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16/11/2020 | FRANCE | N°20BX00008

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 16 novembre 2020, 20BX00008


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2019 de la préfète de la Gironde portant transfert aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1902615 du 3 décembre 2019 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 janviers 2020, M. B... E..., représenté par la SCP Brei

llat - Dieumegard - Masson, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2019 de la préfète de la Gironde portant transfert aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1902615 du 3 décembre 2019 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 janviers 2020, M. B... E..., représenté par la SCP Breillat - Dieumegard - Masson, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, d'enregistrer sa demande d'asile et de lui délivrer un récépissé dans un délai de 48 heures, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 48 heures ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté de transfert aux autorités italiennes est insuffisamment motivé ;

- cet arrêté est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle au regard du temps écoulé depuis le dépôt de sa demande d'asile en Italie en 2016 et qu'il est suivi médicalement en France ;

- il n'a pas été informé de la possibilité de présenter des observations durant toute la procédure de détermination de l'Etat responsable de sa demande d'asile ;

- cet arrêté méconnaît les stipulations de l'article 17-1 du règlement (UE) n°604/2013 dès lors que les autorités italiennes n'ont pas accepté explicitement son transfert, qu'il n'est pas établi qu'il pourra bénéficier d'un traitement médical adapté en Italie, qu'il existe un doute sur la circonstance tenant à ce que sa demande d'asile soit toujours en cours d'examen en Italie ; pour les mêmes motifs cet arrêté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire enregistré le 3 février 2020, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête de M. E....

Elle soutient que les moyens ne sont pas fondés.

M. E... a été admis dans le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 avril 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., ressortissant malien, né le 16 mai 1993 à Bamako, entré en France, selon ses déclarations, le 6 mars 2019 relève appel du jugement du 3 décembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 octobre 2019 par lequel la préfète de la Gironde a décidé de son transfert aux autorités italiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile. M. E... ayant été déclaré en fuite, le délai de son transfert aux autorités italiennes a été prolongé jusqu'au 3 juin 2021.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. (...). ".

3. L'arrêté contesté vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la convention de Genève du 28 juillet 1951, le règlement (UE) n° 604/2013 du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, il précise les conditions dans lesquelles M. E... est entré et a séjourné sur le territoire européen, puis en France, et notamment celles dans lesquelles il a sollicité l'asile et vise l'accord implicite des autorités italiennes donné à son transfert. Ainsi, alors même que l'arrêté ne mentionne pas qu'il suit un traitement médical en France, circonstance que l'intéressé reconnaît lui-même ne pas avoir portée à la connaissance de l'administration, et dès lors que l'arrêté indique que, lors de l'entretien du 26 avril 2018, aucune observation n'a été émise par l'intéressé, il comporte la mention des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, l'arrêté contesté est suffisamment motivé au regard des dispositions précitées.

4. En deuxième lieu, la motivation de cet arrêté ne révèle pas que le préfet se serait abstenu de se livrer à un examen attentif de la situation personnelle de l'intéressé.

5. En troisième lieu, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit implique ainsi que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision de remise aux autorités compétentes d'un autre Etat membre de l'Union européenne, sur le fondement des dispositions de l'article 18 du règlement du 26 juin 2013, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne.

6. Il ressort des pièces du dossier que M E... a été mis à même de présenter des observations antérieurement à l'édiction de l'arrêté contesté, dès lors qu'il a été informé, pendant l'entretien qui s'est tenu le 26 avril 2018 de ce que les autorités allaient être saisies en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Conseil du 26 juin 2013 et qu'il pouvait dès à présent faire parvenir toutes les observations qu'il jugerait utiles sur l'éventuelle décision de transfert vers l'Italie. Dans ces conditions, et contrairement à ce qu'il soutient M. E... a été informé de la possibilité de présenter des observations tout au long de la procédure sur une l'édiction d'une éventuelle décision de transfert aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / 2. L'Etat membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à une autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable (...) ".

8. M. E... fait valoir qu'il est suivi médicalement en France pour une gêne oculaire, toutefois les éléments qu'il produit ne permettent pas de considérer que ce suivi serait impossible en Italie. Par suite, et alors même que la demande d'asile de déposé par M. E..., le 14 novembre 2016 en Italie, serait toujours en examen, la préfète de la Gironde n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant de faire usage de la clause discrétionnaire prévue au 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué du 15 octobre 2019 de la préfète de la Gironde. Par voie de conséquence il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 19 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

M. Dominique A..., président,

Mme D... C..., présidente assesseure,

Mme F....

Lu en audience publique, le 16 novembre 2020.

La présidente assesseure,

Karine C...

Le président,

Dominique A...

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX00008


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX00008
Date de la décision : 16/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: M. Dominique NAVES
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : SCP BREILLAT DIEUMEGARD MASSON

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-11-16;20bx00008 ?
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