fait une juste appréciation en l'évaluant à 100.000 F ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Melle X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier ne lui a accordé qu'une indemnité de 100.000 F ; que le ministre n'est pas davantage fondé à demander que cette indemnité soit ramenée à 5.000 F ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de Melle X... tendant à ce que l'Etat soit condamnée à lui verser une somme au titre des frais qu'elle a exposés ;
Article 1er : La requête n° 93BX00517 de Melle X... et le recours n° 93BX00609 du MINISTRE DELEGUE A LA SANTE sont rejetés.


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