La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/11/2016 | FRANCE | N°14BX03602

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 29 novembre 2016, 14BX03602


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Girardin Max Ameublement a demandé au tribunal administratif de Saint-Pierre-et-Miquelon la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contributions supplémentaires qu'elle a acquittés au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1400013 du 14 octobre 2014, le tribunal administratif de Saint-Pierre-et-Miquelon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 19 décembre 2014, 17 juin 2015 et 2 septembre 201

5, la SARL Girardin Max Ameublement, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Girardin Max Ameublement a demandé au tribunal administratif de Saint-Pierre-et-Miquelon la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contributions supplémentaires qu'elle a acquittés au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1400013 du 14 octobre 2014, le tribunal administratif de Saint-Pierre-et-Miquelon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 19 décembre 2014, 17 juin 2015 et 2 septembre 2015, la SARL Girardin Max Ameublement, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Saint-Pierre-et-Miquelon du 14 octobre 2014 ;

2°) de la décharger des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contributions supplémentaires qu'elle a acquittés au titre de l'année 2012 ;

3°) de mettre à la charge de la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon la somme de 10 000 euros au titre de l'article l. 761-1 du code de justice administrative.

..........................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- le code local des impôts de Saint-Pierre-et-Miquelon et le livre des procédures fiscales de Saint-Pierre-et-Miquelon ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- la circulaire du premier ministre du 23 mai 2011 relative aux dates communes d'entrée en vigueur des normes concernant les entreprises ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christine Mège,

- et les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Girardin Max Ameublement a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant en matière de bénéfice industriel et commercial, sur l'exercice clos en 2012. A la suite de cette vérification, le service a procédé à la réintégration dans les bénéfices imposables au titre de cette année des provisions passées en vue du versement des allocations de départ en retraite ou préretraite du personnel. La société requérante relève appel du jugement n° 1400013 du 14 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Saint-Pierre-et-Miquelon a rejeté sa demande de décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contributions supplémentaires qu'elle a acquittés au titre de l'année 2012 .

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article 212 du code local des impôts de Saint-Pierre-et-Miquelon : " En cas de procédure de redressement contradictoire lorsque le désaccord persiste entre la direction des services fiscaux et le contribuable, il peut être soumis à la commission locale des impôts directs. I. La commission locale des impôts directs intervient lorsque le désaccord porte : 1° sur le montant du résultat industriel et commercial, non commercial, agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition ; 2° sur le caractère de rémunérations excessives versées aux dirigeants de sociétés : Cette commission n'est pas compétente pour connaître des questions de droit. II. (...) Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, la commission peut se prononcer sur le caractère anormal d'un acte de gestion, sur le principe et le montant des amortissements et des provisions ainsi que sur le caractère de charges déductibles des travaux immobiliers. ".

3. Alors que la société Girardin Max Ameublement avait demandé à ce que la commission départementale des impôts directs soit saisie du désaccord persistant entre elle et la direction des services fiscaux quant à la réintégration dans les bénéfices imposables des provisions passées en vue du versement des allocations de départ en retraite ou préretraite du personnel, l'administration a rejeté cette demande le 30 octobre 2013 au motif de l'incompétence de cette commission pour connaître d'une question de droit. Il résulte de l'instruction que le désaccord portait exclusivement sur la détermination de la date d'entrée en vigueur des dispositions du 4° de l'article 26 du code local des impôts, sur le caractère éventuellement rétroactif de l'application de la loi fiscale, ainsi que sur l'applicabilité immédiate de ces dispositions. Un tel désaccord porte sur des questions de droit n'ayant trait ni au principe ni au montant des provisions et, dès lors, ne relève pas des exceptions prévues au II de l'article 212 du code local des impôts précité à l'incompétence de principe de la commission pour connaître des questions de droit. Par suite, en ne soumettant pas ce désaccord à la commission, l'administration fiscale n'a entaché la procédure d'imposition d'aucune irrégularité.

Sur le bien-fondé des impositions :

4. Pour procéder à la réintégration dans les bénéfices imposables de la société Girardin Max Ameublement au titre de l'année 2012 des provisions passées en vue du versement des allocations de départ en retraite ou préretraite du personnel, l'administration a fait application des dispositions du 4° de l'article 26 du code local des impôts dans leur version issue de la délibération du conseil territorial de Saint-Pierre-et-Miquelon du 17 décembre 2012. Elle a en outre imposé la société requérante au prorata des parts détenues dans la SNC SPM Engineering par suite du redressement du bénéfice déclaré de cette dernière après réintégration des mêmes provisions.

En ce qui concerne la date d'entrée en vigueur de ces dispositions :

5. En premier lieu, seul l'article 2 de cette délibération, qui procède à la modification d'autres dispositions du code local des impôts, mentionne que " ces dispositions sont applicables à compter du 1er janvier 2013 ". L'insertion de cette mention dans le seul article 2 indique de manière suffisamment claire que seules les dispositions du code local des impôts modifiées par cet article 2 entreraient en vigueur au 1er janvier 2013. Par suite la société Girardin Max Ameublement n'est fondée ni à invoquer la méconnaissance par ces dispositions de l'objectif à valeur constitutionnelle de clarté et d'intelligibilité de la norme ni à soutenir que la délibération prévoit une entrée en vigueur différée au 1er janvier 2013. Elle ne peut non plus utilement se prévaloir des dispositions de la circulaire du premier ministre du 23 mai 2011 relative aux dates communes d'entrée en vigueur des normes concernant les entreprises qui ne vise que les actes règlementaires pris par les autorités de l'Etat.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 74 de la Constitution : " Les collectivités d'outremer régies par le présent article ont un statut qui tient compte des intérêts propres de chacune d'elles au sein de la République ; Ce statut est défini par une loi organique, adoptée après avis de l'assemblée délibérante, qui fixe : - les conditions dans lesquelles les lois et règlements y sont applicables ; -les compétences de cette collectivité ; sous réserve de celles déjà exercées par elle, le transfert de compétences de l'Etat ne peut porter sur les matières énumérées au quatrième alinéa de l'article 73, précisées et complétées, le cas échéant, par la loi organique ". La possibilité pour la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon d'intervenir en matière législative en application de l'article LO 6414-1 du code général des collectivités territoriales, est sans influence sur la nature de ses délibérations qui demeurent.... En application des articles LO 6451-1 et LO 6451-3 du code général des collectivités territoriales, les délibérations du conseil territorial prises en matière réglementaire sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication au Journal officiel de Saint-Pierre-et-Miquelon, (...) ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'État.

7. Il est constant que la délibération n° 250/2012 du conseil territorial de Saint-Pierre-et-Miquelon du 17 décembre 2012 a été transmise au représentant de l'État le 18 décembre 2012 et a été publiée au Journal officiel de Saint-Pierre-et-Miquelon le 31 décembre 2012. Par suite, ces dispositions sont entrées en vigueur le 31 décembre 2012.

En ce qui concerne le moyen tiré de la violation du principe de non-rétroactivité des actes administratifs :

8. Il résulte des dispositions des articles 20, 21 et 113 du code local des impôts que la clôture de l'exercice comptable constitue le fait générateur de l'impôt sur les sociétés. Entrées en vigueur le 31 décembre 2012, les dispositions du 4° de l'article 212 du code local des impôts, dans leur version issue de la délibération n° 250/2012, s'appliquaient dès lors pour l'imposition des bénéfices des exercices clos à cette même date sans qu'y fasse obstacle la circonstance, au demeurant non démontrée, que la société Girardin Max Ameublement aurait procédé à la constitution des provisions pour versement des allocations de départ en retraite et préretraite antérieurement à cette date. L'application de ce nouveau régime fiscal aux bénéfices de la société Girardin Max Ameublement au titre de l'année 2012 ne revêt dès lors pas de caractère rétroactif.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence de mesures transitoires :

9. L'exercice du pouvoir réglementaire implique pour son détenteur la possibilité de modifier à tout moment les normes qu'il définit sans que les personnes auxquelles sont, le cas échéant, imposées de nouvelles contraintes puissent invoquer un droit au maintien de la réglementation existante. En principe, les nouvelles normes ainsi édictées ont vocation à s'appliquer immédiatement, dans le respect des exigences attachées au principe de non-rétroactivité des actes administratifs. Toutefois, il incombe à l'autorité investie du pouvoir réglementaire, agissant dans les limites de sa compétence et dans le respect des règles qui s'imposent à elle, d'édicter, pour des motifs de sécurité juridique, les mesures transitoires qu'implique, s'il y a lieu, cette réglementation nouvelle. Il en va ainsi lorsque l'application immédiate de celle-ci entraîne, au regard de l'objet et des effets de ses dispositions, une atteinte excessive aux intérêts publics ou privés en cause. Ces mesures transitoires peuvent résider dans le report de l'entrée en vigueur de cette réglementation nouvelle.

10. Il ne résulte ni de l'objet même de la réglementation, ni de la circonstance que toutes les sociétés ayant pratiqué de telles provisions sont concernées, ni du montant de 18 819 euros de redressements hors pénalités qui en ont découlé pour la société Girardin Max Ameublement, que l'application immédiate de ces nouvelles dispositions aient porté une atteinte excessive aux intérêts de la société requérante. Par suite, contrairement à ce que soutient la société Girardin Max Ameublement, le conseil territorial n'était pas tenu de reporter l'entrée en vigueur des dispositions du 4° de l'article 26 du code local des impôts.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la société Girardin Max Ameublement n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Pierre-et-Miquelon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la société Girardin Max Ameublement le versement à la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon une somme de 200 euros au même titre.

DECIDE

Article 1er : La requête de la SARL Girardin Max Ameublement est rejetée.

Article 2 : La SARL Girardin Max Ameublement versera la somme de 200 euros à la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

N° 14BX03602


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14BX03602
Date de la décision : 29/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Application dans le temps - Entrée en vigueur - Entrée en vigueur immédiate.

Actes législatifs et administratifs - Application dans le temps - Rétroactivité - Absence de rétroactivité.

Outre-mer - Droit applicable - Lois et règlements (hors statuts des collectivités) - Collectivités d'outre-mer et Nouvelle-Calédonie - Saint-Pierre et Miquelon.


Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: Mme Christine MEGE
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : GERBET

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-11-29;14bx03602 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award