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05/02/2001 | FRANCE | N°97BX31235

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2e chambre, 05 février 2001, 97BX31235


Vu l'ordonnance du 1er septembre 1997 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Paris a transmis le dossier de la requête de M. X... à la cour administrative d'appel de Bordeaux ;
Vu la requête sommaire enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 20 mai 1997, présentée pour M. Jean X... demeurant ... ;
M. X... demande à la cour :
- d'annuler le jugement du 4 février 1997 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a rejeté sa demande à fin d'indemnité dirigée contre l'Etat et le département de la Guadeloupe à la su

ite de l'accident dont il a été victime le 3 janvier 1993 sur l'ancienn...

Vu l'ordonnance du 1er septembre 1997 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Paris a transmis le dossier de la requête de M. X... à la cour administrative d'appel de Bordeaux ;
Vu la requête sommaire enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 20 mai 1997, présentée pour M. Jean X... demeurant ... ;
M. X... demande à la cour :
- d'annuler le jugement du 4 février 1997 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a rejeté sa demande à fin d'indemnité dirigée contre l'Etat et le département de la Guadeloupe à la suite de l'accident dont il a été victime le 3 janvier 1993 sur l'ancienne route de la Gabarre ;
- de condamner solidairement l'Etat et le département de la Guadeloupe à lui verser une indemnité de 148 127,07 F avec les intérêts de droit à compter du 11 mars 1994 et capitalisation de ces intérêts à la date du 20 mai 1997, en réparation des conséquences dommageables de cet accident ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n? 59-76 du 7 janvier 1959 ;
Vu la loi du 28 Pluviôse an VIII ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2001 :
- le rapport de Mlle ROCA ;
- et les conclusions de M. REY, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le 3 janvier 1993 vers 17 heures 15, M. X..., qui circulait à bicyclette sur l'ancienne route départementale de la Gabarre en direction de la Jaille Baie-Mahaut (Guadeloupe), a fait une chute à l'intersection de cette route et du chemin départemental 26 en raison de la présence sur la chaussée d'une excavation recouverte d'eau ; qu'il a été atteint de contusions multiples, d'un traumatisme crânien, de plaies faciales et de lésions dentaires ayant entraîné une incapacité temporaire totale de 40 jours ;
Sur la régularité de la procédure suivie devant le tribunal administratif de Basse-Terre :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, l'assuré social ou son ayant droit, qui a été victime d'un accident n'entrant pas dans la catégorie des accidents du travail, doit indiquer sa qualité d'assuré social lorsqu'il demande en justice la réparation du préjudice qu'il a subi ; que cette obligation a pour objet de permettre la mise en cause, à laquelle le juge administratif doit procéder d'office, des caisses de sécurité sociale dans les litiges opposant la victime et le tiers responsable de l'accident ; que, par ailleurs, lorsque la victime est un agent de l'Etat, l'article 3 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat, crée pour le juge administratif l'obligation de mettre en cause l'Etat en vue de l'exercice par celui-ci de l'action subrogatoire qui lui est ouverte de plein droit par l'article 1er de la même ordonnance, contre le tiers responsable de l'accident ;
Considérant qu'il résulte des pièces versées au dossier de première instance que M. X..., qui demandait au département de la Guadeloupe et à l'Etat réparation des dommages liés à son accident, est assuré social ; qu'il a indiqué sa qualité d'agent de l'Etat ; que le tribunal administratif n'a communiqué cette demande ni à la caisse de sécurité sociale ni au ministre de l'éducation nationale, employeur de M. X... ; que les premiers juges ont ainsi méconnu les dispositions précitées ; que cette irrégularité doit être soulevée d'office par la cour ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler le jugement attaqué ;
Considérant que la cour ayant communiqué la requête à la mutuelle générale de l'éducation nationale et au ministre de l'éducation nationale, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par M. X... ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'entretien de la route départementale où s'est produit l'accident incombe au département de la Guadeloupe ; que si cet entretien est assuré régulièrement par des agents de l'Etat, à savoir les services de la direction départementale de l'équipement, ceux-ci doivent être regardés comme agissant au nom et pour le compte du département ; qu'il suit de là que seule la responsabilité de ce dernier est susceptible d'être recherchée pour un mauvais entretien de la voie ; que l'Etat doit, dès lors, être mis hors de cause dans le présent litige ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du procès-verbal de police, que l'excavation en cause était relativement importante, non signalée, et entièrement recouverte d'eau de sorte qu'elle échappait à la visibilité des usagers circulant sur la route ; que l'existence de cette excavation était, dans les circonstances de l'espèce, constitutive d'un défaut d'entretien normal de la voie de nature à engager la responsabilité du département de la Guadeloupe ;
Considérant toutefois que M. X..., à qui on ne saurait reprocher ni d'avoir emprunté l'itinéraire qu'il a suivi pour regagner son domicile ni de s'être déporté vers l'axe médian de la voie en vue de tourner sur le côté gauche, se devait néanmoins à l'approche immédiate de l'intersection matérialisée par un panneau "stop", de ralentir sa vitesse dans des conditions suffisantes pour lui permettre de marquer l'arrêt obligatoire ; que les conditions de l'accident tendent à prouver qu'il n'a pas pleinement satisfait à cette exigence ; que cette faute a contribué à en aggraver les conséquences ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'affaire en laissant à sa charge le 1/3 des conséquences dommageables dudit accident ;
Sur la réparation :
Considérant que le requérant ne fait état d'aucune perte de revenus pendant la période où il a été atteint d'une incapacité temporaire totale ; qu'il ne produit par ailleurs aucun justificatif tendant à prouver la réalité des préjudices invoqués tenant aux prothèses dentaires, au préjudice matériel et aux frais d'expertise ; que ces divers chefs de préjudice ne peuvent, dès lors, donner lieu à indemnisation ;
Considérant que M. X... souffre, à la suite de son accident, de douleurs au genou et demeure atteint d'une raideur articulaire à l'origine d'une incapacité permanente partielle évaluée à 10 %, qui constitue une gêne dans l'exercice de son activité professionnelle de professeur d'éducation physique et sportive ; qu'il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence subis par l'intéressé, y compris le préjudice d'agrément, en lui allouant à ce titre la somme de 50 000 F ; que les souffrances physiques endurées par la victime et le préjudice esthétique, dont les cicatrices au visage, seront réparés par l'octroi d'une somme globale de 25 000 F ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, eu égard au partage de responsabilité retenu, le département de la Guadeloupe doit être condamné à verser à M. X... la somme de 50 000 F ;
Sur les frais d'expertise :
Les frais de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif de Basse-Terre, taxés à 1 200 F, sont mis à la charge du département de la Guadeloupe ;
Sur les intérêts :
Considérant que M. X... a droit aux intérêts au taux légal de la somme de 50 000 F à compter du 11 avril 1994, date d'enregistrement de sa demande au tribunal administratif ;

Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée les 20 mai 1997 et 29 septembre 1997 ; que si à la première de ces dates il était dû au moins une année d'intérêts, tel n'était pas le cas à la deuxième date ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à la première demande de capitalisation des intérêts et de rejeter la deuxième demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le département de la Guadeloupe à verser 6 000 F à M. X... au titre des frais qu'il a engagés non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce que M. X..., qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser au département une somme au titre de tels frais ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Basse-Terre du 4 février 1997 est annulé.
Article 2 : Le département de la Guadeloupe est condamné à payer à M. X... la somme de 50 000 F avec intérêts au taux légal à compter du 11 avril 1994. Les intérêts échus le 20 mai 1997 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Les frais d'expertise sont mis à la charge du département de la Guadeloupe.
Article 4 : Le département de la Guadeloupe versera 6 000 F à M. X... au titre des frais que celui-ci a engagés non compris dans les dépens. Les conclusions du département de la Guadeloupe tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le surplus de la demande présentée devant le tribunal administratif par M. X... et le surplus de sa requête sont rejetés.


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