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18/10/2017 | FRANCE | N°17BX03188

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, Juge des référés, 18 octobre 2017, 17BX03188


Vu la procédure suivante :

Par un recours, enregistré le 31 août 2017, le préfet de l'Aveyron a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, sur le fondement de l'article L. 554-1 du code de justice administrative et de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, de suspendre l'exécution du permis d'aménager délivré par le mairie de Savignac le 20 juillet 2017 à la société Immobilière européenne des Mousquetaires pour la réalisation d'un parc d'activités dénommé " Parc de Souyri " au lieu-dit " La Vaysse ".

Par une ordonnance n° 1704076 du 22 septembre 2017, le juge des référés du tribunal...

Vu la procédure suivante :

Par un recours, enregistré le 31 août 2017, le préfet de l'Aveyron a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, sur le fondement de l'article L. 554-1 du code de justice administrative et de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, de suspendre l'exécution du permis d'aménager délivré par le mairie de Savignac le 20 juillet 2017 à la société Immobilière européenne des Mousquetaires pour la réalisation d'un parc d'activités dénommé " Parc de Souyri " au lieu-dit " La Vaysse ".

Par une ordonnance n° 1704076 du 22 septembre 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a suspendu cette décision.

Par une requête enregistrée le 27 septembre 2017, la société Immobilière européenne des Mousquetaires représentée par Me B...demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de rejeter le recours du préfet à fin de suspension sur déféré ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est recevable ;

- le permis d'aménager a été délivré après que le préfet a pris un arrêté le 8 juillet 2014 dispensant celui-ci d'étude d'impact en application de l'article R. 122-3 du code de l'environnement ; par suite, le projet ne devait pas faire l'objet d'une évaluation environnementale et les dispositions des articles L. 123-19 et R. 123-46-1 du code de l'environnement ne sont pas applicables au projet ;

- le permis n'est entaché d'aucune erreur en ce qui concerne le nombre maximum de lots, fixé à 14, ni ne méconnaît l'article R. 442-3 du code de l'urbanisme ; l'opération prévoit la création de 6 îlots en découpe à la demande et dans la limite des 14 lots autorisés ;

- les dispositions du II de l'article L. 122-1 et du I de l'article R. 122-2 du code de l'environnement n'ont pas été méconnues : le projet est d'une surface de plancher maximale de 17 841 m² sur une emprise foncière de 97 272 m² ; conformément à l'article R. 122-1 du code de l'environnement, il est au nombre de ceux mentionnés à la rubrique 39 annexé à cet article ; il a fait l'objet d'un examen particulier et est dispensé d'évaluation environnementale ; la circonstance que cette dispense n'a pas été obtenue par le pétitionnaire du projet en litige mais par le propriétaire du terrain d'assiette du projet est sans incidence ; de plus, le projet d'aménagement est similaire à celui ayant donné lieu à dispense d'étude d'impact et la surface de plancher est inférieure.

Par un mémoire, enregistré le 10 octobre 2017, le préfet de l'Averyon conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la réforme des modes de participation du public prévue par l'ordonnance n° 2016-1060 du 3 août 2016, l'ordonnance n° 2016-1058 du 3 août 2016 et le décret n° 2016-626 du 25 avril 2017, entrée en vigueur le 28 avril 2017, le jour même du dépôt de la demande du permis d'aménager en litige, prévoit notamment une nouvelle procédure de participation du public sur les projets susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement devant faire l'objet d'une évaluation environnementale et non soumis à enquête publique ;

- la décision du 8 juillet 2014 portant dispense d'étude d'impact pour un projet antérieur d'aménagement n'est pas valable pour le projet en litige ; dès lors, le projet aurait dû être soumis à enquête publique avec la participation du public par voie électronique ainsi que le prévoient les articles L. 123-9 et R. 123-46-1 du code de l'environnement ;

- cette consultation imposait une majoration du délai d'instruction de la demande de permis d'aménager fixée par l'article R. 423-24 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté en litige méconnaît les articles R. 441-2, R. 441-3, R. 441-4, R. 442-4 et R. 442-5 du code de l'urbanisme ;

- le maire de Savignac a commis une erreur de fait quant au contenu de la demande de permis d'aménager portant sur la réalisation de 6 îlots alors que le permis autorise la création de 14 lots ;

- le permis d'aménager est entaché d'erreur manifeste d'appréciation du fait que le maire de Savignac a estimé que l'arrêté du 8 juillet 2014 pris pour un projet différent valait dispense d'étude d'impact pour le projet en litige.

Un mémoire présenté par la commune de Savignac représentée par son maire a été enregistré le 13 septembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Le président de la cour a désigné en qualité de juge des référés M. Pouzoulet, président de chambre, en application des dispositions du livre V du code de justice administrative.

Après avoir, à l'audience publique du 18 octobre 2017, dont les parties ont été régulièrement avisées, présenté le rapport de l'affaire et entendu les observations de Me B..., pour la société Immobilière européenne des Mousquetaires, de M. le maire de Savignac et de MmeA..., représentant le préfet de l'Aveyron.

Considérant ce qui suit :

1. Le premier alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales dispose que : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission ". Aux termes du troisième alinéa du même article, dont les dispositions sont reproduites sous l'article L. 554-1 du code de justice administrative : " Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué... ".

2. L'article L. 123-19 du code de l'environnement dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-1060 du 3 août 2016 et applicable aux faits du litige prévoit la participation du public par voie électronique pour les projets qui font l'objet d'une évaluation environnementale et qui sont exemptés d'enquête publique en application du 1° du I de l'article L. 123-2 du même code. Les modalités de cette participation ont été précisées par l'article R. 123-46-1 du code créé par le décret n° 2017-626 du 25 avril 2017 entré en vigueur le 28 avril 2017.

3. L'annexe à l'article R. 122-2 du code pris pour l'application de l'article L. 123-2 du code de l'environnement détermine notamment ceux des projets devant faire l'objet d'une évaluation environnementale à la suite d'un examen au cas par cas. En vertu de la rubrique 39 de cette annexe, tel est le cas pour les opérations d'aménagement qui créent une surface de plancher supérieure ou égale à 10 000 m² et inférieure à 40 000 m² et dont le terrain d'assiette ne couvre pas une superficie supérieure ou égale à 10 hectares.

4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite d'une demande déposée le 28 avril 2017 par la société Immobilière européenne des Mousquetaires, le maire de Savignac a délivré à cette dernière un permis d'aménager un parc d'activité sur un terrain d'assiette d'une superficie de 97 272 m² autorisant la création d'une surface maximale de plancher de 17 841 m² pour au plus 14 lots, mentionnés à la rubrique 4.2. de la demande. La notice explicative précise que l'opération envisage la création de 6 îlots en découpe à la demande destinés à accueillir des bâtiments à dominante commerciale et des services.

5. Il est constant que le projet en litige, qui entre dans le champ de la rubrique mentionnée au point 3 ci-dessus, était au nombre de ceux qui doivent faire l'objet d'un examen au cas par cas en vue de déterminer s'ils doivent faire l'objet d'une étude environnementale.

6. Le projet n'a pas été adopté avec la participation du public ainsi que le prévoit l'article L. 123-19 susmentionné du code de l'environnement, le maire ayant estimé pouvoir se fonder sur un arrêté du préfet de la région Midi-Pyrénées du 8 juillet 2014 portant décision de dispense d'étude d'impact.

7. Il ressort toutefois de l'arrêté du 8 juillet 2014 qu'il a été pris après examen d'un projet présenté en 2014 par le propriétaire du même terrain d'assiette en vue de l'aménagement d'une zone d'activités sur ce terrain mais d'un contenu différent tant en ce qui concerne la surface maximale de plancher à réaliser que le nombre de lots et l'aménagement des voies.

8. Si le préfet de l'Aveyron ne peut se prévaloir de ce qu'un autre projet de la société requérante pour le même terrain d'assiette présenté en 2016 mais abandonné a donné encore lieu à une décision du préfet de région imposant une étude d'impact, il n'en demeure pas moins que le maire de Savignac a délivré le permis d'aménager en litige sans que l'autorité environnementale ait pu se prononcer sur la nécessité de soumettre le nouveau projet de 2017, encore différent des deux précédents, à évaluation environnementale et par conséquent à la consultation du public par voie électronique qui constitue une garantie pour ce dernier. La circonstance que le projet en litige serait susceptible de mieux répondre aux exigences de protection de l'environnement que le projet de 2016, en ce qui concerne notamment la protection de la zone humide située dans l'emprise du projet, n'est pas de nature à le dispenser d'un examen " au cas par cas " par l'autorité environnementale en vue d'apprécier si une évaluation environnementale s'impose au vu des exigences à prendre en compte en fonction de la réglementation applicable.

9. C'est donc à bon droit que le premier juge a estimé que le moyen du préfet de l'Aveyron tiré de la méconnaissance des articles L. 123-19 et R. 122-2 du code de l'environnement paraissait de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité du permis d'aménager en litige.

10. En l'état de l'instruction, et pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens du préfet de l'Aveyron n'est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité du permis d'aménager en litige.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la société Immobilière européenne des Mousquetaires n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée du 22 septembre 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a suspendu l'exécution de ce permis d'aménager.

12. L'Etat n'est pas la partie perdante à l'instance. Par suite, les conclusions de la société au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de la société Immobilière européenne des Mousquetaires est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Immobilière européenne des Mousquetaires, au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, à la commune de Savignac et au préfet de l'Aveyron. Copie en sera adressée au préfet de la région Occitanie.

Fait à Bordeaux, le 18 octobre 2017.

Le juge d'appel des référés

Philippe Pouzoulet

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

N° 17BX03188 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 17BX03188
Date de la décision : 18/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Nature et environnement.

Procédure - Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Philippe POUZOULET
Avocat(s) : CABINET CAROLINE JAUFFRET

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-10-18;17bx03188 ?
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