La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/07/2022 | FRANCE | N°20BX02036

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 05 juillet 2022, 20BX02036


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sodibay a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, en droits et pénalités, qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015.

Par un jugement n° 1801343 du 25 mars 2020, le tribunal administratif de Pau a déchargé la société Sodibay des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 2013 au 3

1 décembre 2015.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 juin 2020, l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sodibay a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, en droits et pénalités, qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015.

Par un jugement n° 1801343 du 25 mars 2020, le tribunal administratif de Pau a déchargé la société Sodibay des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 juin 2020, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 25 mars 2020 ;

2°) de rétablir la société Sodibay aux rappels de TVA mis à sa charge sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 dont la décharge a été ordonnée à tort par le tribunal administratif ;

Il soutient qu'en ne tenant compte que des dispositions de l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts et de la doctrine administrative qui le commentait, les premiers juges ont commis une erreur de droit, dans la mesure où l'administration a également invoqué les articles 39-1 et 271 du code général des impôts, après avoir constaté l'absence de lien entre les dépenses en cause et l'activité de la société, qui n'en a retiré aucun bénéfice direct.

Par ordonnance du 3 novembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 3 janvier 2022 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... E...,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Sodibay qui exploite un hypermarché à l'enseigne " E. Leclerc ", à Bayonne, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er avril 2012 au 31 mars 2015, à l'issue de laquelle le service lui a adressé une proposition de rectification en date du 15 septembre 2016 l'informant, notamment, de la remise en cause de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) portant sur des dépenses de parrainage au profit, d'une part, de la société TFT pour les exercices clos les 31 mars 2013 et 2014 à hauteur respectivement de 23 163 euros et 23 520 euros et d'autre part de la société Red Style Event pour l'exercice clos le 31 mars 2015 à hauteur de 24 000 euros. Le ministre de l'action et des comptes publics relève appel du jugement du 25 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Pau a déchargé la SAS Sodibay des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes auxquels elle a été assujettie sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015.

2. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. (...) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer ". Aux termes de l'article 205 de l'annexe II à ce code " La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu'un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction. ". Aux termes enfin, de l'article 206 de la même annexe " I. - Le coefficient de déduction mentionné à l'article 205 est égal au produit des coefficients d'assujettissement, de taxation et d'admission. (...) IV.-1. Le coefficient d'admission d'un bien ou d'un service est égal à l'unité, sauf dans les cas décrits aux 2 à 4. 2. Le coefficient d'admission est nul dans les cas suivants : 1° Lorsque le bien ou le service est utilisé par l'assujetti à plus de 90 % à des fins étrangères à son entreprise ; (...) ".

3. Pour estimer que la société Sodibay ne retirait aucun bénéfice des sommes allouées en vertu de contrats de partenariat aux sociétés TFT et Red Style Event, dont l'objet social est dédié à la compétition automobile, et qu'en définitive son financement est utilisé à plus de 90 % à des fins étrangères à l'entreprise, le service a relevé que la société TFT est propriétaire de véhicules mis à disposition de M. C... A..., fils de M. B... A..., directeur du Centre E. Leclerc de Bayonne et que la société Red Style Event est dirigée par M. C... A..., puisque seul le logo de la marque E. Leclerc est apposé sur les véhicules participant au championnat et sur le casque d'Anthony A..., qu'aucune précision sur le magasin de Bayonne n'est spécifiée, contrairement à la pratique de la société pour les courses cyclistes locales, que les articles parus dans la presse générale et spécialisée font part des résultats obtenus par Anthony A..., sans que le magasin de Bayonne ne soit jamais mentionné, que les courses automobiles se situent hors de la zone de chalandage de la société et qu'aucune publicité n'est faite à ce sujet dans le magasin.

Sur le bien-fondé du motif de décharge retenu par le tribunal administratif :

4. Selon le bulletin officiel des impôts référencé Tva-ded-20-10-30, dans sa rédaction publiée le 12 septembre 2012 dont a fait application le tribunal " § 1. Contrairement aux deux autres coefficients [coefficient d'assujettissement et coefficient de taxation], qui dépendent de l'activité de l'assujetti et de l'utilisation qu'il fait des biens et services qu'il achète, le coefficient d'admission d'un bien ou d'un service dépend uniquement de la réglementation en vigueur. Il a en effet pour objet de traduire l'existence de dispositifs particuliers qui excluent de la déduction tout ou partie de la taxe afférente à certains biens ou services. (...) / § 10. Lorsqu'un bien ou un service ne fait l'objet d'aucune mesure d'exclusion, son coefficient d'admission est égal à l'unité. Ce coefficient est réduit, éventuellement jusqu'à zéro, lorsque le bien ou le service fait l'objet de mesures d'exclusion. (...) ".

5. Pour décharger la société Sodibay des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015, le tribunal a considéré qu'il " ressort des termes mêmes de cette instruction que le coefficient d'admission est indépendant des conditions d'utilisation du service acquis par l'assujetti et, surtout, qu'il est égal à l'unité lorsque le service ne fait l'objet d'aucune mesure d'exclusion du droit à déduction " et qu'" outre le fait que le directeur du contrôle fiscal a en l'espèce fixé le coefficient d'admission des dépenses de sponsoring litigieuses à zéro en raison des conditions d'utilisation du service auquel elles correspondent, les dépenses de sponsoring ne font par elles-mêmes l'objet, de la part d'une disposition législative ou réglementaire, d'aucune mesure d'exclusion du droit à déduction ".

6. Si la doctrine fiscale précitée prévoit effectivement que lorsqu'un bien ou un service ne fait l'objet d'aucune mesure d'exclusion, son coefficient d'admission est égal à l'unité et que les dépenses de sponsoring ne semblent par elles-mêmes faire l'objet, de la part d'une disposition législative ou réglementaire, d'aucune mesure d'exclusion du droit à déduction, toutefois, pour remettre en cause le bien-fondé des déductions de TVA précitées effectuées par la société Sodibay, le service ne s'est pas seulement fondé sur les dispositions de l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts, interprétées par la doctrine fiscale n° Tva-ded-20-10-30 dont la société a demandé le bénéfice, mais aussi sur les dispositions de l'article 271 du code général des impôts selon lesquelles la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable n'est déductible que dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction. Il suit de là qu'en déchargeant la société Sodibay des rappels de TVA mis à sa charge alors qu'il avait préalablement constaté, sur le terrain de la loi, que la totalité des sommes ont été dépensées à des fins étrangères à l'entreprise, le tribunal administratif de Pau a commis une erreur de droit.

7. Il y a lieu pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Sodibay tant devant le tribunal administratif que devant la cour.

8. En premier lieu, lorsque l'administration fiscale, sur le fondement des dispositions précitées de l'article 271 du code général des impôts, met en cause la déductibilité de la taxe ayant grevé l'acquisition d'un bien ou d'un service, au motif que ce bien ou ce service n'a pas été utilisé pour les besoins des opérations imposables du redevable, il lui appartient, lorsqu'elle a mis en œuvre la procédure de rectification contradictoire et que le contribuable n'a pas accepté la rectification qui en découle, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour soutenir que le bien ou le service acquis n'ont pas été utilisés pour les besoins de ses opérations imposables, sous la réserve des éléments que seul le contribuable est en mesure d'apporter.

9. Il résulte de l'instruction et n'est d'ailleurs pas sérieusement contesté que l'ensemble des éléments de fait relevés par le service, énumérés au point 3 du présent arrêt, sont établis. Il suit de là que la société Sodibay qui n'a tiré aucun bénéfice direct des dépenses qu'elle a engagées au profit des sociétés TFT et Red Style Event, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a estimé que les dépenses exposées étaient sans rapport avec les besoins de ses opérations imposables au sens de l'article 271 précité du code général des impôts.

10. En second lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré [...] ; ".

11. Dès lors que la société Sodibay a déduit de ses charges, pendant trois années consécutives, les dépenses qu'elle a exposées au profit des sociétés TFT et Red Style Event, sans pouvoir en espérer la moindre retombée économique, elle ne pouvait ignorer, ainsi que le relève à juste titre l'administration fiscale, que la condition tenant à ce que les dépenses soient exposées pour les besoins de ses opérations imposables n'était pas remplie. Il suit de là que la société Sodibay qui a intentionnellement déduit une taxe non déductible, a commis un manquement délibéré justifiant la mise à sa charge d'une pénalité de 40 %.

12. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a fait droit à la demande de la SAS Sodibay. Il y a lieu d'annuler le jugement attaqué et de remettre à la charge de cette société les rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie.

Sur les frais liés à la première instance :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la société Sodibay, qui n'est pas la partie gagnante dans la présente instance, demande le remboursement des frais supportés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1801343 en date du 25 mars 2020 du tribunal administratif de Pau est annulé.

Article 2 : Les rappels en droits et pénalités de TVA au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 sont remis à la charge de la SAS Sodibay.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la SAS Sodibay est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Sodibay et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au directeur du contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. Nicolas Normand, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022.

Le rapporteur,

Nicolas E... La présidente,

Evelyne Balzamo Le greffier,

Christophe Pelletier La République mande et ordonne au ministre de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX02036


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX02036
Date de la décision : 05/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Nicolas NORMAND
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : FIDAL BAYONNE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-07-05;20bx02036 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award