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13/12/2016 | FRANCE | N°14BX03219

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 13 décembre 2016, 14BX03219


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La communauté de communes de la Ténarèze a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner solidairement, sur le fondement de la garantie décennale, Mme H...D..., la société Polymidi, la SA Diffazur Piscines et la société de travaux publics et agricoles Gers (STPAG), à réparer les préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des désordres affectant le centre aqualudique dont elle leur avait confié la construction, situé sur le territoire de la commune de Condom (Gers).

Par un jugement n

° 1300111 du 18 septembre 2014, le tribunal administratif de Pau :

1°) a condamné ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La communauté de communes de la Ténarèze a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner solidairement, sur le fondement de la garantie décennale, Mme H...D..., la société Polymidi, la SA Diffazur Piscines et la société de travaux publics et agricoles Gers (STPAG), à réparer les préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des désordres affectant le centre aqualudique dont elle leur avait confié la construction, situé sur le territoire de la commune de Condom (Gers).

Par un jugement n° 1300111 du 18 septembre 2014, le tribunal administratif de Pau :

1°) a condamné solidairement la SA Diffazur Piscines, MmeD..., en sa qualité d'héritière de M. A...D..., et la société Polymidi à verser à la communauté de communes de la Ténarèze la somme de 4 655,75 euros TTC en réparation du désordre affectant le revêtement du bassin ludique ;

2°) a condamné solidairement la société Diffazur, MmeD..., en sa qualité d'héritière de M. A...D..., la société Polymidi et la société STPAG à verser à la communauté de communes de la Ténarèze les sommes de 6 738,54 euros TTC en réparation des désordres affectant le coude d'alimentation du bassin sportif, 5 675,24 euros TTC en réparation des désordres affectant le coude d'alimentation du bassin ludique, 3 471 euros TTC au titre des pertes d'exploitation ainsi que 8 273,92 euros TTC au titre des frais d'inspection générale des réseaux ;

3°) a partiellement fait droit aux conclusions des sociétés Polymidi, Diffazur Piscines et STPAG tendant à ce que Mme D...les relèvent indemnes des condamnations prononcées contre elles, dans les conditions et proportions fixées aux points 21 à 24 du jugement ;

4°) a mis à la charge solidaire des sociétés Polymidi, Diffazur Piscines et STPAG et Mme D...les frais de l'expertise ordonnée en référé, liquidés et taxés à la somme de 38 174,06 euros ainsi qu'une somme de 1 200 euros à verser à la communauté de communes de la Ténarèze au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 17 novembre 2014 et 29 octobre 2015, la SA Diffazur Piscines, représentée par MeE..., demande à la cour :

1°) à titre principal, de réformer ce jugement du 18 septembre 2014 du tribunal administratif de Pau en tant qu'il a prononcé des condamnations à son encontre ;

2°) à titre subsidiaire, si sa responsabilité devait être retenue, de limiter la condamnation prononcée au titre du dommage n° 1 affectant l'ouvrage litigieux à la somme de 3 588 euros TTC et de condamner la société de travaux publics et agricoles Gers (STPAG), le GIE Ceten Apave, Mme H...D..., en sa qualité d'héritière de M.D..., et la société Polymidi à la relever intégralement indemne et la garantir de toute condamnation ;

3°) de condamner la communauté de communes de la Ténarèze à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

..........................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code des marchés publics ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Axel Basset, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,

- et les observations de MeE..., représentant la SA Diffazur Piscines, de Me F..., représentant la société Eurovia Midi Pyrénées, et de MeC..., représentant le GIE Ceten Apave.

Considérant ce qui suit :

1. Par contrat du 18 mars 2003, la communauté de communes de la Ténarèze a confié à la société d'économie mixte Gers la maîtrise d'oeuvre déléguée d'un projet de construction d'un centre de loisirs aqualudique sur le territoire de la commune de Condom (Gers), d'une capacité d'accueil de 700 personnes maximum et comprenant un parking de 5 000 mètres carrés, trois bâtiments, un bassin sportif de 312,50 mètres carrés et un bassin ludique comprenant plusieurs zones ainsi que des plages et espaces de détente répartis respectivement sur des surfaces de 1 200 mètres carrés et 5 000 mètres carrés. Par acte d'engagement du 3 novembre 2003, la maîtrise d'oeuvre de cette opération a été confiée à un groupement solidaire constitué de M. A...D..., architecte et mandataire du groupement, la société Polymidi, bureau d'études techniques, M. B...G..., paysagiste, la société Soulas Etec, bureau d'études structures, et la société Pépin, bureau d'études fluides, le GIE Ceten Apave étant chargé pour sa part, par un marché de contrôle technique signé le 15 septembre 2003, de deux missions L et SEI portant sur la solidité des ouvrages et des éléments d'équipements indissociables ainsi que la sécurité des personnes dans les établissements recevant du public (ERP). L'exécution des travaux relatifs au lot n° B1 " gros oeuvre, étanchéité (bassin) " et au lot n° B3 " filtration, pompage, traitement " a été confiée à la SA Diffazur Piscines et celle portant sur le lot n° A2 " terrassement, VRD " à la société de travaux publics et agricoles Gers (STPAG), aux droits de laquelle vient la société Eurovia Midi Pyrénées. Peu après la réception des travaux, prononcée avec effet au 30 juin 2005, la communauté de communes de la Ténarèze a constaté, dès la mise en service de l'ouvrage, plusieurs désordres se traduisant notamment par des pertes d'eau importantes et une détérioration avancée du revêtement des bassins et margelles, puis des ruptures de canalisations se sont produites tant sur le bassin sportif que sur le bassin ludique. Après avoir obtenu la réalisation d'une expertise ordonnée par le juge des référés, dont le rapport a été déposé le 5 octobre 2010, la communauté de communes de la Ténarèze a saisi le tribunal administratif de Pau aux fins d'obtenir la condamnation solidaire des constructeurs concernés, sur le fondement de la garantie décennale, à lui verser diverses sommes en réparation de ses préjudices. Par un jugement n° 1300111 du 18 septembre 2014, ce tribunal a condamné solidairement la SA Diffazur Piscines, MmeD..., en sa qualité d'héritière de M. A...D..., et la société Polymidi à verser à la communauté de communes la somme de 4 655,75 euros TTC en réparation du désordre affectant le revêtement du bassin ludique. Il a également condamné solidairement ces trois constructeurs et la société STPAG à verser à la communauté de communes plusieurs indemnités en réparation des désordres affectant le coude d'alimentation du bassin sportif (6 738,54 euros TTC) et du bassin ludique (5 675,24 euros TTC) ainsi qu'au titre des pertes d'exploitation (3 471 euros) et des frais d'inspection générale des réseaux (8 273,92 euros), tout en faisant partiellement droit aux conclusions des sociétés Polymidi, Diffazur et STPAG tendant à ce que MmeD..., venant aux droits de M.D..., les relèvent indemnes des condamnations prononcées contre elles, dans les conditions et proportions fixées aux points 21 à 24 du jugement. Enfin, ce tribunal a mis à la charge solidaire des sociétés Polymidi, Diffazur et STPAG et MmeD..., venant aux droits de M.D..., les frais de l'expertise ordonnée en référé, taxés liquidés à la somme de 38 174,06 euros et une somme de 1 200 euros à verser à la communauté de communes de la Ténarèze au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2. La société Diffazur Piscines, qui, seule, a contesté le jugement dans le délai d'appel et qui est donc le seul appelant principal, demande, à titre principal, de réformer le jugement du 18 septembre 2014 du tribunal administratif de Pau en tant qu'il a prononcé des condamnations à son encontre et, à titre subsidiaire, de limiter la condamnation susceptible d'être prononcée au titre du dommage n° 1 affectant l'ouvrage à la somme de 3 588 euros TTC, et de condamner la société de travaux publics et agricoles Gers, le GIE Ceten Apave, Mme H...D..., en sa qualité d'héritière de M.D..., et la société Polymidi à la relever intégralement indemne et la garantir de toute condamnation. La société Eurovia Midi Pyrénées, venant aux droits de la société de travaux publics et agricoles Gers (STPAG), et la société Polymidi, demandent, par la voie de l'appel incident, à titre principal, de réformer ce jugement en tant qu'il a prononcé des condamnations à leur encontre et, à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où leur responsabilité serait retenue, de condamner les autres intervenants au chantier à les relever intégralement indemnes et les garantir de toute condamnation.

Sur le fond :

3. Il résulte des principes qui régissent la responsabilité décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans. En application de ces principes, est susceptible de voir sa responsabilité engagée de plein droit toute personne appelée à participer à la construction de l'ouvrage, liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage ou qui, bien qu'agissant en qualité de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, accomplit une mission assimilable à celle d'un locateur d'ouvrage, ainsi que toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire. Le constructeur dont la responsabilité est recherchée sur ce fondement ne peut en être exonéré, outre les cas de force majeure et de faute du maître d'ouvrage, que lorsque, eu égard aux missions qui lui étaient confiées, il n'apparaît pas que les désordres lui soient en quelque manière imputables. Il incombe enfin au juge administratif, lorsqu'est recherchée devant lui la responsabilité décennale des constructeurs, d'apprécier, au vu de l'argumentation que lui soumettent les parties sur ce point, si les conditions d'engagement de cette responsabilité sont ou non réunies et d'en tirer les conséquences, le cas échéant d'office, pour l'ensemble des constructeurs.

4. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal administratif de Pau, que les désordres affectant les bassins et réseaux du centre de loisirs aqualudique consistent, d'une part, en une dégradation du " plaster " (revêtement du sol) se traduisant par une abrasivité de l'enduit d'imperméabilisation des bassins et un soulèvement localisé de ce revêtement au fond du bassin ludique et, d'autre part, en une rupture des canalisations au niveau du coude d'alimentation et des deux jonctions gravitaires sur le collecteur de la goulotte extérieure du bassin sportif, et un percement du coude de l'extrémité du collecteur du bassin ludique.

En ce qui concerne la rupture du coude sur l'alimentation du bassin sportif :

S'agissant du caractère décennal de ce désordre :

5. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que le conduit d'alimentation en eau du bassin sportif localisé à proximité du " snack " s'est rompu au droit d'un coude enterré, conduisant à l'interruption de l'alimentation de ce bassin et à une perte importante d'eau. Contrairement à ce que font valoir les sociétés Eurovia et Polymidi, ce désordre, qui a rendu le bassin inutilisable et contraint le maître d'ouvrage à ordonner la fermeture de la piscine pendant trois jours (30 et 31 mai 2009, 1er juin 2009) aux fins de faire réaliser des travaux de réparation, est de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination et, par suite, est au nombre de ceux qui sont couverts par la garantie décennale.

S'agissant de l'imputabilité et du montant des travaux de réparation de ce désordre :

6. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que ce désordre a pour origine un mouvement du tuyau dans la tranchée lié à un défaut de calage. Il est imputable tant à la société de travaux publics et agricoles Gers (STPAG), aux droits de laquelle vient la société Eurovia Midi Pyrénées, chargée de la préparation du support lors du terrassement et du remblai, destiné à bloquer la canalisation à l'issue de la pose, qu'à la société Diffazur Piscines, qui, en sa qualité de titulaire des lots n° B1 " gros oeuvre, étanchéité bassin " et n° B3 " filtration, pompage, traitement ", était chargée de la pose de cet équipement. Ce désordre est également imputable à la société Polymidi et à M.D..., tous deux membres d'un groupement solidaire de maîtrise d'oeuvre chargé notamment, en vertu de l'acte d'engagement du 3 novembre 2003, d'une mission d'ordonnancement, de coordination et de pilotage du chantier.

7. Dès lors que, dans le cadre de la mise en oeuvre de la garantie décennale des constructeurs, la responsabilité de ceux-ci se trouve engagée, vis-à-vis du maître d'ouvrage, du seul fait de leur participation aux travaux à l'origine des dommages litigieux, les sociétés Eurovia, Diffazur et Polymidi ne peuvent utilement se prévaloir, pour tenter de s'exonérer de leur responsabilité, de ce qu'elles n'ont commis aucune faute ni davantage, des fautes commises éventuellement par d'autres constructeurs dans l'exercice de leurs missions.

8. Il résulte de ce qui précède que contrairement à ce que soutient l'appelante, c'est à bon droit que les premiers juges l'ont condamné solidairement avec la société Eurovia Midi Pyrénées, la société Polymidi et M. D...à verser à la communauté de communes de la Ténarèze la somme, non contestée en appel, de 6 738,54 euros en réparation des désordres affectant le coude d'alimentation du bassin sportif.

S'agissant du partage final des responsabilités des constructeurs fixé par le tribunal administratif au titre de ce désordre :

9. D'une part, les premiers juges ont relevé que " la rupture du coude d'alimentation trouve son origine dans un défaut de calage du tuyau dans la tranchée et à un tassement du remblai ; que la SA Diffazur Piscines a réalisé la pose de cette canalisation tandis que la société STPAG était chargée des travaux de terrassement et de remblais ; que, dans ces conditions, ce désordre engage, à titre principal, la responsabilité de ces deux sociétés ainsi qu'à un titre moindre, celle de Mme D...et de la société Polymidi, maîtres d'oeuvre ; que, dans ces conditions, la SA Diffazur Piscines est fondée à être relevée et garantie des condamnations solidaires prononcées contre elles, respectivement, par la société STPAG à hauteur du tiers, par Mme D...à hauteur du sixième et par la société Polymidi à hauteur du sixième ; que la société STPAG est fondée à être relevée et garantie des condamnations solidaires prononcées contre elles, respectivement, par la SA Diffazur Piscines à hauteur du tiers, par Mme D...à hauteur du sixième et par la société Polymidi à hauteur du sixième ; que la société Polymidi est fondée à être relevée et garantie des condamnations solidaires prononcées contre elles, respectivement, par la société STPAG à hauteur du tiers, par la SA Diffazur Piscines à hauteur du tiers et par Mme D...à hauteur du sixième ". En se bornant à soutenir qu'elle doit être relevée intégralement indemne et garantie de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre par les autres intervenants au chantier, la SA Diffazur Piscines, qui ne se prévaut d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif, ne remet pas utilement en cause l'appréciation portée par les premiers juges sur la part de responsabilité de chacun des constructeurs concernés. Il y a lieu, dès lors, en écartant ses moyens par adoption de ce motif pertinent retenu par les premiers juges, de rejeter sa demande de remise en cause du partage final des responsabilités des constructeurs ainsi fixé par le tribunal administratif au titre de ce désordre.

10. D'autre part, l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation dispose : " Le contrôleur technique est soumis, dans les limites de la mission à lui confiée par le maître de l'ouvrage à la présomption de responsabilité édictée par les articles 1792, 1792-1 et 1792-2 du code civil, reproduits aux articles L. 111-13 à L. 111-15, qui se prescrit dans les conditions prévues à l'article 2270 du même code reproduit à l'article L. 111-20. " Aux termes de l'article L. 111-23 du même code : " Le contrôleur technique a pour mission de contribuer à la prévention des aléas techniques susceptibles d'être rencontrés dans la réalisation des ouvrages. Il intervient à la demande du maître de l'ouvrage et donne son avis à ce dernier sur les problèmes d'ordre technique. Cet avis porte notamment sur les problèmes qui concernent la solidité de l'ouvrage et la sécurité des personnes. Il résulte de l'acte d'engagement signé le 15 septembre 2003 par la société Ceten Apave qu'elle était chargée, d'une part, d'une mission de type L relative à la solidité des ouvrages et des éléments d'équipements indissociables et, d'autre part, d'une mission de type SEI portant sur la sécurité des personnes dans les établissements recevant du public.

11. Ni la société Eurovia, qui se borne à faire valoir que l'expert a retenu à l'encontre du bureau de contrôle Ceten Apave une part de responsabilité à hauteur de 25 %, ni les sociétés Diffazur et Polymidi, qui appellent en garantie les autres constructeurs dans l'hypothèse où leur responsabilité serait retenue, n'établissent que la société Ceten Apave aurait commis une faute dans l'exercice de ses missions mentionnées au point 10. Il s'ensuit que leurs conclusions aux fins d'appel en garantie dirigées contre la société Ceten Apave ne peuvent qu'être rejetées.

En ce qui concerne la rupture des deux jonctions gravitaires sur le collecteur de la goulotte extérieure du bassin :

12. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, qu'une rupture de deux des huit pièces de raccordement sur le réseau hydraulique a entraîné une perte d'eau conséquente dans le bassin sportif. Toutefois, ce désordre n'a pas compromis le fonctionnement du bassin, la baignade ayant pu se poursuivre dès lors que six des huit raccordements de ce collecteur ainsi que le collecteur horizontal ont continué de fonctionner correctement. En outre, et contrairement à ce que fait valoir la communauté de communes de la Ténarèze, il n'est pas établi qu'il compromettrait la solidité de l'ouvrage. Par suite, et ainsi que l'a relevé à juste titre le tribunal, un tel désordre, qui ne revêt pas un caractère décennal, n'est pas de nature à engager la responsabilité des constructeurs sur ce fondement.

13. Il s'ensuit que les conclusions de la communauté de communes de la Ténarèze tendant à ce que la SA Diffazur Piscines, la société Eurovia Midi Pyrénées, Mme H...D...en sa qualité d'héritière de M. A...D..., la société Polymidi et le GIE Ceten Apave soient condamnés solidairement à lui verser la somme de 13 247,11 euros en réparation de ce désordre doivent en tout état de cause être rejetées.

En ce qui concerne le soulèvement localisé du " plaster " au fond du bassin ludique :

14. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que l'enduit d'imperméabilisation du bassin ludique n'est, localement, pas adhérent au support en béton, ce qui a conduit à un soulèvement de celui-ci et à l'apparition de cloques. Toutefois, l'expert a relevé que ce désordre, qui est très localisé sur le fond du bassin dès lors qu'il ne concerne qu'une surface d'environ 20 mètres carrés devant l'escalier principal et une surface moindre, de 10 mètres carrés environ, devant les toboggans, ne compromet pas la solidité de l'ouvrage. Il ne résulte en outre pas de l'instruction que ce désordre présenterait un danger pour les usagers du bassin dont s'agit ou un caractère évolutif ni, davantage, qu'il était, dans les circonstances de l'espèce, d'une gravité telle qu'il rendait l'ouvrage impropre à sa destination. D'ailleurs, il est constant que cette malfaçon a été réparée par des travaux appropriés d'un coût peu élevé par rapport au prix de revient de la construction. Par suite, ce désordre ne peut être regardé comme revêtant un caractère décennal.

15. Dès lors, et comme le soutient la SA Diffazur Piscines, c'est à tort que les premiers juges ont prononcé sa condamnation solidaire avec MmeD..., en sa qualité d'héritière de M. A... D..., et la société Polymidi, bureau d'études, à verser à la communauté de communes de la Ténarèze la somme de 4 655,75 euros en réparation des conséquences dommageables de ce désordre. Il s'ensuit qu'ainsi qu'elles le demandent, il y a lieu de décharger tant la SA Diffazur Piscines que la société Polymidi de la condamnation de 4 655,75 euros TTC prononcée à leur encontre par le tribunal.

En ce qui concerne le percement du coude de l'extrémité du collecteur du bassin ludique :

S'agissant du caractère décennal de ce désordre :

16. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que le coude situé à l'extrémité du collecteur du réseau gravitaire du bassin ludique a été perforé accidentellement puisque l'orifice a été colmaté grossièrement avec du mortier lequel s'est désagrégé du fait de l'agressivité de l'eau du bassin, ce qui a compromis l'étanchéité du collecteur, qui ne remplit plus son office, et entraîné des fuites d'eau. Ainsi, et contrairement à ce que font valoir les sociétés Eurovia et Polymidi, ce désordre est de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination et, par suite, est au nombre de ceux qui sont couverts par la garantie décennale.

S'agissant de l'imputabilité et du montant des travaux de réparation de ce désordre :

17. Il est vrai, comme le font valoir les sociétés Diffazur et Polymidi, que le rapport d'expertise, après avoir relevé que la perforation accidentelle du collecteur du bassin ludique semble avoir été provoquée par un choc avec un outil pointu à l'intérieur du coude, probablement avant le remblaiement et le calage du collecteur dès lors que le colmatage au mortier a débordé de l'extérieur du coude, n'a pas été en mesure de déterminer avec exactitude, qui, des intervenants au chantier, avait causé cette rupture. Toutefois, tant les sociétés Diffazur et STPAG que les maîtres d'oeuvre M. D...et la société Polymidi ont participé aux travaux de réalisation de cette partie d'ouvrage. Il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction, et notamment pas du rapport de l'expert, que ce désordre serait imputable, contrairement à ce que soutient la société Polymidi, à une faute du maître d'ouvrage, consistant à n'avoir pas procédé à un contrôle régulier de l'eau des bassins, ou, encore, à un cas de force majeure. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Pau a condamné solidairement les quatre constructeurs impliqués à verser à la communauté de communes de la Ténarèze la somme, là encore non contestée en appel, de 5 675,24 euros en réparation de ce désordre.

S'agissant du partage final des responsabilités des constructeurs fixé par le tribunal administratif au titre de ce désordre :

18. Ainsi qu'il vient d'être dit, le percement du coude d'alimentation du bassin ludique s'est produit alors qu'intervenaient sur le chantier les sociétés Diffazur et STPAG. Elles doivent donc être regardées comme ayant commis un manquement à leur obligation de bonne exécution des lots qui leur incombaient. En revanche, et contrairement à ce qu'ont relevé les premiers juges, il n'est pas établi par les sociétés Diffazur et STPAG que M. D...et la société Polymidi, membres d'un groupement de maîtrise d'oeuvre chargé d'une mission d'ordonnancement, de coordination et de pilotage du chantier et non d'une mission de surveillance de celui-ci, auraient, lors de ce percement accidentel, commis une quelconque faute. Il n'est pas davantage établi que le GIE Ceten Apave, chargé, ainsi qu'il a déjà été dit au point 10, d'une mission de type L relative à la solidité des ouvrages et des éléments d'équipements indissociables et d'une mission de type SEI portant sur la sécurité des personnes dans les établissements recevant du public, aurait commis une faute lors de la survenance de ce dommage. Il s'ensuit que les conclusions, présentées par les sociétés Diffazur et STPAG, tendant à ce que la société Polymidi et Mme H...D..., en sa qualité d'héritière de M.D..., ainsi que le GIE Ceten Apave les garantissent de la condamnation prononcée à leur encontre au titre de ce désordre, doivent être rejetées. Il y a lieu, en revanche, de condamner solidairement les deux entreprises Diffazur et STPAG à garantir et relever indemne la société Polymidi de cette condamnation, ainsi qu'elle le demande.

Sur les autres demandes indemnitaires de la communauté de communes de la Ténarèze :

19. La SA Diffazur Piscines soutient que les sommes mises à la charge solidaire des constructeurs en réparation des désordres au titre desquels leur responsabilité décennale a été engagée ne sauraient inclure les constats d'huissiers et les frais liés aux recherches de fuites. Il résulte toutefois de l'instruction que ces frais, qui ont permis d'établir la réalité et l'ampleur des désordres, ont présenté en l'espèce un caractère utile. Par suite, et ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, la communauté de communes de la Ténarèze était fondée à en demander le remboursement. Il en est de même des frais engagés par la communauté de communes aux fins de procéder à une inspection générale des réseaux, effectuée par la société SETEC, en sus de la recherche des fuites, dès lors que cette mission est directement en lien avec les désordres litigieux, et qui ont été chiffrés à la somme de 8 273,92 euros justifiée par des factures. Cette somme devra être prise en charge par les sociétés Diffazur, STPAG et Polymidi, compte tenu de leurs fautes respectives, conformément au partage final des responsabilités des constructeurs fixé par les premiers juges exposé au point 9.

20. De plus, en se bornant à soutenir qu'elle s'est rapprochée, dès le 29 juin 2009, de la communauté de communes afin de proposer son intervention à titre amiable que celle-ci a refusé initialement au motif qu'une autre entreprise intervenait déjà sur le chantier, avant de l'accepter finalement à la suite de l'envoi d'un devis du 22 avril 2010, la SA Diffazur Piscines ne remet pas sérieusement en cause l'existence du préjudice d'exploitation subi par le maître d'ouvrage lors de la fermeture du centre de loisirs aqualudique pendant trois jours (30 et 31 mai 2009, 1er juin 2009), chiffrée à la somme non contestée de 3 471 euros. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges l'ont condamnée solidairement à verser cette somme à la communauté de communes. Cette somme devra être prise en charge par les sociétés Diffazur, STPAG et Polymidi, compte tenu de leurs fautes respectives, conformément au partage final des responsabilités des constructeurs fixé par les premiers juges exposé au point 9.

21. En revanche, la communauté de communes de la Ténarèze n'apporte pas plus en appel qu'en première instance d'éléments de nature à justifier le préjudice d'image qu'elle allègue avoir subi auprès des usagers du centre de loisirs aqualudique du fait de la survenance des désordres litigieux. Par suite, ses conclusions tendant à la condamnation des constructeurs à lui verser la somme de 3 000 euros à ce titre ne peuvent en tout état de cause qu'être rejetées.

Sur les frais d'expertise et les dépens :

22. La communauté de communes de la Ténarèze reprend en appel ses conclusions tendant à la condamnation solidaire des constructeurs concernés à lui verser la somme totale de 38 174,06 euros au titre des frais d'expertise tels que taxés et liquidés dans l'ordonnance du président du tribunal administratif de Pau. Il résulte toutefois de l'instruction que, dans son jugement attaqué du 18 septembre 2014 qui n'est pas réformé sur ce point par le présent arrêt, le tribunal a déjà mis cette somme à la charge solidaire de Mme D...et des sociétés Polymidi, Diffazur et STPAG, conformément au partage final des responsabilités des constructeurs exposé au point 9. Dès lors, et en tout état de cause, de telles conclusions doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

23. Dans les circonstances particulières de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La SA Diffazur Piscines et la société Polymidi sont déchargées de la condamnation de 4 655,75 euros TTC prononcée à leur encontre, par l'article 1er du jugement n° 1300111 du 18 septembre 2014 du tribunal administratif de Pau, en réparation du désordre lié au soulèvement localisé du " plaster " au fond du bassin ludique.

Article 2 : Les entreprises Diffazur et STPAG sont condamnées solidairement à garantir et relever intégralement indemne la société Polymidi de la condamnation de 5 675,24 euros TTC prononcée à son encontre, par l'article 3 de ce jugement, en réparation des désordres consécutifs au percement du coude de l'extrémité du collecteur du bassin ludique.

Article 3 : Le jugement n° 1300111 du 18 septembre 2014 du tribunal administratif de Pau est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

2

N° 14BX03219


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14BX03219
Date de la décision : 13/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité décennale.


Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: M. Axel BASSET
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : ARMANDO ; ARMANDO ; ARMANDO

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-12-13;14bx03219 ?
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