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28/05/2001 | FRANCE | N°98BX01007

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2e chambre, 28 mai 2001, 98BX01007


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 4 juin 1998 et complétée les 2 juillet et 4 août 1998, présentée pour le DEPARTEMENT DE LA DORDOGNE, dûment représenté par le président du conseil général, qui demande à la cour :
* à titre principal,
- d'annuler le jugement du 24 février 1998 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamné à verser à M. et Mme Le Gall une somme de 230 000 F, avec intérêts au taux légal à compter du 27 mars 1995, en réparation du préjudice né de l'ouverture de la route départementale n? 703 à proximité de leur

propriété ;
- de rejeter la demande à fin d'indemnité présentée par M. et Mme Le...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 4 juin 1998 et complétée les 2 juillet et 4 août 1998, présentée pour le DEPARTEMENT DE LA DORDOGNE, dûment représenté par le président du conseil général, qui demande à la cour :
* à titre principal,
- d'annuler le jugement du 24 février 1998 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamné à verser à M. et Mme Le Gall une somme de 230 000 F, avec intérêts au taux légal à compter du 27 mars 1995, en réparation du préjudice né de l'ouverture de la route départementale n? 703 à proximité de leur propriété ;
- de rejeter la demande à fin d'indemnité présentée par M. et Mme Le Gall ;
- de condamner M. et Mme Le Gall à lui verser la somme de 3 000 F sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
* à titre subsidiaire,
- de désigner un expert aux fins de déterminer la réalité de l'imputabilité de la baisse de la valeur vénale de la propriété, invoquée par M. et Mme Le Gall ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le code de justice administrative, ensemble le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mai 2001 :
- le rapport de Mlle Roca ;
- et les conclusions de M. Rey, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Le Gall, propriétaire depuis plusieurs années d'une maison d'habitation avec terrain attenant située sur le territoire de la commune de Saint Cyprien, a été exproprié d'une partie de ce terrain pour la réalisation par le DEPARTEMENT DE LA DORDOGNE de la voie départementale Siorac en Périgord-Saint Cyprien ; que le département fait appel du jugement en date du 24 février 1998 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamné à verser à M. et Mme Le Gall la somme globale de 230 000 F, avec intérêts au taux légal à compter du 27 mars 1995, en réparation des troubles de jouissance et de la perte de la valeur vénale du bien consécutifs à l'ouverture au trafic de cette voie nouvelle ;
Considérant que si dans le cadre de la procédure de fixation des indemnités d'expropriation destinées à réparer les préjudices se rattachant à la cession des terrains nécessaires à la réalisation du projet routier précité, M. Le Gall a obtenu une somme de 77 600 F l'indemnisant notamment de la dépréciation causée à sa propriété du fait de la réduction de sa surface, cette circonstance ne saurait faire obstacle au droit de l'intéressé de demander au juge administratif la réparation du préjudice distinct, indépendant des conséquences directes de l'expropriation et résultant des nuisances dues à la proximité et à l'usage de l'ouvrage public routier nouvellement créé ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert immobilier produit aux débats, que l'implantation d'une voie très fréquentée à 15 mètres de leur maison a entraîné pour les époux Le Gall une modification sensible des conditions d'habitation en raison des nuisances sonores engendrées, et une diminution de la valeur vénale de leur bien ; que, contrairement à ce que prétend le DEPARTEMENT DE LA DORDOGNE ces préjudices revêtent, eu égard notamment à l'état antérieur des lieux et nonobstant la circonstance que d'autres riverains subiraient les mêmes inconvénients, un caractère anormal et spécial de nature à ouvrir à leur profit un droit à réparation ;
Considérant que le DEPARTEMENT DE LA DORDOGNE ne critique pas le montant de 50 000 F alloué par les premiers juges à M. et Mme Le Gall au titre des troubles de jouissance ; que s'il soutient que la perte de la valeur vénale de leur maison d'habitation est imputable à la chute du marché immobilier, il n'apporte aucun commencement de preuve à l'appui de cette allégation ; que les deux évaluations effectuées par des experts immobiliers avant et après la réalisation de l'ouvrage litigieux, produites aux débats par M. Le Gall, démontrent au contraire que cette perte de valeur vénale résulte essentiellement de la création de la voie routière ; que les premiers juges ont fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en le fixant à la somme de 180 000 F, ce qui correspond à une dépréciation de l'ordre de 30 % par rapport à la valeur initiale du bien ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit utile d'ordonner une expertise, que la présente requête ne peut qu'être rejetée ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que M. et Mme Le Gall, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, soient condamnés à verser au DEPARTEMENT DE LA DORDOGNE une somme au titre des frais qu'il a engagés non compris dans les dépens ; que, par contre, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le DEPARTEMENT DE LA DORDOGNE à payer 6 000 F à M. et Mme Le Gall en application de ces mêmes dispositions ;
Article 1er : La requête du DEPARTEMENT DE LA DORDOGNE est rejetée.
Article 2 : Le DEPARTEMENT DE LA DORDOGNE versera 6 000 F à M. et Mme Le Gall en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 98BX01007
Date de la décision : 28/05/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - NOTIONS GENERALES - NOTION D'UTILITE PUBLIQUE - EXISTENCE - INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT - VOIES ROUTIERES.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - FONDEMENT DE LA RESPONSABILITE - RESPONSABILITE SANS FAUTE - RESPONSABILITE ENCOURUE DU FAIT DE L'EXECUTION - DE L'EXISTENCE OU DU FONCTIONNEMENT DE TRAVAUX OU D'OUVRAGES PUBLICS - VICTIMES AUTRES QUE LES USAGERS DE L'OUVRAGE PUBLIC.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - CARACTERE INDEMNISABLE DU PREJUDICE - AUTRES CONDITIONS - SITUATION EXCLUANT INDEMNITE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - CARACTERE SPECIAL ET ANORMAL DU PREJUDICE - PREJUDICE PRESENTANT CE CARACTERE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - PREJUDICE MATERIEL - PERTE DE REVENUS - PERTE DE VALEUR VENALE D'UN IMMEUBLE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - TROUBLES DE JOUISSANCE.


Références :

Code de justice administrative L761-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mlle Roca
Rapporteur public ?: M. Rey

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2001-05-28;98bx01007 ?
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