La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/12/2018 | FRANCE | N°16BX03070

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 13 décembre 2018, 16BX03070


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Villemur sur Tarn a demandé au tribunal administratif Toulouse de condamner solidairement les sociétés Japac, Serige, Qualiconsult, GBMP, Imatec et Eurotip à lui régler la somme de 293 468,52 euros HT en réparation des désordres constatés sur la piscine de plein air " Bernadou " et des frais d'expertise, sous déduction des provisions perçues en exécution des ordonnances du juge des référés.

Par un jugement n° 1202807 du 8 juillet 2016, le tribunal administratif de Toulouse a : <

br>
- condamné solidairement les sociétés Japac, Serige, Qualiconsult, GBMP, Bouygues ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Villemur sur Tarn a demandé au tribunal administratif Toulouse de condamner solidairement les sociétés Japac, Serige, Qualiconsult, GBMP, Imatec et Eurotip à lui régler la somme de 293 468,52 euros HT en réparation des désordres constatés sur la piscine de plein air " Bernadou " et des frais d'expertise, sous déduction des provisions perçues en exécution des ordonnances du juge des référés.

Par un jugement n° 1202807 du 8 juillet 2016, le tribunal administratif de Toulouse a :

- condamné solidairement les sociétés Japac, Serige, Qualiconsult, GBMP, Bouygues Energie Services, venant aux droits de la société Imatec, et Eurotip à verser à la commune de Villemur sur Tarn la somme de 200 000 euros, sous déduction de la provision versée par ordonnance du juge des référés de la Cour administrative d'appel de Bordeaux du 7 juillet 2011 ;

- mis les frais d'expertise, précédemment liquidés à la somme de 40 456, 92 euros, à la charge des sociétés Japac, Serige, Qualiconsult, GBMP, Bouygues Energie Services et Eurotip ;

- condamné la société Japac à garantir les sociétés Serige, Bouygues Energie Services, Qualiconsult et Eurotip à hauteur de 30 % des condamnations prononcées à leur encontre ;

- condamné la société Serige à garantir les sociétés Bouygues Energie Services, Qualiconsult et Eurotip à hauteur de 10 % des condamnations prononcées à leur encontre ;

- condamné la société Qualiconsult à garantir les sociétés Serige, Bouygues Energie Services et Eurotip à hauteur de 10 % des condamnations prononcées à leur encontre ;

- condamné la société Eurotip à garantir les sociétés Qualiconsult, Bouygues Energie Services à hauteur de 30 % des condamnations prononcées à leur encontre ;

- condamné la société Bouygues Energie Services à garantir les sociétés Serige et Eurotip à hauteur de 10 % des condamnations prononcées à leur encontre ;

- condamné la société GBMP à garantir les sociétés Bouygues Energie Services, Qualiconsult et Eurotip à hauteur de 10 % des condamnations prononcées à leur encontre ;

- condamné les sociétés Japac, Serige, Qualiconsult, GBMP, Bouygues Energie Services et Eurotip à verser chacune à la commune de Villemur sur Tarn une somme de 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 septembre 2016, la commune de Villemur sur Tarn, prise en la personne de son maire, représentée par la SELARL Thevenot Mays Bosson, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 8 juillet 2016 ;

2°) de condamner solidairement les sociétés Japac, Serige, Qualiconsult, GBMP, Imatec et Eurotip à lui verser la somme correspondant aux travaux de reprise des désordres à 302 494,23 euros TTC correspondant au devis validé par l'expert judiciaire sous déduction des provisions perçues ;

3°) de mettre à la charge des sociétés Japac, Serige, Qualiconsult, GBMP, Imatec et Eurotip à lui verser la somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de condamner les sociétés Japac, Serige, Qualiconsult, GBMP, Imatec et Eurotip au paiement des entiers dépens y compris les frais d'expertise s'élevant à la somme de 40 546,92 euros.

Elle soutient que :

- en retenant un montant de 200 000 euros, le tribunal administratif a considérablement réduit la somme proposée par l'expert en pratiquant un abattement arbitraire et injustifié de 35 % par rapport à l'évaluation de l'expert ; l'expert a bien précisé dans son rapport que seul le devis SOTRAIB pour un montant de 302 494, 23 euros remplissait les exigences techniques indispensables pour remédier aux dommages constatés ;

- c'est à tort que le tribunal a appliqué un coefficient de vétusté ; l'application d'un coefficient de vétusté, alors même que la durée écoulée entre la réception des travaux et l'apparition des désordres est faible (en l'espèce quatre ans 2000/2004) est totalement injustifié ; l'application d'un tel coefficient est également contraire au principe de réparation intégrale du préjudice dont il résulte que le créancier d'une obligation indemnitaire doit disposer des moyens lui permettant de remettre complètement en état la construction atteinte d'un vice, car il ne s'agit pas ici d'indemniser une valeur vénale mais le coût de reprises de désordres et de malfaçons ;

- le montant de l'indemnisation due doit être fixé à la somme de 302 494,23 euros TTC ; l'indemnisation devant être appréciée TTC dès lors que la commune ne récupère pas la TVA, conformément à l'appréciation de l'expert judiciaire par référence au devis de réparation détaillé fourni par la société SOTRAIB.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 2 juin 2017 et le 11 juin 2018, la SAS Octant Architecture venant aux droits de la SARL Japac Architectes, représentée par la SCP Darnet Gende Attal puis par la SELAS ATCM, conclut, à titre principal, au rejet de la requête et à la réformation du jugement du 8 juillet 2016 en tant qu'il ne l'a pas mise hors de cause, à titre subsidiaire, à la condamnation des sociétés Serige, Qualiconsult, GBMP, Bouygues Energie Services venant aux droits d'Imatec et Eurotip à la garantir intégralement des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre et à la réduction du montant de la somme accordée au titre des travaux de reprise. Elle conclut également et en tout état de cause à la condamnation de la commune de Villemur sur Tarn ou de toute partie succombant à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal n'a pas pris en compte l'incidence des travaux réalisés en 2005 au titre de l'assurance dommages ouvrage alors que les désordres intervenus postérieurement à ces travaux peuvent avoir pour origine les nouvelles interventions réalisées par les sociétés Eurotip et Bouygues Energie Services venant aux droits d'Imatec ; la société Japac aux droits de laquelle intervient la société Octant ne saurait être concernée par des désordres affectant un ouvrage qui a fait l'objet de travaux étrangers à sa mission de maîtrise d'oeuvre ;

- compte tenu de l'écart entre les différents devis produits par l'expert, le tribunal ne disposait pas de tous les éléments lui permettant de statuer sur le montant de la réclamation sollicitée par la commune ;

- le rôle de la société Japac lors de la phase exécution des travaux portait sur la gestion administrative du chantier alors que le bureau d'étude Serige était chargé du constat des travaux et de la tenue des réunions de chantier et il appartiendra à la cour d'appréhender les responsabilités éventuelles de la société Japac et du bureau d'études Serige en fonction de leurs obligations respectives, la responsabilité du bureau d'études Serige étant formellement engagée au titre de sa mission de conception technique et de direction des travaux ;

- pour le cas où une condamnation serait prononcée à l'encontre de la société Octan venant aux droits de la société Japac, il conviendra qu'elle puisse être relevée et garantie non seulement par le bureau d'études Serige mais par l'ensemble des intervenants, le bureau de contrôle Qualiconsult et les entreprises GBMP, Bouygues Energie Services venant aux droits d'Imatec et Eurotip en fonction des missions confiées à chacun des intervenants.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2017, la SARL Serige, représentée par MeA..., conclut à titre principal à la réformation du jugement en tant qu'il est entré en voie de condamnation à son encontre et au rejet de l'ensemble des demandes formées à son encontre, à titre subsidiaire, à ce que la cour limite sa part de responsabilité à 5 %, en tout état de cause au plafonnement du montant des travaux de reprise à la somme de 77 449 euros HT, à la restitution des sommes versées à la suite des décisions en référé excédant les indemnités définitivement allouées avec les intérêts au taux légal, et à ce que la cour mette à la charge de la commune de Villemur sur Tarn ou de tout autre succombant la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en application de la répartition des missions annexée à l'acte d'engagement du marché de maîtrise d'oeuvre, elle n'est intervenue que pour les lots " traitement d'eau, chauffage, ventilation, plomberie, électricité, béton armé et VRD ", tandis que la société Japac était en charge de tous les autres lots ; sa responsabilité ne peut donc être engagée pour les prestations exécutées par la société Japac ;

- l'origine et la cause des désordres affectant le bassin ludique et le bac tampon ne relèvent pas des prestations contractuelles de la Sarl Serige ; elle sera donc mise hors de cause ; en cas de condamnation, sa part de responsabilité sera limitée à 5 % ;

- le chiffre de 302 494, 23 euros admis par l'expert sans aucune vérification personnelle, sur la base du devis de la société Sotraib est discutable dès lors qu'il correspond au devis dont le montant est le plus onéreux ; seule devra être retenue l'évaluation résultant du devis Eurotip du 9 avril 2009 d'un montant de 77 449 euros hors taxes ;

- c'est à juste titre que le tribunal a appliqué un coefficient de vétusté au coût des travaux de remise en état de l'ouvrage du fait de la durée écoulée entre la date d'apparition des désordres et le début du fonctionnement de la piscine.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 février 2018, la société Bouygues Energie Services, venant aux droits de la société Imatec, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de tout succombant une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'analyse des différents devis produits dans le cadre des opérations d'expertise révèlent que ces derniers sont différents quant à leur montant, quant aux surfaces prises en compte, et aux produits utilisés pour effectuer le revêtement du sol ; il est donc difficile de les comparer et le tribunal a, à juste titre, effectué une moyenne de ces différents devis pour apprécier le coût des travaux ; au demeurant, l'expert n'a pas comparé les différents devis produits ;

- la mise en oeuvre d'un coefficient de vétusté est consacrée par la jurisprudence, elle n'est donc pas contraire au principe de réparation intégrale du préjudice, contrairement aux affirmations de la requérante ; la date d'apparition des malfaçons, la date de mise en service de l'ouvrage et la durée de fonctionnement de l'ouvrage doivent être prises en compte dans ce calcul ; la réception de l'ouvrage a été prononcée le 9 novembre 2000 sans réserves ; ce n'est qu'en mai 2004 que les premiers désordres ont affecté le béton et le revêtement du bassin ludique, du bassin tampon et d'un local à usage de bar et de vestiaire ; ainsi la mise en place d'un coefficient de vétusté de 10 % est clairement justifié au regard du délai de 4 ans entre la réception et l'apparition des désordres sur l'ouvrage.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mai 2018, la société Qualiconsult, représentée par MeB..., conclut :

à titre principal :

- au rejet de la requête ;

- à la réformation du jugement en tant qu'il a retenu sa responsabilité ;

- à la condamnation de la commune à lui rembourser toute somme payée avec les intérêts et la capitalisation des intérêts ;

- au rejet des conclusions en garantie présentées par les autres constructeurs à son encontre.

à titre subsidiaire :

- à la confirmation du jugement en ce qu'il a fixé le montant des travaux de reprise à concurrence de la somme de 200 000 euros TTC, après application d'un coefficient de vétusté de 10% ;

- à la réformation du jugement en ce qu'il a prononcé une condamnation solidaire à son préjudice, seule une condamnation in solidum étant susceptible d'intervenir ;

- à la réformation du jugement en ce qu'il a mis à sa charge la somme de 2 870 euros HT soit 3 432,52 euros TTC au titre des travaux de reprise du mur du bar ;

- à la condamnation de la SARL Japac désormais Octant Architectes, la Société Serige, la Société GBMP, la Société Eurotip, la Société Imatec désormais Bouygues Energies Services à la garantir de toute condamnation à intervenir à son encontre ;

- à la limitation de sa part de responsabilité à 5 % du coût des travaux de reprise ;

- au rejet de toute demande de condamnation formulée à son encontre.

Elle demande par ailleurs que soit mise à la charge de la commune de Villemur sur Tarn ou de tout succombant in solidum la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la responsabilité décennale du contrôleur technique ne peut être mise en oeuvre dès lors que le dommage est sans rapport avec la mission qui lui a été contractuellement confiée ; elle n'est pas intervenue en qualité de membre du groupement de maîtrise d'oeuvre ;

- l'expert n'a pas caractérisé dans son rapport une atteinte à la solidité des ouvrages seule susceptible d'engager sa responsabilité au titre de la garantie décennale ;

- le coefficient de vétusté de 10 % retenu par le tribunal est parfaitement justifié compte tenu de la date de réception de l'ouvrage et de la date d'apparition des désordres ; la commune n'a jamais justifié avoir dû interrompre le fonctionnement de l'ouvrage ;

- le coût des travaux de reprise du minibar sera exclu de la demande indemnitaire de la commune ;

- l'appréciation du coût des travaux de reprise par le tribunal n'est pas erronée ; la société SOTRAIB a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire ce qui exclut que soit pris en compte son devis ; la différence entre les devis n'est pas justifiée par l'expert ;

- la cour prononcera une condamnation in solidum et non pas une condamnation solidaire ;

- sa responsabilité sera limitée à 5 % ;

- la SARL Japac désormais Octant Architectes, la Société Serige, la Société GBMP, la Société Eurotip, la Société Imatec désormais Bouygues Energies Services seront déboutées de leurs demandes de garantie excédant ce pourcentage et la relèveront indemne de toute condamnation.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 mai 2018, la société Eurotip, représentée par MeF..., conclut à titre principal, à la réformation du jugement en tant qu'il retenu sa responsabilité ; à titre subsidiaire, à ce que à le montant de l'indemnisation qui sera allouée à la commune de Villemur sur Tarn soit fixé à la somme de 110 938, 80 euros ; à la condamnation de la société Japac désormais Octant Architectes, de la Société Serige, de la Société GBMP, et de la Société Imatec désormais Bouygues Energies Services, à la garantir de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre ; à ce que sa part de responsabilité soit limitée à 10 % ; à la condamnation de la commune à lui rembourser les sommes qu'elle a perçues au titre des décisions de référé et excédant les indemnités définitivement allouées avec intérêt au taux légal à compter de leur paiement à la commune, et en tout état de cause à la condamnation tout succombant à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le revêtement qu'elle a mis en oeuvre n'a pas pour fonction l'étanchéité du bassin ; il s'agit d'un revêtement de finition ;

- ce sont les fissures du béton qui sont le fait générateur de l'ensemble des désordres ; ces fissures ont ensuite provoqué des fissures sur le revêtement qu'elle a posé ; en d'autres termes, si les fissures n'étaient pas apparues dans le béton mis en oeuvre par la société GBMP, le revêtement qu'elle a mis en place n'aurait pas été détérioré ;

- si le revêtement qu'elle a mis en oeuvre ne correspond pas au revêtement prévu par le CCTP, l'ensemble des parties (maîtrise d'ouvrage et maîtrise d'oeuvre) était au courant de ce changement et a accepté ce changement ; l'expert ne peut pas conclure que le revêtement a une épaisseur insuffisante et par conséquent qu'il n'a pas résisté aux fissures du béton du fait de cette insuffisance alors qu'il n'a pas vérifié l'épaisseur du revêtement refait en 2005 ; en tout état de cause, le revêtement ne peut résister quelle que soit son épaisseur à n'importe quelle déformation du support ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu la responsabilité de GBMP à hauteur de 10% et celle de Eurotip à hauteur de 30 % ;

- le choix du devis de la société SOTRAIB n'est pas justifié par l'expert alors que les devis produits ne mentionnent pas la même surface à traiter et que les techniques proposées ne sont pas identiques.

Un courrier du 28 mai 2018, adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a précisé la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

L'instruction a été close au 2 juillet 2018, date d'émission d'une ordonnance prise en application des dispositions combinées des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur deux moyens relevés d'office, tirés, d'une part, de l'irrecevabilité des conclusions d'appel provoqué des sociétés au cas où leur situation ne serait pas aggravée par la décision sur l'appel principal et d'autre part, de ce que les conclusions de la société Octant Architecture venant aux droits de la société Japac tendant à la condamnation des sociétés Serige, Qualiconsult, GBMP, Bouygues Energie Services venant aux droits d'Imatec et EUROTIP à la garantir intégralement des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, qui n'ont pas été soumises aux premiers juges, ont le caractère de conclusions nouvelles en cause d'appel et sont pas suite irrecevables.

Par mémoire enregistré le 12 novembre 2018, la société Octant Architecture venant aux droits de la société Japac indique à la cour qu'elle avait bien produit un mémoire en première instance dans lequel elle présentait des conclusions en garantie dirigées contre les autres constructeurs.

Vu :

- l'ordonnance du président du tribunal administratif du 20 août 2009 liquidant et taxant les frais et honoraires de l'expertise ordonnée le 4 septembre 2008 à la somme de 40 546,92 euros ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public ;

- et les observations de MeG..., représentant la société Qualiconsult, les observations de MeC..., représentant la société Bouygues Énergies Services venant aux droits de la société Imatec et les observations de MeE..., représentant la société Octant Architecture venant aux droits de la société Japac.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Villemur sur Tarn a entrepris en 1998 la réalisation d'une piscine municipale de plein air dite " du Bernardou ", dont elle a confié la maîtrise d'oeuvre à un groupement composé des sociétés Japac et Serige. La réalisation des travaux du lot n° 1 " fondations - gros oeuvre " était attribuée à la société GBMP, du lot n° 11 bis " revêtements de bassins " à la société Eurotip et du lot n° 8 " traitement d'eau " à la société Imatec. La société Qualiconsult était chargée d'une mission de contrôle technique. La réception des travaux a été prononcée le 9 novembre 2000 sans réserves sur ces différents lots. Des désordres affectant principalement le béton et le revêtement du bassin ludique, du bassin tampon et d'un local à usage de bar et de vestiaire sont apparus dans le courant de l'année 2004 et ont fait partiellement l'objet de travaux de remise en état provisoire au cours des années 2005 et 2006. La commune de Villemur sur Tarn a saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande d'expertise, ordonnée par référé le 4 septembre 2008, dont le rapport a été déposé le 27 mai 2009, puis d'une demande de provision. Par ordonnance du 19 avril 2010, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a, d'une part, condamné solidairement les sociétés Japac, Serige, GBMP, Imatec, Eurotip et Qualiconsult à verser à la commune une provision de 290 000 euros dont 40 000 euros au titre des frais d'expertise, en réparation des désordres affectant les bassins de la piscine municipale ainsi que, solidairement, les sociétés Japac, Serige et GBMP à lui verser une provision de 3 346 euros au titre des désordres affectant le bar et le vestiaire de la piscine et, d'autre part, a condamné solidairement les sociétés Japac, Serige, GBMP, Eurotip et Qualiconsult à garantir la société Imatec à concurrence des deux tiers du montant de la condamnation prononcée contre elle. Par ordonnance du 7 juillet 2011, le juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux a réduit le montant de la provision à la somme de 240 000 euros en réparation des désordres affectant les bassins de la piscine municipale, à l'exclusion de ceux affectant le bar et le vestiaire de la piscine.

2. Par jugement n° 1202807 du 8 juillet 2016, le tribunal administratif de Toulouse a d'une part, condamné solidairement les sociétés Japac, Serige, Qualiconsult, GBMP, Bouygues Energie Services et Eurotip à verser à la commune de Villemur sur Tarn la somme de 200 000 euros au titre des désordres, sous déduction de la provision versée par ordonnance du juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 7 juillet 2011. Les premiers juges ont en outre mis les frais d'expertise, précédemment liquidés à la somme de 40 456,92 euros, à la charge des sociétés Japac, Serige, Qualiconsult, Eurotip, GBMP, Bouygues Energie Services, la répartition finale de cette charge, au titre des appels en garantie, étant respectivement fixée à concurrence de 30 %, 10 %, 10 %, 30 %, 10 %, et 10 % du montant global de ces frais. Enfin, les premiers juges ont condamné les sociétés Japac, Serige, Qualiconsult, GBMP, Bouygues Energie Services et Eurotip à verser chacune à la commune de Villemur sur Tarn une somme de 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions des parties. La commune de Villemur sur Tarn relève appel de ce jugement. La société Bouygues Energie Services, venant aux droits de la société Imatec conclut au rejet de la requête. La société Octant Architecture venant aux droits de la société Japac, la société Serige, la société Qualiconsult et la société Eurotip demandent la réformation du jugement entrepris et à être déchargées des sommes que ce jugement les a condamnées à payer au maître de l'ouvrage. Elles présentent également des conclusions d'appel provoqué les unes contre les autres.

Sur l'appel principal :

3. La commune de Villemur sur Tarn soutient en premier lieu que le montant de l'indemnisation accordée par les premiers juges est insuffisant. Elle fait valoir que le devis établi par la société SOTRAIB et retenu par l'expert, est le seul répondant aux exigences techniques indispensables pour remédier aux dommages constatés et pour assurer l'étanchéité recherchée et que les premiers juges ne pouvaient appliquer un coefficient de vétusté de 10 %.

4. Toutefois et d'une part, il ressort du rapport d'expertise que quatre devis ont été présentés à l'expert dont les montants étaient compris entre la somme de 302 494, 23 euros TTC et 92 629 euros TTC. Pour recommander la solution la plus onéreuse l'expert indiquait qu'elle répondait aux exigences du cahier des clauses techniques particulières s'agissant du choix du type de revêtement, qu'elle utilise un système de couverture pour la mise en place du revêtement et garantit une épaisseur de revêtement nécessaire pour obtenir une bonne tenue dans le temps. Il ressort néanmoins de l'analyse des différents devis que les éléments pris en compte sont différents au niveau des surfaces à traiter ou des produits utilisés pour effectuer le revêtement du sol. Par ailleurs, le devis le moins onéreux prévoyait l'utilisation d'un produit identique à celui préconisé par le devis de la société SOTRAIB tout en retenant une surface de traitement supérieure. Dans ces conditions, et alors que l'expert ne précise pas les raisons pour lesquelles les autres propositions formulées dans les devis les moins élevés ne permettent pas d'assurer l'objectif d'étanchéité recherché, la commune de Villemur sur Tarn n'est pas fondée à reprocher aux premiers juges de ne pas avoir retenu le montant des travaux évalué par l'expert à partir du devis de la société SOTRAIB.

5. D'autre part, compte tenu du délai écoulé entre la date de mise en service de l'ouvrage et la date de survenance des désordres, ainsi que de la durée de vie prévisible de l'ouvrage, les juges de première instance n'ont pas fait une inexacte appréciation des circonstances de l'affaire en fixant le coefficient de vétusté à 10 %.

6. Il résulte de ce qui précède que les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation du coût des travaux de remise en état de l'ouvrage en l'évaluant à la somme de 200 000 euros.

7. Le montant du préjudice dont le maître de l'ouvrage est fondé à demander réparation aux constructeurs en raison de désordres affectant l'immeuble qu'ils ont réalisé correspond aux frais qu'il doit engager pour les travaux de réfection. Ces frais comprennent en règle générale la taxe sur la valeur ajoutée, élément indissociable de ce coût, lorsque ladite taxe grève les travaux. Toutefois, le montant de l'indemnisation doit, lorsque le maître de l'ouvrage relève d'un régime fiscal qui lui permet normalement de déduire tout ou partie de cette taxe de celle qu'il a perçue à raison de ses propres opérations être diminué du montant de la taxe ainsi déductible ou remboursable.

8. Il résulte des écritures de première instance de la commune de Villemur sur Tarn qu'elle a demandé la condamnation des constructeurs au paiement d'une somme hors taxe. Par suite, et au regard de la contradiction entre ses écritures de première instance et ses écritures d'appel, il appartient à la commune de démontrer qu'elle n'a pas pu déduire la taxe sur la valeur ajoutée des dépenses qu'elle a engagées et dont elle demande réparation. La commune n'établissant pas être dans l'impossibilité de déduire ou de se faire rembourser le montant de la taxe sur la valeur ajoutée, le montant de l'indemnité, correspondant au coût des travaux nécessaires pour mettre fin aux désordres ne devait pas inclure le montant de la taxe sur la valeur ajoutée. Dans ces conditions, ces conclusions tendant à ce que la condamnation prononcée par les premiers juges inclut le montant de la taxe sur la valeur ajoutée ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les appels incidents :

9. En premier lieu, si la société Octant Architecture, venant aux droits de la société Japac, fait valoir que les réparations provisoires réalisées en 2005 ont modifié l'ouvrage initial et que c'est à tort que le tribunal n'a pas pris en compte l'incidence de ces travaux au titre de l'assurance dommages ouvrage, il résulte de l'instruction que ces travaux ont porté sur la reprise du revêtement et non sur les désordres qui selon le rapport de l'expert résultent de la fissuration de la structure en béton ayant entraîné une corrosion importante des éléments en acier, et de la défectuosité d'une arrivée d'eau entre la structure et la résine semi-adhérente du revêtement, entraînant un cloquage et une fissuration de celui-ci, qui n'est plus imperméable.

10. En deuxième lieu, les membres d'un groupement solidaire sont responsables, à l'égard du maître d'ouvrage, de l'exécution de la totalité des obligations contractuelles et il ne peut être fait échec à cette solidarité que si une répartition des tâches entre les entreprises a été signée par le maître d'ouvrage. Si la société Serige conteste le principe de la solidarité au sein du groupement de maîtrise d'oeuvre, l'acte d'engagement du groupement de maîtrise d'oeuvre indique qu'il s'agit d'un groupement solidaire et elle ne fait pas état d'une convention, à laquelle le maître de l'ouvrage serait partie, fixant la part qui lui revient dans l'exécution des travaux. Par suite, sa responsabilité est engagée vis-à-vis de la commune de Villemur sur Tarn à raison des désordres trouvant pour tout ou partie leur origine dans la conduite des missions confiées à la maîtrise d'oeuvre

11. En troisième lieu, il résulte du rapport d'expertise que l'équipe de maîtrise d'oeuvre composée des sociétés Japac et Serige n'a pas respecté la mission de base qui lui a été confiée concernant notamment la surveillance du chantier et le respect des prescriptions du cahier des clauses techniques particulières. L'expert a également indiqué que la société Japac en charge des missions " architecte et économiste " au sein du groupement, n'a pas respecté la mission de base qui lui a été confiée en acceptant notamment un revêtement du bassin ludique différent de celui retenu dans le cahier des clauses techniques particulières sans en informer par écrit le maître d'ouvrage, en laissant mettre en place des matériaux qui se corrodent et en ne contrôlant pas la qualité du travail exécuté par les soustraitants de la société GBMP. Par suite, la société Octant Architecture venant aux droits de la société Japac et la société Serige ne sont pas fondées à soutenir que ces désordres ne seraient pas imputables à un défaut de contrôle des travaux imputable aux maîtres d'oeuvre et le tribunal a pu estimer à juste titre que leur responsabilité était engagée à hauteur respectivement de 30 % et 10 %.

12. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version applicable à la date de l'acte d'engagement : " Le contrôleur technique est soumis, dans les limites de la mission à lui confiée par le maître de l'ouvrage à la présomption de responsabilité édictée par les articles 1792, 1792-1 et 1792-2 du code civil, reproduits aux articles L. 111-13 à L. 111-15, qui se prescrit dans les conditions prévues à l'article 2270 du même code reproduit à l'article L. 111-20. ". La société Qualiconsult soutient que sa responsabilité ne saurait être engagée dès lors que les missions qui lui ont été confiées, limitées aux missions de base " L " relative à la solidité des ouvrages et " S " portant que les conditions de sécurité des personnes sont sans lien avec le litige. Toutefois, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que la société Qualiconsult a manqué aux obligations de sa mission concernant le système de revêtement du bassin ludique, la qualité des aciers utilisés et l'imperméabilisation du bassin tampon, obligations qui se rapportent à la mission relative à la solidité des ouvrages. Par suite, les désordres litigieux doivent être regardés comme lui étant également imputables et en la condamnant à assumer une part correspondant à 10 % du coût de la réparation des désordres mis à la charge des constructeurs, les premiers juges n'ont pas fait une appréciation inexacte de la responsabilité encourue par celle-ci.

13. En cinquième lieu, en prononçant la condamnation solidaire de la société Qualiconsult avec les autres intervenants, le tribunal n'a pas établi entre ceux-ci une solidarité comportant tous les effets de la solidarité prévue à l'article 1310 du code civil, mais s'est borné, en faisant droit aux conclusions dont il était saisi, à les condamner "in solidum". Dans ces conditions, la société Qualiconsult n'est pas fondée à soutenir que le tribunal ne pouvait prononcer une condamnation solidaire des constructeurs.

14. En sixième lieu, la société Eurotip soutient qu'elle doit être mise hors de cause en faisant valoir qu'elle a informé le maître d'ouvrage et le maître d'oeuvre du changement de revêtement. Toutefois, la circonstance que le maître d'ouvrage et le maître d'oeuvre ont été informés du changement de revêtement ne suffit pas à démontrer que ce changement a été accepté alors au demeurant que la société Eurotip ne démontre pas les avoir informé par écrit. En outre, la société Eurotip ne démontre pas s'être conformée aux prescriptions du cahier des clauses techniques particulières qui prévoient qu'au cas " où une modification de produit sera envisagée l'Entrepreneur devra fournir les Procès Verbaux d'essais, les échantillons, le cahier des charges particulières et obtenir l'accord écrit du Bureau de Contrôle et de la Maîtrise d'oeuvre. " Par ailleurs, l'expert a également relevé que la société Eurotip n'avait pas respecté les règles d'application du revêtement, en particulier la température et le degré d'humidité. Par suite, la société Eurotip n'est ainsi pas fondée à soutenir que les désordres ne lui seraient pas imputables et les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation de sa part de responsabilité en la fixant à 30 %.

15. En septième et dernier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 5 à 7 que les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation du coût des travaux de remise en état de l'ouvrage en l'évaluant à la somme de 200 000 euros. Par suite, les conclusions incidentes de la société Octant Architecture, venant aux droits de la société Japac, de la société Serige, de la société Qualiconsult et de la société Eurotip tendant à la réduction de la somme mise à leur charge en réparation des désordres affectant les bassins de la piscine municipale, à l'exclusion de ceux affectant le bar et le vestiaire de la piscine ne peuvent qu'être écartés.

Sur les conclusions d'appel provoqué :

16. Dès lors que les conclusions de la requête de la commune de Villemur sur Tarn ne sont pas accueillies, la situation des sociétés Octant Architecture, venant aux droits de la société Japac, Serige, Qualiconsult et Eurotip n'est pas aggravée. Par suite, leurs conclusions d'appel provoqué ne sont pas recevables.

Sur les frais d'expertise :

17. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de modifier la répartition des frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 40 546,92 euros par ordonnance du 20 août 2009, opérée par les premiers juges.

Sur les conclusions tendant au remboursement de la provision :

18. Le demandeur qui a obtenu du juge des référés le bénéfice d'une provision doit la reverser en tout ou en partie lorsque le juge du fond rejette sa demande pécuniaire ou lui accorde une somme inférieure au montant de la provision. Les sociétés Serige, Qualiconsult et Eurotip présentent des conclusions tendant au remboursement des sommes perçues par la commune de Villemur sur Tarn au titre des décisions en référé, excédant les indemnités définitivement allouées. Le montant de la provision de 240 000 euros fixé par l'ordonnance du 7 juillet 2011 du juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux comprend d'une part la somme de 200 000 euros au titre de travaux de réparation et la somme de 40 000 euros au titre des frais d'expertise. Il résulte de tout ce qui précède que la condamnation solidaire des constructeurs excède le montant de la provision de 240 000 euros. Par suite, les conclusions tendant à son remboursement ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

19. Il n'y a lieu de faire droit à aucune des conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Villemur sur Tarn est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la SAS Octant Architecture venant aux droits de la SARL Japac Architectes, de la SARL Serige, de la société Bouygues Energie Services, venant aux droits de la société Imatec, de la société Qualiconsult et de la société Eurotip sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Villemur sur Tarn, à la SAS Octant Architecture venant aux droits de la SARL Japac Architectes, à la société GBMP, à la SARL Serige, à la société Bouygues Energie Services venant aux droits de la société Imatec, à la société Qualiconsult et à la société Eurotip.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2018 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président rapporteur,

M. David Terme, premier conseiller,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 décembre 2018.

L'assesseur le plus ancien,

David TERMELe président,

Jean-Claude PAUZIÈS

Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

No 16BX03070


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award