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10/02/2022 | FRANCE | N°20BX01000

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 10 février 2022, 20BX01000


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 31 666,67 euros au titre du premier trimestre 2017.

Par un jugement n° 1702623 du 16 janvier 2020, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 mars 2020 et 1er février 2021, M. C..., représenté par Me Marbot, demande à la cour :

1°) d'annuler

ce jugement du tribunal administratif de Pau du 16 janvier 2020 ;

2°) de prononcer le rembourseme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 31 666,67 euros au titre du premier trimestre 2017.

Par un jugement n° 1702623 du 16 janvier 2020, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 mars 2020 et 1er février 2021, M. C..., représenté par Me Marbot, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 16 janvier 2020 ;

2°) de prononcer le remboursement d'un crédit de la taxe sur la valeur ajoutée pour un montant de 31 666,67 euros du premier trimestre 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'a pas été averti de la tenue de l'audience en méconnaissance de l'article R. 711-2 du code de justice administrative ;

- le tribunal a méconnu les dispositions du 3 de l'article 283 du code général des impôts en jugeant que la mention dans l'acte notarié du 10 mars 2017 de la taxe sur la valeur ajoutée rendait le paiement de cette taxe obligatoire ; le tribunal n'applique pas le dispositif de la taxe sur la valeur ajoutée jusqu'à son terme, l'acquéreur professionnel définitif pouvant récupérer cette taxe ;

- le rejet de la demande de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée constitue un enrichissement sans cause dès lors que l'administration a reçu le paiement de cette même taxe sur la valeur ajoutée par le vendeur du bien immobilier en cause.

Par un mémoire, enregistré le 29 septembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'absence de convocation des parties à l'audience rend le jugement irrégulier en vertu de l'article R. 711-2 du code de justice administrative ;

- les autres moyens développés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive n° 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nathalie Gay ;

- les conclusions de Mme Madelaigue, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Marcel représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., qui exerce l'activité de loueur en meublé non professionnel, a acquis un appartement dans une résidence de tourisme " Les Chalets de la Vallée d'Or " à Valloire, le 10 mars 2017 pour un prix de 190 000 euros. Le 21 avril 2017, il a sollicité auprès de l'administration fiscale le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 31 666,67 euros au titre du premier trimestre 2017 correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé cette acquisition. Le 12 décembre 2017, le service a rejeté sa demande. M. C... relève appel du jugement du 16 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant au remboursement de ce crédit de taxe sur la valeur ajoutée.

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 711-2 du code de justice administrative : " Toute partie est avertie, par une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par la voie administrative mentionnée à l'article R. 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience. (...) L'avertissement est donné sept jours au moins avant l'audience. Toutefois, en cas d'urgence, ce délai peut être réduit à deux jours par une décision expresse du président de la formation de jugement qui est mentionnée sur l'avis d'audience ".

3. Il résulte de la lettre du tribunal administratif de Pau du 24 janvier 2020 que ni M. C..., ni son conseil n'ont été convoqués à l'audience du 19 décembre 2019. Par suite, M. C... est fondé à soutenir que le jugement attaqué a été rendu à l'issue d'une procédure irrégulière et à en demander, pour ce motif, l'annulation.

4. Il y a lieu de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par M. C....

Sur les conclusions à fin de décharge des impositions :

5. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " (...) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures (...) ". Aux termes de l'article 257 bis du même code : " Les livraisons de biens et les prestations de services, réalisées entre redevables de la taxe sur la valeur ajoutée, sont dispensées de celle-ci lors de la transmission à titre onéreux ou à titre gratuit, ou sous forme d'apport à une société, d'une universalité totale ou partielle de biens (...) ". Aux termes de l'article 283 du même code : " (...) 3. Toute personne qui mentionne la taxe sur la valeur ajoutée sur une facture est redevable de la taxe du seul fait de sa facturation (...) ".

6. Il résulte de l'instruction que, par un acte authentique du 10 mars 2017, M. B... a vendu à M. C..., pour un prix de 190 000 euros, taxe sur la valeur ajoutée incluse, un appartement dans une résidence de tourisme dénommé " Les Chalets de la Vallée d'or " à Valloire. Il résulte des termes mêmes de cet acte notarié et il n'est pas contesté que cette acquisition doit être regardée comme une transmission d'une universalité au sens des dispositions de l'article 257 bis du code général des impôts. Il s'ensuit d'une part, que les parties ne pouvaient légalement mentionner, dans cet acte notarié, le prix hors taxes du bien 158 333,33 euros et le montant de 31 666,67 euros de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que le montant de 190 000 euros, taxe sur la valeur ajoutée incluse, de la vente et, d'autre part, que l'administration a pu à bon droit refuser à M. C... la déduction de cette taxe sur le fondement de l'article 257 bis du code général des impôts. La circonstance que le vendeur se serait acquitté de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé l'acquisition de l'appartement en cause n'a pas d'incidence sur la situation de M. C..., qui ne pouvait déduire cette taxe en application de l'article 257 bis du code général des impôts.

7. M. C..., en se prévalant de l'enrichissement sans cause de l'État, doit être regardé comme soutenant que l'application des dispositions combinées de l'article 257 bis et du 3° de l'article 283 du code général des impôts, qui, respectivement, dispensent de taxe sur la valeur ajoutée la transmission d'une universalité de biens et prévoient que cette taxe est due par l'émetteur, aboutit à taxer deux fois une même opération, en méconnaissance du principe communautaire de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée. Toutefois, d'une part, il résulte des objectifs de la directive du 17 mai 1977 susvisée, interprétés par la Cour de justice des Communautés européennes, que le droit à déduction ne s'étend pas à un montant de taxe sur la valeur ajoutée facturé à tort. D'autre part, il résulte expressément de l'article 21 de cette directive que la taxe est due par toute personne qui la mentionne sur une facture ou tout document en tenant lieu. Le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée implique seulement, dans ce cas, qu'une possibilité de régularisation ne dépendant pas du pouvoir discrétionnaire de l'administration fiscale soit laissée à l'émetteur de la facture. Cette possibilité de régularisation doit être ouverte à celui-ci sans condition de bonne foi s'il a éliminé tout risque de perte de recettes fiscales. Dans le cas contraire, une telle possibilité peut être soumise à une condition de bonne foi. Les dispositions précitées des articles 257 bis et 283 du code général des impôts ne sont nullement incompatibles avec ces exigences, dès lors qu'elles n'excluent pas la possibilité de régulariser une facture mentionnant une taxe y figurant à tort. Par suite, le principe communautaire de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée ne faisait pas obstacle à la récupération, conformément à l'article 257 bis et au 3° de l'article 283 du code général des impôts, d'une taxe indûment déduite car facturée à tort.

8. Il résulte de ce qui précède que les conclusions tendant au remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 31 666,67 euros au titre du premier trimestre 2017 doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1702623 du 16 janvier 2020 du tribunal administratif de Pau est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Pau est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente,

Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère,

Mme Nathalie Gay, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 février 2022.

La rapporteure,

Nathalie GayLa présidente,

Frédérique Munoz-Pauziès

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 20BX01000 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 20BX01000
Date de la décision : 10/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03-02 Contributions et taxes. - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. - Taxe sur la valeur ajoutée. - Liquidation de la taxe. - Déductions. - Conditions de la déduction.


Composition du Tribunal
Président : Mme MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : MARBOT CABINET JURIPUBLICA

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-02-10;20bx01000 ?
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