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26/06/2001 | FRANCE | N°97BX01684

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3e chambre, 26 juin 2001, 97BX01684


Vu la requête, enregistrée le 28 août 1997 au greffe de la cour, présentée pour M. Christian A..., Mlle Edith A..., Mlle Anne A..., Mme Z..., Mme Y... et M. Z..., qui se domicilient chez M. A..., ..., par Me C..., avocat ;
Les requérants demandent à la cour :
1?) d'annuler le jugement en date du 9 juillet 1997 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à la condamnation du département des Landes à les indemniser du préjudice résultant de l'accident de la circulation dont M. et Mme A... ont été victimes le 26 octobre 1992 ;
2?) de condam

ner le département des Landes à verser les sommes de : 80.000 F à M. Ch...

Vu la requête, enregistrée le 28 août 1997 au greffe de la cour, présentée pour M. Christian A..., Mlle Edith A..., Mlle Anne A..., Mme Z..., Mme Y... et M. Z..., qui se domicilient chez M. A..., ..., par Me C..., avocat ;
Les requérants demandent à la cour :
1?) d'annuler le jugement en date du 9 juillet 1997 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à la condamnation du département des Landes à les indemniser du préjudice résultant de l'accident de la circulation dont M. et Mme A... ont été victimes le 26 octobre 1992 ;
2?) de condamner le département des Landes à verser les sommes de : 80.000 F à M. Christian A..., 40.000 F à Mlle Edith A..., 40.000 F à Mlle Anne A..., 30.000 F à Mme Z..., 10.000 F à Mme Y..., et 10.000 F à M. Z... ;
3?) de condamner le département des Landes à leur payer la somme de 20.000 F en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mai 2001 :
- le rapport de M. Bichet, premier conseiller ;
- les observations de Me B..., avocat, pour les consorts A... ;
- les observations de Me X..., avocat, pour le département des Landes ;
- et les conclusions de M. Rey, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions de la requête :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le 26 octobre 1992, vers 6 h 45, l'automobile conduite par M. A... qui circulait sur la route départementale 933, dans le sens Mont-de-Marsan Marmande, alors qu'elle abordait le carrefour dit de "Pillelardit" et que des travaux de réfection de la chaussée, à cet endroit, avaient fait disparaître tout marquage au sol, s'est trouvée brusquement face à la balise d'un îlot directionnel implanté sur un terre-plein central ; qu'au cours de la manoeuvre engagée par le conducteur pour éviter la collision son véhicule a dérapé et s'est immobilisé sur l'ancien tracé de la route, à gauche de son sens de circulation, après avoir violemment heurté un arbre ; que Mme A..., qui avait pris place à bord du véhicule, a perdu la vie au cours de cet accident ;
Considérant que si les travaux d'aménagement du carrefour et de réfection de la chaussée étaient signalés, à 800 m par un panneau limitant la vitesse à 60 k/h, à 600 m par un panneau "danger particulier" et un panonceau indiquant l'absence de marquage, à 200 m par un panneau "dos d'âne" pour signaler la différence de niveau de la chaussée, et en admettant même qu'il y ait eu également un panneau "danger gravillons", il n'existait ni balisage de la voie, dans le carrefour, ni même de signalisation du terre-plein central ; qu'en l'absence de cette signalisation, à cet endroit, alors que les automobilistes pouvaient éprouver des difficultés, surtout de nuit, et par temps de pluie, pour identifier le tracé de la route départementale dans une zone où la chaussée est élargie en raison du terre plein central et des bretelles de raccordement à la route départementale 934, et où demeure l'ancien tracé de la RD 933, comme en attestent, tant le fait que l'automobiliste qui a été témoin de cet accident venait lui-même de se méprendre sur le tracé de la route, que les empreintes, sur les accotements détrempés, de passages récents de véhicules, lesquels ont d'ailleurs déposé de la boue sur la chaussée, le département des Landes ne peut être regardé comme apportant la preuve de l'entretien normal de la voie publique ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que M. A... n'a ni prêté une attention suffisante à la signalisation existante ni respecté la limitation de vitesse ; que cette imprudence a joué un rôle dans la survenance de l'accident ; que si le département des Landes fait valoir, en outre, que l'intéressé empruntait cette route pour se rendre en Italie, environ tous les deux mois, il ne ressort d'aucun élément du dossier que ce dernier aurait eu connaissance de l'existence de ces travaux d'aménagement lesquels avaient débuté le 30 septembre ; que, dans ces conditions, si les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté intégralement leur demande en estimant que l'accident était uniquement imputable aux fautes du conducteur, le département est, de son coté, fondé à invoquer lesdites fautes, lesquelles sont opposables aux passagers du véhicule et à leurs ayant-droits ; qu'il sera fait une exacte appréciation des circonstances de l'espèce en mettant à la charge du département la moitié des conséquences dommageables de l'accident ; que les consorts A... sont, ainsi, fondés à demander l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Pau a exonéré le département de toute responsabilité ;

Considérant que, compte tenu du partage de responsabilité ci-dessus indiqué, et en l'absence de toute justification de la part des requérants du préjudice matériel qu'aurait pu leur causer le décès de Mme A..., il sera fait une juste appréciation de la douleur morale éprouvée par chacun des requérants en évaluant le montant de la réparation qui leur est due à 35.000 F pour M. A..., son mari, 20.000 F à chacune de ses filles, Mlles Edith et Anne A..., 15.000 F à sa mère, Mme Z..., 5.000 F à Mme Y..., sa soeur et 5.000 F à son frère, M. Z... ;
Sur les conclusions d'appel en garantie du département des Landes contre la société France route :
Considérant que, pour soutenir que la signalisation incombait à la société France route, le département des Landes invoque, de façon générale, le marché dont cette dernière était titulaire ; qu'en première instance il a fait référence aux obligations prévues à la page 14 du cahier des clauses administratives particulières dont il a produit une copie ; qu'il doit être regardé comme ayant invoqué les dispositions de l'article 8-4. 5 dudit document contractuel pour fonder son action à l'encontre de la société France route ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article précité du CCAP que la mise en ouvre d'une signalisation adaptée aux risques que les travaux font courir aux usagers de la voie publique incombe à l'entreprise, sous le contrôle de la subdivision de l'équipement ; que la société France route a ainsi méconnu l'étendue de ses obligations contractuelles en négligeant d'installer une signalisation adaptée aux risques que faisaient courir les travaux qu'elle réalisait à hauteur du carrefour dit de "Pillelardit" ;
Considérant, toutefois, que la société invoque l'attitude de la subdivision de l'équipement chargée du contrôle de la signalisation, et entend ainsi se prévaloir de la faute qu'aurait commise le maître d'ouvrage ; qu'il ressort du compte-rendu de la première réunion de chantier dressé par la subdivision de l'équipement de Roquefort le 30 septembre 1992, qu'un plan de signalisation type a été fourni à l'entreprise par la subdivision de Mont de Marsan ; qu'en outre, ce compte-rendu prescrit que, la nuit, le panneau "travaux" sera remplacé par le panneau "autres dangers" avec un panonceau "absence de marquage" et que les feux tricolores seront remplacés par le panneau "dos d'âne" avec panonceau "chaussée déformée" ; que le compte-rendu de la réunion n? 4, établi par la même subdivision le 21 octobre indique, alors que des intempéries étaient apparues, que la signalisation est bonne ; que la méconnaissance par l'entreprise de ses obligations contractuelles en matière de signalisation a été rendue possible par la faute lourde ainsi commise par le département des Landes de nature à atténuer la responsabilité encourue par l'entrepreneur ; qu'il sera fait une exacte appréciation des circonstances de l'espèce en mettant à la charge de la société France route la moitié seulement des condamnations prononcées à l'encontre du département ;
Sur les frais irrépétibles :

Considérant que les dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors en vigueur, reprises à l'article L. 761-1 du code de justice administrative, font obstacle à ce que les requérants, qui ne sont pas dans la présente instance la partie perdante, soient condamnés à payer au département des Landes la somme que ce dernier demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, par contre, il y a lieu de condamner le département des Landes à verser aux consorts A... la somme de 6.000 F au même titre ; qu'enfin, il n'y a pas lieu de condamner le département des Landes à payer à la société France route la somme que cette dernière demande, ni de condamner la société France route à payer au département des Landes la somme que celui-ci réclame au même titre ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau du 9 juillet 1997 est annulé.
Article 2 : Le département des Landes est condamné à verser 35.000 F à M. Christian A..., 20.000 F à Mlle Edith A..., 20.000 F à Mlle Anne A..., 15.000 F à Mme Z..., 5.000 F à Mme Y..., et 5.000 F à M. Z... .
Article 3 : La société France route est condamnée à garantir le département des Landes de la moitié des condamnations prononcées contre lui à l'article 2 ci-dessus.
Article 4 : Le département des Landes versera la somme de 6.000 F aux consorts A... au titre des frais irrépétibles.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête, des conclusions du département des Landes et de la société France route est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 97BX01684
Date de la décision : 26/06/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - ACTIONS EN GARANTIE.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DU MAITRE DE L'OUVRAGE ET DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DES TIERS - RESPONSABILITE DU MAITRE DE L'OUVRAGE.

TRAVAUX PUBLICS - DIFFERENTES CATEGORIES DE DOMMAGES - DOMMAGES SUR LES VOIES PUBLIQUES TERRESTRES - DEFAUT D'ENTRETIEN NORMAL - SIGNALISATION.


Références :

Code de justice administrative L761-1
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bichet
Rapporteur public ?: M. Rey

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2001-06-26;97bx01684 ?
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