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01/12/2016 | FRANCE | N°15BX03699

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 01 décembre 2016, 15BX03699


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Realco, la société Construction Saint-Eloi, le groupement Rouzes-Etp, la société Etp, la société Del Tedesco, la société Comey, le groupement Roudie-Sol Français, la société Sol français, la société Cfa, la société Eiffage Energie Termie Sud-ouest et la société Id Verde anciennement Iss Espaces Verts ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse d'ordonner une mesure d'expertise, au contradictoire de l'Université Toulouse 1 Capitole, aux fins pour l'exper

t de se prononcer sur la nature et l'étendue des difficultés rencontrées dans l'établis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Realco, la société Construction Saint-Eloi, le groupement Rouzes-Etp, la société Etp, la société Del Tedesco, la société Comey, le groupement Roudie-Sol Français, la société Sol français, la société Cfa, la société Eiffage Energie Termie Sud-ouest et la société Id Verde anciennement Iss Espaces Verts ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse d'ordonner une mesure d'expertise, au contradictoire de l'Université Toulouse 1 Capitole, aux fins pour l'expert de se prononcer sur la nature et l'étendue des difficultés rencontrées dans l'établissement des études d'exécution du chantier de l'école d'économie de Toulouse, d'en déterminer les causes, de se prononcer sur les conséquences techniques sur les autres corps d'état des modifications des études d'exécution du lot gros oeuvre, et de fournir tout élément utile à la fixation du préjudice subi par les titulaires des lots n°5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12 et 13 résultant du retard engendré.

Par une ordonnance n° 1502895 du 3 novembre 2015, le président du tribunal administratif de Toulouse, statuant en référé, a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 novembre 2015, la société Realco, la société Construction Saint-Eloi, le groupement Rouzes-Etp, la société Etp, la société Del Tedesco, la société Comey, le groupement Roudie-Sol Français, la société Sol français, la société Cfa, la société Eiffage Energie Termie Sud-ouest et la société Id Verde anciennement Iss Espaces Verts, représentés par la scp Salesse et associés, demandent au juge d'appel des référés :

1°) d'annuler cette ordonnance du 3 novembre 2015 ;

2°) de prescrire la mesure d'expertise sollicitée.

Ils soutiennent que :

- la demande d'expertise présente un caractère d'utilité, dès lors qu'il s'agit de déterminer les responsabilités encourues dans la réalisation de leurs préjudices, d'en fixer le montant, et de proposer des solutions techniques de reprise sur leur lots respectifs ; le retard d'avancement du chantier, puis son ajournement, imputables à la défaillance du bureau d'études techniques dans la réalisation des études d'exécution, dont le marché a été résilié, ainsi que la modification des plans de la structure de l'ouvrage, entraîneront nécessairement une modification des conditions d'exécution de leur marché et des contraintes techniques pour leurs lots respectifs, alors même qu'une transaction conclue entre l'Université Toulouse 1 Capitole et la société Eiffage Construction Midi-Pyrénées confie à cette dernière la réalisation des études d'exécution relative à la structure et que les travaux ont repris le 14 septembre 2015 pour le lot gros-oeuvre ;

- la demande d'expertise présente un caractère d'utilité, dès lors qu'elle n'a pas le même objet que l'expertise sollicitée en référé dans le cadre de l'instance n°15BX01465 ayant donné lieu à l'arrêt de la cour du 23 décembre 2015, et ne concerne pas les mêmes intervenants ;

- la circonstance que l'ordonnance rendue le 15 avril 2015 par le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse ait fait l'objet d'un appel n'est pas un obstacle à ce que la présente demande d'expertise présente un caractère d'utilité.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 janvier 2016, l'Université Toulouse 1 Capitole, représentée par MeA..., conclut, à titre principal, au rejet de la requête de la société Realco et autres pour irrecevabilité, à titre subsidiaire, au rejet de la requête de la société Realco et autres comme étant mal fondée et, à titre infiniment subsidiaire, s'il était fait droit à la mesure d'expertise sollicitée, à ce que la mission d'expertise soit complétée en confiant à l'expert mission de se prononcer sur l'indemnisation des entreprises titulaires des différents marchés de travaux pour le préjudice subi par celles-ci du fait de l'ajournement des travaux, sur l'augmentation du coût des marchés de prestations intellectuelles dont la durée d'exécution doit être prolongée, sur l'incidence pour elle des pertes de financement par le Fonds européen de développement régional (FEDER) du fait des retards pris par le chantier, et sur l'ensemble des préjudices subis et imputables à l'exécution défaillante du marché de maîtrise d'oeuvre concerné, et à ce qu'il soit mise à la charge des sociétés requérantes la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable, dès lors qu'une demande d'expertise ayant le même objet a précédemment été rejetée par la cour, par un arrêt du 23 décembre 2015, et qu'elle méconnaît ainsi l'autorité de la chose jugée ;

- la mesure d'expertise sollicitée ne présente pas un caractère d'utilité, dès lors l'intervention d'un expert serait prématurée eu égard à l'état d'avancement des travaux ;

- la mesure d'expertise sollicitée ne présente pas un caractère d'utilité, dès lors qu'un protocole d'accord conclu avec la société Eiffage Construction Midi-Pyrénées, le 6 mai 2015, rend sans objet la plupart des missions de l'expert, portant sur la question de la reprise des travaux, et que les travaux ont effectivement repris ;

- la mission consistant à confier à un expert la mission de se prononcer sur les responsabilités encourues et sur la détermination des préjudices subis, porte sur une question de droit qui ne peut être confiée à un expert, et alors que les sociétés requérantes sont à même de chiffrer leurs propres préjudices.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Le président de la cour a désigné par une décision du 1er septembre 2016 M. Pierre Larroumec, président de chambre, comme juge des référés en application des dispositions du livre V du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre de la construction de l'école d'économie de Toulouse, l'université Toulouse 1 Capitole, assistée par la société Athegram en qualité d'assistant maître d'ouvrage, en a confié la maîtrise d'oeuvre à un groupement constitué du cabinet d'architecte de droit irlandais Grafton, mandataire du groupement, et du bureau d'études RFR. Pour la réalisation de leur mission, le cabinet Grafton a sous-traité au cabinet Vigneu et Zilio l'exécution de la mission DET, et la société RFR a sous-traité à la société Rfr Go+ la mission " EXE ", comprenant notamment l'établissement de toutes les études d'exécution. La réalisation du lot n°1 " gros oeuvre " ainsi que le lot n° 2 B " revêtement sur étanchéité ", a été confié à la société Eiffage. Le retard dans la remise des études d'exécution et de synthèse, et les erreurs dans les études fournies ont, le 11 septembre 2014, conduit le maître d'ouvrage à prononcer l'ajournement des travaux à compter du 29 septembre 2014 jusqu'au 5 janvier 2015, date reculée jusqu'au début du mois d'avril 2015. Le 21 juillet 2014 un premier état estimatif des préjudices que la société Eiffage Construction Midi-Pyrénées estime avoir subi du fait de ces retards a été adressé au maître d'ouvrage. La société Eiffage Construction Midi-Pyrénées a fait appel de l'ordonnance du 15 avril 2015 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'expertise, à laquelle ont été attraits les sociétés et groupements requérants, à la demande de l'Université Toulouse 1 Capitole, aux fins pour l'expert de se prononcer sur les désordres rencontrés dans le cadre de la construction de l'école d'économie de Toulouse. Dans son arrêt du 23 décembre 2015, la cour, après avoir annulé l'ordonnance attaquée, a renvoyé l'affaire devant le juge de première instance. Par une ordonnance du 3 novembre 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande d'expertise sollicitée par la société Realco et autres au motif de son caractère prématuré. La société Realco, la société Construction Saint-Eloi, le groupement Rouzes-Etp, la société Etp, la société Del Tedesco, la société Comey, le groupement Roudie-Sol Français, la société Sol français, la société Cfa, la société Eiffage Energie Termie Sud-ouest et la société Id Verde, relèvent appel de cette dernière ordonnance.

2. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction (...) ". Il appartient, en vertu de ces dispositions, au juge des référés saisi d'une demande d'expertise de rechercher dans quelle mesure cette expertise peut être utile à la solution d'un éventuel litige, en tenant compte, notamment, de l'existence d'une perspective contentieuse recevable, des possibilités ouvertes au demandeur pour arriver au même résultat par d'autres moyens, de l'intérêt de la mesure pour le contentieux né ou à venir.

3. Si l'Université Toulouse 1 Capitole oppose à la demande des requérants l'exception de chose jugée dès lors que le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande d'expertise présentée devant lui par la société Eiffage construction Midi-Pyrénées mettant en cause les mêmes constructeurs et portant sur les mêmes désordres, les ordonnances du juge des référés sont dépourvues de l'autorité de la chose jugée en raison de leur caractère provisoire. Dès lors, l'université ne peut utilement invoquer cette exception pour soutenir que la requête présentée par les requérants est irrecevable.

4. Il résulte de l'instruction que l'Université Toulouse 1 Capitole a conclu avec la société Eiffage une transaction, signée le 6 mai 2015, par laquelle cette dernière s'engage à reprendre les travaux au plus tard le 28 septembre 2015, alors que l'université s'engage à lui verser la somme de 308 783 euros au titre des études réalisées avant le 29 septembre 2014 ainsi qu'une indemnité définitive et irrévocable, pour ajournement des travaux du 29 septembre 2014 à la date de reprise des travaux, pour un montant total de 2 313 221 euros. Toutefois, son article 3 indique que " Pour les autres chefs de préjudices subis par Eiffage Construction Midi-Pyrénées ou le maître de l'ouvrage (...) pour le règlement de tout autre différend, les parties se réservent le droit d'exercer ou de poursuivre toute action juridictionnelle qu'elles estimeront utile (...) " tandis que son article 4 précise qu' " en cas de désaccord entre l'entreprise et la maîtrise d'oeuvre sur le prix et/ou le délai de réalisation de ce travaux, les parties conviennent de recourir à un tiers expert choisi d'un commun accord. ". Il résulte de ces stipulations que cette transaction, qui n'a pas procédé au règlement financier de l'ensemble des points litigieux du marché, n'est pas de nature à priver d'utilité la demande d'expertise présentée par les sociétés et groupements requérants, qui n'étaient pas au demeurant parties à cette transaction.

5. Les requérants demandent que soit désigné un expert à l'effet de décrire la nature et l'étendue des difficultés rencontrées pour l'établissement des études d'exécution du chantier de l'école d'économie de Toulouse, d'en déterminer les causes, de décrire les conséquences techniques des modifications des études d'exécution du lot gros oeuvre sur les autres corps d'état, de fournir au tribunal tout élément utile à la fixation du préjudice subi par les titulaires des lots n° 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, et 13, résultant du retard engendré et des conséquences de l'ajournement prononcé. Eu égard à l'état d'avancement du chantier, Les requérants n'établissent toutefois pas que les conditions dans lesquelles ils seront amenés à effectuer les travaux et les difficultés qu'ils pourraient éventuellement rencontrer ne pourraient être recherchées que par un homme de l'art, ni qu'ils ne seraient pas en mesure de déterminer leurs conséquences, notamment en terme de coût. Il leur appartient, en tout état de cause, de déterminer les éléments de leur préjudice et de justifier de leur évaluation. Enfin, les sociétés et groupements requérants soutiennent qu'ils n'ont aucune garantie de prise en compte de leur préjudice futur par la maîtrise d'ouvrage ou par la maîtrise d'oeuvre compte tenu notamment de l'absence d'information sur l'incidence des études d'exécution relatives à la structure de l'ouvrage, dont la réalisation a été confiée à la société Eiffage, sur l'économie du marché et sur ses conditions d'exécution. Toutefois, les risques de préjudices futurs, qui ne sont pas établis, ne peuvent pas être regardés comme se rattachant à une perspective contentieuse qui conférerait un caractère d'utilité à la mesure sollicitée.

6. Il résulte de ce qui précède qu'en estimant que l'expertise sollicitée par les requérants ne présentait pas le caractère d'utilité exigé par les dispositions précitées de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse n'a pas entaché son ordonnance d'erreur d'appréciation. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des sociétés et groupements requérants la somme que demande l'Université Toulouse 1 Capitole sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de la société Realco, de la société Construction Saint-Eloi, du groupement Rouzes-Etp, de la société Etp, de la société Del Tedesco, de la société Comey, du groupement Roudie-Sol Français, de la société Sol français, de la société Cfa, de la société Eiffage Energie Termie Sud-ouest et de la société Id Verde, anciennement Iss Espaces Verts, est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'Université Toulouse 1 Capitole présentées au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Realco, à la société Construction Saint-Eloi, au groupement Rouzes-Etp, à la société Etp, à la société Del Tedesco, à la société Comey, au groupement Roudie-Sol Français, à la société Sol français, à la société Cfa, à la société Eiffage Energie Termie Sud-ouest et à la société Id Verde et à l'Université Toulouse 1 Capitole. Copie en sera transmise pour information à la société Athegram Amo et à Grafton Architects.

Fait à Bordeaux, le 1er décembre 2016.

Le juge d'appel des référés,

Pierre Larroumec

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

2

N°15BX03699


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 15BX03699
Date de la décision : 01/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-011-04 Procédure. Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé tendant au prononcé d'une mesure d'expertise ou d'instruction. Conditions.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP SALESSE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-12-01;15bx03699 ?
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