Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 8 juillet 2002, présentée pour Mlle X, demeurant ..., par maître Bodet ;
Elle demande à la cour :
- d'annuler le jugement en date du 14 mars 2002 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il a limité à 2 846,61 euros l'indemnité devant lui être versée par la commune de Martignas-sur-Jalle à la suite de l'accident dont elle a été victime le 18 août 1999 ;
- de condamner la commune de Martignas-sur-Jalle à lui verser une indemnité totale de 46 421,72 euros en réparation des diverses conséquences dommageables de cet accident ;
-de condamner la commune à lui verser une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 Pluviôse an VIII ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 novembre 2005 :
- le rapport de Mme Fabien, premier conseiller ;
- les observations de Me Bodet pour Mlle Jessica X,
- les observations de Me Dumontet pour la commune de Martignas-sur-Jalle et la SMACL,
- les conclusions de Mme Jayat, commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mlle X, alors qu'elle était assise le 18 août 1999 sur les marches du monument aux morts de Martignas-sur-Jalle et discutait avec d'autres jeunes gens, a été blessée par le basculement de la stèle à laquelle elle était adossée ; que, par le jugement attaqué du 14 mars 2002, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné la commune de Martignas-sur-Jalle à lui verser une indemnité en réparation des conséquences dommageables de cet accident ; que Mlle X conteste ce jugement en tant qu'il a limité le montant de cette indemnité à 2 846,61 euros ; que, par la voie de l'appel incident, la commune de Martignas-sur-Jalle conteste l'engagement de sa responsabilité ;
Sur la responsabilité :
Considérant que l'intéressée, qui a été blessée par la chute d'un élément du monument aux morts de la commune de Martignas-sur-Jalle sur lequel elle était assise, avait la qualité d'usager de l'ouvrage public communal alors même qu'elle a fait un usage du monument aux morts qui n'était pas conforme à sa destination au moment de l'accident ; que la commune de Martignas-sur-Jalle ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de l'absence de vice de conception ou d'exécution de l'ouvrage et de son entretien normal ; qu'en admettant même que le basculement de la stèle ait été favorisé par l'action d'un tiers, une telle circonstance n'est, en tout état de cause, pas de nature à exonérer, même partiellement, le maître de l'ouvrage de sa responsabilité ; qu'en revanche, l'imprudence de la victime, qui a utilisé le monument aux morts d'une manière non conforme à sa destination, est de nature à atténuer la responsabilité de la commune à concurrence d'un tiers ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Martignas-sur-Jalle doit être condamnée à réparer les deux tiers des conséquences dommageables de l'accident dont a été victime Mlle X ;
Sur l'évaluation des préjudices :
Considérant que Mlle X, qui était âgée de 17 ans à l'époque de l'accident, a subi une invalidité temporaire totale jusqu'au 31 octobre 1999, une invalidité temporaire partielle jusqu'au 18 août 2000, date de consolidation de son état de santé ; qu'elle reste atteinte d'une invalidité permanente partielle résultant des séquelles de fractures du bassin et évaluée à 7% par l'expert désigné par le tribunal administratif ;
Considérant que l'intéressée n'apporte aucun élément permettant de démontrer que l'accident dont elle a été victime lui aurait fait perdre une chance sérieuse d'obtenir le certificat d'aptitude professionnelle de coiffeuse ; que si l'expert relève une gêne certaine aux fonctions de coiffeuse ou au travail de serveuse-plongeuse qu'elle exerçait en décembre 2000, il ne résulte pas de l'instruction que cette circonstance lui aurait fait perdre une chance d'exercer un métier nécessitant une position debout prolongée ; que la réalité des pertes de chance alléguées n'est ainsi pas établie ;
Considérant qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice physiologique, tenant compte de la gêne ressentie dans ses activités professionnelles, et du préjudice d'agrément subis par Mlle X à raison de son invalidité permanente partielle en évaluant ces chefs de préjudice à la somme totale de 9 000 euros dont 6 000 au titre de l'atteinte à l'intégrité physique ; qu'il sera fait une juste appréciation des souffrances physiques qu'elle a subies lors de son accident et des suites immédiates de celui-ci ainsi que de celles qu'elle continue d'endurer en fixant ce chef de préjudice à 2 000 euros ; que le tribunal administratif de Bordeaux a, par ailleurs, fait une exacte évaluation du préjudice esthétique correspondant à une légère asymétrie des cuisses en l'évaluant à 400 euros ;
Considérant que le préjudice personnel subi par Mlle X doit ainsi être évalué à 11 400 euros auxquels il convient d'ajouter la somme de 2 684,50 euros correspondant aux frais médicaux liés à son accident et pris en charge par la CPAM de la Gironde ; que compte tenu du partage de responsabilité retenu, l'indemnité devant être mise à la charge de la commune de Martignas-sur-Jalle s'élève à 9 389,66 euros ;
Sur les droits respectifs de Mlle X et de la CPAM de la Gironde :
Considérant que la CPAM de la Gironde, à laquelle le partage de responsabilité n'est pas opposable et dont la créance s'impute, sans l'absorber totalement, sur la part de l'indemnité réparant l'atteinte à l'intégrité physique, a droit au remboursement total de la somme de 2 684,50 euros ; que compte tenu des droits de la Caisse, l'indemnité devant être versée à Mlle X s'élève donc à 6 705,16 euros ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle X est fondée à demander dans cette mesure la réformation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 14 mars 2002 ;
Sur l' application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mlle X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la commune de Martignas-sur-Jalle la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu de condamner la commune de Martignas-sur-Jalle à verser à ce titre à Mlle X une somme de 1 300 euros et à la CPAM de la Gironde la somme demandée de 160 euros ;
DECIDE :
Article 1 : La somme que la commune de Martignas-sur-Jalle a été condamnée à verser à Mlle X par le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 14 mars 2002 est portée à 6 705,16 euros.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 14 mars 2002 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : La commune de Martignas-sur-Jalle versera à Mlle X une somme de 1 300 euros et à la CPAM de la Gironde une somme de 160 euros en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mlle X est rejeté.
Article 5 : Les conclusions de la commune de Martignas-sur-Jalle et de la compagnie d'assurances SMACL sont rejetées.
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N° 02BX01345