La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/12/2020 | FRANCE | N°19BX02992

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 07 décembre 2020, 19BX02992


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le département de la Haute-Garonne à lui verser une indemnité d'un montant total de 90 000 euros en réparation des préjudices qu'il a subis du fait du décès accidentel de son fils le 15 juin 2005.

Par un jugement n° 1800699 du 16 mai 2019, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 juillet 2019, M. E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1

°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner le département de la Haute-Garonne à lui verser une indem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le département de la Haute-Garonne à lui verser une indemnité d'un montant total de 90 000 euros en réparation des préjudices qu'il a subis du fait du décès accidentel de son fils le 15 juin 2005.

Par un jugement n° 1800699 du 16 mai 2019, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 juillet 2019, M. E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner le département de la Haute-Garonne à lui verser une indemnité d'un montant total de 90 000 euros ;

3°) de mettre à la charge du département de la Haute-Garonne les frais d'expertise, ainsi qu'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- si l'expert a estimé impossible de savoir si son fils a roulé sur le terre-plein ou heurté des parpaings présents sur la voie publique, le doute sur la cause de l'accident ne saurait bénéficier au département ;

- la présence de blocs de béton sur une voie réservée à la circulation automobile suffit à caractériser un défaut d'entretien normal ;

- la route en cause est " connue et reconnue " pour sa dangerosité ;

- il sollicite les sommes de 40 000 euros au titre de son préjudice financier et de 50 000 euros au titre de son préjudice moral.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 juin 2020, le département

de la Haute-Garonne, représenté par la SELARL Thévenot et Associés, conclut au rejet

de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. E... une somme

de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la créance est atteinte par la prescription quadriennale ;

- l'accident est entièrement imputable à la faute de la victime, et aucun témoin n'a vu la présence anormale de bornes sur la voie de circulation ;

- à titre subsidiaire, le préjudice financier invoqué n'est pas établi et la demande présentée au titre du préjudice morale est excessive.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Par une décision du 2 septembre 2019, la présidente de la cour a désigné Mme B..., présidente-assesseure, pour statuer par voie d'ordonnance sur les requêtes et conclusions visées à l'article R. 222-1 du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Le 15 juin 2005 à 6 heures 40, M. D... E..., âgé de 24 ans, a été victime d'un accident mortel alors qu'il tentait de dépasser un camion semi-remorque en cyclomoteur sur la route nationale n° 20, devenue route départementale n° 820. Par un jugement

du 25 janvier 2010, le tribunal de grande instance de Toulouse a débouté les consorts E... de leur demande de condamnation du propriétaire et du conducteur du camion à les indemniser de leur préjudice moral au motif que M. E... avait commis une faute de conduite en entreprenant une manoeuvre de dépassement dangereuse. Les consorts E... ont alors saisi le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse d'une demande d'expertise au contradictoire de l'Etat et du département de la Haute-Garonne afin de rechercher l'origine et les causes précises de l'accident. L'expert désigné par une ordonnance du 26 avril 2011 a conclu que M. E..., qui s'était engagé dans le dépassement alors qu'il ne disposait pas d'une largeur de voie suffisante pour le faire, a perdu l'équilibre soit en roulant sur le terre-plein central de la voie, soit en percutant une des " bornes " en béton, appelées " margelles " par la gendarmerie, situées sur l'accotement, sans qu'il soit possible de privilégier l'une ou l'autre de ces hypothèses. M. A... E..., père de M. D... E..., a saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande de condamnation des préjudices subis du fait du décès de son fils en invoquant un défaut d'entretien normal caractérisé par la présence de " blocs de béton " sur la voie publique, ayant entraîné le déséquilibre et la chute mortelle. Il relève appel du jugement du 16 mai 2019 par lequel le tribunal a rejeté sa demande et mis à sa charge définitive les frais de l'expertise ordonnée par le juge des référés.

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les magistrats ayant une ancienneté minimale de deux ans et ayant atteint au moins le grade de premier conseiller désignés à cet effet par le président de leur juridiction peuvent, par ordonnance : / (...) / 5° Statuer sur les requêtes qui ne présentent plus à juger de questions autres que la condamnation prévue à l'article L. 761-1 ou la charge des dépens ; / (...) / Les présidents des cours administratives d'appel, les premiers vice-présidents des cours et les présidents des formations de jugement des cours, ainsi que les autres magistrats ayant le grade de président désignés à cet effet par le président de la cour peuvent, en outre, par ordonnance, rejeter (...) les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...). "

3. Il appartient à l'usager d'un ouvrage public qui demande réparation d'un préjudice qu'il estime imputable à cet ouvrage de rapporter la preuve de l'existence d'un lien de causalité entre le préjudice invoqué et l'ouvrage. Le maître de l'ouvrage ne peut être exonéré de l'obligation d'indemniser la victime qu'en rapportant, à son tour, la preuve soit de l'absence de défaut d'entretien normal, soit que le dommage est imputable à une faute de la victime ou à un cas de force majeure.

4. Il résulte des principes exposés au point précédent que contrairement à ce que soutient M. E..., l'existence d'un doute sur la cause de l'accident est de nature à exonérer le département d'une responsabilité qui ne pourrait être retenue qu'en cas de lien de causalité direct entre cet accident et un défaut d'entretien normal de la voie.

5. M. E... reprend en appel, dans des termes similaires et sans critique utile du jugement, le moyen tiré de ce que l'accident aurait été causé par la présence de " blocs de béton " sur la voie. Il n'apporte aucun élément de droit ou de fait nouveau, ni aucune nouvelle pièce à l'appui de ce moyen, qu'il y a lieu d'écarter par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

6. L'affirmation de M. E... selon laquelle la route départementale n° 820 serait " connue et reconnue " pour sa dangerosité n'est pas assortie des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Elle est au demeurant contredite par les photographies annexées au rapport d'expertise montrant la configuration de l'entrée de l'agglomération de Lespinasse au niveau de laquelle l'accident s'est produit.

7. Il s'ensuit que la requête d'appel de M. E... est manifestement dépourvue de fondement et peut, dès lors, être rejetée en toutes ses conclusions selon les dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative citées au point 2.

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à la charge de M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par suite, les conclusions présentées à cette fin par le département de la Haute-Garonne doivent être rejetées.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le département de la Haute-Garonne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... E... et au département de la Haute-Garonne.

Fait à Bordeaux, le 7 décembre 2020.

La présidente-assesseure désignée,

Anne B...

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

3

N° 19BX02992


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 19BX02992
Date de la décision : 07/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge.

Travaux publics - Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics - Régime de la responsabilité - Qualité d'usager.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS THEVENOT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-07;19bx02992 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award