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10/06/1999 | FRANCE | N°96BX30493

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1e chambre, 10 juin 1999, 96BX30493


Vu l'ordonnance en date du 1er septembre 1997 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Paris a en application de l'article 5 du décret du 9 mai 1997, transmis le dossier à la cour administrative d'appel de Bordeaux ;
Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 27 février 1996, présentée par M. Eric X... demeurant ... (La Réunion) ;
M. X... demande à la cour :
- d'annuler le jugement en date du 22 novembre 1995 du tribunal administratif de Saint Denis de la Réunion en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de la commune

de Saint Denis à lui payer la somme de 3.700.000 F à titre de dommag...

Vu l'ordonnance en date du 1er septembre 1997 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Paris a en application de l'article 5 du décret du 9 mai 1997, transmis le dossier à la cour administrative d'appel de Bordeaux ;
Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 27 février 1996, présentée par M. Eric X... demeurant ... (La Réunion) ;
M. X... demande à la cour :
- d'annuler le jugement en date du 22 novembre 1995 du tribunal administratif de Saint Denis de la Réunion en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de la commune de Saint Denis à lui payer la somme de 3.700.000 F à titre de dommages et intérêts, et celle de 500.000 F augmentée des intérêts de droit à partir du 20 mars 1992 à titre de réparation du pretium doloris ;
- de condamner la commune de Saint Denis de la Réunion à lui verser ces indemnités, augmentées d'une somme de 1.000 F par jour à compter du 20 mars 1992 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 1999 :
- le rapport de A. BEC, rapporteur ;
- et les conclusions de J.F. DESRAME, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de la requête :
Considérant, en premier lieu, que l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme n'a prescrit de modalités particulières de communication de la requête qu'à l'égard des recours tendant à l'annulation des décisions relatives à l'occupation ou à l'utilisation du sol ; que, par suite, le recours par lequel est seulement recherchée la responsabilité de l'autorité administrative à raison des illégalités entachant une telle décision, n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme ; que la commune n'est donc pas fondée à soutenir que la requête de M. X... serait irrecevable faute d'avoir fait l'objet d'une notification dans les conditions prévues par l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme ;
Considérant, en second lieu, que le mémoire enregistré au greffe le 27 février 1996 par lequel M. X... a saisi la cour a été, le 4 avril 1996, signé par un avocat ; qu'ainsi, la commune de Saint Denis de la Réunion n'est pas fondée à soutenir que la requête de M. X..., n'ayant pas été présentée par ministère d'avocat, serait irrecevable et devrait par suite être rejetée ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant que les conclusions par lesquelles M. X..., tant devant le tribunal administratif que devant la cour, demande à bénéficier d'un montant d'indemnités égal aux condamnations auxquelles, selon lui, les articles L. 480-3 et L. 480-4 du code de l'urbanisme exposent la commune de Saint Denis de la Réunion et le bénéficiaire des permis illégaux délivrés par cette dernière, doivent être regardées non comme tendant à obtenir la contre partie de la condamnation de ces derniers aux peines prévues par les articles L. 480-3 et L. 480-4 précités, mais comme la justification de l'évaluation de l'indemnité à laquelle il prétend avoir droit au titre de la privation de vue et d'ensoleillement, et de perte de valeur vénale de sa propriété et dont il recherche la réparation en mettant en cause la responsabilité de la commune de Saint Denis dela Réunion devant le juge administratif ; que la commune de Saint Denis de la Réunion n'est par suite pas fondée à soutenir que de telles conclusions sont présentées devant une juridiction incompétente pour en connaître, et devraient par suite être rejetées ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 108 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "les requêtes introductive d'instance ainsi que les mémoires doivent, à peine d'irrecevabilité, être présentés soit par un avocat, soit par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation, soit par un avoué en exercice dans le ressort du tribunal administratif intéressé, lorsque les conclusions de la demande tendent au paiement d'une somme d'argent, à la décharge ou à la réduction de sommes dont le paiement est réclamé au requérant ou à la solution d'un litige né d'un contrat" ; que l'article R. 109 du même code dispose : "toutefois, les dispositions de l'article R. 108 ne sont pas applicables : ( ...) 5 aux litiges dans lesquels le défendeur est une collectivité territoriale ou un établissement public en relevant ; ( ...)"

Considérant que si la demande de M. X... devant le tribunal administratif de Saint Denis de la Réunion était dirigée à la fois contre l'Etat et la commune de Saint Denis de la Réunion, les dispositions de l'article L. 109 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel demeuraient applicables aux seules conclusions dirigées contre la commune ; que, par suite la commune de Saint Denis de la Réunion n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier pour avoir statué sur des conclusions présentées sans le ministère d'avocat ;
Sur le préjudice invoqué par M. X... :
Considérant que M. X... soutient sans être contredit que les illégalités dont sont entachés les permis de construire délivrés à son voisin, M. Y..., ont en pour effet de permettre la réalisation d'une construction d'une hauteur largement supérieure à la hauteur autorisée par les dispositions d'urbanisme applicables, et que ce dépassement de hauteur, à l'origine d'une perte de vue et d'ensoleillement, conduit en outre à une diminution de la valeur vénale de sa propriété ; qu'il chiffre le préjudice qui en découlerait au montant des condamnations auquel la ville et le bénéficiaire aurait dû, selon lui, être condamnés en application des articles L. 480-3 et L. 480-4 du code de l'urbanisme ;
Considérant que si le montant des condamnations qui pouvaient être prononcées par application des articles L. 480-3 et L. 480-4 du code de l'urbanisme est sans rapport avec le préjudice dont M. X... demande réparation, M. X... a néanmoins droit à une indemnité calculée d'après les effets sur sa propriété du dépassement de hauteur de la construction de M. Y... ; que, dans les circonstances de l'affaire, il sera fait une juste appréciation des différents préjudices subis à ce titre par M. X... en condamnant la commune de Saint Denis de la Réunion à lui verser une indemnité de 300.000 F y compris toute actualisation et tous intérêts échus au jour de la présente décision ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation". Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que M. X... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante soit condamné à verser une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions précitées, de condamner la commune de Saint Denis de la Réunion à payer à M. X... la somme de 5.000 F.
Article 1er : La somme de 20.000 F que la commune de Saint Denis de la Réunion a été condamnée à verser à M. X... par le jugement du tribunal administratif de Saint Denis de la Réunion en date du 22 novembre 1995, est portée à 300.000 F.
Article 2 : La commune de Saint Denis de la Réunion versera à M. X... la somme de 300.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté, ainsi que le recours incident de la commune de Saint Denis de la Réunion sont rejetés.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Saint Denis de la Réunion tendant au bénéfice de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 96BX30493
Date de la décision : 10/06/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

60-02-05-01-03 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES DE L'URBANISME - PERMIS DE CONSTRUIRE - PREJUDICE


Références :

Code de l'urbanisme L600-3, L480-3, L480-4
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R108, R109, L109, L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: A. BEC
Rapporteur public ?: J.F. DESRAME

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1999-06-10;96bx30493 ?
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