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12/03/2002 | FRANCE | N°99BX01873

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3e chambre, 12 mars 2002, 99BX01873


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux le 5 août 1999 sous le n° 99BX01873, présentée pour la S.A.R.L. DUDUWAK dont le siège social est ... (Gironde) ; la S.A.R.L. demande que la cour :
- annule le jugement en date du 11 mai 1999, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période correspondant aux exercices clos en 1987, 1988 et 1989 ;
- ordonne qu'il soit sursis à l'exécution du jugement su

svisé ;
- ordonne la décharge des taxes contestées ;
Vu les pièces d...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux le 5 août 1999 sous le n° 99BX01873, présentée pour la S.A.R.L. DUDUWAK dont le siège social est ... (Gironde) ; la S.A.R.L. demande que la cour :
- annule le jugement en date du 11 mai 1999, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période correspondant aux exercices clos en 1987, 1988 et 1989 ;
- ordonne qu'il soit sursis à l'exécution du jugement susvisé ;
- ordonne la décharge des taxes contestées ;
Vu les pièces déposées le 4 septembre 2001 pour les requérants ;
Vu les pièces déposées le 7 septembre 2001 par l'administration ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ainsi que le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 février 2002 :
- le rapport de Mme Boulard, premier conseiller ;
- les observations de Mme X... de Saint-Aignan, représentant le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;
- et les conclusions de M. Heinis, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige procèdent d'une vérification de comptabilité dont la S.A.R.L. DUDUWAK, qui exploite un fond de commerce de bar-rhumerie à Lège en Gironde, a fait l'objet au titre de la période correspondant aux exercices clos en 1987, 1988 et 1989, c'est-à-dire la période du 1er octobre 1986 au 30 septembre 1989 ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'en relevant que la société n'établissait pas Aqu'au cours de la vérification sur place de sa comptabilité, il ne lui aurait pas été possible d'avoir avec le vérificateur un débat oral et contradictoire et en ajoutant que le vérificateur n'était pas tenu de donner Aune information sur les redressements qu'il pouvait envisager avant leur notification , les premiers juges, qui n'avaient pas à répondre à tous les arguments présentés par la S.A.R.L. DUDUWAK, ont suffisamment motivé le rejet du moyen tiré par cette société de ce qu'elle aurait été privée d'un débat oral et contradictoire au cours des opérations de contrôle ; que le tribunal administratif, qui a précisé les éléments contenus dans la notification de redressements en date du 27 octobre 1990, a également suffisamment répondu au moyen tenant à la motivation de cette notification ; que, dans la mesure où en critiquant le caractère Alaconique du jugement quant à la méthode de reconstitution, la société aurait entendu contester la motivation sur ce point du jugement attaqué, il résulte de la lecture même de cette décision que les premiers juges, qui, après avoir décrit les irrégularités de la comptabilité, ont détaillé la méthode suivant laquelle ont été reconstituées les recettes de la société, puis ont porté une appréciation sur sa validité, ont ainsi motivé de manière suffisante leur décision ; que, par suite, le moyen tiré d'une prétendue insuffisance de motivation du jugement contesté doit être écarté ;
Sur la procédure des impositions :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des éléments non contestés de l'instruction que la première intervention du vérificateur a eu lieu a siège de la société et que la vérification de comptabilité s'est par la suite déroulée dans le bureau de l'expert-comptable de la société, à la demande du gérant de celle-ci ; qu'il appartient dans ces conditions à la société de démontrer qu'elle aurait été privée de la faculté d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur lors des opérations de contrôle ; que ni la durée de ces opérations, qui ont eu lieu du 5 avril au 22 mai 1990, ni la nature ou la motivation des redressements opérés, non plus que les motifs qui ont conduit le vérificateur à rejeter la comptabilité, ne révèlent que la société aurait été privée de cette faculté de débat oral et contradictoire ; que l'attestation de l'expert-comptable en date du 30 août 1995, qui fait état de demandes formulées par le vérificateur, ne permet pas d'établir que ce dernier se serait refusé à tout échange de vue avec le responsable de la société qu'il a rencontré à au moins deux reprises ; que les termes de la réponse de la société à la notification de redressements ne permettent pas davantage, non plus que ceux de la confirmation de redressements, de tenir pour établi un refus du vérificateur de se prêter à un débat oral et contradictoire ; que le vérificateur n'avait pas à discuter avec le gérant de la S.A.R.L. DUDUWAK, préalablement à la notification de redressements, des conséquences qu'il entendait tirer des constatations opérées lors de la vérification de comptabilité ; qu'en tout état de cause, la société était en situation de taxation d'office pour la partie de la période correspondant aux exercices clos en 1987 et 1989, ainsi qu'il est dit ci-dessous ; que cette situation, dont la constatation ne découle pas des opérations de contrôle, rend inopérant au titre de la période susdécrite le moyen tiré de la prétendue irrégularité de ces opérations ;

Considérant, en second lieu, que la circonstance que la réponse aux observations du contribuable ait été rédigée le 30 novembre 1990, soit 3 jours après la réception le 27 novembre de ces observations, ne saurait révéler par elle- même que la réponse de l'administration serait entachée d'une insuffisance de motivation ; qu'il résulte de l'instruction que la réponse de la S.A.R.L. comportait deux parties, la première dactylographiée opposant un refus de principe au Arejet systématique des Apièces justificatives , aux Ataxations d'office envisagées ainsi qu'à Atoute réintégration arbitraire , refus présenté comme fondé sur l'absence d'information préalable quant aux conséquences des constatations opérées lors du contrôle et à l'impossibilité alléguée de ce fait de présenter une défense, la seconde manuscrite contestant de manière précise les modalités de reconstitution des recettes et des autres chefs de redressement ; qu'eu égard au caractère général de la contestation du rejet de la comptabilité et de la procédure ainsi qu'au motif présenté comme justifiant cette contestation, le vérificateur a pu se borner à noter dans la réponse du 30 novembre 1990 que la procédure était Asans changement et que ses critiques portant sur la comptabilité étaient Amaintenues dans la mesure où celle-ci était Anon régulière en la forme et Anon probante au fond ; qu'en revanche, dans ce même document du 30 novembre 1990, le vérificateur a répondu de manière très précise à la contestation elle-même circonstanciée faite par la société du rehaussement de ses recettes et des autres chefs de redressements ; que la réponse du vérificateur est donc adéquate à celle de la société ; que dans ces conditions la lettre du 30 novembre 1990 n'a pas méconnu les dispositions du second alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales qui imposent à l'administration de motiver sa réponse lorsqu'elle rejette les observation du contribuable ; Sur la charge de la preuve et le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : ALorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité présentée comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission ; qu'aux termes de l'article L. 193 du même livre : ADans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la S.A.R.L. DUDUWAK, soumise au régime simplifié d'imposition, était, par application de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales en situation de taxation d'office pour avoir souscrit hors délai la déclaration récapitulative de taxes sur le chiffre d'affaires relatives à la période correspondant aux exercices clos en 1987 et 1989 ; que la charge de la preuve pèse donc sur la société en ce qui concerne le rappel de taxe sur la valeur ajoutée afférent à cette période ;

Considérant qu'il résulte également de l'instruction que, sur l'ensemble de la période vérifiée, la comptabilité de l'entreprise présentait de graves irrégularités au sens de l'article L. 192 précité, telles que la globalisation journalière des recettes, pour les bandes de caisse qui ont pu être présentées, sans justification du détail de ces recettes et l'état lacunaire des stocks ; que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, saisie du différend entre l'administration et la S.A.R.L. DUDUWAK a émis un avis dans sa séance du 27 septembre 1991 ; que la commission a porté une appréciation sur les différents éléments de la reconstitution effectuée par le vérificateur en fonction des boissons revendues ; qu'ainsi, la commission a été d'avis de maintenir les modalités de la reconstitution relatives à la vente de Apunch , des Apetites bouteilles , de la bière et à la part des Aofferts qu'elle a évaluée comme le vérificateur à 10 % des recettes ; que s'agissant du champagne et plus particulièrement du nombre de consommations vendues par bouteille, l'administration soutient que l'évaluation servant de base à l'évaluation a été Aentérinée par la commission sans susciter de critiques ultérieures de la S.A.R.L. qui ne s'est d'ailleurs pas prévalue dans sa requête d'un renversement de la charge de la preuve à son profit sur ce point ; qu'en revanche, pour ce qui est des éléments de la reconstitution afférents à la limonade et aux liqueurs, la commission a proposé l'abandon des redressements en découlant ; que, cependant, l'administration a établi les impositions sur la base des rehaussements tels qu'ils avaient été confirmés dans la réponse aux observations du contribuable susmentionnée du 30 novembre 1990 ; que, dès lors qu'elle n'a pas tenu compte des critiques de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires portant sur les recettes reconstituées à partir des achats revendus de limonade et de liqueurs, l'administration doit être regardée comme ne s'étant pas, dans cette mesure, conformée à l'avis de cette commission et supporte la charge de la preuve pour la part des rappels de taxe sur la valeur ajoutée assis sur les recettes reconstituées en fonction de ces achats, qui ont été établis selon la procédure contradictoire au titre de la période correspondant à l'exercice clos en 1988 ; que pour le reste de ces rappels au titre de cette même période, l'administration doit être regardée comme s'étant conformée à l'avis de la commission, ce qui conduit, à raison de l'irrégularité de la comptabilité de la société requérante, à mettre la preuve à la charge de cette dernière ;

Considérant que la reconstitution des recettes a été effectuée année par année à partir des achats revendus de boissons, tels qu'ils ont pu être retracés dans les achats et les stocks présentés, selon chaque type de produits, en fonction d'un dosage et de prix à la consommation indiqués au vérificateur lors des opérations de contrôle ainsi que celui-ci le précise dans la notification de redressements ; qu'une telle méthode n'est ni imprécise, ni sommaire, ni erronée dans son principe, contrairement à ce qui soutient la société requérante ; qu'il n'est pas établi qu'une erreur de tarification du rhum aurait été commise par le vérificateur de telle sorte que les recettes correspondant à la vente de Apunch en auraient été surestimées ; que les indications générales de la société sur le montant des Aofferts , qu'elle estime être de 30 % ne tiennent pas lieu de la preuve requise en la matière, et ne permettent pas de retenir un taux supérieur à celui de 10 % évalué par le vérificateur et admis par la commission ; que s'agissant des points susindiqués de la reconstitution pour lesquels la commission a donné un avis négatif, aucun élément de l'instruction ne permet de distraire les achats de limonade de la base de reconstitution, la motivation retenue par la commission et reprise par la requête suivant laquelle l'entreprise ne vendrait pas de Apanaché ne pouvant par elle-même justifier qu'il soit fait abstraction de la limonade achetée pour l'estimation des consommations revendues ; qu'ainsi, l'administration, qui supporte sur ce point et au titre de 1988 la charge de la preuve, établie la réalité des recettes correspondant à la vente de cette boisson pour ces deux années ; qu'au titre de 1987 et 1989, la société qui, ainsi qu'il est dit ci-dessus, supporte la charge de la preuve en raison de la procédure d'office dont elle relève, ne conteste pas utilement cet élément de la reconstitution ; qu'en revanche et pour ce qui est, au titre de 1988, des recettes reconstituées à partir des liqueurs, suivant la procédure contradictoire mais ayant fait l'objet d'un avis défavorable de la commission, l'administration ne démontre pas que les liquides de cette catégorie qu'elle a pris en compte aient pu, dans leur intégralité et pour le dosage qu'elle a retenu, donner lieu à la facturation d'une consommation spécifique ; que, sur ce point, l'administration se borne à faire valoir que les Aadjuvants n'ont pas été inclus dans les achats revendus , alors que précisément les liqueurs, dont le service ne conteste pas qu'elles entrent dans la composition de cocktails, figurent dans la base de la reconstitution au même titre que les autres liquides ; que l'administration ne soutient même pas que la prise en compte du volume des liqueurs viendrait compenser une insuffisante prise en compte du volume des autres boissons auxquelles elles s'ajoutent, comme l'avait prétendu le vérificateur lors de la confirmation de ce rehaussement ; que, parallèlement, la société doit être regardée comme démontrant, ce qu'il lui incombe de faire au titre de 1987 et 1989, l'exagération de la reconstitution de ses recettes procédant de la prise en compte des achats de liqueurs ; qu'il convient donc de soustraire de la base d'imposition de l'ensemble de la période en litige les consommations estimées à partir des liqueurs, à l'exception de celle correspondant au produit dont la société avait reconnu dans sa réponse à la notification de redressements qu'il était consommé tel quel ; qu'il y a lieu de retenir le montant des
consommations calculées en fonction des liqueurs que la société avait mentionné comme excédentaire dans sa réponse à la notification , soit 2 234 consommations au titre de 1987, 1 509 consommations au titre de 1988 et 1 436 consommations au titre de 1989, ce qui, à raison d'une recette qui avait été estimée à 50 F par consommation pour cette catégorie de boisson, conduit à une diminution des bases toutes taxes comprises de la reconstitution de 111 700 F au titre de 1987, 75 450 F au titre de 1988 et 71 800 F au titre de 1989, soit une diminution de ces mêmes bases ramenée en hors taxe à 94 182 F au titre de 1987, 63 617 F au titre de 1988 et 60 539 F au titre de 1989 ; que cette diminution implique le dégrèvement corrélatif de la taxe sur la valeur ajoutée, qui a été assise sur ces bases au taux de 18,6 %, pour un montant en principal de 17 518 F au titre de 1987, de 11 833 F au titre de 1988 et de 11 260 F au titre de 1989, ainsi que des pénalités qui lui ont été appliquées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la S.A.R.L. DUDUWAK n'est fondée à demander la réformation du jugement attaqué qu'en tant qu'il rejette sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période en litige dans la mesure des dégrèvements chiffrés ci-dessus ;
Article 1er : Le complément de taxe sur la valeur ajoutée qui a été réclamé à la S.A.R.L. DUDUWAK pour la période correspondant aux exercices clos en 1987, 1988 et 1989 est réduit, en principal, d'une somme de 17 518 F au titre de 1987, de 11 833 F au titre de 1988 et de 11 260 F au titre de 1989, ainsi que des pénalités y afférentes.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 11 mai 1999 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.


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