La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/02/2010 | FRANCE | N°08BX03313

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 04 février 2010, 08BX03313


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 30 décembre 2008 sous le n° 08BX03313, présentée pour la société VERGNET ARCHIPEL, renommée EOLE MIQUELON, dont le siège social est 41 bis rue Boursaint à Saint-Pierre et Miquelon (97500), par Me Cassin, avocat ;

La société VERGNET ARCHIPEL demande à la cour :

- d'annuler le jugement n° 624/07 en date du 3 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Saint-Pierre et Miquelon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société Electricité de France (E.D.F.) à lui verser la somme de 475.939 eur

os hors taxes assortie des intérêts de droit au titre de l'énergie non produite ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 30 décembre 2008 sous le n° 08BX03313, présentée pour la société VERGNET ARCHIPEL, renommée EOLE MIQUELON, dont le siège social est 41 bis rue Boursaint à Saint-Pierre et Miquelon (97500), par Me Cassin, avocat ;

La société VERGNET ARCHIPEL demande à la cour :

- d'annuler le jugement n° 624/07 en date du 3 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Saint-Pierre et Miquelon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société Electricité de France (E.D.F.) à lui verser la somme de 475.939 euros hors taxes assortie des intérêts de droit au titre de l'énergie non produite depuis 2001 par la centrale éolienne de Miquelon, en application des stipulations du contrat d'achat conclu le 29 octobre 1999 ;

- de condamner la société E.D.F. à lui verser la somme impayée de 375.393 euros hors taxes assortie des intérêts de droit au titre de l'énergie non produite depuis 2001 par la centrale éolienne de Miquelon, en application des stipulations du contrat d'achat conclu le 29 octobre 1999 et la somme de 100.000 euros hors taxes assortie des intérêts de retard en réparation du préjudice résultant des fautes contractuelles ;

- de condamner la société E.D.F. à lui verser la somme de 5.000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 2010,

- le rapport de Mme Balzamo, premier conseiller ;

- les observations de Me Heckenroth du cabinet CGR Legal, avocat de la société VERGNET ARCHIPEL ;

- les observations de Me Pintat, avocat de E.D.F. ;

- et les conclusions de M. Zupan, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 janvier 2010, présentée pour la société VERGNET ARCHIPEL ;

Considérant que dans le cadre du développement du parc éolien français, Electricité de France (E.D.F.) a lancé le 31 mai 1997 un appel à propositions en vue de conclure avec les candidats sélectionnés des contrats d'achat d'électricité ; que la société VERGNET ARCHIPEL, aujourd'hui dénommée EOLE MIQUELON, a été choisie pour la création d'un parc éolien, composé de dix éoliennes d'une puissance de 60 kWh chacune, raccordé au réseau électrique de Miquelon qui était alors alimenté exclusivement par une centrale fonctionnant avec des moteurs Diesel ; qu'après la conclusion d'un protocole d'accord entre E.D.F. et la société VERGNET ARCHIPEL le 22 janvier 1998 pour préciser les règles de fonctionnement de ce système électrique mixte, et la réalisation d'études complémentaires, un contrat pour l'achat de l'énergie électrique produite par la centrale éolienne de Miquelon a été conclu par E.D.F. avec la société VERGNET ARCHIPEL le 29 octobre 1999 ; que la société VERGNET ARCHIPEL interjette appel du jugement en date du 3 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Saint-Pierre et Miquelon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société E.D.F. à l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'inexécution des stipulations financières du contrat d'achat et du comportement fautif de la société E.D.F. qui aurait volontairement limité le recours à l'énergie électrique d'origine éolienne ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative dans sa rédaction en vigueur à la date du jugement : La décision mentionne que l'audience a été publique, sauf s'il a été fait application des dispositions de l'article L. 731-1. Dans ce dernier cas, il est mentionné que l'audience a eu lieu ou s'est poursuivie hors la présence du public. Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. Mention y est faite que le rapporteur et le commissaire du gouvernement et, s'il y a lieu, les parties, leurs mandataires ou défenseurs ainsi que toute personne entendue sur décision du président en vertu du deuxième alinéa de l'article R. 731-3 ont été entendus. Mention est également faite de la production d'une note en délibéré.(...) ;

Considérant que le juge administratif ne peut être valablement saisi d'une note en délibéré que si elle est enregistrée avant la date de lecture de la décision ; que la note en délibéré produite par la société VERGNET ARCHIPEL, dont il ne ressort pas des pièces du dossier de première instance qu'elle aurait été annoncée par télécopie adressée au tribunal administratif de Saint-Pierre et Miquelon le 30 septembre 2008, n'a été enregistrée au greffe de ce tribunal que le 7 octobre 2008 soit postérieurement à la lecture du jugement le 3 octobre 2008 ; que, par suite, cette note en délibéré a pu, sans entacher le jugement d'irrégularité, ne pas être visée ;

Considérant, en deuxième lieu, que si la société VERGNET ARCHIPEL soutient que le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen tiré du comportement fautif adopté par la société E.D.F. dans l'exécution du contrat d'achat, en n'optimisant pas l'utilisation de l'énergie produite par les éoliennes dans le réseau électrique de Saint-Pierre et Miquelon, il résulte de l'instruction que le jugement relève que le contrat du 29 octobre 1999 prévoyait expressément des réserves au prélèvement d'électricité éolienne par E.D.F. qui ne pouvait donc être considérée comme s'étant engagée à rémunérer en toutes circonstances toute la quantité d'énergie d'origine éolienne disponible et que la société VERGNET ARCHIPEL n'établissait pas qu'E.D.F. aurait failli à ses obligations contractuelles ; que, par suite, le tribunal ayant écarté l'ensemble des moyens présentés, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement manque en fait ;

Sur la responsabilité :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 des conditions générales du contrat conclu le 29 octobre 1999 pour l'achat de l'énergie électrique produite par la centrale éolienne de Miquelon : Le producteur s'engage à livrer toute sa production à E.D.F. (...) E.D.F. s'engage à prélever et à rémunérer toute l'énergie produite disponible, dans la limite de la puissance indiquée aux conditions particulières, sous réserve qu'il n'en résulte aucune entrave au bon fonctionnement technique des réseaux et sous les réserves de disponibilité du réseau d'accueil précisées à l'article 6 des conditions particulières. ; que l'article 5 des conditions particulières du même contrat prévoit que : le producteur s'engage sur la livraison à E.D.F. d'une production annuelle égale à 1 700 000 kWh ; que l'article 8 de ces conditions générales prévoit la rémunération de l'énergie électrique au prorata des kWh livrés sur le réseau E.D.F. sur la base d'un prix exprimé en cF/kWh indiqué au paragraphe 7.1 des conditions particulières ; qu'enfin l'article 9 des mêmes conditions générales prévoit le versement d'une prime annuelle de capacité calculée sur la base de l'engagement de production annuelle pris par le producteur et affectée d'un bonus ou d'un malus en fonction du respect de la quantité d'énergie effectivement fournie ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des stipulations précitées du contrat du 29 octobre 1999, qui prévoient d'une part, des réserves à l'obligation de prélèvement de l'énergie électrique d'origine éolienne en cas d'entrave au bon fonctionnement des réseaux et d'autre part, une rémunération au prorata des kWh effectivement livrés sur le réseau électrique, qu'E.D.F. ne s'est engagée à rémunérer que l'énergie électrique produite par la centrale éolienne, effectivement prélevée et livrée sur le réseau électrique de Saint-Pierre et Miquelon, et non l'ensemble de la production annuelle de référence que la société VERGNET ARCHIPEL s'est engagée à lui livrer aux termes de l'article 5 des conditions particulières ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la société E.D.F. devait, en application des stipulations financières de ce contrat, lui payer chaque année toute l'énergie électrique disponible dans la limite de 1.700.000 kWh ;

Considérant, en second lieu, que la société VERGNET ARCHIPEL soutient que la société E.D.F. a méconnu ses engagements contractuels en ce qui concerne l'optimisation du recours à l'énergie éolienne, en favorisant la livraison de l'énergie électrique produite par la centrale électrique regroupant les moteurs Diesel qu'elle gère, au détriment de l'énergie produite par les éoliennes ; qu'elle soutient avoir subi un préjudice économique et commercial du fait du comportement fautif de la société E.D.F. qui aurait, volontairement et sans raison, limité l'introduction de l'énergie produite par les éoliennes dans le réseau électrique de Saint-Pierre ;

Considérant, d'une part, qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, l'article 4 des conditions générales du contrat prévoit que l'engagement de prélèvement de l'énergie éolienne de l'acheteur se fait sous réserve du bon fonctionnement technique des réseaux et sous les réserves de disponibilité du réseau d'accueil ; que si la société VERGNET ARCHIPEL se prévaut du protocole d'accord établi entre les parties le 22 janvier 1998 et dont l'objet est de préciser les limites de fourniture dans le développement puis l'exploitation du projet et définir les règles de fonctionnement de l'ensemble du système éolien /diesel dans le système électrique de Miquelon, tant au niveau de la ferme éolienne que de la centrale E.D.F. , il résulte des stipulations de ce document que l'insertion de la ferme éolienne dans le réseau ne doit pas modifier les conditions d'exploitation technique de la centrale électrique ni dégrader le niveau de qualité de l'offre de services par E.D.F. ; que ce protocole précise également que la puissance minimale de bon fonctionnement des groupes de moteurs Diesel est fixée à 50 % de leur puissance nominale et que l'injection de la production éolienne dans le réseau peut être optimisée en faisant fonctionner un groupe de plus faible puissance que celui normalement utilisé ; qu'ainsi, l'optimisation de la production éolienne ne constitue qu'une faculté et n'est prévue que sous réserve du maintien de la qualité des services fournis par E.D.F. aux usagers ; que l'étude technique réalisée en janvier 1999 sur le fonctionnement d'un système mixte éolien/diesel, dont se prévaut la requérante, précise expressément que les limites de ce système sont dictées par le maintien de la qualité de fourniture du service et les règles d'exploitation des moyens de production et que le raccordement d'un site éolien à un réseau insulaire de faible puissance, tel celui de Saint-Pierre et Miquelon, est de nature à provoquer des perturbations gênantes pour les usagers ; que ce document conclut en outre à la nécessité d'investigations complémentaires ; que si la société VERGNET ARCHIPEL fait valoir qu'aux termes de l'article 3 du contrat du 29 octobre 1999, un document technique devait être établi entre les parties pour définir les consignes d'exploitation du système mixte et les responsabilités des parties sur ce point, il résulte de l'instruction qu'aucun document de ce type n'a jamais été rédigé et que la société VERGNET ARCHIPEL n'a jamais sollicité E.D.F. sur ce point avant de lui adresser une mise en demeure en février 2009 ;

Considérant, d'autre part, qu'ainsi que l'a estimé à juste titre le tribunal administratif, le contrat d'achat conclu le 29 octobre 1999, qui doit être regardé comme l'expression des engagements réciproques des parties, prévoit expressément des réserves au prélèvement et à l'injection de l'énergie électrique d'origine éolienne dans le réseau de Saint-Pierre et Miquelon en cas de troubles dans le fonctionnement du réseau ; que la société VERGNET ARCHIPEL qui avait connaissance, des contraintes d'exploitation du réseau électrique de Saint-Pierre et Miquelon, compte tenu de sa taille limitée, et notamment de la nécessité d'assurer la qualité de fourniture du service fourni aux usagers ne conteste pas la nécessité pour E.D.F. d'assurer une réserve primaire d'énergie par l'utilisation de moteurs de forte puissance pour pallier le caractère intermittent de l'énergie éolienne ; que cette société n'ignorait pas les contraintes de bon fonctionnement des groupes de moteurs Diesel de la centrale électrique gérée par E.D.F. ; que par suite, la société VERGNET ARCHIPEL n'établit pas qu'en limitant le recours à l'énergie éolienne dans le réseau électrique de Saint-Pierre et Miquelon, la société E.D.F., dont il ne résulte pas de l'instruction qu'elle ne maîtrisait pas les réglages des moteurs Diesel de sa centrale, aurait méconnu la portée de ses engagements contractuels dans des conditions lui ouvrant droit à réparation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société VERGNET ARCHIPEL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Saint-Pierre et Miquelon a rejeté sa demande ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société E.D.F., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, quelque somme que ce soit au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu' il y a lieu, en revanche, de condamner la société VERGNET ARCHIPEL à verser à la société E.D.F. la somme de 1.500 euros sur le fondement du même article ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société VERGNET ARCHIPEL est rejetée.

Article 2 : La société VERGNET ARCHIPEL versera à la société E.D.F. la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

''

''

''

''

5

No 08BX03313


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08BX03313
Date de la décision : 04/02/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: Mme Evelyne BALZAMO
Rapporteur public ?: M. ZUPAN
Avocat(s) : CABINET CGR LEGAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-02-04;08bx03313 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award